N° RG 22/00420 - N° Portalis DBV2-V-B7G-I74D
COUR D'APPEL DE ROUEN
CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE
ARRET DU 23 MARS 2023
DÉCISION DÉFÉRÉE :
21/01848
CHAMBRE CIVILE - TRIBUNAL JUDICIAIRE D'EVREUX du 5 janvier 2022
APPELANTE :
Association CONGES INTEMPERIES BTP - CAISSE DU CENTRE OUEST
[Adresse 3]
[Localité 4]
représentée par Me Pauline COSSE de la SCP BARON COSSE ANDRE, avocat au barreau de L'EURE
INTIME :
Monsieur [B] [R]
[Adresse 1]
[Localité 2]
représenté et assisté de Me Florence DROUIN, avocat au barreau de ROUEN
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 11 janvier 2023 sans opposition des avocats devant M. URBANO, Conseiller, rapporteur,
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée de :
Mme FOUCHER-GROS, Présidente
M. URBANO, Conseiller
Mme MENARD-GOGIBU, Conseillère
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme DEVELET, Greffière
DEBATS :
A l'audience publique du 11 janvier 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 23 mars 2023
ARRET :
CONTRADICTOIRE
Rendu publiquement le 23 mars 2023, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
signé par Mme Foucher-Gros, Présidente et par Mme Riffault, Greffière lors de la mise à disposition
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* *
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
M. [R], entrepreneur individuel, exerce une activité d'électricien et est, à ce titre, affilié à la Caisse des congés payés.
Affirmant que M. [R] était défaillant depuis 2019 dans le versement de ses cotisations, l'association Congés Intempéries BTP - Caisse du Centre Ouest l'a fait assigner en paiement de la somme de 80 053,19 euros devant le tribunal judiciaire d'Evreux par acte d'huissier du 28 juin 2021.
Par jugement réputé contradictoire du 5 janvier 2022, le tribunal judiciaire d'Evreux l'a déboutée de toutes ses demandes et condamnée aux dépens en rappelant que l'exécution provisoire était de droit.
Par déclaration du 4 février 2022, l'association Congés Intempéries BTP - Caisse du Centre a interjeté appel de cette décision.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 3 janvier 2023.
EXPOSE DES PRETENTIONS ET DES MOYENS
Vu les conclusions du 6 octobre 2022, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens et arguments de l'association Congés Intempéries BTP - Caisse du Centre qui demande à la cour de:
- dire recevable l'appel régularisé à l'encontre du jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Evreux le 5 janvier 2022.
Infirmer le jugement déféré.
Statuant à nouveau :
- condamner Monsieur [B] [R] au paiement de la somme de 110 145.67 euros en principal et majorations dues à la date du 21 septembre 2022.
- le condamner au paiement de la somme de 5 000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile.
- le condamner aux entiers dépens.
L'association Congés Intempéries BTP - Caisse du Centre soutient que :
- l'affiliation de M. [R] à la caisse est obligatoire eu égard à l'activité qu'il exerce et aux dispositions applicables du code du travail ;
- M. [R] ne règle plus les cotisations depuis l'année 2019 de sorte qu'il ne peut prétendre que la pandémie a été la cause de sa défaillance ;
- la conséquence de sa défaillance est l'absence de paiement des congés payés à ses salariés par la Caisse alors qu'il est interdit à l'employeur de les payer directement ;
- la défaillance persistante de M. [R] y compris lorsqu'il a sollicité des délais qu'il n'a pas respectés doit entraîner le rejet de sa demande de délais.
Vu les conclusions du 20 juillet 2022, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens et arguments de M. [R] qui demande à la cour de:
Vu l'article 1343-5 du code civil,
- constater que Monsieur [R] ne conteste pas la créance de la Caisse,
- accorder à Monsieur [R] les plus larges délais de paiement,
En conséquence,
- juger que Monsieur [R] procédera au règlement de la créance de la Caisse par versements mensuels de 1500 €.
- débouter la Caisse de sa demande d'article 700 du CPC,
- dire que chaque partie conservera la charge de ses dépens.
M. [R] soutient que :
- la pandémie a fait diminuer de moitié son chiffre d'affaires entre 2019 et 2020 ;
- il a tenté de régler par mensualités de 4000 euros qui étaient trop lourdes pour sa trésorerie et la Caisse a refusé toute autre proposition de paiement ;
- il a tenté de régler par chèque ce qui lui a été également refusé ;
- alors que la caisse lui avait accordé un délai de paiement, il a été assigné devant le tribunal judiciaire d'Evreux ;
- sa situation résultant de la crise sanitaire, il sollicite des délais ;
- c'est lui qui règle directement les congés payés de ses salariés puisque la Caisse ne les paye pas.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la créance de l'Association Congé Intempérie BTP :
M. [R] reconnaissant le principe de son affiliation obligatoire à l'association Congés Intempéries BTP - Caisse du Centre et sa dette à l'égard de celle-ci, le jugement entrepris sera infirmé en toutes ses dispositions et M. [R] sera condamné à payer à l'association Congés Intempéries BTP - Caisse du Centre la somme de 110 145,67 euros au titre de ses cotisations et majorations arrêtées au 21 septembre 2022 ainsi qu'il résulte du décompte versé aux débats par l'appelante.
Sur la demande de délai de paiement :
Aux termes de l'article 1343-5 du code civil : « Le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues'»
Les documents comptables versés aux débats relatifs à l'exercice arrêté au 30 juin 2020 font effectivement état d'une baisse très importante du chiffre d'affaires et d'une perte par rapport à l'exercice précédent qui était bénéficiaire.
Mais l'association Congés Intempéries BTP - Caisse du Centre produit des relevés de compte au nom de M. [R] dont il ressort que la Caisse a dû faire face à des impayés de cotisations dès le 20 mars 2017 par un rejet de 2970 euros puis que les impayés se sont accumulés au cours des années 2017 à 2019 incluses et se sont poursuivis au-delà. Elle verse aux débats un courrier de mise en demeure qu'elle a adressé le 20 mai 2019 à M. [R] pour la somme de
22 552,58 euros.
Si M. [R] affirme que la situation sanitaire de 2020 a « impacté gravement son activité » ou a eu « de graves répercussions » sur celle-ci, il ressort des pièces rapportées ci-dessus que sa défaillance est bien antérieure au mois de mars 2020 et que la défaillance de M. [R] a pris naissance au cours d'un exercice bénéficiaire.
Par ailleurs, l'offre de paiement de M. [R] de 1500 euros par mois, soit
36 000 euros en deux ans, ne lui permettra pas d'apurer sa dette dans le délai de deux ans de l'article 1343-5 du code civil. M. [R] n'indique pas comment il pourra régler le solde très important demeurant à l'issue de vingt quatre mois.
M. [R] étant défaillant depuis plus de trois ans désormais et ne produisant aucun document comptable pour l'exercice 2021 ni pour l'exercice 2022 justifiant de sa situation actuelle, sa demande de délais doit être rejetée.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant par arrêt contradictoire;
Infirme le jugement du tribunal judiciaire d'Evreux du 5 janvier 2022 en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau :
Condamne M. [R] à payer à l'association Congés Intempéries BTP - Caisse du Centre la somme de 110 145,67 euros au titre des cotisations arrêtées au 21 septembre 2022 ;
Y ajoutant :
Déboute M. [R] de sa demande de délais de paiement ;
Condamne M. [R] aux dépens de première instance et d'appel ;
Condamne M. [R] à payer à l'association Congés Intempéries BTP - Caisse du Centre la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile comprenant les frais irrépétibles de première instance et d'appel.
La greffière, La présidente,