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19/04/2023 | FRANCE | N°22/00066

France | France, Cour d'appel de Rouen, Chambre premier président, 19 avril 2023, 22/00066


N° RG 22/00066 - N° Portalis DBV2-V-B7G-JHPT





COUR D'APPEL DE ROUEN



JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT



ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ



DU 19 AVRIL 2023











DÉCISION CONCERNÉE :



Décision rendue par le conseil de prud'hommes - formation paritaire d'Evreux en date du 27 septembre 2022







DEMANDERESSE :



Sarl ESPACE DAVIS

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Adresse 4]



représentée par Me David VERDIER de la SELA

RL VERDIER MOUCHABAC, avocat au barreau de l'Eure





DÉFENDEUR :



Monsieur [W] [U]

[Adresse 1]

[Adresse 1]



représenté par Me Delphine HUAN-PINCON, avocat au barreau de l'Eure





DÉBATS  :



En salle des référés, à ...

N° RG 22/00066 - N° Portalis DBV2-V-B7G-JHPT

COUR D'APPEL DE ROUEN

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

DU 19 AVRIL 2023

DÉCISION CONCERNÉE :

Décision rendue par le conseil de prud'hommes - formation paritaire d'Evreux en date du 27 septembre 2022

DEMANDERESSE :

Sarl ESPACE DAVIS

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

représentée par Me David VERDIER de la SELARL VERDIER MOUCHABAC, avocat au barreau de l'Eure

DÉFENDEUR :

Monsieur [W] [U]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représenté par Me Delphine HUAN-PINCON, avocat au barreau de l'Eure

DÉBATS  :

En salle des référés, à l'audience publique du 22 mars 2023 devant Mme Edwige WITTRANT, présidente de chambre à la cour d'appel de Rouen, spécialement désignée par ordonnance de la première présidente de ladite cour pour la suppléer dans les fonctions qui lui sont attribuées, l'affaire a été mise en délibéré au 12 avril 2023 prorogé au 19 avril 2023.

Assistée de Mme Catherine CHEVALIER, greffier,

DÉCISION :

Contradictoire

Prononcée publiquement le 19 avril 2023, par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

signée par Mme WITTRANT, présidente et par Mme CHEVALIER, greffier présent lors de la mise à disposition.

*****

Par jugement du 27 septembre 2022, le conseil de prud'hommes d'Evreux a, dans l'affaire opposant M. [W] [U] à son employeur, la Sarl Espace Davis :

- dit que le licenciement de M. [W] [U] était nul,

- annulé l'avertissement notifié le 20 octobre 2020,

- condamné la Sarl Espace Davis à payer à M. [W] [U] les sommes suivantes :

. 31 384,97 euros à titre de rappel de rémunération valable pour les années 2019 et 2020,

. 3 138,49 euros à titre de congés payés sur rémunération variable,

. 6 417,43 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice lié à l'avertissement injustifié,

. 8 724,31 euros à titre de rappel de salaire sur mise à pied,

. 872,43 euros au titre des congés payés sur rappel de salaire,

. 19 252,29 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

. 1 925,22 euros au titre des congés payés sur préavis,

. 20 143,59 euros à titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

. 38 504,58 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,

. 1 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné à la Sarl Espace Davis de faire parvenir à M. [U] une attestation destinée à Pôle emploi, un certificat de travail et un bulletin de salaire conformes à la décision, sous astreinte de 30 euros par jour de retard et par document à compter du 21ème jour suivant la notification du jugement,

- s'est réservé le droit de liquider l'astreinte et autoriser M. [U] à saisir le conseil en tant que de besoin aux fins de liquidation de l'astreinte,

- débouté M. [U] du surplus de ses demandes,

- débouté la Sarl Espace Davis de ses demandes reconventionnelles,

- dit que les condamnations prononcées par la décision en ce qu'elles n'ont pas le caractère de dommages et intérêts, portent intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil et à compter du prononcé du jugement pour les condamnations à des dommages et intérêts,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement,

- dit qu'à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par la décision et qu'en cas de d'exécution par voie extrajudiciaire, les sommes retenues par l'huissier instrumentaire devront être supportées par la Sarl Espace Davis en sus de l'indemnité mise à sa charge sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la Sarl Espace Davis aux dépens.

Par déclaration reçue au greffe le 20 octobre 2022, la Sarl Espace Davis a formé appel.

Par assignation en référé délivrée le 28 novembre 2022, puis par dernières conclusions notifiées le 8 février 2023, elle demande à la juridiction, au visa des articles 517-1 et 521 du code de procédure civile, de :

- ordonner la consignation de la condamnation prononcée ci-dessus assortie de l'exécution provisoire soit la somme de 73 506,43 euros auprès de la Carpa,

- condamner M. [U] à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle rappelle qu'elle exerce l'activité de concessionnaire automobile faisant partie du groupe Met ; que M. [U] a été embauché le 1er avril 2009 en qualité de vendeur de véhicules d'occasion ; qu'à compter d'août 2013, M. [U] a assuré la direction de la société Davis 78 située à [Localité 3] puis dès avril 2016, il a également assuré la direction de la société Espace Davis située à [Localité 2] ; qu'il y occupait les fonctions de directeur-cadre dirigeant niveau IV et gérait ainsi les deux établissements pour un salaire mensuel moyen de 6 417,42 euros brut sur douze mois.

Elle précise qu'il a été convoqué, par lettre du 15 septembre 2020 remise en main propre, à l'entretien préalable à une sanction qui s'est tenu le 23 septembre 2020 ; que l'avertissement prononcé a été notifié par lettre du 20 octobre 2020. M. [U] a ensuite été convoqué par lettre recommandée avec avis de réception du 28 octobre 2020 pour un entretien de sanction pouvant être le licenciement fixé au 10 novembre 2020 puis reporté au 21 novembre 2020. Le licenciement pour faute grave a été notifié par lettre recommandée avec avis de réception du 10 décembre 2020.

M. [U] a saisi le conseil de prud'hommes d'une demande en annulation du licenciement et indemnisation.

Elle invoque au titre des moyens sérieux d'annulation ou de réformation les points suivants :

- le conseil de prud'hommes a retenu une carence probatoire de sa part en considérant que le seul rapport d'enquête portant sur la direction assurée par M. [U] auprès des salariés n'avait pas de force probante sans tenir compte de l'ensemble des pièces produites, notamment les témoignages versés aux débats qui corroborent le rapport critiqué ;

- l'employeur est tenu légalement de prendre toutes les mesures nécessaires pour prévenir des faits de harcèlement moral et sexuel et pour mettre fin à de tels agissements, sous peine d'engager sa responsabilité et d'avoir à supporter les conséquences dommageables d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse dans l'hypothèse où le salarié qui les a subis prend acte de la rupture de son contrat de travail pour ce motif ou obtient une décision de résiliation du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur ;

- il n'existe aucune obligation d'entendre tous les salariés ;

- elle conteste l'octroi indemnitaire d'une somme de 31 384,97 euros au titre de rappel de primes d'objectifs sur les années 2019 et 2020 dans la mesure où en réalité M. [U] ne peut y prétendre compte tenu des résultats de la société et au regard de la méthode de calcul erronée retenue par la juridiction ;

- l'avertissement délivré le 20 octobre 2020 n'était pas nul et infondé comme l'expose la juridiction : il était notamment reproché à M. [U] d'avoir bénéficié de deux véhicules de fonction, l'un étant mis à la disposition de son épouse, en l'absence de tout lien avec la société, fait constitutif d'une faute, avec en outre une déclaration fiscale et comptable de l'avantage en nature fausse de 225 euros alors qu'il utilisait un véhicule d'une valeur de 51 767 euros soit plus du double de la valeur retenue pour le calcul de l'avantage ; le conseil a retenu de façon péremptoire, sans fondement, la connaissance qu'avait la société de la mise à disposition de la voiture au profit de l'épouse.

Sur les conséquences manifestement excessives de l'exécution provisoire de la décision critiquée, elle soutient que M. [U] ne présente pas de garantie en l'absence d'activité professionnelle stable depuis son licenciement et que le paiement des condamnations prononcées soit un total en principal de 131 863,31 euros dont

84 841,30 euros à titre de salaire et 44 922,01 euros à titre de dommages et intérêts mettrait en péril le sort de la société dont les résultats annuels sont négatifs trois années de suite ; que M. [U] ne peut contester sa demande en se référant à l'évolution du groupe Met alors qu'il s'agit d'évaluer strictement la situation individuelle de la société débitrice.

Par dernières conclusions notifiées le 10 janvier 2023, M. [W] [U] demande à la juridiction de :

- débouter la Sarl Espace Davis de ses demandes,

- condamner la Sarl Espace Davis à lui payer la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de l'instance, y compris les frais éventuels d'exécution forcée.

Il indique que la Sarl Espace Davis a payé la somme de 50 021,40 euros correspondant à l'exécution provisoire de droit dans la limite fixée à 9 mois de salaire en application de l'article R. 1454,28 du code du travail et qu'ainsi, la demande porte sur le solde de la créance.

Il fait valoir que la demande n'est pas fondée en droit ; que le solde de la créance s'élève à la somme de 74 106,44 euros ; que la demande ne peut porter que sur la rupture du contrat de travail ; qu'elle n'est dès lors pas recevable sur l'ensemble des sommes restant dues en exécution du jugement critiqué mais seulement sur les postes relevant du licenciement, sans que la partie de la condamnation exécutée ne puisse être remise en cause.

Sur les moyens sérieux de réformation, il discute des termes du licenciement, de la rémunération variable remise en cause par l'employeur et des conditions dans lesquelles l'avertissement a été prononcé pour soutenir la pertinence de ses prétentions.

Quant aux conséquences manifestement excessives de l'exécution provisoire, il soutient que la Sarl Espace Davis ne justifie pas de ses difficultés alors qu'elle appartient à un groupe d'entreprises, Met, dont l'exercice 2021 était bénéficiaire à hauteur de 1 217 928 euros. Il soutient qu'il présente des garanties de remboursement dans l'hypothèse d'une infirmation du jugement puisqu'il a créé une société de négoce de véhicules le 15 février 2022 qui a réalisé un chiffre d'affaires de

436 500 euros. Il percevra durant plus d'un an un complément de revenus au titre des allocations chômage. Il présente des garanties justifiant le rejet de la demande de consignation.

Il est renvoyé aux écritures des parties pour plus ample exposé des faits, prétentions et moyens en application de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Selon l'article 517 du code de procédure civile relatif à l'exécution provisoire facultative, l'exécution provisoire peut être subordonnée à la constitution d'une garantie, réelle ou personnelle, suffisante pour répondre de toutes restitutions ou réparations.

Selon l'article 518 du même code, la nature, l'étendue et les modalités de la garantie prévue aux articles 514-5 et 517 sont précisées par la décision qui en prescrit la constitution.

La constitution d'une garantie, notamment par la consignation des fonds devant être perçus en exécution d'une décision, suppose l'existence d'un risque quant à leur restitution dans l'hypothèse d'une infirmation de cette même décision.

En l'espèce, M. [U] justifie des éléments suivants :

- le 15 février 2022, il a créé une société qui a réalisé au 31 octobre 2022 un chiffre d'affaires de 436 521 euros HT soit un chiffre moyen de 48 502 euros sur 9 mois ;

- il perçoit une allocation d'aide au retour à l'emploi de 2 205,96 euros pérenne en 2023 ;

- les revenus du foyer fiscal s'élevait à la somme de 67 944 euros au 31 décembre 2021 soit 5 662 euros par mois pour le couple et un enfant ; son épouse est fonctionnaire de catégorie B ;

- il est propriétaire de son immeuble d'habitation.

Compte tenu d'une situation économique favorable susceptible de garantir l'exécution d'une décision de la cour d'appel différente de celle des premiers juges, la consignation n'est pas nécessaire.

S'agissant de la situation de la Sarl Espace Davis, cette dernière ne soutient pas être dans l'impossibilité de payer les sommes dues mais être fragilisée dans l'hypothèse où la créance qui serait constituée par une décision contraire à celle de la première instance ne serait pas acquittée.

En l'absence de pertinence de la demande de consignation, la demande est rejetée.

La Sarl Espace Davis succombe à l'instance et en supportera les dépens. L'équité ne commande pas l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

statuant par ordonnance contradictoire, mise à disposition au greffe,

Rejette la demande de consignation des sommes dues par elle formée par la Sarl Espace Davis,

Déboute M. [W] [U] de sa demande en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la Sarl Espace Davis aux dépens.

Le greffier, La présidente de chambre,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Formation : Chambre premier président
Numéro d'arrêt : 22/00066
Date de la décision : 19/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-19;22.00066 ?
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