La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/07/2023 | FRANCE | N°23/01016

France | France, Cour d'appel de Rouen, Chambre premier président, 04 juillet 2023, 23/01016


N° RG 23/01016 - N° Portalis DBV2-V-B7H-JKHT



COUR D'APPEL DE ROUEN



JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT



ORDONNANCE DU 4 JUILLET 2023





DÉCISION DÉFÉRÉE :



Ordonnance de taxe du bâtonnier de Rouen du 20 février 2023





DEMANDEURS AU RECOURS :



Monsieur [G] [T]

[Adresse 1]

[Localité 3]



comparant en personne





Madame [M] [T]

[Adresse 1]

[Localité 3]



comparante en personne





DÉFE

NDEUR AU RECOURS :



SELARL [I] AVOCATS

représentée par Me [I] [O]

[Adresse 4]

[Localité 2]



représentée par Me Céline ULBRICH, avocat au barreau de Rouen





DEBATS :



A l'audience publique du 2 mai 2023, devant Mme Marie-Christ...

N° RG 23/01016 - N° Portalis DBV2-V-B7H-JKHT

COUR D'APPEL DE ROUEN

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

ORDONNANCE DU 4 JUILLET 2023

DÉCISION DÉFÉRÉE :

Ordonnance de taxe du bâtonnier de Rouen du 20 février 2023

DEMANDEURS AU RECOURS :

Monsieur [G] [T]

[Adresse 1]

[Localité 3]

comparant en personne

Madame [M] [T]

[Adresse 1]

[Localité 3]

comparante en personne

DÉFENDEUR AU RECOURS :

SELARL [I] AVOCATS

représentée par Me [I] [O]

[Adresse 4]

[Localité 2]

représentée par Me Céline ULBRICH, avocat au barreau de Rouen

DEBATS :

A l'audience publique du 2 mai 2023, devant Mme Marie-Christine LEPRINCE, première présidente de la cour d'appel de Rouen, assistée de Mme Catherine CHEVALIER, greffier ; après avoir entendu les observations des parties présentes, la première présidente a mis l'affaire en délibéré au 4 juillet 2023.

DECISION :

CONTRADICTOIRE

Prononcée publiquement le 4 juillet 2023, par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

Signée par Mme LEPRINCE, présidente et par Mme CHEVALIER, greffier présent lors de la mise en disposition.

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 07 septembre 2022, M. et Mme [T] ont pris attache avec Me [I] afin de se faire assister en vue d'obtenir réparation de leur préjudice, suite à l'achat d'un véhicule auprès d'un concessionnaire automobile.

Le 19 septembre 2022, M. et Mme [T] ont donné, par écrit, mandat à Me'[I] pour qu'il les représente et les assiste dans le litige qui les oppose au concessionnaire.

Le 21 septembre 2022, Me [I] leur a fait parvenir une convention d'honoraires, un projet d'assignation, ainsi que la copie d'une mise en demeure délivrée ce même jour.

Il est admis que la convention d'honoraires n'a jamais été signée.

Le 20 octobre 2022, les époux [T] ont mis fin au mandat de Me [I].

Le 26 octobre 2022, une facture de 2'902,76 euros TTC leur a été adressée par la Selarl [I] Avocats.

Par courrier daté du 08 novembre 2022, Me [I] a mis en demeure M. et Mme [T] d'avoir à lui régler ses honoraires.

Par requête reçue à l'ordre des avocats de Rouen le 04 novembre 2022, M. et Mme [T] ont saisi le bâtonnier en contestation des honoraires réclamés.

Par décision du 20 février 2023, le délégataire du bâtonnier a fixé le montant des honoraires dus à Me [I] à la somme totale de 2'110,76'euros TTC, M. et Mme [T] étant tenus à leur paiement.

Par lettre recommandée réceptionnée à la cour d'appel le 16 mars 2023, M. et Mme [T] ont formé un recours contre cette décision.

L'audience a été fixée au 02 mai 2023, les parties qui ont été régulièrement convoquées par lettres recommandées étaient présentes.

A l'audience, M. et Mme [T], sollicitent l'infirmation de la décision du bâtonnier et demandent l'annulation de la facturation de Me [I]. Ils soutiennent avoir fait l'objet d'un démarchage, ils critiquent les méthodes employées par Me [I], et affirment ne pas avoir autorisé les diligences accomplies à l'exception de la mise en demeure envoyée à la concession automobile.

Me [I], représenté par Me Ulbrich demande le rejet de l'argumentation de

M. et Mme [T] et leur condamnation au paiement de la somme de 750'euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile dont distraction au profit de Me Ulbrich, outre le règlement des entiers dépens. Il soutient avoir réalisé un travail de qualité en tenant compte de l'empressement de ses clients. Il fait également valoir que les époux [T] ont bien pris contact avec lui et non l'inverse. Il prétend que M. et Mme [T] auraienteu pour intention d'obtenir le projet d'assignation définitif sans le régler. Il indique avoir retenu celui-ci en raison du défaut de signature de sa convention d'honoraires.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la responsabilité de l'avocat

Préalablement à toutes considérations de fond, il convient de rappeler que la procédure de contestations en matière d'honoraires et de débours d'avocats prévue à l'article 174 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, concerne les seules contestations relatives au montant et au recouvrement de leurs honoraires.

Dès lors, le juge de l'honoraire n'a pas le pouvoir de connaître, même à titre incident, de la responsabilité de l'avocat à l'égard de son client résultant d'un manquement dans l'exercice de sa mission, et il n'est conséquemment pas tenu par les demandes qui s'y rattachent.

En l'espèce, M. et Mme [T] soutiennent avoir été démarchés par Me'[I]. Ils critiquent les méthodes de celui-ci qui ne les aurait pas rencontré et aurait travaillé exclusivement en distanciel. Ils ajoutent que Me [I] ne leur aurait pas laissé le temps de bien appréhender les démarches entreprises et la procédure engagée. Ils dénoncent également la faible qualité de l'assignation rédigée qui leur a été transmise.

Or, ces questions ne relèvent pas de la compétence du juge de l'honoraire.

En conséquence, les moyens visant à engager la responsabilité de Me [I], seront écartés.

Sur les honoraires de l'avocat

Le défaut de signature d'une convention ne prive pas l'avocat du droit de percevoir pour ses diligences, dès lors que celles-ci sont établies, des honoraires qui sont alors fixés - conformément à l'alinéa 4 de l'article 10 de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971 -, en tenant compte, selon les usages, de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci.

De plus, si juge de l'honoraire est incompétent pour connaître d'une question relative à l'existence du mandat entre l'avocat et son client, il a en revanche le pouvoir de trancher la contestation sur l'étendue de la mission confiée à l'avocat.

En l'espèce, il est établi que la convention d'honoraires du 21 septembre 2022 n'a pas été signée par M. et Mme [T].

Cependant, il n'est pas contesté que M. et Mme [T] ont donné mandat à Me [I]. La contestation porte sur l'étendue de la mission qui lui a été confiée.

M. et Mme [T] soutiennent n'avoir autorisé que la rédaction et l'envoi d'une mise en demeure au concessionnaire automobile avec lequel ils étaient en litige. Ils excluent avoir donné leur accord pour la rédaction d'une assignation.

Concernant le projet d'assignation, il apparaît des emails des 21 et 30 septembre 2022, ainsi que de celui du 18 octobre 2022, que M. et Mme [T] avaient bien connaissance du projet d'assignation pour la rédaction duquel ils ont communiqué un certain nombre de pièces. Ils s'enquéraient de plus des corrections apportées.

Partant, nonobstant le débat portant sur la qualité de l'acte, il est établi que M. et Mme [T] ont bien acquiescé au principe d'un projet d'assignation, lequel leur a été soumis sous une forme relativement avancée. Me [I] affirme avoir refusé de leur communiquer la version définitive en raison de l'absence de signature de sa convention d'honoraires.

En outre, il sera relevé que dans un courriel du 30 septembre 2022 adressé par Mme [T] à Me'[I], celle-ci se renseigne sur 'quels seront les frais supplémentaires, par rapport au forfait de 2'400'euros que l'on s'apprête à vous payer', confirmant la connaissance approximative par les appelants du montant des honoraires réclamé par leur avocat, et leur volonté de s'en acquitter, et ce postérieurement à la production dudit projet d'assignation.

Dès lors, les diligences effectivement accomplies, à savoir tant la mise en demeure que l'assignation, doivent être rémunérées quand bien même la convention d'honoraires n'a pas été signée.

L'appréciation du délégataire du bâtonnier quant au travail réalisé, avec l'abaissement du temps consacré à la rédaction de l'assignation de 4 heures à 3 heures, ainsi que la réduction de moitié du temps passé pour l'étude de la documentation est parfaitement adaptée, soit':

- rédaction d'une assignation devant le TJ (3h) : 840'euros

- frais de secrétariat': 165'euros

- mise en demeure (1h)': 280'euros

- frais postaux': 13,97'euros

- étude de la documentation (1h30)': 420'euros

TOTAL HT : 1'718,97'euros

TOTAL TTC': 2'062,76'euros

L'ordonnance de taxation du délégataire du bâtonnier sera confirmée sauf en ce qu'elle comporte une erreur dans la fixation du montant des honoraires à payer. Le montant des honoraires dus en tenant compte des rectifications horaires est de 1'718,97'euros HT, soit 2'062,76'euros TTC (et non de 1'758,97 euros HT et de 2'110,76'euros TTC).

Sur les demandes accessoires

M. et Mme [T], appelants dans la présente procédure seront tenus au paiement d'une indemnité pour frais irrépétibles qu'il est équitable de fixer à 250'euros.

M. et Mme [T], seront en outre, condamnés aux dépens de l'instance.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme l'ordonnance de taxation du délégataire du bâtonnier de l'ordre des avocats de Rouen du 20 février 2023, sous réserve de la rectification de l'erreur matérielle

Fixe le montant des honoraires dus par M. [G] [T] et Mme [M] [T] à la Selarl [I] Avocats à la somme de 2'062,76'euros TTC,

Y ajoutant,

Condamne M. [G] [T] et Mme [M] [T] au paiement de la somme de 250'euros autitre de l'article 700 du code de procédure civile

Condamne M. [G] [T] et Mme [M] [T] aux dépens de la présente instance.

Le greffier, La première présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Formation : Chambre premier président
Numéro d'arrêt : 23/01016
Date de la décision : 04/07/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-07-04;23.01016 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award