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10/05/2023 | FRANCE | N°22/02129

France | France, Cour d'appel de Rouen, 1ère ch. civile, 10 mai 2023, 22/02129


N° RG 22/02129 - N° Portalis DBV2-V-B7G-JDS6







COUR D'APPEL DE ROUEN



1ERE CHAMBRE CIVILE



ARRET DU 10 MAI 2023







DÉCISION DÉFÉRÉE :



21/00823

Tribunal judiciaire de Rouen du 31 mai 2022





APPELANT :



Monsieur [H] [Y]

né le 11 octobre 1978 à [Localité 6] (Maroc)

[Adresse 2]

[Adresse 2]



représenté et assisté de Me Amèle MANSOURI, avocat au barreau de Rouen substitué par Me Jean-Sébastien VAYSSE

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aide juridictionnelle en cours





INTIMEES :



Madame [V] [C]

née le 31 octobre 1987 à [Localité 5]

[Adresse 1]

[Adresse 1]



non constituée bien que régulièrement assignée par acte d'huissier du 7 septembre 2022...

N° RG 22/02129 - N° Portalis DBV2-V-B7G-JDS6

COUR D'APPEL DE ROUEN

1ERE CHAMBRE CIVILE

ARRET DU 10 MAI 2023

DÉCISION DÉFÉRÉE :

21/00823

Tribunal judiciaire de Rouen du 31 mai 2022

APPELANT :

Monsieur [H] [Y]

né le 11 octobre 1978 à [Localité 6] (Maroc)

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représenté et assisté de Me Amèle MANSOURI, avocat au barreau de Rouen substitué par Me Jean-Sébastien VAYSSE

aide juridictionnelle en cours

INTIMEES :

Madame [V] [C]

née le 31 octobre 1987 à [Localité 5]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

non constituée bien que régulièrement assignée par acte d'huissier du 7 septembre 2022 remis à l'étude

SYNDICAT DE COPROPRIÉTAIRES DE LA RÉSIDENCE CÉSAR FRANCK représentée par son syndic FONCIA NORMANDIE Sas

RCS de Rouen 394 288 401

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Vincent MOSQUET de la SELARL LEXAVOUE NORMANDIE, avocat au barreau de Rouen et assistée de Me BLANDIN, de la Scp DPR, avocat au barreau de Rouen

COMPOSITION DE LA COUR  :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 6 mars 2023 sans opposition des avocats devant Mme Magali DEGUETTE, conseillère, rapporteur,

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée de :

Mme Edwige WITTRANT, présidente de chambre,

M. Jean-François MELLET, conseiller,

Mme Magali DEGUETTE, conseillère,

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Catherine CHEVALIER,

DEBATS :

A l'audience publique du 6 mars 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 10 mai 2023.

ARRET :

RENDU PAR DEFAUT

Prononcé publiquement le 10 mai 2023, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

signé par Mme WITTRANT, présidente et par Mme CHEVALIER, greffier présent lors de la mise à disposition.

*

* *

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

M. [H] [Y] et Mme [V] [C], son ex-épouse, sont propriétaires des lots n°4 et 69 dans l'ensemble immobilier situé [Adresse 2], et soumis au statut de la copropriété. Ils sont également propriétaires d'une part d'intérêt n°155 dans la Sci des Parkings, gérée par le cabinet Bourdon Lagadeuc.

Par actes d'huissier de justice des 17, 22 novembre, et 1er décembre 2021, M. [H] [Y] et Mme [V] [C] ont été assignés devant le président du tribunal judiciaire de Rouen, statuant selon la procédure accélérée au fond, aux fins de paiement de charges de copropriété, de frais de recouvrement, et de dommages et intérêts.

Suivant jugement du 31 mai 2022, le tribunal judiciaire de Rouen a :

- déclaré l'action du syndic Foncia Normandie représentant le syndicat des copropriétaires de la résidence César Franck recevable,

- condamné solidairement M. [H] [Y] et Mme [V] [C] à régler au syndicat des copropriétaires de la résidence César Franck représenté par son syndic Foncia Normandie, la somme de 14 026,19 euros correspondant aux charges de copropriété et aux frais de recouvrement dus au 18 février 2022, et ce, avec intérêts au taux légal à compter du 16 juillet 2021, date de la mise en demeure de payer adressée à M. [Y] sur la somme de 12 656,39 euros, et, pour le surplus à compter de la présente assignation,

- ordonné la capitalisation des intérêts échus dus au moins pour une année entière,

- condamné M. [Y] seul au règlement d'une somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts,

- laissé à chacune des parties la charge de ses propres dépens, lesquels seront recouvrés conformément aux modalités relatives à l'aide juridictionnelle,

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté toutes demandes plus amples et contraires.

Par déclaration du 24 juin 2022, M. [H] [Y] a formé un appel contre le jugement.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET DES MOYENS DES PARTIES

Par dernières conclusions notifiées le 3 novembre 2022, M. [H] [Y] sollicite de voir en vertu de l'article 122 du code de procédure civile :

in limine litis,

- prononcer l'irrecevabilité de l'action du syndic Foncia Normandie représentant le syndicat des copropriétaires de la résidence César Franck au titre d'un défaut du droit d'agir en justice déduit d'un défaut de qualité à agir du syndic,

sur le fond,

- confirmer le jugement du 31 mai 2022 du tribunal judiciaire de Rouen uniquement en ce qu'il a débouté le syndicat des copropriétaires de la résidence César Franck, représenté par le syndic Foncia Normandie, de sa demande de condamnation à son encontre au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- infirmer le jugement précité sur le reste des dispositions en ce qu'il a :

. déclaré l'action du syndic Foncia Normandie représentant le syndicat des copropriétaires de la résidence César Franck recevable,

. condamné solidairement M. [H] [Y] et Mme [V] [C] à régler au syndicat des copropriétaires de la résidence César Franck représenté par son syndic Foncia Normandie, la somme de 14 026,19 euros correspondant aux charges de copropriété et aux frais de recouvrement dus au 18 février 2022, et ce, avec intérêts au taux légal à compter du 16 juillet 2021, date de la mise en demeure de payer adressée à M. [Y] sur la somme de 12 656,39 euros, et, pour le surplus à compter de la présente assignation,

. ordonné la capitalisation des intérêts échus dus au moins pour une année entière,

. condamné M. [Y] seul au règlement d'une somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts,

. laissé à chacune des parties la charge de ses propres dépens, lesquels seront recouvrés conformément aux modalités relatives à l'aide juridictionnelle,

. rejeté toutes demandes plus amples et contraires,

statuant à nouveau,

- débouter le syndicat des copropriétaires de la résidence César Franck, représenté par le syndic Foncia Normandie, de sa demande de condamnation à son encontre à régler solidairement la somme de 14 026,19 euros correspondant aux charges de copropriété et aux frais de recouvrement dus au 18 février 2022, et ce, avec intérêts au taux légal à compter du 16 juillet 2021, date de la mise en demeure de payer adressée sur la somme de 12 656,39 euros, et, pour le surplus à compter de l'assignation,

- débouter le syndicat des copropriétaires de la résidence César Franck, représenté par le syndic Foncia Normandie, de sa demande de capitalisation des intérêts échus dus pour une année entière,

- débouter le syndicat des copropriétaires de la résidence César Franck, représenté par le syndic Foncia Normandie, de sa demande de le voir condamner à régler seul la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts,

- constater et retenir la particulière passivité fautive de Mme [V] [C],

- condamner Mme [V] [C] à régler seule la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts au syndicat des copropriétaires et les entiers dépens de la présente instance,

- condamner solidairement le syndicat des copropriétaires de la résidence César Franck, représenté par le syndic Foncia Normandie, et Mme [V] [C] à régler la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il fait valoir que le procès-verbal d'assemblée générale actant le renouvellement du mandat de gérant du cabinet Bourdon Lagadeuc pour la Sci des Parkings n'est pas produit ; que le contrat du syndic le cabinet Lagadeuc n'est pas visé par la Sci des Parkings et mentionne une adresse au [Adresse 4], différente de celle visée dans l'assignation au [Adresse 3] ; que l'action engagée par le cabinet Lagadeuc est irrecevable pour défaut d'intérêt à agir.

Il ajoute que le cabinet Lagadeuc, syndic précédant la Sas Foncia Normandie, n'a pas reçu mandat pour agir en justice aux lieu et place du syndicat des copropriétaires ; que la Sas Foncia Normandie n'en justifie pas davantage ; que cette dernière ne prouve pas qu'elle a été autorisée à reprendre les procédures contentieuses en cours ; que l'article 55 du décret du 17 mars 1967 qui permet au syndic d'intervenir dans le cadre du recouvrement des charges de copropriété est inopérant pour justifier d'un mandat explicite et régulier pour agir en justice, de sorte qu'une résolution devait être adoptée en assemblée générale pour permettre à la Sas Foncia Normandie de l'assigner ; que le tribunal ne s'est pas interrogé sur la régularité de la succession des deux syndics.

Il indique ensuite que la créance alléguée est incertaine, non exigible et non liquide ; qu'elle inclut des frais de procédure et de mises en demeure qui ne constituent pas des appels de charges ou de provisions, ni des appels à travaux ; que des frais doivent être supportés par le syndic de copropriété en application du contrat de syndic qui n'est pas opposable aux copropriétaires ; que le règlement du solde des charges nécessite l'approbation des comptes de l'exercice écoulé par l'assemblée générale ; que n'ont pas été produits les éléments nécessaires à la vérification de la créance réclamée ; qu'au surplus, la mise en demeure tardive et irrégulière du 16 juillet 2021 ne suffit pas à la prouver et n'a pas d'effet juridique ; que la déclaration de cette créance du syndicat des copropriétaires qu'il a faite et qui est reprise dans le tableau établi par la commission de surendettement ne l'empêche pas d'en discuter judiciairement le fondement, la nature, et le montant.

Il précise enfin que, par la tardiveté de ses diligences notamment dans l'envoi de mises en demeure et par son incurie dans la gestion des impayés par sept copropriétaires, le syndic a contribué à aggraver son propre dommage ; que, contrairement à ce que l'intimé soutient, il n'a pas aggravé la situation financière de celui-ci, qu'il n'est produit aucun élément comptable permettant de prouver les difficultés de trésorerie ; qu'il a toujours effectué des règlements partiels en raison de l'absence ou de l'insuffisance de ses ressources du fait de l'accident de la circulation dont il a été victime le 29 mai 2013, ce qui prouve sa bonne foi ; que le syndicat des copropriétaires ne caractérise pas un préjudice spécifique.

Par dernières conclusions notifiées le 28 novembre 2022 et signifiées le 5 décembre 2022 à Mme [V] [C], le syndicat des copropriétaires de la résidence César Franck, représenté par son syndic la Sas Foncia Normandie, demande de voir :

- débouter M. [H] [Y] de l'ensemble de ses demandes,

- confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Rouen du 31 mai 2022 en toutes ses dispositions,

en conséquence,

- déclarer recevable son action,

- condamné solidairement M. [H] [Y] et Mme [V] [C] à lui régler la somme de 14 026,19 euros correspondant aux charges de copropriété et aux frais de recouvrement dus au 18 février 2022, et actualisée au 21 octobre 2022 à la somme de 13 276,49 euros, et ce, avec intérêts au taux légal à compter du 16 juillet 2021, date de la mise en demeure de payer adressée à M. [Y] sur la somme de

12 656,39 euros, et, pour le surplus à compter de la présente assignation,

- ordonner la capitalisation des intérêts échus dus au moins pour une année entière,

- condamner M. [Y] seul au règlement d'une somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts,

y ajoutant,

- condamner M. [H] [Y] à lui régler une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés dans le cadre de la procédure d'appel, en plus des entiers dépens d'appel, et accorder à Me Mosquet le droit de recouvrer ceux des dépens dont il aurait fait l'avance sans en avoir reçu provision.

Il fait valoir que l'appelant opère une confusion ; que cette action n'a pas été initiée par la Sci des Parkings, le cabinet Lagadeuc ou la Sas Foncia Normandie, mais par le syndicat des copropriétaires représenté par son syndic le cabinet Lagadeuc au jour de l'assignation et désormais la Sas Foncia Normandie désignée lors de l'assemblée générale du 5 janvier 2022 ; qu'il est recevable à agir ; qu'en application de l'article 55 du décret du 17 mars 1967, le syndic n'a pas à être autorisé par l'assemblée générale pour agir en recouvrement des charges dues par les copropriétaires ; que l'assignation délivrée le 17 novembre 2021 à M. [H] [Y] mentionne le cabinet Lagadeuc comme le représentant légal du syndicat des copropriétaires ; que c'est à cette date que s'apprécie l'existence du droit d'agir en justice ; qu'aucune autorisation de l'assemblée générale n'est nécessaire en cas de changement de syndic en cours de procédure.

Il expose sur le fond que, le 16 juillet 2021, le syndic a adressé une mise en demeure recommandée à M. [H] [Y] et à Mme [V] [C] de payer les sommes dues depuis le 1er juillet 2013 laquelle est restée sans effet dans le délai de 30 jours à compter du lendemain de la première présentation ; qu'il produit les pièces justificatives de sa créance ; que M. [H] [Y] a déclaré une dette envers lui de

12 656,39 euros à la commission de surendettement le 27 janvier 2022, de sorte que la bonne foi de ce dernier dans le cadre de la procédure de surendettement et la faculté de contester l'état du passif arrêté par la commission dont il n'a pas usé ne lui permettent pas de contester aujourd'hui l'existence et le montant de la même dette.

Il ajoute que le défaut de règlement des charges dues par M. [H] [Y] et son ex-épouse impacte sa trésorerie et retarde les paiements de ses dettes ce qui peut l'obliger à effectuer des appels complémentaires auprès des autres copropriétaires pour pallier la défaillance d'un copropriétaire, que cette abstention fautive lui ouvre droit à indemnisation.

Mme [V] [C], à qui la déclaration d'appel, le calendrier de procédure et les conclusions de l'appelant ont été signifiés le 7 septembre 2022 par dépôt de l'acte à l'étude, n'a pas constitué avocat.

La clôture de l'instruction a été ordonnée le 6 mars 2023.

MOTIFS

Sur l'irrecevabilité de l'action

L'article 122 du code de procédure civile définit la fin de non-recevoir comme tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

Aux termes de l'article 31 du même code, l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.

L'intérêt à agir doit être apprécié au moment de l'engagement de l'action et ne peut pas dépendre de circonstances postérieures qui l'auraient rendue sans objet.

L'article 32 du code précité indique enfin qu'est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d'agir.

- Sur le défaut d'intérêt et de qualité à agir de la Sas Cabinet Lagadeuc

Le 18 octobre 2019, le syndicat des copropriétaires et la Sas Cabinet Lagadeuc ont conclu un contrat de mandat valable du 18 octobre 2019 au 30 juin 2022, qui a été soumis au vote de l'assemblée générale du 18 octobre 2019. Si l'adresse de cette personne morale est similaire à celle du cabinet Bourdon Lagadeuc, gérant de la Sci des Parkings, M. [Y] ne justifie pas que c'est ce dernier qui lui a fait délivrer l'assignation le 17 novembre 2021 qu'il ne verse d'ailleurs pas aux débats, et non pas le cabinet Lagadeuc en sa qualité de syndic de la copropriété. Au surplus, M. [Y] ne sollicite pas la nullité de cet acte.

Par ailleurs, l'article 55 du décret n°67-223 du 17 mars 1967 dispense le syndic d'obtenir une autorisation de l'assemblée générale des copropriétaires pour intenter une action en recouvrement de créance au nom du syndicat des copropriétaires.

Dès lors, l'action engagée le 17 novembre 2021 contre M. [Y] en paiement de ses charges de copropriété par le cabinet Lagadeuc, syndic de copropriété, l'a été valablement au nom du syndicat des copropriétaires. Cette action est recevable.

- Sur le défaut de qualité à agir de la Sas Foncia Normandie

Celle-ci a succédé à la Sas Cabinet Lagadeuc en qualité de syndic de copropriété à partir du 5 janvier 2022 conformément à la décision de l'assemblée générale ordinaire des copropriétaires de la même date.

L'appréciation de sa qualité à l'égard de la copropriété à la date de l'assignation n'a aucune utilité. Celle-ci a été examinée ci-dessus.

L'article 18 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 n'exige pas que le nouveau syndic soit autorisé par l'assemblée générale des copropriétaires à reprendre les procédures contentieuses en cours. Il prévoit seulement que l'assemblée générale désigne le nouveau syndic et fixe les dates de fin du contrat en cours et de prise d'effet du nouveau contrat, qui interviennent au plus tôt un jour franc après la tenue de cette assemblée.

La Sas Foncia Normandie avait donc qualité à poursuivre cette instance devant le tribunal qui l'a légitimement visée dans l'en-tête de son jugement. La fin de non-recevoir opposée par M. [Y] sera rejetée.

La décision du premier juge ayant déclaré cette action recevable sera confirmée.

Sur la demande de paiement

L'article 10 de la loi du 10 juillet 1965, dans sa version applicable au présent litige, dispose que les copropriétaires sont tenus de participer aux charges entraînées par les services collectifs et les éléments d'équipement commun en fonction de l'utilité objective que ces services et éléments présentent à l'égard de chaque lot, dès lors que ces charges ne sont pas individualisées.

Ils sont tenus de participer aux charges relatives à la conservation, à l'entretien et à l'administration des parties communes, générales et spéciales, et de verser au fonds de travaux mentionné à l'article 14-2 la cotisation prévue au même article, proportionnellement aux valeurs relatives des parties privatives comprises dans leurs lots, telles que ces valeurs résultent des dispositions de l'article 5.

L'article 10-1 de la même loi précise que, par dérogation aux dispositions du deuxième alinéa de l'article 10, sont imputables au seul copropriétaire concerné notamment :

a) les frais nécessaires exposés par le syndicat, notamment les frais de mise en demeure, de relance et de prise d'hypothèque à compter de la mise en demeure, pour le recouvrement d'une créance justifiée à l'encontre d'un copropriétaire ainsi que les droits et émoluments des actes des huissiers de justice et le droit de recouvrement ou d'encaissement à la charge du débiteur ;

b) les frais et honoraires du syndic afférents aux prestations effectuées au profit de ce copropriétaire. Les honoraires et frais perçus par le syndic au titre des prestations qu'il doit effectuer pour l'établissement de l'état daté à l'occasion de la mutation à titre onéreux d'un lot, ou de plusieurs lots objets de la même mutation, ne peuvent excéder un montant fixé par décret.

L'article 14-1 de la même loi dans sa version applicable au présent litige prévoit que, pour faire face aux dépenses courantes de maintenance, de fonctionnement et d'administration des parties communes et équipements communs de l'immeuble, le syndicat des copropriétaires vote, chaque année, un budget prévisionnel. Les copropriétaires versent au syndicat des provisions égales au quart du budget voté. Toutefois, l'assemblée générale peut fixer des modalités différentes. La provision est exigible le premier jour de chaque trimestre ou le premier jour de la période fixée par l'assemblée générale.

L'article 14-2 II de la même loi dans sa version applicable au présent litige dispose que, dans les immeubles à destination partielle ou totale d'habitation soumis à la présente loi, le syndicat des copropriétaires constitue un fonds de travaux à l'issue d'une période de cinq ans suivant la date de la réception des travaux pour faire face aux dépenses résultant :

1° des travaux prescrits par les lois et règlements,

2° des travaux décidés par l'assemblée générale des copropriétaires au titre du I du présent article.

Ce fonds de travaux est alimenté par une cotisation annuelle obligatoire versée par les copropriétaires selon les mêmes modalités que celles décidées par l'assemblée générale pour le versement des provisions du budget prévisionnel.

Selon l'article 19-2 de la même loi, dans sa version applicable au présent litige, à défaut du versement à sa date d'exigibilité d'une provision due au titre de l'article 14-1 ou du I de l'article 14-2, et après mise en demeure restée infructueuse passé un délai de trente jours, les autres provisions non encore échues en application des mêmes articles 14-1 ou 14-2 ainsi que les sommes restant dues appelées au titre des exercices précédents après approbation des comptes deviennent immédiatement exigibles.

Le président du tribunal judiciaire statuant selon la procédure accélérée au fond, après avoir constaté, selon le cas, l'approbation par l'assemblée générale des copropriétaires du budget prévisionnel, des travaux ou des comptes annuels, ainsi que la défaillance du copropriétaire, condamne ce dernier au paiement des provisions ou sommes exigibles.

Le présent article est applicable aux cotisations du fonds de travaux mentionné à l'article 14-2.

L'article 35 du décret du 17 mars 1967 prévoit que le syndic peut exiger le versement :

- de l'avance constituant la réserve prévue au règlement de copropriété, laquelle ne peut excéder 1/6 du montant du budget prévisionnel,

- des provisions du budget prévisionnel prévues aux deuxième et troisième alinéas de l'article 14-1 de la loi du 10 juillet 1965,

- des provisions pour les dépenses non comprises dans le budget prévisionnel prévues au I de l'article 14-2 de la loi du 10 juillet 1965 et énoncées à l'article 44 du présent décret,

- des avances correspondant à l'échéancier prévu dans le plan pluriannuel de travaux adopté par l'assemblée générale,

- des cotisations au fonds de travaux prévues au II de l'article 14-2 de la loi du 10 juillet 1965,

7° des avances décidées en assemblée générale et destinées à pallier un manque temporaire de trésorerie du syndicat des copropriétaires.

L'article 36 du même décret indique enfin que, sauf stipulation contraire du règlement de copropriété, les sommes dues au titre de l'article 35 portent intérêt au profit du syndicat. Cet intérêt, fixé au taux légal en matière civile, est dû à compter de la mise en demeure adressée par le syndic au copropriétaire défaillant.

En l'espèce, contrairement à ce que M. [Y] avance, le syndicat des copropriétaires justifie sa créance au moyen des appels de fonds et/ou de provisions adressés à ce dernier et à son ex-épouse entre le 25 juin 2013 et le 31 mars 2022, des décomptes de charges du 1er juillet 2013 au 30 juin 2021, des procès-verbaux des assemblées générales des copropriétaires de 2014 à 2020 et de 2022 afférents aux charges en cause dues à partir de juillet 2013, qu'il verse aux débats.

L'article 10-1 lui permet de réclamer les frais nécessaires exposés pour recouvrer sa créance et, les articles 14-1 et 14-2 II, des provisions notamment un fonds de travaux.

Dans le cadre de la saisine de la commission de surendettement des particuliers qu'il a initiée le 27 janvier 2022, M. [Y] a déclaré être redevable d'une dette de charges envers le syndicat des copropriétaires de 12 656,39 euros. Destinataire de l'état du passif dressé par la commission de surendettement le 15 février 2022, il ne l'a pas contesté et n'a pas fait usage de sa faculté prévue par les articles L.723-3 et R.723-5 du code de la consommation de solliciter la vérification de la validité des créances et de leur montant. Si la procédure de surendettement et la présente instance sont distinctes, l'appréciation de la qualité de débiteur de M. [Y] est faite au vu de toutes les pièces versées aux débats. Son absence de contestation de l'existence et du montant de sa dette envers le syndicat des copropriétaires qu'il a lui-même déclarée, tant devant la commission de surendettement que devant le juge des contentieux de la protection, est en totale contradiction avec sa position actuelle tendant au rejet de la créance de l'intimé.

Ce changement dans sa stratégie de défense n'est justifié par aucun élément nouveau. Lors de la déclaration de ses dettes à la commission de surendettement, il disposait de tous les éléments et pièces pour en apprécier l'existence et le montant. Il a ainsi reconnu le caractère certain, exigible, et liquide de sa dette contre laquelle les moyens qu'il avance aujourd'hui ne sont pas nouveaux et utiles. Enfin, il n'apporte pas la preuve d'une faute du syndicat des copropriétaires ou du syndic agissant en ses lieu et place.

M. [Y] sera donc condamné solidairement avec son ex-épouse à payer au syndicat des copropriétaires la somme actualisée de 13 276,49 euros arrêtée au 21 octobre 2022 correspondant aux appels de fonds et de provisions impayés du 1er juillet 2013 au 31 décembre 2022, aux appels de cotisations pour le fonds travaux, et aux frais nécessaires exposés pour le recouvrement de cette créance et après déduction des règlements partiels qu'il a opérés jusqu'au 21 octobre 2022.

La mise en demeure recommandée adressée le 16 juillet 2021 à M. [Y] et dont il a signé l'avis de réception le 18 juillet 2021 a été établie sur un papier à en-tête de la Sas Foncia Normandie par Mme [F] du service contentieux.

Or, comme il a été vu ci-dessus, la Sas Foncia Normandie a été investie de ses fonctions de syndic de la copropriété seulement à partir du 5 janvier 2022.

La mise en demeure adressée par une personne n'ayant pas la qualité de syndic n'a donc pas d'effet juridique. Les sommes sont devenues exigibles à compter de l'assignation de M. [Y] le 17 novembre 2021. Les intérêts au taux légal courront à compter de celle-ci.

La décision du premier juge sera infirmée uniquement en son montant et sur le point de départ des intérêts.

Sur la demande de dommages et intérêts

Selon l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

En l'espèce, s'il est exact que M. [Y] a effectué des règlements depuis le 1er juillet 2013, leur montant limité a participé à la décision de l'assemblée générale des copropriétaires votée le 5 janvier 2022 d'autoriser le syndicat des copropriétaires à procéder à un appel de fonds de 30 000 euros correspondant au montant créditeur de l'apurement des copropriétaires. Ce coût en a été nécessairement supporté par les autres copropriétaires, les manquements notamment de M. [Y] ne permettant pas au syndicat des copropriétaires de respecter l'exigence légale de disposer de sommes suffisantes sur son compte pour régler ses propres créanciers.

M. [Y] ne peut pas se décharger de sa faute même non intentionnelle sur son ex-épouse dont il ne démontre pas les agissements fautifs, ni sur les autres copropriétaires également défaillants dans leur obligation de paiement et contre lesquels a aussi été engagée une procédure judiciaire en recouvrement des charges de copropriété.

Il sera fait droit à la demande du syndicat des copropriétaires telle que libellée dans le dispositif de ses écritures et qui tend à condamner M. [Y] seul au règlement d'une somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts. Le tribunal ayant statué en ce sens sera confirmé.

Sur les demandes accessoires

Les dispositions de première instance sur les dépens et les frais de procédure seront confirmées.

Partie perdante, M. [Y] sera condamné aux dépens d'appel avec bénéfice de distraction au profit de l'avocat qui en a fait la demande.

Il n'est pas inéquitable de le condamner également à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 2 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens exposés pour cette procédure.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt par défaut, mis à disposition au greffe,

Confirme le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a condamné M. [H] [Y], solidairement avec Mme [V] [C], à régler au syndicat des copropriétaires de la résidence César Franck représenté par son syndic Foncia Normandie, la somme de 14 026,19 euros correspondant aux charges de copropriété et aux frais de recouvrement dus au 18 février 2022, et ce, avec intérêts au taux légal à compter du 16 juillet 2021, date de la mise en demeure de payer adressée à M. [Y] sur la somme de 12 656,39 euros, et, pour le surplus à compter de la présente assignation,

Statuant à nouveau sur ce chef infirmé et y ajoutant,

Condamne M. [H] [Y], ce solidairement avec Mme [V] [C], à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence César Franck la somme de

13 276,49 euros arrêtée au 21 octobre 2022 avec intérêts au taux légal à compter du 17 novembre 2021,

Condamne M. [H] [Y] à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence César Franck la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel,

Déboute les parties du surplus des demandes,

Condamne M. [H] [Y] aux dépens d'appel, avec bénéfice de distraction au profit de Me Mosquet, avocat, en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Le greffier, La présidente de chambre,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Formation : 1ère ch. civile
Numéro d'arrêt : 22/02129
Date de la décision : 10/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-10;22.02129 ?
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