La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/02/2023 | FRANCE | N°22/03826

France | France, Cour d'appel de Rouen, Chambre premier président, 07 février 2023, 22/03826


N° RG 22/03826 - N° Portalis DBV2-V-B7G-JHH5



COUR D'APPEL DE ROUEN



JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT



ORDONNANCE DU 7 FEVRIER 2023





DÉCISION DÉFÉRÉE :



ordonnance du bâtonnier de Rouen du 15 novembre 2022



DEMANDERESSE AU RECOURS :



Madame [C] [G]

[Adresse 2]

[Localité 4]



comparante en personne





DÉFENDEUR AU RECOURS :



Maître [X] [Z]

[Adresse 1]

[Localité 3]



représentée par Me Marin

a CHAUVEL, avocat au barreau de Rouen





DEBATS :



A l'audience publique du 7 février 2023, devant Mme Marie-Christine LEPRINCE, première présidente de la cour d'appel de Rouen, assistée de Mme Catherine CHEVALIER, greffier ;...

N° RG 22/03826 - N° Portalis DBV2-V-B7G-JHH5

COUR D'APPEL DE ROUEN

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

ORDONNANCE DU 7 FEVRIER 2023

DÉCISION DÉFÉRÉE :

ordonnance du bâtonnier de Rouen du 15 novembre 2022

DEMANDERESSE AU RECOURS :

Madame [C] [G]

[Adresse 2]

[Localité 4]

comparante en personne

DÉFENDEUR AU RECOURS :

Maître [X] [Z]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Marina CHAUVEL, avocat au barreau de Rouen

DEBATS :

A l'audience publique du 7 février 2023, devant Mme Marie-Christine LEPRINCE, première présidente de la cour d'appel de Rouen, assistée de Mme Catherine CHEVALIER, greffier ; après avoir entendu les observations des parties présentes, la première présidente a mis l'affaire en délibéré au 7 février 2023.

DECISION :

CONTRADICTOIRE

Prononcée publiquement le 7 février 2023, par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

Signée par Mme LEPRINCE, première présidente et par Mme CHEVALIER, greffier présent lors de la mise à disposition.

EXPOSÉ DU LITIGE

Par requête adressée à l'ordre des avocats de Rouen le 25 juillet 2022, Mme [C] [G] a saisi le bâtonnier en contestation des honoraires versés à Me [X] [Z] pour un montant de 6 000 euros TTC dans le cadre d'une audience devant la cour d'assises des mineurs de la Seine-Maritime pour laquelle elle était convoquée comme civilement responsable de son fils mineur.

Par décision du 15 novembre 2022, la délégataire du bâtonnier de l'ordre des avocats de Rouen a fixé le montant des honoraires dus à Me [X] [Z] à la somme de 6 000 euros TTC et décidé que la décision serait assortie de l'exécution provisoire à hauteur de la somme de 1 500 euros TTC.

Cette décision a été notifiée à Mme [C] [G] par lettre recommandée avec avis de réception signé par l'intéressée le 17 novembre 2022.

Mme [C] [G] a déposé un recours contre cette décision par lettre reçue à la cour d'appel le 29 novembre 2022.

L'audience a été fixée au 3 janvier 2023.

Mme [G], présente à l'audience, sollicite l'infirmation de la décision attaquée en toutes ses dispositions.

Elle fait valoir pour l'essentiel qu'ayant reçu sa convocation quelques jours avant l'audience, elle a accepté, de manière précipitée, l'honoraire forfaitaire de

6 000 euros proposé par Me [Z] pour l'assister devant la cour d'assises des mineurs de la Seine-Maritime, que les honoraires sont disproportionnés au vu des diligences effectivement accomplies et qu'elle s'est ensuite adressée à Me [B] pour la représenter en appel, celle-ci ayant facturé sa prestation à hauteur de

4 000 euros TTC, somme qu'elle considère être la juste rétribution des honoraires de Me [Z].

Me [Z], représentée à l'audience, demande la confirmation de l'ordonnance de taxe.

Elle soutient que l'honoraire forfaitaire de 6 000 euros TCC a été accepté par Mme [G] lors du premier rendez-vous et que cet honoraire est justifié compte tenu de l'urgence de la situation, de la complexité de l'affaire et du temps passé à l'audience (deux jours et demi). Elle ajoute qu'elle a été contrainte de travailler sur le dossier pendant le week-end précédant l'audience.

MOTIFS DE LA DÉCISION

L'article 10 de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971 tel qu'il résulte de la modification de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 prévoit que :

'Les honoraires de postulation, de consultation, d'assistance, de conseil, de rédaction d'actes juridiques sous seing privé et de plaidoirie sont fixés en accord avec le client.

Sauf en cas d'urgence ou de force majeure ou lorsqu'il intervient au titre de l'aide juridictionnelle totale ou de la troisième partie de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, l'avocat conclut par écrit avec son client une convention d'honoraires, qui précise, notamment, le montant ou le mode de détermination des honoraires couvrant les diligences prévisibles, ainsi que les divers frais et débours envisagés.

Les honoraires tiennent compte, selon les usages, de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci'.

En l'espèce, il ressort des pièces du dossier et des débats à l'audience les faits suivants :

Son conseil habituel ne pouvant l'assister, Mme [G] a pris l'attache de Me [Z],le 25 mars 2022, pour que celle-ci défende ses intérêts devant la cour d'assises des mineurs de la Seine-Maritime, où elle était convoquée en qualité de civilement responsable de son fils [M] [G], mineur au moment des faits, accusé d'avoir commis des viols sur mineur de quinze ans entre 1996 et 1998.

Me [Z] a reçu Mme [G] à son cabinet le lundi 28 mars, à 10h, pour préparer l'audience et lui a proposé un honoraire forfaitaire de 6 000 euros TTC comprenant l'étude du dossier pénal, le rendez-vous de préparation et les deux jours et demi d'assistance à l'audience.

Mme [G] a accepté cet honoraire qu'elle a réglé dans son intégralité avant l'audience.

Le procès devant la cour d'assises des mineurs de la Seine-Maritime s'est déroulé du 28 mars, 14h30, au 30 mars 2022.

M. [M] [G] a été déclaré coupable le 30 mars 2022 par ladite cour et condamné à cinq ans d'emprisonnement intégralement assortis d'un sursis probatoire pendant trois ans.

Statuant sur intérêts civils, la cour a déclaré Mme [G] civilement responsable des préjudices causés par son fils et l'a condamnée in solidum avec celui-ci à payer la somme de 35 000 euros à titre de dommages et intérêts à la victime, la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 375-1 du code de procédure pénale, ainsi qu'un euro de dommages et intérêts aux parents de la victime, outre la somme de

1 000 euros sur le fondement de l'article 375-1 du code de procédure pénale.

M. [M] [G] ayant formé appel de ces décisions, Mme [G] a choisi de confier la défense de ses intérêts à Me [B] pour la procédure en appel devant la cour d'assises des mineurs de l'Eure.

Elle affirme que l'avocate lui aurait demandé des honoraires de 4 000 euros pour cette procédure, sans qu'il n'en soit cependant justifié par les pièces versées aux débats.

Il est constant qu'aucune convention d'honoraires n'a été régularisée par les parties concernant la procédure devant la cour d'assises des mineurs de la Seine- Maritime.

L'article 10 de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971 pose le principe de la signature d'une convention d'honoraires, sauf dans certaines hypothèses comme l'urgence ou la force majeure.

Comme relevé par l'avocate, son intervention s'inscrivait dans un cadre d'urgence puisqu'elle a été saisie des intérêts de Mme [G] dans les jours précédant l'audience devant la cour d'assises des mineurs.

Surtout, l'absence de convention ne prive pas l'avocat du droit qui est le sien à obtenir la juste indemnisation de ses diligences, laquelle est alors fixée en tenant compte, selon les usages, de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci.

Il sera par ailleurs rappelé que l'accord antérieur des parties n'empêche pas le contrôle du juge sur les honoraires convenus initialement entre l'avocat et son client lorsque ceux-ci apparaissent exagérés au regard du service rendu.

En l'espèce, Me [Z] verse aux débats les arrêts de la cour d'assises des mineurs de la Seine-Maritime du 30 mars 2022.

Le rendez-vous du 28 mars 2022 d'une durée de deux heures n'est pas contesté.

Il n'est pas contesté non plus que Me [Z] s'est rendue à l'audience se tenant les 28, 29 et 30 mars 2022 afin de défendre les intérêts de sa cliente, ce qui représente deux jours et demi de travail pendant lesquels l'avocate n'a pu se consacrer à la préparation de ses autres dossiers.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, tenant compte des critères de l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971, notamment le temps passé à l'audience, la préparation du dossier et l'urgence de la situation, les honoraires dus à Me [Z] au titre des diligences accomplies dans le cadre du procès devant la cour d'assises des mineurs au titre de la défense des intérêts du civilement responsable seront fixés à la somme de 4 000 euros TTC et Me [Z] sera tenue de rembourser la somme de

2 000 euros au profit de Mme [G].

En conséquence, la décision du bâtonnier sera infirmée en toutes ses dispositions.

Compte tenu de la solution apportée au litige, il y a lieu de faire masse des dépens et de dire qu'ils seront supportés à parts égales par Me [Z] d'une part et Mme [G] d'autre part.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Infirme en toutes ses dispositions la décision du 15 novembre 2022 rendue par le bâtonnier de l'ordre des avocats de Rouen,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Fixe à la somme de 4 000 euros TTC le montant des honoraires dus par Mme [C] [G] à Me [X] [Z] ;

Ordonne en conséquence à Me [X] [Z] de rembourser à Mme [C] [G] la somme de 2 000 euros TTC ;

Fait masse des dépens et dit qu'ils seront supportés pour moitié par Me [X] [Z] d'une part et par Mme [C] [G] d'autre part.

Le greffier, La première présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Formation : Chambre premier président
Numéro d'arrêt : 22/03826
Date de la décision : 07/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-07;22.03826 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award