N° RG 21/01578 - N° Portalis DBV2-V-B7F-IXZC
COUR D'APPEL DE ROUEN
CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE
SECURITE SOCIALE
ARRET DU 25 MAI 2023
DÉCISION DÉFÉRÉE :
Jugement du CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE ROUEN du 17 Mars 2021
APPELANT :
Monsieur [U] [K]
[Adresse 2]
[Localité 3]
représenté par Me Hélène QUESNEL de la SELARL MOLINERO QUESNEL STRATEGIES, avocat au barreau de ROUEN
INTIMEE :
S.A.S. RENAULT
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par Me Vincent MOSQUET de la SELARL LEXAVOUE NORMANDIE, avocat au barreau de ROUEN substituée par Me Christophe PLAGNIOL, avocat au barreau des HAUTS-DE-SEINE
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 805 du Code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 12 Avril 2023 sans opposition des parties devant Madame BERGERE, Conseillère, magistrat chargé du rapport.
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente
Madame BACHELET, Conseillère
Madame BERGERE, Conseillère
GREFFIER LORS DES DEBATS :
M. GUYOT, Greffier
DEBATS :
A l'audience publique du 12 Avril 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 25 Mai 2023
ARRET :
CONTRADICTOIRE
Prononcé le 25 Mai 2023, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
signé par Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente et par Mme WERNER, Greffière.
EXPOSÉ DU LITIGE
M. [U] [K] a été engagé par la régie nationale des usines Renault, aux droits de laquelle se trouve la SAS Renault, à compter du 1er janvier 1993 par contrat de travail à durée indéterminée en qualité de technicien recherches études essais.
Les relations contractuelles des parties sont régies par la convention collective nationale de la métallurgie.
Par requête du 6 juin 2016, M. [K] a saisi le conseil de prud'hommes de Rouen afin de voir reconnaître l'existence d'une discrimination syndicale et obtenir réparation de ses préjudices.
Par jugement du 17 mars 2021, le conseil de prud'hommes a dit que les demandes de M. [K] portant sur la discrimination syndicale étaient prescrites, débouté M. [K] de sa demande de reconnaissance d'une discrimination syndicale à son endroit, donné acte à la société Renault de l'attribution du coefficient 365 à effet du 1er avril 2020, débouté M. [K] du surplus de ses demandes, débouté la société Renault de sa demande de versement de la somme de 16 897,88 euros à titre de compensation des préjudices subis par M. [K] en application de l'accord de méthode du 14 décembre 2001, dit n'y avoir lieu à la capitalisation des intérêts, dit n'y avoir lieu d'ordonner une astreinte, condamné M. [K] à verser à la société Renault la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, dit n'y avoir lieu à l'exécution provisoire du présent jugement pour ses dispositions qui n'en bénéficieraient pas de plein droit, condamné M. [K] aux entiers dépens de l'instance, débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
M. [K] a interjeté appel de cette décision le 15 avril 2021.
Par conclusions remises le 23 mars 2023, auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé des moyens, M. [K] demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a donné acte à la société Renault de son positionnement au coefficient 365 au 1er avril 2020, statuant à nouveau,
- dire que son action en reconnaissance d'une discrimination syndicale est recevable, ordonner à la société Renault son repositionnement au salaire annuel brut de 53 384 euros, dire que cette injonction sera assortie d'une astreinte de 500 euros par jour de retard passé un délai d'un mois à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, condamner la société Renault à lui payer 115 687 euros nets à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice financier subi, 25 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral,
- dire que les vendredis 1er et 8 mai 2015, 25 décembre 2015 et 1er janvier 2016, 14 juillet 2017, journées féries coïncidant avec des jours de congés correspondant à des jours normalement non-travaillés auraient dû être réintégrés dans le compteur congés de M. [K], condamner la société Renault à lui payer la somme de 748,78 euros à titre de rappel de salaire,
- dire qu'il est fondé à solliciter un rappel de congés supplémentaires pour ancienneté au titre des années 2012 à 2018, condamner en conséquence la société Renault à lui payer la somme de 3 151,32 euros à titre de rappel de salaire,
- condamner la société Renault à lui payer une indemnité de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, toutes causes confondues, dire que les condamnations seront assorties de l'intérêt au taux légal à compter de la demande en justice, ordonner la capitalisation des intérêts, condamner la société Renault aux entiers dépens.
Par conclusions remises le 23 mars 2023, auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé des moyens, la société Renault demande à la cour, à titre principal, de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, en conséquence, déclarer les demandes de M. [K] fondée sur la discrimination syndicale irrecevables comme étant prescrites, débouter M. [K] de l'intégralité de ses demandes, et le condamner à lui verser la somme de 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens, à titre subsidiaire, dire que M. [K] n'a pas été victime de discrimination syndicale, donner acte à la société Renault qu'elle versera à M. [K] la somme de 16 896,88 euros pour compenser l'intégralité des préjudices matériels professionnels et moraux subis par l'intéressé en application de l'accord de méthode du 14 décembre 2001, débouter M. [K] du surplus de ses demandes, en tout état de cause, condamner M. [K] à lui verser la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, outre les entiers dépens.
L'ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 23 mars 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
À titre liminaire, conformément à l'accord des parties et à l'application de l'article 803 du code de procédure civile, il convient d'ordonner la révocation de l'ordonnance de clôture, d'accueillir la production de la pièce n° 26 bis communiquée par la société Renault le 24 avril 2023 et de procéder à une nouvelle clôture de la procédure à l'audience de plaidoiries, avant l'ouverture des débats
I - Sur la discrimination syndicale
I - a) Sur la recevabilité de l'action
Aux termes de l'article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel la prescription.
Selon l'article L. 1471-1 du code du travail dans sa version applicable au litige, toute action portant sur l'exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit.
Le premier alinéa n'est toutefois pas applicable aux actions en réparation d'un dommage corporel causé à l'occasion de l'exécution du contrat de travail, aux actions en paiement ou en répétition du salaire et aux actions exercées en application des articles L. 1132-1, L. 1152-1 et L. 1153-1. Elles ne font obstacle ni aux délais de prescription plus courts prévus par le présent code et notamment ceux prévus aux articles L. 1233-67, L. 1234-20, L. 1235-7 et L. 1237-14, ni à l'application du dernier alinéa de l'article L. 1134-5.
L'article L. 1134-5 du même code précise que l'action en réparation du préjudice résultant d'une discrimination se prescrit par cinq ans à compter de la révélation de la discrimination. Ce délai n'est pas susceptible d'aménagement conventionnel. Les dommages et intérêts réparent l'entier préjudice résultant de la discrimination, pendant toute sa durée.
L'action en discrimination ne peut être considérée comme prescrite si le salarié la fonde sur des faits qui n'ont pas cessé de produire leurs effets avant la période non atteinte par la prescription.
En l'espèce, M. [K] fait état d'une discrimination au regard de son temps partiel, de son congé parental et de son activité syndicale qui a commencée en 1998, date à partir de laquelle il a siégé au CHSCT avec 'l'étiquette syndicale CGT' pour se poursuivre tout au long de sa carrière en terme d'évolution professionnelle, tant salariale que personnelle, se traduisant par une inégalité de traitement toujours actuelle, par une évolution de carrière moins rapide que les autres salariés et stagnante au coefficient 335 depuis le 1er juin 2002 et par la définition de ses missions et ses tâches professionnelles, qui sont devenues au fur et à mesure des années 'déqualifiantes', M. [K] soutenant également qu'il n'était pas occupé à la hauteur de sa disponibilité.
Il résulte de ces éléments que le salarié se fonde sur des faits qui n'ont pas cessé de produire leurs effets avant la période non atteinte par la prescription fixée à compter du 6 juin 2011, soit 5 ans avant l'introduction de son action, de sorte que celle-ci n'est pas prescrite.
En conséquence, il convient d'infirmer la décision entreprise et de déclarer l'action en discrimination intentée par M. [K] recevable.
II - b) Sur le fond
En application des articles L. 1132-1 et L. 2141-5 du code du travail, il est interdit à l'employeur de prendre en considération l'état de santé ou l'appartenance à un syndicat ou l'exercice d'une activité syndicale pour arrêter ses décisions en matière notamment de recrutement, de conduite et de répartition du travail, de formation professionnelle, d'avancement, de rémunération et d'octroi d'avantages sociaux, de mesures de discipline, et de rupture du contrat de travail.
L'article L. 1134-1 du code du travail prévoit qu'en cas de litige survenant en raison d'une méconnaissance des règles de non discrimination, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte au sens du droit communautaire.
C'est au vu de ces éléments, qu'il incombe à l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments étrangers à toute discrimination, précision faite que des faits peuvent être en soi discriminatoires, notamment des faits de harcèlement discriminatoire sans que l'employeur ne puisse les justifier par des éléments objectifs.
En l'espèce, M. [K] fait valoir qu'à partir de la fin de l'année 1998, date à laquelle il a commencé à exercer un mandat de représentant du personnel au sein du CHSCT avec l'étiquette syndicale CGT, il a connu :
- une évolution de carrière défavorable par rapport aux salariés auprès desquels il peut légitimement se comparer, alors que son début de carrière avait connu une progression rapide,
- une dégradation de ses conditions de travail pouvant être qualifiée de harcèlement discriminatoire et se caractérisant pour une sous-occupation en termes qualitatif et quantitatif, des notations dégradées de 2005 à 2016, ainsi qu'une mise à l'écart de l'équipe,
- la reconnaissance par l'employeur d'une différence de traitement en lien avec ses engagements syndicaux.
Il est constant que M. [K] a cessé ses activités syndicales au mois d'avril 2015.
* Sur l'évolution de sa carrière et de sa rémunération
Il ressort des pièces produites aux débats qu'engagé en 1993 en qualité de technicien recherches études essais, niveau IV, échelon 3, coefficient 285, M. [K] a évolué, dès le 1er septembre 1995, au niveau V, échelon 1 coefficient 305. A compter du 1er juin 2002, il a bénéficié d'une évolution en étant positionné à l'échelon 2 du niveau V, coefficient 335. Alors qu'il travaillait jusqu'à présent sur le site de [Localité 6], à compter du 1er novembre 2004, il va rejoindre le site de [Localité 5] pour occuper un poste de technicien qualité toujours au niveau V, échelon 2 coefficient 335. Enfin, à compter du 1er avril 2020, il va atteindre l'échelon 3 du niveau V coefficient 365.
Parallèlement à cette évolution de carrière, M. [K] a bénéficié d'une augmentation de salaire de 2 % à partir du 1er janvier 2005, de 1 % à partir du 1er avril 2014, de 2,01 % le 1er avril 2018, de 2 % le 1er avril 2019, de 3% le 1er avril 2020 et d'une prime de 700 euros au mois d'avril 2022.
Pour critiquer la durée de sa 'stagnation' aux coefficients 305 (pendant 6 ans et 9 mois, de 1995 à 2002) puis au coefficient 335 (pendant 17 ans et 10 mois, de 2002 à 2020), M. [K] se fonde sur un document établi le 14 septembre 2010 relatif à la rémunération des ETAM de l'ensemble du groupe Renault duquel il ressort que concernant la filière 700 auquel il appartient, la durée moyenne d'un salarié dans les coefficients est la suivante :
- coefficient 285 : 5,7 ans,
- coefficient 305 : 4,7 ans,
- coefficient 335 : 5 ans.
Toutefois, la comparaison entre la situation particulière de M. [K], technicien recherches études sur le site de [Localité 6] jusqu'en 2004, puis technicien qualité sur le site de [Localité 5] et l'ensemble de tous les salariés classés ETAM de la société Renault n'a aucune pertinence.
En effet, elle ne prend en compte ni la nature de la composition de cette catégorie (notamment les salariés engagés avec un niveau et des diplômes plus élevés que M. [K] dont l'évolution de carrière est incomparable puisqu'embauchés dès l'origine à un coefficient plus important) ni la spécificité des besoins et de l'organisation de chaque site selon la nature de l'activité et la typologie de la composition de la masse salariale dudit site.
Au demeurant, il convient de relever que les autres documents produits par M. [K] démontrent en eux même cette absence de légitimité.
Ainsi, le salarié verse aux débats des synthèses des bilans sociaux de la société Renault entre 2010 et 2015 qui montrent qu'entre 2007 et 2015, la durée moyenne pour les salariés ETAM entre deux promotions varient entre 6,1 années et 7,1 années avec des différences très significatives d'une année sur l'autre, puisque par exemple en 2013, cette durée n'est que de 3 ans. En outre, la société Renault explique sans être contredite sur ce point qu'entre 2008 et 2014, elle a connu des difficultés économiques importantes qui l'ont contrainte à appliquer une modération salariale à l'ensemble des salariés. Ces éléments établissent que les évolutions de carrière ne dépendent pas uniquement de la situation personnelle du salarié, mais également de considérations de politique économique à l'échelle de la société, de sorte que les statistiques établies sur la même échelle ne sont pas un élément de comparaison utile.
De plus, M. [K] produit des documents issus des bilan sociaux du site de [Localité 5], établis sur des années postérieures (2017 et 2018) mais sans que ne soit contestée la stabilité des caractéristiques de la masse salariale, desquels il ressort, s'agissant des ETAM, que sur un effectif d'environ 1 500 personnes, environ 1 000 salariés sont au niveau 2 (coefficient 260 à 335) et environ seulement 140 personnes sont au niveau 3 (coefficient supérieur à 335). Au vu de ces besoins structurels de main d'oeuvre qui établissent un ratio de l'ordre de 10 %, il n'apparaît absolument pas anormal que la durée moyenne d'un salarié du site de [Localité 5] au coefficient 335 soit plus longue que la moyenne générale de tous les salariés Renault au même coefficient, de sorte les chiffres nationaux utilisés par M. [K] ne peuvent valablement servir de référence pour apprécier sa situation personnelle.
En tout état de cause, d'une part, s'agissant du passage de M. [K] du coefficient 305 à 335, le document sur lequel il fonde sa critique montre lui-même qu'elle est infondée. Au contraire, il en ressort qu'il a bénéficié d'une progression plus rapide que la moyenne, puisqu'engagé en 1993 au coefficient 285, il n'a mis que 9,25 années à atteindre le coefficient 335, alors que la durée moyenne sur laquelle il fonde son raisonnement est de 10, 40 années.
La critique ne peut pas non plus être fondée sur une inadéquation de son coefficient avec les tâches qui lui étaient confiées, puisque les entretiens d'évaluation des années 2001 et 2002 montrent au contraire que l'évolution des missions de M. [K] a été progressive entre 2000 et 2002 et que la promotion qu'il a obtenue en 2002 avec son passage au coefficient 335 correspond justement à la valorisation et la montée en puissance de ses nouvelles compétences, ce qui ne pouvait intervenir immédiatement, dès l'année 2000, en l'absence d'acquisitions complètes du niveau exigé pour ce coefficient.
D'autre part, s'agissant du passage de M. [K] du coefficient 335 (atteint en 2002) au coefficient 365 (atteint en 2020), à titre liminaire, il convient de rappeler que le salarié a été en congé parental du 30 juin 2007 au 31 décembre 2009. Or, pendant toute la durée de cette suspension du contrat de travail, soit 30 mois, il ne pouvait prétendre à une promotion. Il convient donc de retenir que M. [K] a mis 15 ans et 6 mois de durée de travail effective pour atteindre le coefficient 365 et non 17 ans et 10 mois.
Pour justifier ce délai, la société Renault produit un élément de comparaison très pertinent, à savoir la carrière de M. [T] qui est le salarié que M. [K] a remplacé à compter du 1er avril 2020 dans le cadre de l'obtention de sa promotion au coefficient 365, salarié qui n'a pas eu d'activité syndicale. Il ressort de ce document que M. [T] a été engagé en 1983 au coefficient 240, qu'il a obtenu le coefficient 335 après 18 ans d'ancienneté et que son passage au coefficient supérieur 365 s'est effectué 14 ans et 4 mois plus tard, alors qu'il avait 32 ans d'ancienneté totale dans la société (contre 27 ans pour M. [K]).
En outre, il convient de relever que M. [K] ne soutient pas avoir exercé des tâches qui auraient justifié sa classification au coefficient 365 avant le 1er avril 2020, se plaignant au contraire fréquemment qu'il n'était pas employé à sa juste valeur et qu'on lui confiait des tâches subalternes qui relevaient d'un coefficient bien inférieur au sien.
Enfin, s'agissant de l'absence d'augmentation individuelle de salaire, il convient de rappeler que M. [K] ne conteste pas qu'entre 2008 et 2014, la société Renault a connu des difficultés économiques importantes qui l'ont contrainte à appliquer une modération salariale à l'ensemble des salariés. L'absence d'augmentation individuelle sur cette période est donc objectivement justifiée, et ce d'autant que sur cette même période, le contrat de travail de M. [K] a été suspendu pendant 30 mois du fait de son congé parental. Au demeurant, M. [K] ne produit aucun élément établissant une différence de traitement, le rapport du groupe paritaire de 2010 évoquant un plan de révision salariale avec l'octroi d'augmentation individuelle à 50 % des ETAM n'étant qu'un document de travail et d'échanges sur des prospections économiques et non des données statistiques chiffrées et effectives.
Il ne ressort donc de ces éléments aucune différence de traitement subi par M. [K] quant à l'avancement de sa carrière et/ou à l'octroi d'augmentations de salaires individuelles.
* Sur la dégradation de ses conditions de travail
M. [K] expose qu'il a ressenti le changement de comportement de sa hiérarchie lorsqu'il est devenu membre du CHSCT tertiaire à l'automne 2005, cette situation se manifestant par la mise en oeuvre d'une procédure disciplinaire dès janvier 2006 et par la soudaine dévalorisation de son travail et de ses compétences techniques. En outre, il expose qu'après son congé parental, il a repris une activité à temps partiel à compter de janvier 2010 dans le cadre de l'accord relatif au développement du travail à temps partiel choisi, sans jamais bénéficié d'entretien spécifique pour équilibrer sa charge de travail avec ses horaires et dans des conditions dégradantes, puisque lui ont été confiées des tâches 'déqualifiantes'. Ainsi, il explique qu'on lui a demandé d'assurer la compétence métallurgique dans les analyses quotidiennes mais qu'en réalité, il n'a jamais été sollicité, qu'à l'inverse des tâches subalternes lui ont été confiées comme le suivi matière ou le suivi de la chaîne d'étalonnage. Il avait en outre un volume d'activité très faible en deça de sa disponibilité, ses heures de délégations n'étant que de 300 heures par an. Il soutient que cette situation n'a pris fin qu'à compter de la saisine du conseil de prud'hommes.
Sur la procédure disciplinaire engagée en 2006, il résulte du courrier de réponse rédigé par M. [K] lui-même qu'il a reconnu avoir émis trois rapports de contrôles erronés, contextualisant cette situation par une surcharge de travail. Cet argument a été entendu par sa hiérarchie, puisque M. [K] à l'issue de l'entretien préalable, n'a eu aucune sanction, mais seulement un courrier de mise en garde. Certes, il ressort de ce même courrier que lors de l'entretien a été évoqué la question de non remplissage d'un bordereau d'absence prévisible pour exercice du mandat syndical. Toutefois, ce grief n'a pas été retenu dans la lettre de mise en garde, ce qui montre également que les explications de M. [K] ont été entendues par son employeur. Cet élément ne peut donc être retenu comme un harcèlement discriminatoire, étant précisé que l'employeur est légitime à évoquer avec le salarié les conditions dans lesquelles il exerce son mandat syndical, puisque cette situation a nécessairement des conséquences sur l'organisation du poste de travail du salarié.
Sur les conditions de son retour à l'emploi à compter de 2010, M. [K] verse aux débats ses entretiens annuels professionnels des années 2010 à 2020. Il ressort de la lecture de ces documents que la société Renault s'est trouvée en difficulté, au retour de M. [K], pour lui confier, au sein du laboratoire métallurgique qu'il ne souhaitait pas quitter, des tâches à la hauteur de sa qualification et de ses compétences compatibles avec son temps partiel de 60 %, de surcroît amputé de son temps de délégation syndicale de l'ordre de 300 heures par an, ce qui représentait 30 % de son temps de travail effectif.
Ainsi, le laboratoire métallurgique était composé de deux salariés à temps plein à qui étaient confiés les missions habituelles affectées à cette unité conformes aux compétences de M. [K], ce dernier étant affecté à des tâches ponctuelles non urgentes, que le salarié pouvait traiter à sa convenance lorsqu'il était présent.
Or, il s'est avéré que l'activité de l'usine de [Localité 5] ne générait pas des besoins suffisants sur lesdites tâches, de sorte qu'en sus du sentiment d'accomplir des missions subalternes, M. [K] a également déploré, surtout à partir de 2014, une sous-activité certaine, non contestée par sa hiérarchie.
Certes, alors que M. [K] s'est plaint de cette situation dès 2010, la société Renault n'explique pas pourquoi elle n'a pas tenté d'y remédier, se contentant d'affirmer, sans en justifier, que le temps de travail effectif de M. [K] était incompatible avec les missions confiées au laboratoire métallurgique qu'il ne souhaitait pas quitter, de sorte que cela créait des difficultés d'organisation conduisant à ne lui confier que des missions ponctuelles non urgentes.
Toutefois, il convient de mettre cette situation en perspective avec le contexte économique de l'époque, la société Renault ayant connu, à la suite de la crise pétrolière de 2008, une récession importante de son activité, situation qui n'a commencé à s'améliorer qu'à compter de l'année 2014.
En outre, il ressort des évaluations postérieures de M. [K] que sa situation n'a pu se débloquer qu'à compter de 2017, année au cours de laquelle une nouvelle activité a été intégrée au laboratoire métallurgie avec besoin d'un spécialiste référent, poste qui a été proposé au salarié, sous réserve d'un retour à temps complet, le poste n'étant pas compatible avec un temps partiel. Parallèlement, M. [K] va être également affecté sur une nouvelle tâche dite 'test Balwin'. Bien qu'aux termes de son évaluation 2017, il estime que cette fonction est en deçà de ses compétences, les évaluations postérieures montrent qu'il ne sera opérationnel sur ce poste qu'après avoir réalisé plusieurs formations spécifiques. Du fait de cette nouvelle spécialité et du départ d'un salarié, M. [K] retrouvera, à compter de 2019 un poste à temps plein, situation qu'il qualifie lui-même de satisfaisante dans son évaluation de 2018, saluant la transition opérée au cours de cette année. Les évaluations postérieures sont valorisantes et M. [K] demeure satisfait de ses conditions de travail.
Ces éléments et la concordante des dates montrent que si M. [K] a incontestablement rencontré une dégradation de ses conditions de travail entre 2010 et 2018, cette situation n'a aucun lien avec l'existence de son mandat syndical qu'il exerçait déjà depuis de nombreuses années auparavant et qu'il a cessé en avril 2015, soit près de trois ans avant qu'une modification positive de ses conditions de travail intervienne. Elle est exclusivement dûe à l'incompatibilité du temps partiel de M. [K] avec les fonctions qu'il souhaitait conserver au sein du laboratoire métallurgique, la re-valorisation de ses tâches n'ayant pu être effectuée qu' à compter du développement, à partir de 2017, de nouvelles activités confiées à ce service, et de son accord pour reprendre un poste à temps complet libéré par le départ d'un de ses collègues du laboratoire.
Il est ainsi établi que les conditions de travail subies par M. [K] sont étrangères à toute discrimination syndicale.
* Sur l'inégalité de traitement
Il convient de rappeler qu'aux termes d'un accord de méthode du 14 décembre 2001 relatif au règlement des litiges résultant d'évolutions professionnelles de représentants du personnel, la société Renault a entendu prendre acte de la réalité de la situation dénoncée par les représentants du personnel déclarant avoir subi ou subir un préjudice dans leur évolution de carrière, tout en rappelant qu'elle n'a jamais pris en considération ces mandats pour décider d'une évolution de carrière.
En application de cet accord de méthode, la société Renault a examiné la demande faite par M. [K] le 3 octobre 2013 et a reconnu que ce dernier avait subi une inégalité de traitement sur les années de 1999 à 2014, dans des proportions très faibles les premières années, de l'ordre de 150 euros par an, puis plus importantes, de l'ordre de 2 500 euros par an entre 2011 et 2014.
Dans la mesure où l'accord de méthode que la société Renault s'est engagée à appliquer et à respecter conduit à reconnaître l'existence d'une inégalité de traitement sur une période pendant laquelle M. [K] était titulaire d'un mandat syndical, il est suffisamment établi l'existence d'une discrimination syndicale, aucun élément objectif ne venant expliquer cette situation.
I - c) Sur la réparation du préjudice subi
* Sur le repositionnement du salarié
M. [K] expose que s'il a bénéficié d'un re-positionnement de coefficient à compter du 1er avril 2020 en obtenant le coefficient 365, en revanche, sa rémunération n'a pas été correctement re-positionné, puisque s'il avait eu une évolution de carrière non discriminée il aurait pu prétendre atteindre le 9ème décile du salaire annuel brut théorique de ce coefficient, soit la somme de 53 384 euros.
Il résulte des motifs adoptés précédemment qu'il n'est pas établi que M. [K] a subi une discrimination sur le plan de l'évolution de sa carrière en terme d'affectation de coefficient.
Il s'en suit, qu'alors qu'au 1er avril 2020, il ne peut se prévaloir d'aucune ancienneté dans le coefficient 365, il n'est aucunement justifié de re-positionner sa rémunération au niveau du 9ème décile du salaire brut annuel de référence de tous les salariés de la société Renault affectés à ce coefficient en 2020, étant rappelé que ce niveau de 9ème décile signifie que 90 % des salariés ayant ce coefficient sont payés en deçà de ce montant.
En outre, il convient également de relever que ce montant correspond à 1 000 euros près au montant médian du salaire moyen de référence du coefficient supérieur (400) qui n'est attribué qu'à 2 % de l'ensemble des salariés de la société Renault, ce qui ne correspond aucunement à une position hiérarchique à laquelle M. [K] pourrait prétendre.
Cette demande est également bien supérieure au salaire que percevait M. [T], le prédécesseur de M. [K], qui alors qu'il avait plusieurs années d'ancienneté dans son poste au coefficient 365 a perçu la dernière année avant sa retraite un salaire annuel de référence de 46 754,64 euros.
Cette demande n'est donc pas justifiée, le jugement entrepris étant confirmé sur ce point.
* Sur le préjudice financier de perte de salaire et de perte de droits à la retraite
M. [K] réclame à ce titre un préjudice sur la période 1998-2022 d'un montant de 88 990 euros pour la perte de salaire, outre une majoration de 30 % pour la perte de droits à la retraite. Il base son calcul sur le salaire de référence de 53 384 euros qu'il aurait dû atteindre selon lui au 1er avril 2020 lors de son passage au coefficient 365, tout en se fondant sur un tableau de reconstitution de carrière et de rémunération dans lequel il fait apparaître un coefficient 400 atteint dès l'année 2012. Toutefois, cette mention est parfaitement indifférente, puisque M. [K] effectue son calcul de pente sur la base du 9ème décile du coefficient 365, sans aucune incidence finalement sur la date à laquelle il aurait dû passer au coefficient supérieur.
La société Renault conteste ce calcul soutenant que le seul préjudice qui peut être retenu, c'est celui évalué conformément à l'accord de méthode, à savoir la somme de 16 897,88 euros, étant relevé que la période d'indemnisation prise en compte dans le cadre de l'application de l'accord de méthode est plus courte, puisqu'elle s'arrête à la fin du 1er semestre 2015.
Il résulte des motifs adoptés précédemment que le calcul de M. [K] ne peut être validé, puisqu'il se base sur un salaire de référence qui n'est pas justifié. Au demeurant, le salaire brut annuel théorique de 1998 de 26 024 euros qu'il retient n'est pas plus justifié, puisqu'il ne correspond ni au salaire de base retenu dans l'accord de méthode, ni au montant du salaire mensuel moyen calculé sur la base du bulletin de salaire du mois de septembre 1998.
L'évolution de carrière de M. [K] intervenue au mois d'avril 2020, avec son passage au coefficient 365 correspondant à un salaire annuel de référence de 46 055,52 euros, étant considérée comme normale, indépendante de la situation de discrimination salariale qu'il a subi concernant le montant de son salaire avant cette promotion, il y a lieu de circonscrire la période d'indemnisation du préjudice subi entre 1998, date de sa prise de fonction syndicale, et avril 2020.
Par ailleurs, le panel utilisé dans l'accord de méthode du 14 décembre 2001 n'étant pas utilement critiqué par M. [K], il convient de partir de cette base de calcul pour évaluer son préjudice, en se fondant sur les salaires de référence retenus dans la proposition de transaction faite au salarié en application dudit accord. En revanche, il convient, pour indemniser le salarié sur l'intégralité de la période de préjudice, d'appliquer la méthode proposée par M. [K]. Aussi, il convient de chiffrer son préjudice comme suit :
Calcul de la perte du salaire réel de M. [K] à partir des assiettes fixées par l'accord de méthode (pente a) : [(18480,12 francs/mois x 12 ) - ( 11 729,80 francs/mois x 12)] / 16 ans = 5 062,74 francs, soit 771,81 euros par an.
Calcul de la perte du salaire si évolution normale sans discrimination (pente a') : [(20 342,81 francs/mois x 12 ) - ( 11 729,80 francs/mois x 12)] / 16 ans = 6 459,76 francs, soit 984,78 euros par an.
Il convient également de tenir compte du congé parental de M. [K] de juillet 2007 à décembre 2009, de sa période de temps partiel à 60 % de janvier 2010 décembre 2018 et d'une revalorisation annuelle en fonction du coefficient de revalorisation des salaires proposé par le salarié.
année
brut annuel
pente a
(771,81 euros/an)
brut annuel
pente a' (984,78 euros/an)
différence annuelle
différence après corrections congé parental et temps partiel
revalorisation
préjudice annuel
1998
21 458,36
(11 729,80 francs)
21 458,36
(11 729,80 francs)
1999
22 230,17
22 443,14
212,97
212,97
1,295
275,80
2000
23 001,98
23 427,92
425,94
425,94
1,288
548,61
2001
23 773,79
24 412,70
638,91
638,91
1,263
806,94
2002
24 545,60
25 397,48
851,88
851,88
1,235
1 052,07
2003
25 317,41
26 382,26
1 064,85
1 064,85
1,214
1 292,73
2004
26 089,22
27 367,04
1 277,82
1 277,82
1,195
1 526,99
2005
26 861,03
28 351,32
1 490,29
1 490,29
1,175
1 751,09
2006
27 632,84
29 336,60
1 703,76
1 703,76
1,154
1 966,14
2007
28 404,65
30 321,38
1 916,73
958,37 (de janvier à juin)
1,135
1 087,75
2008
29 176,46
31 306,16
2 129,70
0
1,123
0, 00
2009
29 948,27
32 290,94
2 342,67
0
1,113
0, 00
2010
30 720,08
33 275,72
2 555,64
1 533,38
1,103
1 691,32
2011
31 491,89
34 260,50
2 768,61
1 661,17
1,093
1 815,66
2012
32 263,70
35 245,28
2 981,58
1 788,95
1,072
1 917,75
2013
33 035,51
36 230,06
3 194,55
1 916,73
1,051
2 014,48
2014
33 807,32
37 214,84
3 407,52
2 044,51
1,038
2 122,20
2015
34 579,13
38 199,62
3 620,49
2 172,29
1,038
2 254,84
2016
35 350,94
39 184,40
3 833,46
2 300,08
1,037
2 385,18
2017
36 122,75
40 169,18
4 046,43
2 427,86
1,037
2 517,69
2018
36 894,56
41 153,96
4 259,40
2 555,64
1,029
2 629,75
2019
37 666,37
42 138,74
4 472,37
4 472,37
1,014
4 534,98
2020
38 438,18
43 123,52
4 685,34
1 171,34 (préjudice de janvier à mars 2020)
1,004
1 176,03
TOTAL
35 368,00
Il convient de majorer cette somme de 24 % au titre de la perte de droit à la retraite, soit un préjudice financier total de 43 856,32 euros, étant précisé qu'il n'y a pas lieu de pondérer cette somme au titre d'un coefficient de perte de chance, cet aléa étant inclus dans le panel choisi et déterminé dans l'accord de méthode du 14 décembre 2001, qui prend en considération à la fois des salaires avec un coefficient supérieur à celui du salarié mais également des salaires avec coefficient inférieur.
Par arrêt infirmatif, la société Renault est donc condamnée à payer à M. [K] au titre de son préjudice financier la somme de 43 856,32 euros.
* Sur le préjudice moral
M. [K] fait valoir à ce titre, que la discrimination syndicale qu'il a subie pendant de nombreuses années a eu un impact psychologique et moral considérable, puisqu'il a été très affecté par le manque de reconnaissance de ses compétences, de son expérience et de son implication professionnelle, de sorte qu'à défaut de perspectives favorables, il a été contraint de travailler à temps partiel.
Il résulte des motifs adoptés précédemment qu'il n'existe aucun lien de causalité entre le sentiment de dévalorisation vécu par M. [K] et la situation de discrimination syndicale qui a uniquement eu des répercussions sur le montant de son salaire, étant relevé que le salarié ne peut, sans une certaine mauvaise foi, reprocher à son employeur à ce titre son temps de travail à temps partiel, qui résulte uniquement d'un choix délibéré et assumé de sa part, ainsi qu'en attestent les courriers de prolongations exceptionnelles d'autorisation de temps de travail à temps partiel produits aux débats.
Dans ces conditions, le préjudice moral subi par le salarié, qui résulte de l'injustice vécue sur le plan de sa rémunération, sera justement indemnisé par l'allocation d'une somme de 1 000 euros.
Ces sommes à caractère indemnitaire porteront intérêt au taux légal à compter du présent arrêt.
Par ailleurs, conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil, les intérêts échus produiront intérêts dès lors qu'ils seront dus au moins pour une année entière et ce, à compter de l'arrêt.
II - Sur les demandes de rappels de salaires au titre des congés payés
Aux termes de l'article L. 3141-4 du code du travail, le salarié a droit à un congé de deux jours et demi ouvrables par mois de travail effectif chez le même employeur. La durée totale du congé exigible ne peut excéder trente jours ouvrables.
En vertu du principe d'égalité, le salarié à temps partiel a les mêmes droits à congés payés que le salarié à temps complet.
Il convient de rappeler que l'entreprise peut également calculer les jours de congés payés en jours ouvrés (jours normalement travaillés dans l'entreprise), à condition de ne pas désavantager les salariés. Afin de garantir l'égalité des droits avec le salarié à temps complet, il convient, en principe, de retenir pour le salarié à temps partiel les jours normalement travaillés dans l'entreprise, et non les jours effectivement travaillés par le salarié. Toutefois, certaines entreprises opèrent une correspondance entre les jours travaillés par les salariés à temps partiel et les jours ouvrés de l'entreprise, afin de ne décompter au titre des congés payés que les jours où le salarié à temps partiel aurait dû normalement travailler.
II - a) Sur le rappel de salaire lié à la rétribution des jours de congés coïncidant avec des jours fériés
M. [K] soutient que si un jour férié coïncide avec un jour ouvrable normalement non travaillé, alors que le salarié a posé une semaine de congés, le jour férié doit lui être ré-attribué, raison pour laquelle il sollicite un rappel de salaires correspondant aux jours de congés coïncidant avec un jour férié sur la période 2015-2017.
En l'espèce, il est constant que sur la période concernée par le rappel de salaire sollicité par M. [K], celui-ci travaillait à temps partiel les lundis, mardis et jeudis de chaque semaine.
S'il est exact que les jours fériés doivent être ré-attribués par l'employeur lorsqu'ils correspondent à un jour de congés posé par le salarié, ce n'est qu'à la seule et unique condition que le jour de congés ait été comptabilisé et imputé sur le solde total de jours de congés payés, ce qui peut arriver lorsque le décompte des jours de congés payés est réalisé sur la base des jours ouvrables. Au demeurant, c'est exactement le raisonnement qui est tenu dans le compte rendu de la réunion des délégués du personnel du 5 mai 2011 produit aux débats par M. [K], qui se fonde sur un calcul en jours ouvrables.
Or, il résulte de l'examen des bulletins de salaires produits aux débats que le calcul des congés payés de M. [K] est effectué par la société Renault, non pas sur la base de jours ouvrables ou même ouvrés, mais sur la base des jours travaillés par le salarié. Ainsi sur une semaine complète de congés payés, l'employeur décompte uniquement les jours où il aurait dû normalement travailler, soit 3 jours (lundi, mardi et jeudis). Aucun jour de congés n'a été décompté à M. [K] pour les 1er et 8 mai 2015 qui était des vendredis, ni pour les vendredis 25 décembre 2016 et 1er janvier 2017, pas plus que pour le vendredi 14 juillet 2017. Il ne peut donc aucunement prétendre à une ré-attribution de congés payés pour ces jours fériés.
En conséquence, il convient de confirmer le jugement entrepris sur ce point.
II -b) Sur le rappel de salaire lié à la proratisation des congés payés supplémentaires pour ancienneté
Il est constant qu'en exécution des accords d'entreprise, M. [K] pouvant se prévaloir d'une ancienneté de plus de quinze ans depuis le 1er janvier 2008, il bénéficie de six jours ouvrables supplémentaires de congés payés (dont un samedi).
M. [K] critique la proratisation effectuée par son employeur qui, à ce titre, lui a accordé, trois jours ouvrés alors qu'elle aurait dû correspondre à cinq jours ouvrés. Il estime que cette situation porte atteinte au principe d'égalité de traitement entre les salariés à temps partiel et à temps plein et demande, en conséquence, un rappel de salaire de 3 jours par an entre 2012 et 2018, puisqu'à l'année 2019 où il a repris le travail à temps plein.
Cet argument ne peut être retenu par la cour, la proratisation effectuée par la société Renault étant régulière et sans aucune rupture d'égalité entre le calcul en jours ouvrables et en jours travaillés pour un salarié à temps partiel.
En effet, ainsi que cela résulte des motifs adoptés précédemment, la société Renault calcule les jours de congés de M. [K] ni sur la base des jours ouvrables ou ouvrés mais sur la base des jours travaillés. Or, s'il est exact que six jours ouvrables de congés correspondent à cinq jours ouvrés, cette proratisation n'a pas à s'appliquer à M. [K] puisque le décompte des jours de congés est en base 'jour travaillé', soit trois jours par semaine.
En proratisant la semaine de congés payés offerte au titre de l'ancienneté à trois jours travaillés, la société Renault ne commet aucune violation du principe d'égalité, ainsi que le démontre cet exemple : une semaine de congés en jours ouvrables correspond à six jours du lundi au samedi inclus. En jours ouvrés, le calcul se fait du lundi au vendredi soit cinq jours. En jours travaillés, pour un salarié à temps partiel travaillant les lundis, mardis et jeudis, le calcul se fait sur trois jours.
En conséquence, il convient de confirmer le jugement entrepris sur ce point.
III - Sur les dépens et frais irrépétibles
En qualité de partie succombante, il y a lieu de condamner la société Renault aux entiers dépens, y compris ceux de première instance, de la débouter de sa demande formulée en application de l'article 700 du code de procédure civile et de la condamner à payer à M. [K] la somme de 3 000 euros sur ce même fondement pour les frais générés tant en première instance qu'en cause d'appel et non compris dans les dépens.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Statuant publiquement par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe,
Ordonne la révocation de l'ordonnance de clôture intervenue le 23 mars 2023 et fixe la nouvelle clôture de la procédure à l'audience de plaidoiries du 12 avril 2023, avant l'ouverture des débats ;
Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [U] [K] de ses demandes de rappels de salaires au titre des congés payés et de sa demande de re-positionnement au salaire brut annuel de référence de 53 384 euros ;
L'infirme pour le surplus ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Condamne la SAS Renault à payer à M. [U] [K] en réparation de la discrimination syndicale subie les sommes suivantes :
préjudice financier : 43 856,32 euros
préjudice moral : 1 000,00 euros
Dit que ces sommes à caractère indemnitaire porteront intérêts au taux légal à compter du jugement de première instance pour les dispositions confirmées et du présent arrêt pour les dispositions infirmées ;
Dit que les intérêts échus produiront intérêts dés lors qu'ils seront dus au moins pour une année entière et ce, à compter de l'arrêt ;
Condamne la SAS Renault aux entiers dépens de première instance et d'appel ;
Déboute la SAS Renault de sa demande au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la SAS Renault à payer à M. [U] [K] la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en première instance et en appel.
La greffière La présidente