N° RG 23/00685 - N° Portalis DBV2-V-B7H-JJSM
COUR D'APPEL DE ROUEN
CHAMBRE DE LA PROXIMITÉ
Section SURENDETTEMENT
ARRET DU 11 MAI 2023
DÉCISION DÉFÉRÉE :
11-22-0420
Jugement du juge des contentieux de la protection de louviers du 03 février 2023
APPELANTE :
Madame [G] [Y]
née 2 octobre 1955 à [Localité 22]
[Adresse 13]
[Localité 6]
Non comparante représentée par Me Thibaut BEAUHAIRE de la SCP PICARD LEBEL QUEFFRINEC BEAUHAIRE MOREL, avocat au barreau de l'EURE
Aide juridictionnelle provisoire
INTIMÉES :
Société [21]
[Localité 12]
[23]
[Adresse 1]
[Adresse 18]
[Localité 6]
CAF DE L'EURE
[Adresse 15]
[Localité 5]
Société [19]
Chez [24]
[Adresse 2]
[Localité 8]
SIP [Localité 29]
[Adresse 4]
[Localité 7]
Non comparants, ni représentés, bien que régulièrement convoqués par courrier recommandé avec accusé de réception.
[28]
Pole surendettement
[Adresse 14]
[Localité 11]
Société [27]
[Adresse 10]
[Localité 5]
HOTEL DU DEPARTEMENT POLE PRESTATIONS
[Adresse 17]
[Localité 5]
Société [26] FIXE ET ADSL
Chez [20]
[Adresse 3]
[Localité 9]
Non comparants, ni représentés bien que régulièrement convoqués par lettre recommandée avec accusé de réception.
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 13 avril 2023 sans opposition des parties devant Madame GOUARIN, présidente.
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée de :
Madame GOUARIN, présidente
Monsieur JULIEN, conseiller
Madame GERMAIN, conseillère
Madame DUPONT, greffière lors des débats et de la mise à disposition
DÉBATS :
A l'audience publique du 13 avril 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 11 mai 2023
Le rapport oral de l'affaire a été fait à l'audience avant les plaidoiries
ARRÊT :
Réputé contradictoire
Prononcé publiquement le 11 mai 2023, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
signé par Madame GOUARIN, présidente et par Madame DUPONT, greffière.
Exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties
Par déclaration du 19 mars 2021, Mme [G] [Y] a saisi la commission de surendettement des particuliers de l'Eure d'une demande de traitement de sa situation de surendettement qui a été déclarée recevable le 11 juin 2021.
Le 1er juillet 2022, la commission a imposé des mesures consistant en un rééchelonnement des dettes d'une durée de 20 mois avec une mensualité de 308,78 euros.
Mme [Y] a formé un recours à l'encontre de cette décision, sollicitant un effacement de ses dettes.
Par jugement du 3 février 2023, la chambre de proximité de Louviers a :
- déclaré recevable le recours de Mme [Y] ;
- adopté les mesures recommandées par la commission ;
- laissé les dépens à la charge du Trésor public.
Par lettre recommandée expédiée le 6 février 2023, Mme [Y] a relevé appel de cette décision.
Par conclusions développées oralement à l'audience du 13 avril 2023, Mme [Y] demande à la cour de :
- juger l'appel recevable ;
- infirmer le jugement rendu ;
Statuant à nouveau,
- admettre Mme [Y] au bénéfice d'un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire et en tirer toutes conséquences de droit ;
- admettre Mme [Y] au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;
- statuer ce que de droit quant aux frais et dépens.
Au soutien de son appel, Mme [Y] fait essentiellement valoir que, âgée de 67 ans, elle a cessé l'activité complémentaire qui était la sienne au 31 décembre 2022, qu'elle ne perçoit plus désormais que sa pension de retraite, qu'elle ne dispose d'aucun bien dont la vente pourrait lui permettre d'apurer son passif et que sa retraite s'élève à la somme de 882,79 euros par mois.
Régulièrement convoqués par lettres recommandées dont les avis de réception ont été retournés signés, les créanciers n'ont pas comparu et ne se sont pas fait représenter.
MOTIFS DE LA DECISION
Au vu des ressources dont il est justifié, il sera fait droit à la demande de l'appelante tendant à se voir accorder le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire.
L'appel, formé au greffe de la cour d'appel dans le délai de 15 jours suivant la notification du jugement déféré, est recevable en application des dispositions de l'article R. 713-7 du code de la consommation.
En l'espèce, ni la bonne foi ni l'impossibilité manifeste de Mme [Y] de faire face à ses dettes ne sont contestées. La débitrice est en conséquence fondée à solliciter le bénéfice des dispositions des articles L. 711-1 et suivants du code de la consommation.
Aux termes de l'article L. 724-1 du code de la consommation, lorsqu'il ressort de l'examen de la demande de traitement de la situation de surendettement que les ressources ou l'actif réalisable du débiteur le permettent, la commission prescrit des mesures de traitement dans les conditions prévues aux articles L. 732-1, L. 733-1, L. 733-4 et L. 733-7.
Lorsque le débiteur se trouve dans une situation irrémédiablement compromise caractérisée par l'impossibilité manifeste de mettre en oeuvre les mesures de traitement mentionnées au premier alinéa, la commission peut, dans les conditions du présent livre :
1° soit imposer un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire si elle constate que le débiteur ne possède que des biens meublants nécessaires à la vie courante et des biens non professionnels indispensables à l'exercice de son activité professionnelle, ou que l'actif n'est constitué que de biens dépourvus de valeur marchande ou dont les frais de vente seraient manifestement disproportionnés au regard de leur valeur vénale ;
2° soit saisir, si elle constate que le débiteur n'est pas dans la situation mentionnée au 1°, avec l'accord du débiteur, le juge du tribunal d'instance aux fins d'ouverture d'une procédure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire.
Conformément au montant retenu par la commission, le montant des créances sera fixé pour les besoins de la présente procédure à la somme de 5 933,02 euros, sous réserve des paiements éventuellement intervenus en cours de procédure.
Mme [Y], âgée de 67 ans, est divorcée, sans personne à charge, locataire de son logement et retraitée depuis le mois de novembre 2018.
Elle justifie par les pièces versées aux débats percevoir une pension de retraite d'un montant mensuel de 882 euros. Si elle exerçait une activité complémentaire d'agent de service auprès de la société [25] pour un salaire mensuel de l'ordre de 700 euros, la débitrice indique avoir cessé cette activité depuis le 31 décembre 2022.
En application de l'article R. 731-1 du code de la consommation, la part des ressources mensuelles du débiteur à affecter à l'apurement des dettes est calculée par référence au barème prévu à l'article R. 3252-2 du code du travail, de manière à ce qu'une partie des dépenses courantes du ménage lui soit réservée par priorité.
Ainsi, la part des ressources mensuelles de Mme [Y] à affecter théoriquement à l'apurement des dettes en application du barème de saisie des rémunérations serait de 91,19 euros.
Toutefois, le juge comme la commission doivent toujours rechercher la capacité réelle de remboursement du débiteur eu égard à ses charges particulières.
Il convient d'évaluer le montant de ses charges conformément aux éléments déclarés à la procédure, aux justificatifs versés aux débats et au barème commun appliqué par la [16] pour l'année 2023.
Chaque mois, Mme [Y] doit ainsi faire face aux dépenses courantes suivantes :
- forfait de base comprenant les dépenses d'alimentation, de transport, d'habillement, les dépenses diverses et de mutuelle santé : 604 euros,
- forfait habitation comprenant l'eau, l'énergie hors chauffage, le téléphone, internet et l'assurance habitation : 116 euros,
- forfait chauffage : 114 euros,
- loyer : 384 euros,
Soit des charges totales d'un montant de 1 218 euros.
Il en résulte que les charges supportées par Mme [Y] sont d'un montant supérieur à ses revenus et que la capacité contributive de Mme [Y] est négative.
Le patrimoine de la débitrice n'est composé que de biens meublants ou de biens dépourvus de valeur marchande ou dont les frais de vente seraient manifestement disproportionnés compte tenu de leur valeur vénale.
Il s'ensuit que les mesures de traitement prévues aux articles L. 732-1, L. 733-1, L. 733-4 et L. 733-7 du code de la consommation ne peuvent être mises en application.
Au vu de ses ressources, de ses charges, de son endettement, de son âge et de l'absence de perspective d'amélioration de sa situation, Mme [Y] apparaît dès lors dans une situation irrémédiablement compromise au sens de l'article L. 724-1 alinéa 1er du code de la consommation.
Le jugement déféré doit en conséquence être infirmé et il convient d'ordonner un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Accorde à Mme [G] [Y] le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;
Déclare recevable l'appel interjeté par Mme [G] [Y] ;
Infirme le jugement rendu dans toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau,
Constate que la situation de Mme [G] [Y] est irrémédiablement compromise au sens de l'article L. 724-1 alinéa 1er du code de la consommation ;
Prononce le rétablissement personnel sans liquidation judiciaire de Mme [G] [Y] ;
Rappelle que le rétablissement personnel sans liquidation judiciaire entraîne, en application des dispositions des articles L. 741-2 et L. 741-7 du code de la consommation, l'effacement de toutes les dettes non professionnelles du débiteur arrêtées à la date du présent arrêt, à l'exception de celles prévues aux articles L. 711-4 et L. 711-5 du code de la consommation et des dettes dont le montant a été payé par des personnes physiques cautions ou coobligés ;
Dit que les dépens d'appel seront supportés par le Trésor public.
Le greffier La présidente