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31/05/2023 | FRANCE | N°23/00028

France | France, Cour d'appel de Rouen, Chambre premier président, 31 mai 2023, 23/00028


N° RG 23/00028 - N° Portalis DBV2-V-B7H-JLBO





COUR D'APPEL DE ROUEN



JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT



ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ



DU 31 MAI 2023









DÉCISION CONCERNÉE :



Décision rendue par le tribunal de commerce de Rouen en date du 16 mars 2023





DEMANDERESSE :



SAS COMPAGNIE NOUVELLE DE MANUTENTIONS PORTUAIRES (CNMP)

[Adresse 18]

[Localité 15]



représentée par Me Guilhem BREMOND du PARTNERSHIPS PAUL HASTINGS (

Europe) LLP, avocat au barreau de Paris plaidant par Me BERTRAND







DÉFENDEURS :



Maître [Z] [L] ès qualités de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la société CNMP

[Adresse 1]

[Localit...

N° RG 23/00028 - N° Portalis DBV2-V-B7H-JLBO

COUR D'APPEL DE ROUEN

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

DU 31 MAI 2023

DÉCISION CONCERNÉE :

Décision rendue par le tribunal de commerce de Rouen en date du 16 mars 2023

DEMANDERESSE :

SAS COMPAGNIE NOUVELLE DE MANUTENTIONS PORTUAIRES (CNMP)

[Adresse 18]

[Localité 15]

représentée par Me Guilhem BREMOND du PARTNERSHIPS PAUL HASTINGS (Europe) LLP, avocat au barreau de Paris plaidant par Me BERTRAND

DÉFENDEURS :

Maître [Z] [L] ès qualités de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la société CNMP

[Adresse 1]

[Localité 13]

représentée par Me Camille PERCHERON de la SCP Ince & Co France, avocat au barreau du Havre

Maître [O] [S] ès qualités d'administrateur judiciaire au redressement judiciaire de la société CNMP

[Adresse 4]

[Localité 7]

représenté par Me Camille PERCHERON de la SCP Ince & Co France, avocat au barreau du Havre

Maître [Z] [L] ès qualités de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la société CNMEP

[Adresse 1]

[Localité 13]

représenté par Me Camille PERCHERON de la SCP Ince & Co France, avocat au barreau du Havre

Maître [O] [S] ès qualités d'administrateur judiciaire au redressement judiciaire de la société CNMEP

[Adresse 4]

[Localité 7]

représenté par Me Camille PERCHERON de la SCP Ince & Co France, avocat au barreau du Havre

Monsieur [Y] [V] pris en sa qualité de représentant des salariés de la société CNMEP

[Adresse 10]

[Localité 14]

comparant en personne

Monsieur [U] [W] en sa qualité de représentant des salariés de la société CNMP

[Adresse 9]

[Localité 15]

comparant en personne

Monsieur [I] [H] pris en sa qualité membre titulaire du Comité social et économique de la société CNMEP

[Adresse 5]

[Localité 15]

comparant en personne

SAS SCANIA FINANCE FRANCE

[Adresse 19]

[Localité 11]

représentée par Me Frédéric CANTON de la SCP EMO AVOCATS, avocat au barreau de Rouen

SAS NYLH

[Adresse 6]

[Localité 12]

représentée par son directeur général, M. [C] [P] et par Me Hector ARROYO et Me Léa MARLIERE du cabinet ALLEN & OVERY LLP, avocat au barreau de Paris

SA GENERAL DE MANUTENTION PORTUAIRE

[Adresse 16]

[Localité 15]

non comparante

[Adresse 17]

[Adresse 2]

[Localité 15]

non comparante

SA EUROPE ATLANTIQUE TERMINAL

[Adresse 16]

[Localité 15]

non comparante

SARL MBB ASSURANCES

[Adresse 3]

[Localité 15]

non comparante

SARL COMPAGNIE NOUVELLE DE MANUTENTIONS ET D'EXPLOITATI ON PORTUAIRE (CNMEP)

[Adresse 18]

[Localité 15]

non comparante

EN PRÉSENCE DE :

MINISTERE PUBLIC

Cour d'appel

[Adresse 8]

[Localité 13]

représenté par M. François Pucheus, avocat général

DÉBATS  :

En salle des référés, à l'audience publique du 10 mai 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 31 mai 2023, devant Mme Edwige WITTRANT, présidente de chambre à la cour d'appel de Rouen, spécialement désignée par ordonnance de la première présidente de ladite cour pour la suppléer dans les fonctions qui lui sont attribuées,

Assistée de Mme Catherine CHEVALIER et Mme Marion DEVELET, greffier,

DÉCISION :

RENDUE PAR DEFAUT

Prononcée publiquement le 31 mai 2023, par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

signée par Mme WITTRANT, présidente et par Mme CHEVALIER, greffier présent lors de la mise à disposition.

*****

FAITS ET PROCEDURE DE PREMIERE INSTANCE

La Sarl Compagnie nouvelle de manutentions et d'exploitation portuaire (CNMEP) a été créée en 1993 afin d'exercer une activité de manutention portuaire au sein du port du [Localité 15]. Elle emploie des dockers opérant au profit de la Sas Compagnie nouvelle de manutentions portuaires (CNMP) à qui elle facture la quasi-totalité de ses coûts de main d''uvre. La CNMP détient également un fonds de commerce comprenant l'outil de production de la société.

Par jugement, prononcé sur saisine du ministère public, du 31 août 2021, confirmé par arrêt de la cour d'appel de Rouen le 14 avril 2022, le tribunal de commerce spécialisé de Rouen a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la Sarl CNMEP et a désigné Me [O] [S], en qualité d'administrateur judiciaire avec une mission d'assistance et Me [Z] [L] en qualité de mandataire judiciaire.

Par jugement du 4 juillet 2022, la juridiction a prononcé l'extension de la procédure de redressement judiciaire de la Sarl CNMEP à la Sas CNMP et fixé la date de cessation des paiements au 24 août 2021.

Par jugement du 30 août 2022, elle a autorisé le renouvellement de la période d'observation pour une période de six mois.

Le 9 décembre 2022, les sociétés CNMEP et CNMP ont soumis au tribunal compétent un plan de redressement pour débats lors de l'audience du 7 mars 2023.

Par jugement du 16 mars 2023 (rôle 2023 000854), le tribunal a rejeté le plan de redressement présenté.

Par jugement du même jour (rôle 2023 000846), le tribunal a essentiellement et en substance :

- ordonné sur le fondement de l'article L. 631-22 du code de commerce, la cession totale des actifs des sociétés CNMEP et CNMP au profit de la société Nylh avec faculté de substitution, moyennant un prix de cession de 507 000 euros, la reprise de 276 contrats à durée indéterminée de la société CNMP et 26 de la société CNMP,

- ordonné le licenciement de quatre salariés,

- fixé la date de prise de possession au 20 mars 2023 à 0 heure,

- fixé au plus tard au 15 septembre 2023 la date de signature des actes de cession,

- maintenu la Selarl FHB, en la personne de Me [S], dans ses fonctions d'administrateur pendant la période d'observation et en cas de liquidation judiciaire jusqu'à la date de signature des actes,

- maintenu Me [L] dans ses fonctions de mandataire judiciaire le temps nécessaire à la vérification des créances,

- désigné M. [A] [E] responsable de l'exécution de la cession,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement et les mesures légales de publicité.

Par déclarations du même jour, le 27 mars 2023, la Sas CNMP a formé appel des deux décisions enregistrées sous les numéros suivants :

- la procédure relative au rejet du plan du redressement, n° RG 23/01144,

- la procédure relative au plan de cession des actifs, n° RG 23/01143.

PROCEDURE DE REFERE

Par assignations en référé délivrées les 13 et 14 avril 2023 dans chacune des affaires enrôlées ci-dessus sous les numéros RG 23/01144 et 23/01143, la Sas Compagnie nouvelle de manutentions portuaires (CNMP) a saisi la juridiction des référés de la cour d'appel afin d'obtenir, au visa des articles L. 626-1, L. 626-2, L. 631-1, L. 631-19 et L. 631-22, R. 661-1 et suivants du code de commerce, les articles 367, 455 al. 1 et 514-3 du code de procédure civile :

- la jonction des procédures de référé,

- l'arrêt de l'exécution provisoire de chacun des jugements prononcés par le tribunal de commerce spécialisé de Rouen,

- l'emploi des dépens en frais de procédure.

La procédure de référé relative à l'arrêt de l'exécution provisoire du jugement prononçant le rejet du plan de redressement a été enrôlé sous le numéro RG 23/00029.

La procédure de référé relative à l'arrêt de l'exécution provisoire du jugement arrêtant le plan de cession des actifs a été enrôlé sous le numéro RG 23/00028.

Par dernières conclusions notifiées le 9 mai 2023, la Sas CNMP expose que les difficultés ont, pour origine, un contentieux avec l'Urssaf, portant sur l'application du dispositif de réduction des cotisations patronales dit Fillon représentant une somme de 29 millions d'euros ; qu'après extension de la procédure à son égard, elle a mandaté le cabinet de conseil Alvarez & Marsal en mars 2022 afin de favoriser l'élaboration d'un plan de redressement ; que le tribunal de commerce spécialisé a, en décembre 2022, sur demande des organes de la procédure, à réception du rapport des experts sollicités, désigné un technicien afin d'avoir une analyse des évaluations qui lui étaient soumises ; que par ailleurs, il avait ordonné l'ouverture de la procédure d'appel d'offres en plan de cession ; qu'ainsi, le même jour, ont été examinés à l'audience le plan de redressement soumis par les sociétés CNMP et CNMEP et le plan de cession au profit de la Sasu Nylh qui a eu gain de cause.

Elle demande, à titre liminaire, la jonction des procédures puisqu'il résulte de l'application combinée des articles L. 631-22 du code de commerce et 367 du code de procédure civile que la solution relative à l'arrêté du plan de cession malgré la présentation d'un plan de continuation est directement liée à la décision de la cour relative au jugement ayant rejeté le plan de redressement de sorte qu'il est de l'intérêt d'une bonne justice de les faire instruire ou juger ensemble ; que l'analyse est la identique s'agissant des procédures de référé engagées puisque le plan de cession ne peut être exécuté si l'exécution provisoire du jugement rejetant le plan de continuation est arrêté ; que les moyens dans les deux affaires sont identiques.

Elle rappelle qu'en application de l'article R. 661-1 du code de commerce, la seule condition nécessaire à l'obtention de l'arrêt de l'exécution provisoire du jugement est lorsque les moyens à l'appui de l'appel paraissent sérieux et soutient en conséquence que :

- aucun des éléments qui lui sont reprochés au titre d'une absence de coopération avec les organes de la procédure collective, d'une volonté de rétention d'information ou d'une incompétence à diriger les sociétés ne peut être retenu comme justifiant d'un déficit de confiance tel que l'exécution du plan et son sérieux en seraient compromis ; tout en opposant aux organes de la procédure une volonté de sortir rapidement de la procédure par la présentation d'un plan de continuation et leur désaccord quant aux motifs de l'extension les sociétés ont coopéré et ont présenté aux organes régulièrement les réalisations de la période d'observation et les perspectives d'activité ;

- il résulte de chacun des rapports du cabinet de conseil Alvarez & Marsal que l'activité du groupe est rentable, historiquement et structurellement ; que les réalisations en période d'observation quant au chiffre d'affaires, de l'activité sont record sans être décorrélés des niveaux antérieurs à la crise sanitaire, ni des projections d'Haropa Port pour les prochaines années de sorte que ces éléments constituent une base solide dans l'élaboration du plan de redressement ; les sociétés présentent un chiffre d'affaires réalisé de 51,2 millions d'euros et un EBITDA (Earnings Before Interest, Taxes, Depreciation, and Amortization soit bénéfice avant intérêts, impôts, dépréciation et amortissement) de 4,9 millions d'euros, une trésorerie de début de plan de 12 millions d'euros ;

- l'expert judiciaire désigné à la demande des organes de la procédure a majoritairement validé les hypothèses présentées qu'il a même considérées comme parfois plus raisonnable que les perspectives estimées dans le secteur dans son ensemble ;

- si l'expert a effectivement émis quelques réserves sur le besoin d'investissement du groupe à court terme, notamment 16 cavaliers et 2 portiques, il ne vise comme urgent le remplacement de seulement de 5 d'entre eux, le plan prévoyant le remplacement de 9 cavaliers avant 2025 dans un plan d'investissement de 10 millions d'euros sur la période courant jusque-là ;

- un plan de dix ans avec une trésorerie de départ d'environ 12 millions d'euros, prévoyant des hypothèses de progression de chiffre d'affaires sur la base réalisé en 2022 jugées comme raisonnables par les experts, des évaluations de charges cohérentes avec ce niveau d'activité, les tarifs et salaires en vigueur et un EBITDA positif de plus de 4 millions d'euros sur l'ensemble de la période ne peut pas être jugé comme manifestement insusceptible d'assurer le redressement de l'entreprise sauf à démontrer une absence totale de résultats pendant la période d'observation ni de comptabilité, ce qui n'est pas démontré par les parties adverses ;

- les modalités et garanties d'exécution du plan sont présentées et n'ont pas été critiquées en première instance, étant précisé que l'engagement des actionnaires de réinjecter des fonds n'est pas une condition de sérieux du plan ;

- le plan proposé présente un niveau et des perspectives d'emploi meilleures que celles du plan de cession arrêté puisqu'aucun licenciement n'est nécessaire sur la durée du plan.

Par dernières conclusions notifiées le 3 mai 2023, la Selarl FHB en la personne de Me [O] [S], ès qualités d'administrateur judiciaire au redressement des sociétés CNMP et CNMEP et Me [Z] [L], ès qualités de mandataire judiciaire au redressement de ces deux sociétés demandent à la juridiction de débouter la Sas CNMP de ses demandes d'arrêt de l'exécution provisoire et d'ordonner l'emploi des dépens en frais privilégiés de la procédure collective.

Elles exposent que le groupe a été créé par M. [M] [T] qui détient 100 % des parts de la Sas CNMP qui possède également 100 % de la Sarl CNMP, le groupe comptant également trois autres sociétés également détenues à 100 % par la Sas CNMP, les sociétés Cogeco, Mecap, Cogemap ; qu'il exploite un terrain de 35 hectares sur les terminaux nord du port avec 1,5 km linéaire de quais dans le cadre d'une concession signée par le Port du [Localité 15] ; que l'ensemble est équipé de 9 portiques post-panoramax, 30 cavaliers, 300 prises reefers, des zones dédiées spécifiquement à la maintenance des conteneurs ;

que les relations entre les sociétés CNMP et CNMEP sont fixées par une convention d'assistance et de prestations de service signée le 1er août 2019 ; que si les deux sociétés exploitent officiellement l'activité de manutentionnaire portuaire, seule la Sarl CNMEP emploie de la main d''uvre nécessaire à cette activité soit 342 salariés à la date de l'ouverture de la procédure de redressement à l'exclusion de la Sas CNMP qui n'emploie que du personnel commercial, administratif et financier ; que la Sarl CNMEP met à la disposition de la Sas CNMP qui détient les contrats avec les clients et le matériel d'exploitation.

Elles précisent que la Sas CNMP assistant la Sarl CNMEP dans la gestion des ressources humaines, elle a adressé à l'Urssaf les déclarations sociales mensuelles pour le compte de la Sarl CNMEP ; qu'en octobre 2014, un contentieux est né au sujet des modalités de calcul de l'allègement général des cotisations patronales dans des proportions ne pouvant être acceptées par l'Urssaf qui a dès lors émis des titres à l'encontre de la Sarl CNMEP, la Sas CNMP se refusant de facturer la dette sociale à l'encontre de la Sarl CNMP ; que les flux financiers anormaux entre les sociétés ont justifié leur demande d'extension de redressement judiciaire à la Sas CNMP.

Elles invoquent :

- une résistance de la part du dirigeant de la Sarl CNMEP dès le début de la période d'observation qui n'a évolué que lors de l'assignation de la Sas CNMP en extension de procédure : cependant, l'élaboration d'un plan de redressement de la Sarl CNMEP n'a été envisagé qu'« en échange de l'abandon de la procédure d'extension », perspective rejetée, le tribunal ayant la charge de statuer sur la demande. La seule proposition soutenue, à l'aide des rapports établis à sa demande par le cabinet Alvarez & Marsal s'est résumée au paiement de la du passif de la Sarl CNMEP, filiale, par la Sas CNMP, société mère. Le plan soumis par le dirigeant ne pouvait pas être communiqué aux créanciers pour des raisons techniques liées à l'extension récente de la procédure et en raison d'une sous-estimation du passif de la filiale à apurer.

- l'interposition systématique du cabinet de conseil pour interdire à l'adminsitrateur d'avoir sa propre appréciation sur les pertes financières. Divers rapports ont été adressés. Un rapport constituant en une situation comptable, sans prévisionnels d'activité a été remis par le dirigeant le 4 octobre 2022 : il s'avérait particulièrement optimiste au regard des réalités constatées par les organes de la procédure. Un rapport modifié du 17 novembre 2022 a été communiqué le 17 novembre 2022 présentant des résultats exceptionnels sur trois d'activité de juillet à octobre 2022.Cependant, il était observé dans les documents suivants une amélioration du prévisionnel face à l'augmentation irréductible du passif.

- des fluctuations financières qui ont conduit à la demande d'une expertise auprès du tribunal.

Les sociétés n'ont pas été en mesure de présenter les comptes consolidés et certifiés des sociétés malgré la demande du juge-commissaire en ce sens. Les chiffres présentés sont tronqués et ne comprennent pas toutes les données de la vie des entreprises du groupe. Aucun des éléments financiers produits par la société CNMP n'est sérieux. La démonstration en est faite.

Elles font observer qu'en réalité, la société CNMP ne soulève qu'un moyen au titre des moyens sérieux de réformation en soutenant que le tribunal n'aurait pas motivé sa décision en examinant les raisons pour lesquelles le plan soumis serait insusceptible d'assurer le redressement de l'entreprise ; que la société demande à la cour d'utiliser son pouvoir d'évocation en adoptant le plan qu'elle a élaboré nonobstant des chiffres faux ; que le tribunal a au contraire retenu que les conditions n'étaient pas réunies ; que les prétentions de la société CNMP ne peuvent aboutir.

Elles décrivent de façon détaillée les éléments d'appréciation économiques et financiers de la situation des sociétés CNMP et CNMEP et concluent quant aux conditions légales de mise en 'uvre des articles L. 626-1, L. 631-22 et L. 640-1 du code de commerce que :

- la question relative aux mérites du plan est laissé à l'appréciation souveraine des juges du fond, le contrôle de la Cour de cassation étant limité au point de savoir si le tribunal a vérifié le caractère sérieux du projet de plan ;

- les résultats dégagés pendant la période d'observation sont primordiaux puisque par construction ceux-ci doivent être suffisants, non seulement pour assurer l'équilibre de l'exploitation mais également pour rembourser le passif sur une durée maximale de 10 ans ;

-l'entreprise doit remettre au tribunal des éléments prospectifs justifiant de la viabilité à venir de l'activité soit un compte de résultat prévisionnel sérieux ;

- l'attitude du débiteur, sa coopération pendant la procédure, son adhésion, son degré de compétence et d'honnêteté doivent également être examinés puisque l'adoption d'un plan suppose de pouvoir lui faire confiance sur le long terme.

En l'espèce, la société CNMP ne répond favorablement à aucun de ces critères et ne peut prétendre à l'obtention de l'exécution provisoire sollicitée.

Assigné en qualité de représentant des salariés de la Sas CNMP, M. [U] [W] souligne l'inquiétude des salariés durant le temps de la procédure quant au sort de l'entreprise et les relations tendues avec le conseil des organes de la procédure. Il ne peut se prononcer sur les termes du plan de redressement proposé par les sociétés débitrices mais la cession des actifs en mars 2023 semble être la meilleure solution.

Assigné en qualité de représentant des salariés de la Sarl CNMEP, M. [Y] [V] ne formule pas d'observations.

Assigné en qualité de membre titulaire du comité social et économique, M. [I] [H] déclare que les membres du comité ne sont pas des comptables mais que si les sociétés ont connu une activité exceptionnelle en 2022, le sentiment partagé des salariés était celui d'une évolution vouée à l'échec.

Par conclusions notifiées le 5 mai 2023, la Sasu Nylh demande à la juridiction, au visa des articles 31, 122, 367 al 1, 514-3 et 561 et suivants du code de procédure civile, L. 626-2, L. 631-22, L. 642-5 et R. 661-1 du code de commerce de :

- débouter la Sas CNMP de sa demande de jonction des procédures,

- déclarer irrecevable la demande d'arrêt de l'exécution provisoire du jugement statuant sur l plan de cession le 16 mars 2023 pour défaut de qualité et d'intérêt à agir,

- débouter la Sas CNMP de la demande d'arrêt de l'exécution provisoire de ce jugement,

- dire que les dépens de l'instance seront employés en frais privilégiés de la procédure collective.

Elle rappelle que le 19 octobre 2022, le tribunal saisi a autorisé la poursuite de la période d'observation et a invité l'administrateur judiciaire, parallèlement à l'étude du plan de redressement, à mettre en 'uvre tous les moyens permettant d'assurer rapidement une issue alternative ; que l'administrateur judiciaire a initié un processus de cession à l'égard des actifs et activités du groupe CNMP avec une date limite de dépôt des offres fixées au 19 décembre 2022 ; que les informations transmises ont été particulièrement lacunaires à l'intention des repreneurs placés en grande difficulté compte tenu de nombreuses données inconnues ; qu'elle a pu émettre une proposition grâce à sa connaissance de l'environnement du port du [Localité 15]. Le défaut de coopération de la direction des entreprises était évoquée en cours de procédure. Les rapports du cabinet de conseil Alvarez & Marsal ne lui ont jamais été adressés.

Ensuite, l'administrateur judiciaire a ouvert un nouvel appel d'offres avec la date limite de leur dépôt fixée au 20 janvier 2023. La Sasu Nylh a dès lors déposé une offre de reprise globale sur les actifs et activités du groupe, ultimement améliorée par lettres des 2 février et 2 mars 2023. Le 6 mars 2023, le comité social et économique de la Sarl CNMEP a émis un avis en faveur de cette offre, a voté contre le projet de la société, désavouant ainsi l'équipe dirigeante et soulignant le défaut de crédibilité du projet interne. Les débats ont eu lieu le 7 mars 2023 et les jugements distincts prononcés et contre lesquels la Sas CNMP a formé appel le 16 mars 2023. Elle n'est partie de façon évidente que dans la procédure relative au plan de cession.

Elle s'oppose à la jonction des procédures en reprenant les termes de quatre arrêts prononcés par la Cour de cassation le 18 janvier 2023 : Si l'article L. 631-22 du code de commerce prévoit qu'une juridiction peut ordonner la cession totale ou partielle de l'entreprise si le ou les plans proposés apparaissent manifestement insusceptibles d'en permettre le redressement ou en l'absence de tels plans, il ne résulte pas de ce texte que cette juridiction est tenue de statuer par un seul et même jugement sur tous les projets de plan, ni d'attendre, en l'absence d'une décision d'arrêt de l'exécution provisoire de droit assortissant le jugement antérieur de rejet du projet de plan de continuation prononcée, en cas d'appel de ce jugement, par le premier président en application de l'article R. 661-1du même code, qu'il soit statué sur cet appel pour examiner un projet de plan de cession.

Au visa de l'article L. 661-6-III du code de commerce, elle soutient que seules les personnes expressément visées par ce texte peuvent exercer les prérogatives propres aux appelants, en ce compris devant la juridiction du premier président de la cour d'appel ; l'extension de la procédure de redressement judiciaire de la Sarl CNMEP à la Sas CNMP n'autorise pas cette dernière à agir seule puisqu'elle n'a plus sans l'action de la Sarl CNMEP la qualité de débitrice. Elle se réfère à l'analyse proposée par la doctrine en ce sens, la confusion des patrimoines emportant unicité des masses actives et passives. Les personnes dont les patrimoines sont confondus n'ont plus d'intérêt distinct et doivent agir ensemble. L'intérêt patrimonial des débiteurs à patrimoines unifiés est indissociable et ce critère conditionne la recevabilité de l'appel. La Sas CNMP n'a ni qualité ni intérêt à agir.

Sur le fond, elle fait valoir que contrairement à ce qu'affirme la Sas CNMP, le tribunal n'était pas tenu dans le jugement statuant sur la cession des actifs de qualifier la proposition de redressement des deux sociétés du groupe avant de trancher la question de l'offre faite par le repreneur. L'article L. 631-22 du code de commerce permet à la juridiction commerciale d'ordonner la cession d'une société si le plan de redressement proposé par le débiteur bénéficiant de la primauté dans l'analyse des issues possibles apparaît manifestement insusceptible d'assurer la sauvegarde de l'activité et des emplois. Le tribunal de commerce pouvait dès lors par un jugement distinct statuer sur ce plan avant d'aborder dans le cadre de la second instance l'offre de reprise des actifs.

En outre, la décision du tribunal est amplement motivée sans que le jugement ne soit dès lors sur ce point critiquable. Les mérites du plan de cession des actifs seront examinés par la cour d'appel sans que devant la juridiction de référé, la Sas CNMP, seule demanderesse, ne mette en évidence des moyens sérieux de réformation et alors qu'elle ne peut défendre les intérêts de la Sarl CNMEP.

Par conclusions notifiées le 5 mai 2023, la Sas Scania finance France s'en rapporte à justice en sa qualité de cocontractante sur la demande et demande l'emploi des dépens en frais privilégiés de procédure.

Par conclusions notifiées le 3 mai 2023 soutenues à l'audience, le ministère public requiert la jonction des deux instances mais entend les oppositions formulées à cette mesure et le maintien de l'exécution provisoire assortissant les décisions rendues par le tribunal de commerce.

Il souligne que depuis 2014, la Sas CNMP s'est appliquée une réduction infondée des cotisations sociales lui permettant de bénéficier d'une trésorerie plus favorable, la dette constaté lors de l'ouverture de la procédure le 31 août 2021 s'élevant à plus de 24 millions d'euros ; qu'elle est à l'origine du contentieux avec l'URSSAF et a en outre, fait litière durant plus de sept ans des décisions judiciaires du pôle social du tribunal, de la chambre sociale de la cour ; que ses résultats comptables sont inexacts à la lumière de ce passif ; que le commissaire aux comptes a refusé de certifier les comptes de la Sarl CNMEP au titre des exercices 2015 à 2020 ; que le passif reconnu exigible par la cour d'appel dans son arrêt du 14 avril 2022 s'élève à la somme de

8,4 millions. Cette somme aurait dû être inscrite au passif de la Sarl CNMEP et faire l'objet d'une facturation de la part de la Sas CNMP au titre des produits ou dégrèvements à obtenir de l'administration. La persévérance du dirigeant dans son refus de procéder à cette opération a précipité l'état de cessation des paiements de la débitrice comme le relève la chambre commerciale.

Le ministère public relève l'ensemble des motifs retenus par le tribunal de commerce spécialisé pour rejeter le plan de redressement des sociétés et notamment :

- l'absence de leçon tirée des conséquences induites par sa politique d'allègement des charges sociales et n'a présenté aucun modèle d'organisation interne permettant d'anticiper ou de remédier aux difficultés à l'origine de la procédure collective de sorte qu'elles ont vocation à perdurer ;

- l'absence de conviction du tribunal quant à la pertinence et la vraisemblance des hypothèses retenues tablant sur une progression constante de l'activité sur la base des seuls chiffres de l'année 2022 pourtant exceptionnelle de l'avis commun ;

- l'absence de conviction quant à la réalité des moyens humains et matériels nécessaires à la réalisation du plan ;

- une trésorerie présentée faussement comme abondante ;

- le défaut des engagements des actionnaires et le défaut de compétence des dirigeants.

Il y ajoute le risque de qualification pénale de certains agissements dans la gestion des sociétés au regard des difficultés nées de la créance sociale envers l'Urssaf et la condamnation prononcée par le tribunal correctionnel à l'encontre du dirigeant le 8 novembre 2022 pour faux en écriture privée, condamnation qui n'est pas définitive.

Il fait état des avis négatifs unanimes des différents acteurs de la procédure et des salariés dockers de la Sarl CNMEP et du déficit de confiance à l'égard de la direction actuelle des entreprises.

Quant au plan de cession des actifs, le ministère public reprend également les éléments qui ont motivé la juridiction commerciale à retenir l'offre de la Sasu Nylh, société holding du groupe Seafrigo, entreprise havraise de logistique reconnue dans le milieu maritime présentant une surface financière satisfaisante et des garanties évidentes et maintenant les emplois, sans plan social durant cinq ans. Si le montant du prix de cession est faible (507 000 euros), sans rapport avec l'importance du passif social déclaré, aucune opposition, aucune réserve n'a été émise par les organes de la procédure, le juge commissaire et le ministère public et les créanciers. L'offre de la Sasu Nylh est la seule qui réponde aux objectifs de sauvegarde de l'activité, de la quasi-totalité des emplois et d'indemnisation au moins partielle des créanciers.

Assignée le 13 avril 2023 par procès-verbal de recherches infructueuses suivant les modalités de l'article 659 du code de procédure civile, la Sarl CNMEP n'est pas représentée à l'audience du 10 mai 2023.

Bien que régulièrement assignée à personne habilitée le 13 avril 2023, la [Adresse 17] n'est pas représentée à l'audience.

La Sa Général de manutention portuaire, la Sa Europe Atlantique terminal, la Sarl MBB assurances ne sont pas représentées à l'audience malgré assignations délivrées le 13 avril 2023 à personnes habilitées.

L'affaire plaidée à l'audience du 10 mai 2023 a été mise en délibéré pour la décision être prononcée le 31 mai 2023.

MOTIFS

Sur la jonction des procédures n° RG 23/00028 et 23/00029

L'article 367 du code de procédure civile dispose que le juge peut, à la demande des parties ou d'office, ordonner la jonction de plusieurs instances pendantes devant lui s'il existe entre les litiges un lien tel qu'il soit de l'intérêt d'une bonne justice de les faire instruire ou juger ensemble.

Les jugements entrepris ont été prononcés distinctement en ce qu'ils n'avaient pas le même objet et ne concernaient pas les mêmes parties ; dès lors, les procédures de référé y afférentes sont dissociables de sorte qu'il n'est pas opportun de les joindre.

La demande de jonction formée par la Sas CNMP est rejetée.

Sur la recevabilité de l'action de la Sas CNMP

L'article 122 du code de procédure civile dispose que constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt.

L'article 661-6-III du code de commerce précise que ne sont susceptibles que d'un appel de la part soit du débiteur, soit du ministère public, soit du cessionnaire ou du cocontractant mentionné à l'article L. 642-7 les jugements qui arrêtent ou rejettent le plan de cession de l'entreprise. 

Sur la qualité à agir

La Sas CNMP et la Sarl CNMEP constituent des personnes morales distinctes que ne fait pas disparaître l'extension de la procédure collective de la seconde à la première prononcée par le jugement du tribunal de commerce de Rouen le 4 juillet 2022.

La Sas CNMP, débitrice défaillante, a donc qualité agir pour la défense de ses intérêts s'agissant des conditions de cession de ses actifs.

Sur l'intérêt à agir

Si l'extension de la procédure emporte la confusion des patrimoines dans l'appréhension des masses actives et passives, elle ne peut avoir pour effet l'anéantissement des droits de chacune des sociétés attraites à défendre face à l'analyse exposée par les organes de la procédure puis retenue par la juridiction saisie de ses activités et à agir selon le sort qui leur sont réservés.

La confusion patrimoniale n'efface pas les intérêts potentiellement divergents d'une société mère et de l'une de ses filiales, la faculté d'une élaboration d'un plan de continuation préservant l'une et non l'autre, une appréciation différente de la cession des actifs et dès lors la mise en 'uvre d'issues différentes afin de sauvegarder une entité économique reconfigurée.

En effet, l'intérêt de chacune des sociétés repose non seulement sur l'aspect strictement patrimonial mais comme le démontre le jugement entrepris, également sur la capacité des dirigeants, quand bien même ils seraient communs, à remettre en cause les fonctionnements acquis, à développer un dialogue social et une politique commerciale efficients, et éventuellement dissociés.

En l'espèce, la Sas CNMP est la propriétaire exclusive des parts sociales des sociétés du groupe et assure la direction effective du groupe. Celui-ci n'est pas composé uniquement de deux sociétés mais de cinq entités distinctes de sorte que les conséquences de la procédure collective doivent nécessairement être appréhendées en tenant compte des responsabilités assumées par la holding à l'égard des autres sociétés non affectées en l'état par l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire mais à tout le moins concernées. Le plan de cession des actifs retenu comprend précisément l'appropriation des titres appartenant à la Sas CNMP dans les autres sociétés du groupe.

En outre, la Sas CNMP et la Sarl CNMEP avaient proposé un plan de continuation qui a été examiné le même jour que le plan de cession le 7 mars 2023 et sur lesquels il a été statué également à date identique le 16 mars 2023. La Sas CNMP discute le bien-fondé de la cession intervenue en opposant les qualités de ses propositions de redressement.

Aussi, dans l'attente de la décision de la cour d'appel statuant sur la recevabilité de l'appel formé et sur le bien-fondé des décisions prises par la juridiction commerciale, il est prématuré d'écarter la Sas CNMP de tout droit d'agir en arrêt de l'exécution provisoire.

Cette demande est recevable.

Sur l'arrêt de l'exécution provisoire

L'article 514-3 du code de procédure civile dispose qu'en cas d'appel, le premier président peut être saisi afin d'arrêter l'exécution provisoire de la décision lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives.

L'article R. 661-1 du code de commerce précise que les jugements et ordonnances rendus en matière de mandat ad hoc, de conciliation, de sauvegarde, de redressement judiciaire, de rétablissement professionnel et de liquidation judiciaire sont exécutoires de plein droit à titre provisoire. Par dérogation aux dispositions de l'article 514-3 du code de procédure civile, le premier président de la cour d'appel, statuant en référé, ne peut arrêter l'exécution provisoire des décisions mentionnées ci-dessus que lorsque les moyens à l'appui de l'appel paraissent sérieux.

Les objectifs et conditions d'octroi d'un plan de redressement de l'entreprise sont définies par les articles suivants :

- selon l'article L. 631-1 du code de commerce, la procédure de redressement judiciaire est destinée à permettre la poursuite de l'activité de l'entreprise, le maintien de l'emploi et l'apurement du passif. Elle donne lieu à un plan arrêté par jugement à l'issue d'une période d'observation ; 

- selon l'article L. 626-1 du même code, lorsqu'il existe une possibilité sérieuse pour l'entreprise d'être sauvegardée, le tribunal arrête dans ce but un plan qui met fin à la période d'observation ;

- selon l'article L. 626-2, au vu du bilan économique, social et, le cas échéant, environnemental, le débiteur, avec le concours de l'administrateur, propose un plan, sans préjudice de l'application des dispositions de l'article L.622-10. Le projet de plan mentionne les engagements d'effectuer des apports de trésorerie pris pour l'exécution du plan. Le projet de plan détermine les perspectives de redressement en fonction des possibilités et des modalités d'activités, de l'état du marché et des moyens de financement disponibles. Il définit les modalités de règlement du passif et les garanties éventuelles que le débiteur doit souscrire pour en assurer l'exécution.

Ce projet expose et justifie le niveau et les perspectives d'emploi ainsi que les conditions sociales envisagées pour la poursuite d'activité. Lorsque le projet prévoit des licenciements pour motif économique, il rappelle les mesures déjà intervenues et définit les actions à entreprendre en vue de faciliter le reclassement et l'indemnisation des salariés dont l'emploi est menacé. Le projet tient compte des travaux recensés par le bilan environnemental. Il recense, annexe et analyse les offres d'acquisition portant sur une ou plusieurs activités, présentées par des tiers. Il indique la ou les activités dont sont proposés l'arrêt ou l'adjonction.

L'article L.631-22 du code de commerce ajoute qu'à la demande de l'administrateur, le tribunal peut ordonner la cession totale ou partielle de l'entreprise si le ou les plans proposés apparaissent manifestement insusceptibles de permettre le redressement de l'entreprise ou en l'absence de tels plans. Les dispositions de la section 1 du chapitre II du titre IV, à l'exception du I de l'article L. 642-2, et l'article L. 642-22 sont applicables à cette cession. Le mandataire judiciaire exerce les missions dévolues au liquidateur. L'administrateur reste en fonction pour passer tous les actes nécessaires à la réalisation de la cession.

Dans le jugement entrepris, la juridiction saisie a rappelé les différentes décisions et phases procédurales conduisant à l'examen des offres de cession des actifs, en visant l'abandon de toute proposition de la part de la société EIM Capital management « en raison des nombreuses inconnues résiduelles » la plaçant dans « l'impossibilité de finaliser son analyse et de lever les conditions suspensives ».

Elle expose de façon détaillée et commentée l'ensemble des éléments soumis par la Sasu Nylh au titre de son offre de reprise des actifs du groupe, de la page 8 à la page 13 et motive sa décision de la page 15 à 17 pour justifier l'acceptation de l'offre et ordonner la cession. Elle examine ainsi les qualités du candidat, le projet économique qui sous-tend ses perspectives d'activité, les conditions de préservation de l'emploi, le financement et la pérennité de l'activité, le désintéressement des créanciers pour conclure au bien-fondé de la cession discutée.

La Sas CNMP ne discute pas ces motifs mais soutient, au titre des moyens sérieux défendus à l'appui de son appel, la qualité de son plan de redressement qu'elle présente comme plus favorable au sort des entreprises contrôlées.

La juridiction saisie n'est pas tenue de statuer de façon concurrente et par une seule décision sur le plan de continuation de l'entreprise et le plan de cession des actifs.

Le premier jugement ayant rejeté son plan de redressement est exécutoire par provision. Il met en évidence dans le cadre d'une motivation développée les défaillances structurelles et fonctionnelles du groupe CNMP et les insuffisances des propositions formulées pour la sauvegarde de l'activité et le maintien des emplois.

Les décisions prises dans le cadre du second jugement portant cession des actifs sont en cours d'exécution de sorte que la pérennité de l'activité et le maintien des emplois exigent la poursuite de leurs effets : l'arrêt de l'exécution provisoire serait directement préjudiciable à la vie de l'entreprise en étant source de confusion et d'insécurité alors que la perte de confiance envers l'ancienne direction est démontrée et que les salariés, après avoir connu l'incertitude liée à la procédure depuis l'été 2021 et à un déficit de dialogue social constructif, ont retrouvé les bénéfices d'une direction donnant des orientations et apportant un cadre structuré, notamment à l'écoute des déclarations positives formulées à l'audience.

La demande d'arrêt de l'exécution provisoire est dès lors rejetée.

Sur les frais de procédure

Les dépens seront à la charge de la Sas CNMP et employés en frais privilégiés de la procédure collective.

PAR CES MOTIFS,

statuant par ordonnance prononcée par défaut, mise à disposition au greffe,

Rejette la demande de jonction des procédures n° RG 23/00028 et 23/00029 formée par la Sas CNMP,

Déclare recevable la Sas CNMP en son action mais la déboute de sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire du jugement prononcée le 16 mars 2023 par le tribunal de commerce spécialisé de Rouen (Rôle 2023 000846),

Condamne la Sas CNMP aux dépens qui seront employés en frais privilégiés de la procédure collective.

Le greffier, La présidente de chambre,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Formation : Chambre premier président
Numéro d'arrêt : 23/00028
Date de la décision : 31/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-31;23.00028 ?
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