N° RG 21/04184 - N° Portalis DBV2-V-B7F-I5K4
COUR D'APPEL DE ROUEN
1ERE CHAMBRE CIVILE
ARRET DU 31 MAI 2023
DÉCISION DÉFÉRÉE :
17/00488
Tribunal de grande instance de Rouen du 30 août 2018
APPELANTE :
Sarl CPM IMMOBILIER sous l'enseigne CABINET [X] PATIN anciennement dénommée CAUX VALLEE DE SEINE IMMOBILIER
RCS de Rouen 522 525 328
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée et assistée par Me Catherine KERSUAL, avocat au barreau de Rouen
INTIMEES :
Sarl HEMONET-ZABEE
[Adresse 2]
[Localité 3]
non constituée bien que régulièrement assignée par acte d'huissier de justice délivré selon les dispositions de l'article 659 du code de procédure civile le 18 octobre 2018
SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DE L'IMMEUBLE BOIELDIEU À [Localité 4]
représenté par son syndic la Sas Nexity Lamy
[Adresse 8]
[Localité 4]
représentée et assistée par Me Sandrine DARTIX-DOUILLET de la SCP SILIE VERILHAC ET ASSOCIÉS SOCIÉTÉ D'AVOCATS, avocat au barreau de Rouen, plaidant par Me ABDOU
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 27 mars 2023 sans opposition des avocats devant Mme Magali DEGUETTE, conseillère, rapporteur,
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée de :
Mme Edwige WITTRANT, présidente de chambre
M. Jean-François MELLET, conseiller
Mme MagaliDEGUETTE, conseillère
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme [V] [N],
DEBATS :
A l'audience publique du 27 mars 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 31 mai 2023
ARRET :
RENDUE PAR DEFAUT
Prononcé publiquement le 31 mai 2023, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
signé par Mme WITTRANT, présidente et par Mme CHEVALIER, greffier présent lors de la mise à disposition.
*
* *
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
La Sarl Caux Vallée de Seine Immobilier a été syndic de la copropriété de l'immeuble Boieldieu à [Localité 4] du 26 février 2011 au 4 juillet 2014.
Le 28 mai 2011, l'assemblée générale extraordinaire des copropriétaires a décidé de faire procéder à la réfection de la coursive extérieure supérieure de l'immeuble et d'en confier la réalisation à la Sarl Hemonet Zabee suivant son devis d'un montant de 15 040,50 euros TTC.
Entre le 5 juillet 2012 et le 19 mars 2013, la Sarl Mrci est intervenue à plusieurs reprises pour effectuer des travaux d'étanchement des descentes de gouttières de certains appartements du dernier étage et de pose de 20 crapaudines.
Par actes d'huissier de justice des 3 et 23 janvier 2017, le syndicat des copropriétaires, alléguant la survenue d'infiltrations du fait du manque d'étanchéité de la coursive, a fait assigner la Sarl Hemonet Zabee et la Sarl Caux Vallée de Seine Immobilier en responsabilité devant le tribunal de grande instance de Rouen en vertu des articles 1792 et 1992 du code civil.
Suivant jugement du 30 août 2018, le tribunal a :
- condamné in solidum la société Caux Vallée de Seine Immobilier et la société Hemonet Zabee à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble Boieldieu les sommes suivantes :
. 51 510,80 euros au titre du coût de la remise en état de l'étanchéité de la coursive,
. 816,93 euros au titre des factures Mrci de juillet et août 2012,
. 1 000 euros au titre des troubles de fonctionnement du syndicat et honoraires supplémentaires du nouveau syndic,
. l 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
. 408,64 euros au titre des frais de constat d'huissier du 13 juin 2016 de la Scp Catherine & Petit,
- rejeté toute autre demande,
- condamné in solidum la société Caux Vallée de Seine Immobilier et la société Hemonet Zabee à payer les dépens et autorisé la Scp Silie Verilhac & Associés à les recouvrer conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
- ordonné l'exécution provisoire.
Par déclaration du 13 septembre 2018, la Sarl Caux Vallée de Seine Immobilier a formé un appel contre le jugement en toutes ses dispositions.
Par ordonnance du 5 novembre 2019, le président de la mise en état de la première chambre civile a déclaré recevable et bien fondée la demande de radiation du rôle faite par le syndicat des copropriétaires sur le fondement de l'article 526 du code de procédure civile, la Sarl Caux Vallée de Seine Immobilier n'ayant pas réglé les sommes mises à sa charge, ni émis une quelconque proposition de règlement. Il a radié du rôle la présente procédure.
L'affaire a été réinscrite au rôle le 2 novembre 2021 à la suite de conclusions notifiées en ce sens par la Sarl Caux Vallée de Seine Immobilier, ayant justifié avoir payé les causes du jugement du 30 août 2018.
EXPOSE DES PRETENTIONS ET DES MOYENS DES PARTIES
Par dernières conclusions notifiées le 5 septembre 2022, la Sarl Cpm Immobilier, enseigne Cabinet [X]-Patin, anciennement Caux Vallée de Seine Immobilier, demande de voir :
au principal,
- réformer le jugement entrepris tant sur la responsabilité que sur le préjudice,
- débouter le syndicat des copropriétaires de toutes ses demandes et de son appel incident,
- condamner celui-ci à lui verser les sommes de 2 000 euros en réparation de ses préjudices et de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre tous les dépens de première instance et d'appel,
subsidiairement,
- réformer le jugement entrepris,
- dire et juger qu'elle n'est responsable des dommages qu'à hauteur de 10 % et lui accorder recours et garantie pour le surplus à l'encontre de la Sarl Hemonet Zabee,
- débouter le syndicat des copropriétaires de son appel incident,
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté les demandes du syndicat des copropriétaires concernant la facture de 4 210,62 euros et la réclamation de
4 846 euros,
- condamner la Sarl Hemonet Zabee à lui verser une indemnité de 5 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile en plus des entiers dépens de première instance et d'appel,
très subsidiairement,
- surseoir à statuer sur le préjudice,
- ordonner une expertise aux frais avancés du syndicat des copropriétaires aux fins de déterminer la nature des désordres et de préciser la nature des réparations et leur coût,
- réserver les dépens.
Elle expose que les travaux en cause sont des travaux d'entretien de la coursive et non pas des travaux de construction au sens de l'article 1792 du code civil comme l'a retenu le tribunal ; que, lors de l'assemblée générale du 28 mai 2011, certains copropriétaires connaissant les produits d'étanchéité ont fortement incité les autres à opter pour l'application d'un produit d'étanchéité prévu par le devis de la Sarl Hemonet Zabee et non pas pour la réfection totale de la coursive ; que les demandes formées contre elle doivent être analysées au seul visa de l'article 1994 du code civil qui concerne la responsabilité du mandataire pour toute faute commise dans sa gestion.
Elle ajoute que les travaux votés le 28 mai 2011, qui consistaient en un traitement par démoussage et en l'application d'un produit, ne nécessitaient pas la souscription d'une assurance dommages-ouvrage, que ces travaux ont remédié aux infiltrations ; que les interventions de la Sarl Mrci en juillet et août 2012 ont été nécessitées par de nouveaux désordres concernant les occupants de certains appartements et n'exigeaient pas davantage la souscription d'une telle assurance ; que, près de deux ans après la pose du produit, M. [C], architecte mandaté par le syndicat des copropriétaires, a constaté un phénomène de fissuration générale tenant au vieillissement de l'immeuble, et non pas au produit posé par la Sarl Hemonet Zabee, et a indiqué qu'il était difficile de déterminer si ces fissures étaient pénétrantes.
Elle précise qu'en janvier 2013, la Sarl Mrci a délibérément posé 20 crapaudines sans aucun accord, ni infirmation, de sa part, de sorte que ces travaux relèvent de la seule responsabilité délictuelle ou quasi-délictuelle de celle-ci.
Elle fait valoir qu'il appartient au syndicat des copropriétaires de prouver le lien de causalité entre une prétendue faute du syndic et le dommage invoqué, ce qu'il ne fait pas, que les désordres n'ont pas pour origine les travaux qu'elle a confiés à la Sarl Hemonet Zabee, mais les travaux effectués par la Sarl Mrci et le vieillissement de l'immeuble ; que le refus de garantie émis par la Sa Axa, assureur décennal de la Sarl Mrci, ne lui est pas opposable, que le syndicat des copropriétaires ne démontre pas avoir intenté une action contre la Sa Axa.
Elle indique qu'elle n'a commis aucune faute ou négligence fautive car les copropriétaires ont été informés en mai 2011 de façon complète et précise des solutions de travaux examinées préalablement par la commission travaux et ont choisi en pleine connaissance de cause le devis de la Sarl Hemonet Zabee.
Elle considère que l'action entreprise par le syndicat des copropriétaires est téméraire et abusive et lui a causé un préjudice matériel, la contraignant à prendre du temps pour se défendre, et un préjudice d'image.
Par dernières conclusions notifiées le 21 juillet 2022, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble Boieldieu à [Localité 4], représenté par son syndic la Sas Nexity Lamy, sollicite de voir en application des articles 1792 et 1992 du code civil :
- confirmer la décision dont appel en ce qu'elle a déclaré entièrement responsable la Sarl Cvsi et la Sarl Hemonet Zabee des désordres qu'il a subis du fait de l'étanchéité de la coursive haute et les a condamnées,
- réformer la décision dont appel en ce qu'elle a limité le poste de préjudice correspondant aux réparations ponctuelles à 816,93 euros au lieu de 4 210,62 euros et le poste relatif aux troubles de fonctionnement du syndicat des copropriétaires et aux honoraires du nouveau syndic à la somme de 1 000 euros au lieu de 4 846 euros,
- condamner in solidum les sociétés Cvsi et Hemonet Zabee au paiement de la somme de 60 567,42 euros,
- les condamner en outre à une indemnité de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens d'appel.
Il fait valoir que les articles 1794 et 1994 du code civil sur lesquels se fonde la Sarl Cvsi sont sans rapport avec le présent litige, que les travaux en cause sont des travaux de construction au sens des articles 1792 et suivants du même code, et que le syndic a failli à ses obligations contractuelles de mandataire dont il doit répondre en application de l'article 1992 du même code.
Il expose que la Sarl Cvsi a négligé de vérifier que les sociétés Hemonet Zabee et Mrci étaient assurées en responsabilité civile décennale et pour l'activité d'étanchéité ; qu'elle a influencé l'assemblée générale des copropriétaires le 28 mai 2011 sur le choix de la Sarl Hemonet Zabee, ce dont elle ne peut se défausser sur certains copropriétaires ; que même si le devis de cette société était moins coûteux, il n'était pas comparable aux autres devis présentés ; que le syndic, en sa qualité de professionnel de l'immobilier, devait mieux éclairer les copropriétaires sur les conséquences du choix à faire ; qu'une entreprise spécialisée n'aurait pas commis les défauts de mise en oeuvre qui ont été constatés par M. [C] ; qu'il se trouve aujourd'hui sans recours contre la Sarl Hemonet Zabee.
Il indique que le syndic aurait dû proposer l'assistance d'un architecte pour effectuer des travaux touchant à la couverture du bâtiment et à sa conservation, qui n'étaient pas des travaux courants d'entretien ; que la Sarl Cvsi avait l'obligation d'informer l'assemblée générale des copropriétaires de la nécessité de souscrire une assurance dommages-ouvrage, qu'à défaut, la défaillance des sociétés Hemonet Zabee et Mrci aurait été suppléée ; qu'il a perdu la chance d'avoir un interlocuteur solvable.
Il reproche également au syndic de ne pas avoir effectué une déclaration de créance au passif de la Sarl Mrci, placée en redressement judiciaire le 26 juillet 2013, dont il aurait dû surveiller la situation en sa qualité de professionnel du droit et de l'immobilier, que sa créance est perdue du fait de cette négligence.
Il ajoute que le syndic a reconnu sa responsabilité dans son courrier du 3 juillet 2014 en s'engageant à continuer à faire le nécessaire pour solutionner cette affaire.
Il conclut par ailleurs à la responsabilité de plein droit de la Sarl Hemonet Zabee en application de l'article 1792 du code civil pour les désordres affectant son ouvrage avant même les inconvénients résultant de l'intervention postérieure de la Sarl Mrci.
La Sarl Hemonet Zabee, à qui la déclaration d'appel avait été signifiée le 18 octobre 2018 par procès-verbal de recherches infructueuses, n'a pas constitué avocat.
La clôture de l'instruction a été ordonnée le 7 septembre 2022.
MOTIFS
Sur la responsabilité de la Sarl Cvsi
L'article 1992 alinéa 1er du code civil prévoit que le mandataire répond non seulement du dol, mais encore des fautes qu'il commet dans sa gestion.
Il appartient au mandant d'établir les fautes de gestion de son mandataire, à l'origine du préjudice qu'il allègue.
- Sur le défaut de conseil lors du choix de l'entreprise et le défaut de qualification des entreprises
L'article L.241-1 du code des assurances applicable au présent litige précise que toute personne physique ou morale, dont la responsabilité décennale peut être engagée sur le fondement de la présomption établie par les articles 1792 et suivants du code civil, doit être couverte par une assurance. A l'ouverture de tout chantier, elle doit être en mesure de justifier qu'elle a souscrit un contrat d'assurance la couvrant pour cette responsabilité.
Selon l'article L.243-2 du même code applicable au présent litige, les personnes soumises aux obligations prévues par les articles L.241-1 à L.242-1 du présent code doivent être en mesure de justifier qu'elles ont satisfait auxdites obligations.
En l'espèce, les travaux d'étanchéité de la coursive supérieure de l'immeuble effectués par la Sarl Hemonet Zabee, consistant en l'application de Lankotoit en deux couches et de bandes Lankoband, n'ont pas donné lieu à la construction d'un ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil. Il en est de même des travaux d'étanchement, de pose de siphons, de reprise du Lankotoit derrière certaines descentes de gouttières, et de pose de 20 crapaudines, par la Sarl Mrci.
En revanche, l'application de Lankotoit, revêtement souple d'étanchéité selon sa fiche technique versée aux débats par le syndicat des copropriétaires, et de bandes d'étanchéité, a une fonction d'imperméabilisation. Elle fait indissociablement corps avec le sol de la coursive. Elle constitue un élément d'équipement indissociable de l'immeuble au sens de l'article 1792-2 du code civil qui le définit ainsi lorsque sa dépose, son démontage, ou son remplacement ne peut s'effectuer sans détérioration ou enlèvement de matière dudit ouvrage.
Les travaux ainsi réalisés sur la coursive de l'immeuble visaient à la rendre étanche afin de remédier à des infiltrations. Dans un courrier daté du 26 janvier 2011, Mme [S], copropriétaire, avait notamment dénoncé des infiltrations dans son appartement et sollicité que l'étanchéité des coursives soit inscrite à l'ordre du jour de l'assemblée générale des copropriétaires à venir.
Il ressort également du procès-verbal de l'assemblée générale du 28 mai 2011 qu'une commission travaux avait été créée et avait recueilli différents devis de travaux dont la différence entre les procédés et les prix qu'ils proposaient avaient nécessité, sur demande du syndic, l'avis d'un architecte. Il y est aussi précisé que le syndic avait informé les copropriétaires que l'architecte lui avait détaillé la technique proposée par les entreprises.
La Sarl Cvsi ne peut donc pas dire qu'elle n'avait aucune connaissance sur la nature des travaux projetés. Elle a répercuté aux copropriétaires la description de ces travaux comme cela apparaît dans la synthèse retranscrite dans le procès-verbal.
L'influence dont M. [X] de la Sarl Cvsi aurait usé auprès de l'assemblée générale pour choisir la Sarl Hemonet Zabee est dénoncée par MM. [J] et [R], copropriétaires. M. [J] atteste que, lors de cette assemblée générale, a été présentée une fiche produit mentionnant que celui-ci allait au plus profond des fissures et que les propos de M. [X] visaient à opter pour la solution la moins onéreuse pour un même résultat. M. [R] explique que cette assemblée générale s'est déroulée sans problème particulier lors du débat sur le choix de la Sarl Hemonet Zabee, que le sien s'est porté sur la majorité, et qu'il a fait confiance à
M. [X].
Cependant, même si M. [X] a été destinataire de données techniques par l'architecte qu'il avait contacté, celles-ci ne lui conféraient pas une compétence en matière d'étanchéité de coursives. D'ailleurs, il n'est pas établi que l'architecte a écarté la solution technique proposée par la Sarl Hemonet Zabee dans son devis du 8 janvier 2011. De plus, ce devis était le moins cher. Ces deux critères légitimaient le choix de celui-ci. En le privilégiant, le syndic n'a pas commis de faute.
En outre, préalablement à leurs interventions, aucun élément ne permettait de faire douter le syndic sur une mauvaise exécution de leurs travaux par les sociétés Hemonet Zabee et Mrci. Aucune obligation légale ne lui imposait de vérifier la nature de l'activité exercée par ces sociétés au moyen notamment d'un extrait Kbis.
En revanche, comme justement avancé par le syndicat des copropriétaires, la Sarl Cvsi ne s'est pas assurée que les entreprises dont les devis étaient proposés au vote étaient couvertes par une assurance de responsabilité civile décennale pour l'accomplissement de travaux d'étanchéité.
Lors de sa visite de la coursive le 24 octobre 2013, M. [C], en présence de
M. [X], a constaté que :
- le revêtement de la coursive présentait à plusieurs endroits des marques d'usure et de craquèlements, sans savoir si elles étaient pénétrantes,
- certains relevés d'étanchéité, type parequerre, et certains colmatages en packs aluminium abîmés faits par le passé pour boucher certaines fissures, type joints de dilatation de l'immeuble, costières béton périmétriques, étaient fissurés au niveau de la pliure,
- toutes les naissances de descentes d'eaux pluviales étaient munies d'un siphon, type siphon de douche de diamètre 40 mm, que ces siphons avaient été installés par l'entreprise qui avait repris les étanchéités, sans doute pour retenir les mousses et les lichens, mais qu'il s'agissait d'une ineptie car ils obstruaient l'évacuation des eaux pluviales d'où probablement un écoulement trop lent des eaux pluviales, une montée en charge de la coursive, et des infiltrations par les différentes fissures de l'étanchéité,
- le diamètre minimal des descentes devait être de 90 mm,
- certaines poteries, servant de protection aux différents conduits, étaient cassées ou absentes.
Aux termes de son procès-verbal de constat du 13 juin 2016, Me [V], huissier de justice mandaté par le syndicat des copropriétaires, a relevé au dernier étage de l'immeuble, sur la coursive située en extérieur, et qui en fait tout le tour, que :
- côté [Adresse 7] et [Adresse 5] et côté [Adresse 9] et [Adresse 6], le revêtement d'étanchéité du sol était écaillé et sauté ; la bande d'étanchéité située en pied du parapet avait disparu ou était plissée à plusieurs endroits ; en fin de coursive, juste avant l'angle droit du pignon, le revêtement d'étanchéité du sol présentait des fissures,
- dans la partie de la coursive donnant en pignon (côté rue de la République), le revêtement d'étanchéité présentait des fissures.
L'immeuble comporte 51 lots. Dans un courrier adressé le 12 décembre 2014 à la Sa Axa, assureur décennal de la Sarl Mrci, la Sas Nexity Lamy, nouveau syndic, a mentionné l'existence de onze sinistres liés aux travaux des sociétés Hemonet Zabee et Mrci et survenus entre le 29 septembre 2012 et le 18 août 2014.
Toutefois, seuls sont justifiés des dégâts des eaux et/ou des problèmes d'humidité survenus postérieurement aux travaux critiqués dans les lots de quatre copropriétaires (Mme [K], MM.[I], [J], et [R]).
La preuve n'est pas apportée de l'impropriété à destination de l'ouvrage dans son ensemble.
Or, les désordres affectant des éléments d'équipement, dissociables ou non, d'origine ou installés sur existant, relèvent de la responsabilité décennale seulement lorsqu'ils rendent l'ouvrage, dans son ensemble, impropre à sa destination.
Dès lors, les désordres en cause n'étant pas décennaux, l'abstention fautive de la Sarl Cvsi qui ne s'est pas assurée que les sociétés Hemonet Zabee et Mrci avaient souscrit une assurance couvrant leur responsabilité civile décennale n'a pas privé le syndicat des copropriétaires de l'exercice d'une action directe contre un assureur décennal de la Sarl Hemonet Zabee et/ou contre la Sa Axa, assureur décennal de la Sarl Mrci qui a dénié sa garantie. Le préjudice qu'il allègue est infondé.
Les conditions de la mise en jeu de la responsabilité contractuelle de la Sarl Cvsi ne sont pas réunies.
- Sur le défaut de souscription d'une assurance dommages-ouvrage
L'article L.242-1 du code des assurances précise que toute personne physique ou morale qui, agissant en qualité de propriétaire de l'ouvrage, de vendeur ou de mandataire du propriétaire de l'ouvrage, fait réaliser des travaux de construction, doit souscrire avant l'ouverture du chantier, pour son compte ou pour celui des propriétaires successifs, une assurance garantissant, en dehors de toute recherche des responsabilités, le paiement de la totalité des travaux de réparation des dommages de la nature de ceux dont sont responsables les constructeurs au sens de l'article 1792-1, les fabricants et importateurs ou le contrôleur technique sur le fondement de l'article 1792 du code civil.
Eu égard à la nature des travaux projetés au vu des motifs spécifiés ci-dessus, il appartenait à la Sarl Cvsi de faire respecter cette exigence légale par le syndicat des copropriétaires, ce qu'elle n'a pas fait.
Cependant, les désordres en cause n'étant pas décennaux, cette faute de la Sarl Cvsi n'a pas fait perdre à son mandant le droit d'être indemnisé par l'assureur dommages-ouvrage. La responsabilité contractuelle de la Sarl Cvsi ne peut pas être mise en jeu.
- Sur le défaut de proposition d'une surveillance par un architecte
Le recours à un maître d''uvre ne revêt pas de caractère obligatoire, de sorte que l'absence d'assistance par un tel professionnel ne constitue pas une faute du maître de l'ouvrage ou de son mandataire et ne concourt pas à la réalisation de son préjudice.
Ce reproche fait à la Sarl Cvsi est donc infondé.
- Sur le défaut de déclaration de créance au passif de la Sarl Mrci
Il n'est pas démontré que le syndic avait connaissance de la procédure de redressement judiciaire ouverte à l'égard de la Sarl Mrci le 26 juillet 2013 par le tribunal de commerce du Havre, ni de la procédure de liquidation judiciaire simplifiée prononcée le 21 novembre 2014. Il ne lui appartenait pas de surveiller la santé financière de la Sarl Mrci dont la dernière intervention pour le compte de la copropriété datait au plus tard du 19 mars 2013.
Il ne peut donc pas lui être reproché d'avoir omis de déclarer la créance du syndicat des copropriétaires au passif de la procédure collective. La mise en cause de sa responsabilité sera écartée.
- Sur la reconnaissance expresse de sa responsabilité par le syndic
Dans un courrier daté du 3 juillet 2014 et adressé au président du conseil syndical de la copropriété, M. [X] pour le compte de la Sarl Cvsi a notamment indiqué qu'il avait fait prendre en charge par la Sarl Mrci différentes factures qu'elle avait émises et qui étaient remboursées à la copropriété. Il a ajouté qu'il s'engageait à prendre toutes les dispositions pour que les remises en état qui seraient nécessaires soient effectuées et qu'il suivrait ces travaux pour que la copropriété ne soit pas pénalisée par les désordres qui pourraient résulter de travaux de remplacement des systèmes de siphon posés par la Sarl Mrci. Il a enfin précisé qu'il ferait le maximum, avec le syndic qui lui succéderait, pour que cette affaire soit résolue le plus rapidement possible et au mieux des intérêts de chacun, qu'il avait toujours fait face à ses responsabilités et à ses engagements.
Si M. [X] évoque l'hypothèse de possibles désordres causés par les travaux de la Sarl Mrci et s'engage à assurer le suivi de leur reprise, il ne manifeste aucune reconnaissance de la responsabilité de la Sarl Cvsi en qualité de syndic.
Aucun autre élément probant ne vient au surplus corroborer un positionnement contraire. Bien plus, la Sarl Cvsi s'est opposée aux demandes formulées contre elle par le syndicat des copropriétaires en première instance et a interjeté appel du jugement.
Ce moyen est rejeté.
En définitive, le syndicat des copropriétaires sera débouté de ses demandes. Le jugement du tribunal les ayant accueillies sera infirmé.
Sur la responsabilité de la Sarl Hemonet Zabee
Celle-ci était défaillante en première instance comme en appel. Sa responsabilité retenue par le premier juge sur le fondement de l'article 1792 du code civil ne peut qu'être confirmée conformément à la demande en ce sens du syndicat des copropriétaires.
S'agissant des condamnations pécuniaires de celle-ci, il sollicite la réformation du montant retenu par le tribunal de 816,93 euros au titre des frais qu'il a engagés pour remédier aux infiltrations.
Toutefois, comme le tribunal l'a exactement motivé, les autres factures produites par le syndicat des copropriétaires ne mentionnent pas d'intervention sur la coursive, ce qui ne permet pas de les rattacher aux défauts d'étanchéité relevés par M. [C].
La demande de majoration de la somme de 816,93 euros sera rejetée et, la décision du premier juge, confirmée.
Le syndicat des copropriétaires demande également la réformation du montant de
1 000 euros qui lui a été alloué par le tribunal en réparation de son trouble de fonctionnement et au titre des honoraires supplémentaires du nouveau syndic.
Cependant, il la justifie au regard notamment de la mauvaise gestion des désordres par la Sarl Cvsi qui a occasionné des pertes de temps pour le nouveau syndic et les membres du syndicat, particulièrement les conseillers syndicaux.
Or, la responsabilité de la Sarl Cvsi n'a pas été retenue.
En conséquence, l'indemnité de 1 000 euros accordée par le premier juge, qui comprend les honoraires supplémentaires de 846 euros facturés par la Sas Nexity Lamy qui n'ont pas été omis contrairement à ce qu'indique le syndicat des copropriétaires, sera confirmée à la charge de la Sarl Hemonet Zabee. L'appel incident formé sur ce point par le syndicat des copropriétaires sera rejeté.
Sur la demande indemnitaire de la Sarl Cpm Immobilier
Il incombe à celle-ci de prouver l'existence d'une faute commise par le syndicat des copropriétaires dans l'exercice de son action, même dépourvue d'intention de nuire, et du dommage qui en a résulté pour elle.
Or, cette preuve n'est pas apportée. Si cette action dirigée contre la Sarl Cvsi a été rejetée, elle n'était pas dénuée de sérieux et d'une chance de succès dès lors que le premier juge y avait fait droit.
En conséquence, cette prétention sera rejetée. La décision du tribunal ayant statué en ce sens sera confirmée.
Sur les demandes accessoires
Les dispositions du jugement sur les dépens et les frais de procédure seront infirmées seulement en ce qu'elles concernent la Sarl Cvsi.
Partie perdante, le syndicat des copropriétaires sera condamné aux dépens d'appel.
Il n'est pas inéquitable de laisser à chaque partie la charge de ses frais non compris dans les dépens exposés pour cette procédure d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt par défaut, mis à disposition au greffe,
Confirme le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a :
- condamné la société Caux Vallée de Seine Immobilier à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble Boieldieu les sommes suivantes :
. 51 510,80 euros au titre du coût de la remise en état de l'étanchéité de la coursive,
. 816,93 euros au titre des factures Mrci de juillet et août 2012,
. 1 000 euros au titre des troubles de fonctionnement du syndicat et honoraires supplémentaires du nouveau syndic,
. l 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
. 408,64 euros au titre des frais de constat d'huissier du 13 juin 2016 de la Scp Catherine & Petit,
- condamné la société Caux Vallée de Seine Immobilier à payer les dépens,
Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,
Déboute le syndicat des copropriétaires de l'immeuble Boieldieu à [Localité 4] de toutes ses demandes formées contre la Sarl Cpm Immobilier,
Déboute les parties du surplus des demandes,
Condamne le syndicat des copropriétaires de l'immeuble Boieldieu à [Localité 4] aux dépens d'appel.
Le greffier, La présidente de chambre,