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23/02/2023 | FRANCE | N°20/03630

France | France, Cour d'appel de Rouen, Chambre sociale, 23 février 2023, 20/03630


N° RG 20/03630 - N° Portalis DBV2-V-B7E-ITEO





COUR D'APPEL DE ROUEN



CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE

SECURITE SOCIALE



ARRET DU 23 FEVRIER 2023











DÉCISION DÉFÉRÉE :





Jugement du CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE ROUEN du 22 Octobre 2020





APPELANTE :





Société MONDIAL PROTECTION FRANCE venant aux droits de la SAS HOLDING MONDIAL PROTECTION

[Adresse 1]

[Localité 4]



représentée par Me Luc MASSON,

avocat au barreau de ROUEN substitué par Me Caroline PAILLOT, avocat au barreau de ROUEN









INTIME :





Monsieur [L] [B]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 3]



représenté par Me François GARRAUD de la SCP GAR...

N° RG 20/03630 - N° Portalis DBV2-V-B7E-ITEO

COUR D'APPEL DE ROUEN

CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE

SECURITE SOCIALE

ARRET DU 23 FEVRIER 2023

DÉCISION DÉFÉRÉE :

Jugement du CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE ROUEN du 22 Octobre 2020

APPELANTE :

Société MONDIAL PROTECTION FRANCE venant aux droits de la SAS HOLDING MONDIAL PROTECTION

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Luc MASSON, avocat au barreau de ROUEN substitué par Me Caroline PAILLOT, avocat au barreau de ROUEN

INTIME :

Monsieur [L] [B]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 3]

représenté par Me François GARRAUD de la SCP GARRAUD OGEL LARIBI HAUSSETETE, avocat au barreau de DIEPPE

COMPOSITION DE LA COUR  :

En application des dispositions de l'article 805 du Code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 04 Janvier 2023 sans opposition des parties devant Madame BACHELET, Conseillère, magistrat chargé du rapport.

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente

Madame BACHELET, Conseillère

Madame BERGERE, Conseillère

GREFFIER LORS DES DEBATS :

M. GUYOT, Greffier

DEBATS :

A l'audience publique du 04 Janvier 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 23 Février 2023

ARRET :

CONTRADICTOIRE

Prononcé le 23 Février 2023, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

signé par Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente et par Mme WERNER, Greffière.

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [L] [B] a été engagé par la société Mondial protection en qualité d'agent de sécurité par contrat de travail à durée indéterminée intermittent le 12 août 2015.

Les relations contractuelles des parties étaient soumises à la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité.

M. [B] a pris acte de la rupture de son contrat de travail le16 janvier 2018 et, par requête du 24 janvier 2018, il a saisi le conseil de prud'hommes de Rouen en contestation de la rupture, ainsi qu'en paiement de rappels de salaire et indemnités.

Par jugement du 22 octobre 2020, le conseil de prud'hommes a :

- condamné la société Mondial protection France à verser à M. [B] les sommes suivantes :

rappel de salaire et congés payés y afférents : 42 928,68 euros,

rappel de repos compensateurs de nuit : 38,12 euros,

indemnité de panier : 82,72 euros,

indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile : 1 000 euros,

- débouté M. [B] de sa demande de requalification de la prise d'acte en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que du surplus de ses demandes,

- condamné la société Mondial protection à remettre à M. [B] les bulletins de salaire qui n'ont pas été établis, une attestation Pôle emploi et un certificat de travail, et ce, sous astreinte de 20 euros par jour de retard et par document à compter de trois mois à dater de la notification du jugement, le conseil se réservant le droit de liquider l'astreinte,

- débouté la société Mondial protection de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile et l'a condamnée aux entiers dépens et frais d'exécution.

La société Mondial Protection France a interjeté appel de cette décision le 10 novembre 2020.

Par conclusions remises le 7 juillet 2021, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé de ses moyens, la société Mondial protection France demande à la cour de :

- infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à verser à M. [B] 42 928,68 euros à titre de rappel de salaire et congés payés y afférents, outre 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile mais aussi en ce qu'il l'a déboutée de sa demande d'indemnité au titre de l'article 700 en première instance et lui a ordonné, sous astreinte, de remettre à M. [B] les bulletins de salaire qui n'ont pas été établis, une attestation Pôle emploi et un certificat de travail,

- statuant à nouveau,

- à titre principal, dire que la prise d'acte de M. [B] en date du 18 janvier 2018 doit produire les effets d'une démission et débouter M. [B] de ses demandes,

- à titre subsidiaire, si la cour faisait droit au principe d'un complément de salaire, pour 2015, 2017 et 2018, le débouter et, pour 2016, limiter le complément de salaire à 184 heures,

- lui donner acte de ce qu'elle offre de verser à M. [B] la somme de 38,12 euros au titre d'indemnités de repos compensateur nuit et 82,72 euros à titre de rappel de paniers,

- condamner M. [B] à lui verser la somme de 1 800 euros au titre des frais irrépétibles exposés en première instance, et celle de 2 500 euros pour ceux exposés en cause d'appel, ainsi qu'aux dépens.

Par conclusions remises le 14 avril 2021, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé de ses moyens, M. [B] demande à la cour de :

- confirmer le jugement sauf en ce qu'il l'a débouté de sa demande de requalification de la prise d'acte en licenciement sans cause réelle et sérieuse et de ses demandes de condamnation au titre de dommages et intérêts pour rupture abusive, indemnité compensatrice de préavis et congés payés y afférents, indemnité de licenciement, dommages et intérêts pour travail dissimulé et rappel de congés payés,

- statuant à nouveau, requalifier la prise d'acte en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamner la société Mondial protection France à lui payer les sommes suivantes :

dommages et intérêts pour rupture abusive : 3 045,12 euros,

indemnité compensatrice de préavis et congés payés y afférents : 2 233,09 euros,

indemnité de licenciement : 616,07 euros,

dommages et intérêts pour travail dissimulé : 6 090,24 euros,

rappel de congés payés : 1 372,26 euros,

- y ajoutant, débouter la société Mondial protection France de l'intégralité de ses demandes et la condamner à lui verser la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 15 décembre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, il convient de relever qu'aucune des parties n'a interjeté appel de la décision en ce qui concerne les sommes attribuées au titre du repos compensateur et de la prime de repas.

1. Sur la demande de requalification du contrat de travail intermittent en contrat de travail à temps plein

Relevant qu'en contravention des dispositions de l'article L. 3123-34 du code du travail, son contrat de travail intermittent ne mentionne ni les périodes travaillées, ni la répartition des heures à l'intérieur de ces périodes, M. [B] sollicite la requalification de son contrat de travail intermittent en contrat de travail à temps plein, étant au surplus relevé qu'il n'était pas destinataire de plannings mensuels malgré les dispositions prises en ce sens par l'accord collectif d'établissement du 4 novembre 2011.

En réponse, la société Mondial protection fait valoir qu'elle a recouru valablement à un contrat à durée indéterminée intermittent en respectant les termes de l'accord d'entreprise signé le 4 novembre 2011, lequel prévoit que le volume d'heures annuel ne peut être inférieur à 240 heures avec une limite de 48 heures hebdomadaires et une rémunération lissée sur l'année. Aussi, considérant que les conditions en sont respectées, elle s'oppose à toute requalification à temps plein, relevant d'ailleurs que M. [B] a refusé de fournir son avis d'imposition, ce qui permet de s'assurer qu'il ne se tenait pas à sa disposition. En tout état de cause, elle note qu'à compter de mars 2017, elle ne peut être condamnée à aucune somme dès lors que M. [B] n'a pas justifié auprès d'elle du renouvellement de sa carte professionnelle.

Il résulte de l'article L. 3123-31 du code du travail, dans sa version applicable lors de la conclusion du contrat, que dans les entreprises pour lesquelles une convention ou un accord collectif de travail étendu ou une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement le prévoit, des contrats de travail intermittent peuvent être conclus afin de pourvoir les emplois permanents, définis par cette convention ou cet accord, qui par nature comportent une alternance de périodes travaillées et de périodes non travaillées.

Par ailleurs, selon l'article 3123-33, le contrat de travail intermittent est un contrat à durée indéterminée. Il est écrit et mentionne notamment la qualification du salarié, les éléments de la rémunération, la durée annuelle minimale de travail du salarié, les périodes de travail et la répartition des heures de travail à l'intérieur de ces périodes.

Le travail intermittent ayant pour objet de pourvoir des emplois permanents qui par nature comportent une alternance de périodes travaillées et non travaillées, il en résulte qu'en l'absence de définition de ces périodes dans le contrat de travail, ce dernier doit être requalifié en contrat à durée indéterminée de droit commun à temps plein.

Par ailleurs, l'employeur étant tenu de fournir un travail et de payer sa rémunération au salarié qui se tient à sa disposition, en cas de requalification d'un contrat de travail intermittent en contrat de travail à temps complet, l'employeur doit établir qu'il a satisfait à l'obligation de fournir un travail dont il est débiteur du fait de cette requalification.

Dès lors, ce n'est que lorsqu'il démontre que le salarié a refusé d'exécuter son travail ou ne s'est pas tenu à sa disposition, qu'il n'est pas tenu au paiement du salaire.

En l'espèce, M. [B] a été engagé le 12 août 2015 en qualité d'agent de sécurité confirmé par contrat à durée indéterminée intermittent et ce, pour une durée de travail de 240 heures par an au taux horaire de 9,756 euros bruts par heure.

Il y était par ailleurs prévu que son site d'affectation était la Haute et la Basse Normandie et que, compte tenu du caractère spécifique de ce site, le salarié s'engageait à prendre les horaires de service par le bais du responsable d'exploitation ou toute autre personne responsable hiérarchiquement, qu'aucun planning ne serait remis et que tout refus de se rendre sur le lieu de travail serait décompté sur le salaire en absence autorisée ainsi que le nombre d'heures annualisées.

Enfin, il était indiqué que le salarié pourrait être amené, en fonction des besoins de la société, à assurer un service de jour comme de nuit, quel que soit le jour de la semaine, y compris les dimanches et jours fériés, les parties convenant que ceci constituait une modalité normale de l'exercice de la fonction.

Ainsi, à aucun moment, il n'est mentionné les périodes travaillées et non travaillées et il convient en conséquence de requalifier le contrat de travail intermittent en contrat de travail à temps plein, peu important l'accord d'entreprise signé le 4 novembre 2011 dès lors que celui-ci ne peut, conformément à l'article L. 2251-1 du code du travail, déroger aux dispositions qui revêtent un caractère d'ordre public, étant surabondamment précisé que sa lecture ne permet pas de considérer qu'il aurait été dérogé à l'obligation pour la société Mondial protection de préciser les périodes travaillées et non travaillées dans les contrats intermittents.

Dès lors, pour ne pas être tenu au paiement de l'ensemble des salaires dus à raison de cette requalification, il appartient à la société Mondial protection d'apporter la preuve qu'elle a fourni du travail à M. [B] et que ce dernier a refusé d'exécuter son travail ou ne s'est pas tenu à sa disposition.

Or, la société Mondial protection est totalement défaillante dans la démonstration de cette preuve puisqu'elle ne justifie pas de la moindre transmission de planning ou interpellation de M. [B] afin qu'il se conforme à ses demandes, sachant qu'elle n'a d'ailleurs même pas honoré son obligation de fournir du travail à hauteur des 240 heures annuelles dès 2016, seules 56 heures ayant été payées à M. [B] en 2016, puis, plus aucune heure en 2017 et 2018.

En outre, sauf à renverser la charge de la preuve, elle ne peut se retrancher derrière le fait que M. [B] n'aurait pas transmis ses avis d'imposition pour en déduire qu'il ne se tenait pas à sa disposition.

Enfin, et s'il est justifié qu'elle a sollicité M. [B] en décembre 2016 afin qu'il renouvelle sa carte professionnelle venant à expiration en mars 2017, indispensable pour exercer les missions qui étaient les siennes en vertu de son contrat de travail, ce dernier justifie avoir obtenu cette décision de renouvellement dès le 20 décembre 2016.

Or, s'il n'est pas produit de justificatif d'envoi à la société Mondial protection, outre que le contrat de travail imposait uniquement à M. [B] d'aviser son employeur de toute modification rendant impossible la poursuite de son contrat de travail, ce qui n'a jamais été le cas en l'espèce puisque le renouvellement est intervenu antérieurement à l'expiration de la précédente carte, en tout état de cause, à défaut pour la société Mondial protection de justifier de la moindre fourniture de travail pour la période postérieure à mars 2017, première obligation qui pèse sur elle, elle ne peut invoquer un éventuel manquement de son salarié, en l'occurrence non établi.

En ce qui concerne le montant des sommes dues sur la base d'un temps complet, ayant travaillé deux ans quatre mois et 20 jours, M. [B], rémunéré sur la base d'un taux horaire de 9,756 euros, aurait dû percevoir 42 403,41 euros, dont il convient cependant de déduire les sommes déjà perçues au titre de son salaire de base, soit 2 459,45 euros.

Il lui est donc dû un rappel de salaire à hauteur de 39 943,96 euros, auxquels doivent s'ajouter les congés payés afférents comme le souligne M. [B], aussi, convient-il, dans les limites de la demande, de condamner la société Mondial protection à lui verser la somme réclamée, soit  42 928,68 euros.

2. Sur la demande de rappel de congés payés

M. [B] fait valoir qu'il résulte de ses bulletins de salaire qu'il avait acquis 23,17 jours de congés payés en août 2016, aussi, en réclame t-il le paiement sur la base d'un taux plein, considérant qu'il ne peut lui être opposé, comme l'a fait le conseil de prud'hommes, que la requalification comprendrait ce paiement.

Si la société Mondial protection soutient que M. [B] ne serait plus en droit de réclamer le paiement de ses congés payés dès lors qu'il aurait dû les prendre au cours de la période de référence, il résulte suffisamment des précédents développements qu'il n'a pu les prendre en raison de l'attitude de la société Mondial protection.

Par ailleurs, comme indiqué précédemment, si M. [B] a sollicité, au titre de la requalification à temps plein, une somme de 42 928,68 euros en indiquant qu'elle était due à titre de rappel de salaire et congés payés afférents, il apparaît néanmoins à la lecture de ses conclusions que s'il a omis de soustraire les sommes déjà perçues à titre de salaires, il n'a pas pris en compte les congés payés dus.

Aussi, alors qu'il lui était dû 3 994,40 euros de congés payés sur la somme accordée à titre de rappel de salaire et que, compte tenu de sa demande tendant au paiement de 42 928,68 euros congés payés compris, il ne lui a été accordé que cette seule somme, soit des congés payés à hauteur de 2 984,72 euros et qu'il lui restait donc dû 1 009,68 euros, sachant qu'il n'a par ailleurs pas bénéficié de congés payés dus au titre des sommes prévues à son contrat de travail représentant 195,12 euros par mois, il lui est dû à ce titre, 180,83 euros.

Il convient en conséquence de condamner la société Mondial protection à payer à M. [B] la somme de 1 190,51 euros à titre de rappel complémentaire de congés payés.

3. Sur les effets de la prise d'acte de la rupture

La prise d'acte est un mode de rupture du contrat de travail par lequel le salarié met un terme à son contrat en se fondant sur des manquements qu'il impute à l'employeur.

Il appartient au salarié qui a pris acte de la rupture de justifier de manquements graves de l'employeur rendant impossible la poursuite du contrat de travail afin que cette prise d'acte produise les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, à défaut la prise d'acte s'analyse en une démission.

En l'espèce, par courrier du 16 janvier 2018, M. [B] a pris acte de la rupture de son contrat de travail en raison de l'irrégularité de son contrat de travail intermittent pour 240 heures annuelles mais aussi en raison de l'absence de fourniture de travail.

Il résulte des précédents développements que la société Mondial protection n'a fourni que 56 heures de travail à M. [B] en 2016, puis plus aucune heure de travail à compter de 2017, aussi, et alors qu'il s'agit de l'obligation principale et essentielle de l'employeur, avec pour corollaire, le paiement d'un salaire, il convient d'infirmer le jugement et de dire qu'il s'agit de manquements graves rendant impossible la poursuite du contrat de travail.

Il convient en conséquence d'infirmer le jugement et de dire que la prise d'acte de la rupture doit produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Aussi, et alors que le salaire de M. [B] sur la base d'un temps plein est de 1 480,30 euros mensuels, dans les limites de la demande, il convient de condamner la société Mondial protection à lui payer une indemnité compensatrice de 2 030,08 euros, outre 203,01 euros au titre des congés payés afférents et 616,07 euros à titre d'indemnité de licenciement.

Enfin, conformément à l'article L. 1235-3 du code du travail qui prévoit une indemnisation comprise entre 3 et 3,5 mois pour un salarié ayant deux années d'ancienneté complète dans une entreprise employant plus de onze salariés, il convient, dans la limite de la demande, de condamner la société Mondial protection à payer à M. [B] la somme de 3 045,12 euros.

4. Sur le remboursement des indemnités Pôle emploi

Conformément à l'article L 1235-4 du code du travail, il convient d'ordonner à la société Mondial protection de rembourser à Pôle emploi les indemnités chômage versées à M. [B] du jour de son licenciement au jour de la présente décision, dans la limite de six mois.

5. Sur la remise de documents

Il convient d'ordonner à la société Mondial protection de remettre à M. [B] un certificat de travail, une attestation Pôle emploi et un bulletin de salaire récapitulatif dûment rectifiés, sans que les circonstances de la cause justifient de prononcer une astreinte.

6. Sur la demande d'indemnité pour travail dissimulé

Expliquant n'avoir reçu aucun bulletin de salaire pour les mois de novembre 2015, janvier à mars 2016, juin 2016, puis plus aucun à compter de septembre 2016, M. [B] considère que la société Mondial protection s'est intentionnellement soustraite à l'obligation de délivrance des bulletins de salaire au regard de sa taille et de sa structure.

Aux termes de l'article L. 8221-5 du Code du travail, est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur : 1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ; 2° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 3243-2, relatif à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli(...).

Selon l'article L. 8223-1, en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

En l'espèce, alors que l'absence de délivrance de bulletins de salaire correspond aux mois durant lesquels M. [B] n'a effectivement ni travaillé, ni perçu aucune somme, outre que l'article L. 3243-2 du code du travail prévoit la remise d'un bulletin de paie lors du paiement du salaire, ce qui implique qu'une somme, serait-elle minime, soit versée, en tout état de cause, les circonstances de la cause ne permettent pas de caractériser l'élément intentionnel, sachant que M. [B] a été destinataire d'un bulletin de salaire pour chacun des mois durant lesquels il a travaillé.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [B] de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé.

7. Sur les dépens et frais irrépétibles

En qualité de partie succombante, il y a lieu de condamner la société Mondial protection aux entiers dépens, y compris ceux de première instance, de la débouter de sa demande formulée en application de l'article 700 du code de procédure civile et de la condamner à payer à M. [B] la somme de 2 000 euros sur ce même fondement, en plus de la somme allouée en première instance.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Statuant contradictoirement et publiquement, par arrêt mis à disposition au greffe ;

Confirme le jugement sauf en ses dispositions relatives aux modalités de remise des documents, en ce qu'il a débouté M. [L] [B] de sa demande d'indemnité compensatrice de congés payés complémentaire, de sa demande requalification de la prise d'acte de la rupture en licenciement sans cause réelle et sérieuse et en conséquence des sommes réclamées au titre de la rupture ;

L'infirme de ces chefs et statuant à nouveau,

Dit que la prise d'acte de la rupture s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Condamne la SAS Mondial protection à payer à M. [L] [B] les sommes suivantes :

dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 3 045,12 euros

indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents : 2 233,09 euros

indemnité de licenciement : 616,07 euros

indemnité compensatrice de congés payés complémentaire : 1 190,51 euros

Ordonne à la SAS Mondial protection de remettre à M. [L] [B] un certificat de travail, une attestation Pôle emploi et un bulletin de salaire récapitulatif dûment rectifiés conformément à la présente décision ;

Dit n'y avoir lieu à astreinte ;

Ordonne à la SAS Mondial protection de rembourser à Pôle emploi les indemnités chômage versées à M. [L] [B] du jour de son licenciement au jour de la présente décision, dans la limite de six mois ;

Condamne la SAS Mondial protection France aux entiers dépens ;

Condamne la SAS Mondial protection France à payer à M. [L] [B] la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute la SAS Mondial protection France de sa demande formulée en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20/03630
Date de la décision : 23/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-23;20.03630 ?
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