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22/03/2023 | FRANCE | N°21/02957

France | France, Cour d'appel de Rouen, 1ère ch. civile, 22 mars 2023, 21/02957


N° RG 21/02957 - N° Portalis DBV2-V-B7F-I2WS







COUR D'APPEL DE ROUEN



1ERE CHAMBRE CIVILE



ARRET DU 22 MARS 2023









DÉCISION DÉFÉRÉE :



20/00321

Tribunal judiciaire de Rouen du 12 juillet 2021





APPELANTE :



Sccc LES FLORALINES

RCS de Rouen 753 797 059

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]



représentée et assistée par Me Franck LANGLOIS de la SCP BONIFACE DAKIN & ASSOCIES, avocat au barreau de Rouen









INTIMES :



Monsieur [M] [K]

né le 23 avril 1945 à [Localité 3]

[Adresse 1]

[Adresse 1]



représenté et assisté par Me Richard SEDILLOT, avocat au barreau de Rouen plaidant par Me LARROCHETTE





Madame [...

N° RG 21/02957 - N° Portalis DBV2-V-B7F-I2WS

COUR D'APPEL DE ROUEN

1ERE CHAMBRE CIVILE

ARRET DU 22 MARS 2023

DÉCISION DÉFÉRÉE :

20/00321

Tribunal judiciaire de Rouen du 12 juillet 2021

APPELANTE :

Sccc LES FLORALINES

RCS de Rouen 753 797 059

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée et assistée par Me Franck LANGLOIS de la SCP BONIFACE DAKIN & ASSOCIES, avocat au barreau de Rouen

INTIMES :

Monsieur [M] [K]

né le 23 avril 1945 à [Localité 3]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représenté et assisté par Me Richard SEDILLOT, avocat au barreau de Rouen plaidant par Me LARROCHETTE

Madame [I] [E] épouse [K]

née le 1er novembre 1946 à [Localité 4]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée et assistée par Me Richard SEDILLOT, avocat au barreau de Rouen plaidant par Me LARROCHETTE

COMPOSITION DE LA COUR  :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 16 janvier 2023 sans opposition des avocats devant Mme Edwige WITTRANT, présidente de chambre, rapporteur,

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée de :

Mme Edwige WITTRANT, présidente de chambre

M. Jean-François MELLET, conseiller

Mme Magali DEGUETTE, conseillère

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Catherine CHEVALIER

DEBATS :

A l'audience publique du 16 janvier 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 22 mars 2023.

ARRET :

REPUTE CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 22 mars 2023, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

signé par Mme WITTRANT, présidente de chambre et par Mme CHEVALIER, greffier présent lors de la mise à disposition.

*

* *

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Le 13 juin 2017, M. [M] [K] et Mme [I] [E], son épouse, ont fait l'acquisition auprès de la Sccc Les floralines d'un appartement et de trois places de stationnement en l'état futur d'achèvement dans un ensemble immobilier situé [Adresse 1] (76). La livraison est intervenue le 14 décembre 2018.

Ils ont exposé avoir constaté, peu après la prise de possession du bien, que l'accès à la place de parking lot n°68 était difficile en cas d'inoccupation de la place de n°60 située en face de la leur, impossible en présence d'un véhicule sur cet emplacement. Leur proposition de traitement amiable du litige, notamment par l'acquisition de la place n°60 n'ayant pas abouti, ils ont fait assigner la Sccc Les floralines en réparation de leur préjudice.

Par jugement contradictoire du 12 juillet 2021, le tribunal judiciaire de Rouen a :

- condamné la Sccc Les floralines à payer à M. [M] [K] et Mme [I] [E], son épouse, la somme de 7 000 euros en réparation de leur préjudice de jouissance,

- rejeté toute demande plus ample ou contraire,

- dit n'y avoir lieu d'écarter l'exécution provisoire,

- condamné la Sccc Les floralines à payer à M. [M] [K] et Mme [I] [E], son épouse, la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la Sccc Les floralines aux dépens.

Par déclaration reçue au greffe le 19 juillet 2021, la Sccc Les floralines a formé apple du jugement.

EXPOSE DES PRETENTIONS ET MOYENS

Par dernières conclusions notifiées le 13 janvier 2023, la Sccc Les floralines demande à la cour d'infirmer la décision entreprise, et statuant à nouveau de :

- débouter M. [M] [K] et Mme [I] [E], son épouse, de leurs demandes,

- condamner M. [M] [K] et Mme [I] [E], son épouse, à lui payer la somme de 1 500 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- condamner M. [M] [K] et Mme [I] [E], son épouse, à lui payer la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [M] [K] et Mme [I] [E], son épouse, aux dépens qui comprendront le coût des procès-verbaux de constat de Me [E] des 18 août 2021, 23 mars 2022 et 11 janvier 2023.

Elle rappelle que lors de la livraison du bien, le 14 décembre 2018, M. et Mme [K] n'ont émis aucune réserve concernant l'emplacement de parking parfaitement connu ; qu'à la suite de la correspondance adressée le 11 janvier 2019 par les acquéreurs, elle répondait le 1er mars 2019 : « le nouveau traçage (provisoire) effectué sur le site selon plan contractuel confirme la conformité de l'ensemble des places et voie de circulation y compris la place 04 de M. et Mme [K] qui fait 2,46 ml de large (pour 2,30 ml mini) par 5,00 ml de profond. La voirie d'accès fera également, après rectification des traçages selon plan 5 ml de large et sera donc en conformité. Le sujet des places de parking et voies d'accès n'a donc plus lieu d'être. » ; que les acquéreurs ne démontrent pas une impropriété à la destination en raison de l'exiguïté de l'accès à leur place de parking ; que différents constats d'huissier démontrent la parfaite accessibilité du lieu de stationnement n°60.

Elle souligne la conformité de la place livrée au plan produit dans l'acte de vente et la connaissance qu'avait les acquéreurs de sa localisation entre la rampe de descente au sous-sol et le mur de l'immeuble, la conformité aux normes applicables soit la norme NF P 91-120 d'avril 1996 prévoyant des emplacements de 5 m de longueur et de 2,30 m de largeur, l'existence des différents certificats de conformité démontrant la régularité de la place livrée.

Le préjudice allégué n'est pas démontré tant en son principe qu'en son montant.

Par dernières conclusions notifiées le 16 janvier 2023, M. [M] [K] et Mme [I] [E], son épouse, demandent à la cour, au visa des articles 1642-1, 1646-1, 1792 du code civil, de :

- débouter la Sccc Les floralines de ses demandes,

- confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré la Sccc Les floralines responsable des vices apparents invoqués,

le réformant,

- condamner la Sccc Les floralines à leur payer la somme de 10 000 euros en réparation de leur préjudice,

en tout état de cause,

- débouter la Sccc Les floralines de sa demande de condamnation pour procédure abusive,

- condamner la Sccc Les floralines à leur payer la somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Ils font valoir que les difficultés d'accès à l'emplacement extérieur n°68 ont fait l'objet d'une annotation dans le procès-verbal de livraison du 15 septembre 2019 et relèvent de la garantie de parfait achèvement ; que la Sccc Les floralines n'était pas déchargée de sa responsabilité au titre des vices apparents ; que la place n°60 faisait l'objet d'une interdiction de stationnement sauf aux visiteurs handicapés ; qu'ils ont formulé plusieurs propositions en vain ; qu'ils ne pouvaient pas en outre mesurer la difficulté d'accès sur plan sans éprouver les man'uvres imposées par le stationnement.

Ils indiquent qu'ils peuvent se prévaloir d'un vice apparent caractériser par un constat d'huissier dressé le 12 novembre 2019 ; que s'ils avaient eu connaissance des difficultés d'accès dénoncés, ils n'auraient pas acquis le bien ou en auraient fait une acquisition à un prix moindre ; que mêmes les constats produits par la Sccc Les floralines démontrent l'exiguïté des lieux et le faible espace permettant d'effectuer les man'uvres avec un véhicule ; que l'huissier qu'ils ont sollicité a constaté l'impossibilité de se garer en marche avant ou arrière sans empiéter sur la place n°60.

Ils contestent le respect des normes alléguées par la Sccc Les floralines puisque l'huissier de justice instrumentaire a mesuré que la largeur de la voie de desserte entre la place 4 et la place 60 située en face n'était que de 4,67 mètres ; que de la même manière, la largeur totale comprise entre le fond de la place 4 et celui de la place 60 soit la largeur de l'entier parking n'était que de 14,18 mètres et non de 15 mètres tel que prévus par la norme. Ils relèvent donc la mauvaise foi de l'appelante.

Ils demandent paiement d'une somme de 10 000 euros et de 7 000 euros comme retenu par le tribunal en ce que cette somme correspond à une valeur égale au prix de vente de la place n° 60. Ils versent aux débats une attestation d'une agence immobilière évaluant la place de stationnement extérieure sur la commune à la somme de 10 à 12 000 euros.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 16 janvier 2023.

MOTIFS

Sur l'existence d'un vice affectant la place de stationnement extérieure

Selon l'article 1642-1 du code civil, le vendeur d(un immeuble à construire ne peut être déchargé, ni avant la réception des travaux, ni avant l'expiration d'un délai d'un mois après la prise de possession par l'acquéreur, des vices de construction ou des défauts de conformité alors apparents. Il n'y aura pas lieu à résolution du contrat ou à diminution du prix si le vendeur s'oblige à réparer.

Le procès-verbal de livraison des lots de M. et Mme [K] du 14 décembre 2018 ne comporte aucune mention contemporaine relative à la place de stationnement, une observation étant juste apposée unilatéralement par l'acquéreur le 15 septembre 2019.

Toutefois, dans le délai d'un mois suivant la livraison soit le 11 janvier 2019, M. et Mme [K] ont notifié l'impossibilité d'accéder à l'emplacement dès lors qu'un véhicule occupe celui qui est réservé aux personnes à mobilité réduite. La demande est en ce sens recevable sur le fondement invoqué.

Sur l'impossibilité d'accéder à la place de stationnement

Sur les faits, le tribunal a retenu les termes du constat de l'huissier de justice, Me [Y] du 12 novembre 2019 dressé dans l'intérêt de M. et Mme [K] : « Cet emplacement est placé directement à gauche de la descente au sous-sol de la résidence accueillant le parking souterrain. A ce titre, je constate qu'il est impossible de garer un véhicule sur cet emplacement en marche avant au regard de la configuration et de son étroitesse, par rapport au muret de la descente de sous-sol qui le borde côté droit' Après avoir positionné son véhicule dans le sens de circulation d'arrivée, il constate d'une part, qu'il ne peut se garer en marche-avant sur son emplacement et d'autre part, qu'il est contraint, pour s'y garer en marche-arrière, d'empiéter en marche-avant sur l'emplacement n°60 situé en face ».

Toutefois, la Sccc Les floralines versent aux débats deux constats rédigés par un huissier de justice les 18 août 2021 et 23 mars 2022 démontrant le contraire : qu'il s'agisse d'un petit véhicule type Renault Zoé ou de type Mégane, le conducteur de chacune des voitures a pu, devant l'auxiliaire de justice se stationner en marche avant ou en marche arrière en demeurant sur l'allée centrale commune. Le second constat a été dressé alors que la place n°60 située en face de l'emplacement n°68 était occupée afin de démontrer l'accessibilité au lot de M. et Mme [K].

La configuration des lieux, particulièrement sa proximité avec l'accès au parking sousterrain, impose des man'uvres mais le stationnement est permis. Le plan soumis à M. et Mme [K] lors de l'achat du lot positionne clairement la place en fond de propriété et le long de la rampe d'accès au souterrain, en laissant présager l'obligation de ménager le stationnement du véhicule dans des conditions plus délicates que lors d'un stationnement droit ou en épi.

L'existence d'un vice, celui de l'impossibilité d'accéder à la place de stationnement vendue, n'est pas démontrée.

Sur les normes applicables

M. et Mme [K] reprochent en outre un défaut de conformité aux normes dont se prévaut l'appelante, précisément la norme AFNOR NF P 91-120 établie en 1996 relative aux dimensions minimales des emplacements et voies.

Dans l'hypothèse d'un angle de rangement par rapport à l'axe de circulation de 90°, ce texte définit les normes comme suit :

- Largeur de la voie de circulation de 5 mètres

- Longueur de l'emplacement de 5 mètres,

- Largeur de l'emplacement 2,30 mètres avec une majoration de

20 cm s'il existe un obstacle dans des conditions déterminées d'un côté, de 30 cm s'il existe également un obstacle précisément défini sur les deux côtés de la place de stationnement.

Suivant constat d'huissier de justice du 11 janvier 2023 et photographies à l'appui, la Sccc Les floralines démontrent que la longueur du lot de M. et Mme [K] est de 5 mètres et la largeur de 2,50 mètres à l'entrée du stationnement (2,60 mètres en fond de place) soit au visa de la norme 2,30 mètres et 20 cm pour tenir compte de la présence du mur le long de la rampe d'accès au sous-sol de l'immeuble.

Si le côté gauche de la place est délimitée par une bordure, le mur séparatif de la propriété voisine se situe visuellement à au moins 20 cm de l'emplacement.

La voie d'accès à l'emplacement est également conforme à la norme à la lecture de ce constat puisqu'elle présente une largeur de 5,02 mètres. La difficulté provient d'une largeur moindre de l'allée en pavés de ciment et dès lors de la perception d'un accès réduit mais l'auxiliaire de justice a pris la mesure dans les conditions explicitées en page 7 : « La première mesure part de l'extrémité du dernier marquage au sol d'emplacement de stationnement visible avant d'atteindre l'emplacement A04(68), objet du conflit et l'emplacement (60) qui lui fait face, identifié par un logo handicapé au plan ci-dessus. Ce dernier marquage au sol matérialise la séparation entre l'emplacement A 17 et l'emplacement (60). De l'extrémité de ce marquage au sol jusqu'au bord externe de la voie pavée et plus précisément à cet endroit du bord extrême du caniveau qui précède la descente vers le sous-sol de l'immeuble, je mesure 5,02 mètres. ».  

Au pied de la rampe d'accès au sous-sol, à l'angle formé avec le caniveau, la largeur de l'allée s'élève à 5 mètres.

Le constat dressé par huissier de justice le 15 novembre 2022 pour M. et Mme [K] porte la mention d'une largeur de la voie d'accès de 4,67 mètres mais la mesure se limite à l'allée en pavés de ciment sans tenir compte de la matérialisation des places de stationnement de part et d'autre.

Le professionnel a mesuré non pas la longueur de l'emplacement appartenant à

M. et Mme [K] mais la longueur totale des places en vis-à-vis, allée comprise soit 14,18 mètres. Cependant, le débat ne porte pas sur la conformité de la place n°60 que cependant, les intimés auraient souhaité acquérir, mais de l'emplacement n°68.

Les éléments contraires à l'appréciation retenue par le premier juge quant à l'existence d'un vice affectant l'emplacement vendu conduisent à l'infirmation de la décision et au débouté des prétentions indemnitaires de M. et Mme [K].

Sur les dommages et intérêts pour procédure abusive

Selon l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

La Sccc Les floralines ne démontre ni la faute, ni le préjudice qu'aurait provoqué l'action de M. et Mme [K], ce d'autant plus que seuls les éléments produits de façon plus complète par ses soins en cause d'appel ont justifié l'infirmation du jugement entrepris. La demande est rejetée.

Sur les frais de procédure

La décision étant infirmée, M. et Mme [K] succombent à l'instance et supporteront solidairement les dépens de première instance et d'appel.

Les procès-verbaux dressés n'entrent pas dans les dépens mais dans les frais irrépétibles relevant de l'article 700 du code de procédure civile.

Toutefois, l'équité ne commande pas l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en l'espèce.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions,

Et statuant à nouveau,

Déboute M. [M] [K] et Mme [I] [E], son épouse de leurs demandes indemnitaires,

Déboute la Sccc Les floralines de ses demandes indemnitaires,

Condamne solidairement aux dépens de première instance et d'appel M. [M] [K] et Mme [I] [E], son épouse.

Le greffier, La présidente de chambre,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Formation : 1ère ch. civile
Numéro d'arrêt : 21/02957
Date de la décision : 22/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-22;21.02957 ?
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