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12/01/2023 | FRANCE | N°20/03190

France | France, Cour d'appel de Rouen, Chambre sociale, 12 janvier 2023, 20/03190


N° RG 20/03190 - N° Portalis DBV2-V-B7E-ISIG





COUR D'APPEL DE ROUEN



CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE

SECURITE SOCIALE



ARRET DU 12 JANVIER 2023











DÉCISION DÉFÉRÉE :





Jugement du CONSEIL DE PRUD'HOMMES D'EVREUX du 29 Septembre 2020





APPELANTE :





Madame [E] [A]

[Adresse 5]

[Localité 2]



représentée par Me Jean-Baptiste LELANDAIS, avocat au barreau de ROUEN







INTI

MEE :





Société ÉCOLE [9] - ÉCOLE [8]

[Adresse 4]

[Localité 3]



représentée par Me Olivier ZAGO, avocat au barreau de ROUEN









































COMPOSITION DE LA COUR  :





En application des dispositions de l'ar...

N° RG 20/03190 - N° Portalis DBV2-V-B7E-ISIG

COUR D'APPEL DE ROUEN

CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE

SECURITE SOCIALE

ARRET DU 12 JANVIER 2023

DÉCISION DÉFÉRÉE :

Jugement du CONSEIL DE PRUD'HOMMES D'EVREUX du 29 Septembre 2020

APPELANTE :

Madame [E] [A]

[Adresse 5]

[Localité 2]

représentée par Me Jean-Baptiste LELANDAIS, avocat au barreau de ROUEN

INTIMEE :

Société ÉCOLE [9] - ÉCOLE [8]

[Adresse 4]

[Localité 3]

représentée par Me Olivier ZAGO, avocat au barreau de ROUEN

COMPOSITION DE LA COUR  :

En application des dispositions de l'article 805 du Code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 17 Novembre 2022 sans opposition des parties devant Madame BIDEAULT, Présidente, magistrat chargé du rapport.

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame BIDEAULT, Présidente

Madame ALVARADE, Présidente

Madame POUGET, Conseillère

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme WERNER, Greffière

DEBATS :

A l'audience publique du 17 Novembre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 12 Janvier 2023

ARRET :

CONTRADICTOIRE

Prononcé le 12 Janvier 2023, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

signé par Madame BIDEAULT, Présidente et par Mme WERNER, Greffière.

EXPOSÉ DU LITIGE

Vu le jugement en date du 29 septembre 2020 par lequel le conseil de prud'hommes d'Evreux, statuant dans le litige opposant Mme [E] [A] à son ancien employeur, la société Ecole [9] Ecole [8], a donné acte à l'employeur de ce qu'il s'engageait à remettre à Mme [A] ses documents de fin de contrat, a débouté la salariée de ses demandes, a débouté la société de sa demande reconventionnelle et a condamné Mme [A] aux entiers dépens ;

Vu l'appel interjeté par voie électronique le 8 octobre 2020 par Mme [A] à l'encontre de cette décision qui lui a été notifiée le 6 octobre précédent ;

Vu la constitution d'avocat de la société Ecole [9], intimée, effectuée par voie électronique le 28 octobre 2020 ;

Vu les dernières conclusions enregistrées au greffe et notifiées par voie électronique le 21 juin 2021 par lesquelles la salariée appelante, soutenant avoir été victime de harcèlement moral au cours de la relation contractuelle, contestant la légitimité du licenciement prononcé et estimant ne pas avoir été intégralement remplie de ses droits au titre de l'exécution du contrat de travail, sollicite l'infirmation du jugement entrepris en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes et condamnée aux dépens et demande à la cour, statuant à nouveau de :

- dire et juger sans cause réelle et sérieuse son licenciement,

- dire et juger que son licenciement s'analyse en un licenciement nul,

- condamner l'Ecole [8] à lui verser :

67 941,80 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul (harcèlement moral),

6 794,18 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 679,41 euros brut au titre des congés payés afférents,

10 889,27 euros brut à titre d'indemnité légale de licenciement,

25 000 euros à titre d'indemnité pour le préjudice subi consécutif au harcèlement moral,

32 272,36 euros brut à titre de rappel de salaire pour la période comprise entre le 1er septembre 2018 et le 14 juin 2019 outre 3 227,24 euros brut au titre des congés payés afférents,

3 600 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonner la remise des documents de fin de contrat modifiés sous astreinte de 75 euros par jour de retard passé un délai de 8 jours à compter de la notification de la décision à intervenir,

- dire que les sommes porteront intérêt au taux légal à compter de la mise en demeure du 7 mars 2018,

- débouter l'Ecole [8] de ses demandes plus amples ou contraires,

- condamner l'Ecole [8] aux entiers dépens de première instance et d'appel ;

Vu les conclusions enregistrées au greffe et notifiées par voie électronique le 23 mars 2021 aux termes desquelles la société intimée, réfutant les moyens et l'argumentation de la partie appelante, aux motifs notamment que la salariée n'a pas été victime de harcèlement moral, que les faits reprochés au sein de la lettre de rupture sont matériellement établis, lui sont imputables et justifiaient le licenciement pour faute grave prononcé, soutenant que la salariée a été intégralement remplie de ses droits au titre de l'exécution du contrat de travail, sollicite pour sa part la confirmation de la décision déférée sauf en ce qu'elle l'a déboutée de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile, demande à la cour, de réformer le jugement sur ce point et de condamner l'appelante au paiement de la somme de 3 600 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction est requise au profit de la Maître Olivier Zago ;

Vu l'ordonnance de clôture en date du 20 octobre 2022 renvoyant l'affaire pour être plaidée à l'audience du 17 novembre 2022 ;

Vu les conclusions transmises le 21 juin 2021 par l'appelante et le 23 mars 2021 par l'intimée auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé détaillé des prétentions et moyens présentés en cause d'appel;

SUR CE, LA COUR

La société Ecole [8] Ecole [9] a pour activité l'enseignement secondaire général. Elle gère des établissements d'enseignement privé, sous contrat d'association avec l'Etat ainsi que des classes d'enseignement hors contrat.

Elle emploie plus de 11 salariés et applique la convention collective de l'enseignement privé.

Mme [A], enseignante en lettres classiques, a intégré l'école [8] dans le cadre d'un détachement en qualité de professeur de français et de latin.

En sus de cette affectation, afin d'enseigner au sein des classes hors contrat, Mme [A] a signé un contrat de travail de droit privé.

Elle a, dans un premier temps, été embauchée dans le cadre d'un contrat de travail à durée déterminée à compter du 1er septembre 2006 jusqu'au 30 juin 2007 pour dispenser 9h30 de cours hebdomadaires dans les classes hors contrat puis, par avenant en date du 21 mai 2007, le contrat de travail est devenu un contrat à durée indéterminée, la société garantissant un horaire hebdomadaire minimum de 4 heures de cours à la salariée.

A compter du 19 octobre 2017, Mme [A] a bénéficié d'un arrêt de travail pour maladie.

A compter du 1er septembre 2018, Mme [A] a été affectée, au titre de son contrat avec l'Etat, au collège [11] à [Localité 10].

Mme [A] a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 24 mai 2019 par lettre du 13 mai précédent puis licenciée pour faute grave par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 13 juin 2019 motivée comme suit :

' Par lettre recommandée en date du 13 mai 2019, nous vous avons convoquée à un entretien préalable pour le vendredi 24 mai 2019 à 14 heures à l'Ecole [8] au bâtiment de la Colline. Cette lettre nous a été retournée avec l'indication 'destinataire inconnu à l'adresse'.

Parallèlement, notre conseil, Maître Olivier Zago, par lettre officielle en date du 13 mai 2019 a fait parvenir le double de cette convocation à votre avocat, Maître [K] [W], [Adresse 1] à [Localité 6], lequel par lettre recommandée des 7 mars 2019 et 9 avril 2019 s'était présenté à nous en qualité de conseil de vous-même.

Cependant, vous ne vous êtes pas présentée à cet entretien préalable ce qui ne nous a pas permis d'évoquer oralement avec vous les griefs que nous avons et de recueillir vos observations préalablement à toute décision.

Après réflexion, nous sommes malheureusement au regret de prononcer votre licenciement pour les motifs suivants, constitutifs à nos yeux de faute grave.

Depuis le 19 octobre 2017, vous êtes en arrêt de travail lequel a été régulièrement renouvelé jusqu'au 1er août 2018, date à partir de laquelle vous ne nous avez plus fait parvenir vos justificatifs de renouvellement, et ce malgré notre relance par mail du 6 septembre 2018.

En effet, alors que vous auriez dû reprendre votre emploi à la rentrée scolaire 2018-2019, vous ne vous êtes pas présentée sur votre lieu de travail et vous ne nous avez jamais fourni de justificatifs d'absence.

Un tel comportement de votre part perturbe gravement l'organisation du travail et rend impossible votre maintien dans l'entreprise, même pendant l'exécution du préavis.

Le licenciement prend donc effet dès aujourd'hui et vos documents de fin de contrat (solde de tout compte et certificat de travail) seront arrêtés à cette date, sans indemnité de préavis, ni de licenciement.

Nous vous demandons de bien vouloir revenir vers nous pour vous remettre ces documents et nous restituer vos badges et autres objets éventuellement en votre possession. (...)'

Invoquant l'existence d'un harcèlement moral, contestant la licéité et la légitimité de son licenciement et estimant ne pas avoir été remplie de ses droits au titre de la rupture de son contrat de travail, Mme [A] a saisi le 14 août 2019 le conseil de prud'hommes d'Evreux, qui, statuant par jugement du 29 septembre 2020, dont appel, s'est prononcé comme indiqué précédemment.

Sur le harcèlement moral

Aux termes de l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale de compromettre son avenir professionnel.

L'article L. 1154-1 du même code prévoit qu'en cas de litige, le salarié présente des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement.

Au vu de ces éléments, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

La deuxième partie de ce texte présuppose que les éléments de fait présentés par le salarié soient des faits établis puisqu'il n'est pas offert à l'employeur de les contester mais seulement de démontrer qu'ils étaient justifiés.

Au soutien de sa demande tendant à reconnaître l'existence d'un harcèlement moral, Mme [A] indique qu'elle a fait l'objet de plusieurs brimades, comportements inappropriés et actions vexatoires de la part de certains de ses collègues dont Mmes [M] et [B].

Elle affirme que Mme [M] a tenté de dissuader certains élèves de suivre ses cours. Elle soutient avoir entendu des cris d'animaux lors de son arrivée en salle des professeurs.

Mme [A] expose que son état moral et mental s'est fortement dégradé en raison de ces agissements, précisant qu'elle s'est totalement effondrée le 19 octobre 2017 lorsqu'elle a été publiquement invectivée et décrédibilisée par M. [S], proche des harceleurs, lors d'une réunion en présence de plusieurs témoins.

Au soutien de ses allégations, la salariée produit :

- des attestations établies par Mme [X], salariée de l'Ecole [8], Mme [H], M. [C] enseignant, Mme [U] et M. [N], anciens élèves, sa fille Mme [A] [I],

- des échanges de SMS avec ses élèves,

- des échanges de SMS avec Mme [D],

- un courrier qu'elle a adressé le 27 octobre 2017 au recteur de [Localité 7],

- un mail de Mme [O] du 15 octobre 2014,

- ses arrêts de travail,

- un extrait de son dossier médical mentionnant qu'elle souffre d'une dépression profonde en relation avec ses conditions de travail.

Il ressort de ces éléments que l'existence de conflits au sein de l'école [8] est établie. Cependant, ces éléments ne permettent pas d'établir la matérialité de brimades, comportements inappropriés et actions vexatoires de la part de certains de ses collègues à l'encontre de la salariée.

Ainsi, il ne résulte pas des témoignages versés aux débats l'existence de cris d'animaux entendus lors de l'arrivée de Mme [A] en salle des professeurs tel qu'allégué.

Mme [X] atteste de ce que le 19 janvier 2017, lors de la réunion évoquée, M. [S] a demandé à Mme [A] de ne pas l'agresser, qu'il a refusé de lui répondre en lui demandant de s'adresser à un autre délégué du personnel et qu'il lui a tourné le dos. Il n'est pas fait état de propos déplacés ou humiliants.

Mme [H] atteste avoir constaté la grande détresse de Mme [A] le 19 octobre à 13h30 sans témoigner des faits à l'origine de cet état.

Les anciens élèves de la salariée attestent de ses qualités, de son engagement professionnel, relatent avoir eux-mêmes été victimes de harcèlement moral durant leur scolarité sans évoquer de faits précis concernant Mme [A].

M. [C] évoque de façon générale le parcours de Mme [A] sans relater de faits précis.

Si Mme [A] justifie avoir écrit le 27 octobre 2017, au cours de son arrêt maladie, au recteur de [Localité 7], en évoquant des comportements inadaptés de certains collègues à son égard, ce courrier, écrit de sa main, n'est pas corroboré par d'autres éléments.

Mme [D] souhaite uniquement à la salariée dans son SMS un bon repos et de bonnes 'vacances'.

Il ressort du mail de Mme [O], représentante du personnel, rédigé le 15 octobre 2014 soit 3 ans avant l'arrêt de travail de la salariée qu'il existait au sein de l'établissement des situations de harcèlement moral sans que Mme [A] ne soit expressément mentionnée à ce titre, Mme [O] lui reprochant de s'être elle-même montrée méprisante à l'égard d'un membre du personnel administratif de l'établissement.

S'il ressort des éléments produits par la salariée que son état de santé s'est dégradé, les pièces et documents versés aux débats n'établissent pas la matérialité des éléments de faits évoqués par Mme [A].

En conséquence, par confirmation du jugement entrepris, il y a lieu de débouter l'appelante de sa demande au titre du harcèlement moral.

Sur le licenciement

A titre liminaire, il y a lieu de constater que la salariée sollicite à la fois que son licenciement soit jugé dépourvu de cause réelle et sérieuse et qu'il soit déclaré nul.

En tout état de cause, la salariée ayant été précédemment déboutée de sa demande au titre du harcèlement moral, il appartient à la cour de statuer sur la légitimité et non la licéité de la rupture.

Si Mme [A] ne conteste pas son absence au sein de l'établissement depuis la date de son arrêt maladie, elle soutient que son employeur était informé de sa mutation au sein de son nouveau collège, qu'elle lui avait proposé dès le 7 mars 2018, par l'intermédiaire de son conseil, la mise en place d'une rupture conventionnelle.

Elle constate qu'au regard de sa faible amplitude de travail au sein des classes hors contrat, de l'absence d'envoi d'un planning pour la rentrée 2018, de la notification de son licenciement en fin d'année scolaire, son absence n'a pas désorganisé l'établissement.

L'employeur soutient les griefs reprochés matériellement établis, imputables à la salariée. Il indique que l'ensemble des correspondances adressées à la salariée revenait avec la mention 'destinataire inconnu à l'adresse'.

Sur ce ;

Pour satisfaire à l'exigence de motivation posée par l'article L.1232-6 du code du travail, la lettre de licenciement doit comporter l'énoncé de faits précis et contrôlables.

La lettre de licenciement, précisée le cas échéant par l'employeur, qui fixe les limites du litige, lie les parties et le juge qui ne peut examiner d'autres griefs que ceux qu'elle énonce.

La faute grave s'entend d'une faute d'une particulière gravité ayant pour conséquence d'interdire le maintien du salarié dans l'entreprise.

La preuve des faits constitutifs de faute grave incombe à l'employeur et à lui seul et il appartient au juge du contrat de travail d'apprécier au vu des éléments de preuve figurant au dossier si les faits invoqués dans la lettre de licenciement sont établis, imputables au salarié, et s'ils ont revêtu un caractère de gravité suffisant pour justifier l'éviction immédiate du salarié de l'entreprise.

En l'espèce, il est établi et non contesté par la salariée qu'à l'issue de son congé maladie, elle n'a pas repris son poste au sein de l'école [8].

Il ne ressort pas des éléments produits qu'elle se soit manifestée auprès de son employeur avant le 7 mars 2018.

L'employeur justifie avoir adressé un courrier à la salariée le 31 janvier 2019 lui indiquant ne pas avoir de nouvelles de sa part et lui indiquant qu'il résiliait sa mutuelle, le courrier étant revenu avec la mention 'destinataire inconnu à l'adresse indiquée.'

Il résulte de ces éléments que le grief reproché à la salariée est établi étant observé que la salariée n'a pas pris l'initiative de rompre le contrat de travail alors qu'elle n'avait manifestement pas l'intention de reprendre son emploi.

Cependant, il s'évince des éléments produits que l'employeur n'a pas intégré la salariée dans son planning lors de la rentrée scolaire 2018/2019, qu'il était informé de sa mutation au sein du collège de [Localité 10] dans le cadre de son contrat de droit public en ce qu'il avait signé dès le 14 mai 2018 sa demande de mutation, qu'il n'a pas réagi à la demande de rupture conventionnelle formée par la salariée en mars 2018 et n'a initié la procédure de licenciement qu'à la fin de l'année scolaire, ces éléments tendant à établir que l'absence de Mme [A] n'a pas désorganisé le service et était 'anticipée' par l'employeur.

Au regard de ces circonstances, il doit en conséquence être jugé que le licenciement de Mme [A] est justifié par une cause réelle et sérieuse et non par une faute grave.

La salariée peut par conséquent prétendre au paiement d'une indemnité compensatrice de préavis, augmentée des congés payés afférents, ainsi qu'à une indemnité de licenciement, à hauteur des sommes, non spécifiquement contestées dans leur quantum, qui seront précisées au dispositif ci-après.

La demande de dommages et intérêts pour licenciement illégitime doit en revanche être rejetée.

Sur la demande de rappel de salaire

Mme [A] demande la condamnation de son ancien employeur au paiement d'un rappel de salaire à hauteur de 32 272,36 euros pour la période comprise entre le 1er septembre 2018 et le 14 juin 2019.

Elle indique qu'en dépit de sa reprise de travail au sein d'un autre établissement pour les heures en contrat avec l'éducation nationale, elle restait disponible pour les heures hors contrat, qu'il appartenait à l'employeur de lui fournir du travail ou de démontrer qu'elle n'était pas disponible pour cette reprise.

L'employeur conclut au rejet de la demande observant que la salariée ne l'a pas informé du terme de son arrêt maladie, de sa volonté de reprise du travail, qu'il a été informé de sa mutation au lycée [11] et de l'impossibilité matérielle de reprendre une activité au sein de l'école [8] compte tenu de son emploi à temps plein au lycée publique.

Sur ce ;

Le contrat de travail est par essence un contrat synallagmatique en vertu duquel, l'employeur s'engage à fournir un travail convenu moyennant un salaire convenu et le salarié s'engage à exécuter ce travail.

Le refus par un salarié de reprendre le travail peut être légitimé par un manquement de l'employeur à ses obligations.

En l'espèce, il ressort des éléments du dossier que Mme [A] n'a pas repris son emploi en raison de sa mutation au sein d'un autre établissement.

Elle ne peut reprocher un quelconque manquement à l'employeur en ce que d'une part elle ne l'a pas informé du terme de son arrêt de travail, d'autre part elle ne conteste pas qu'il était informé de sa mutation, qu'enfin elle ne conteste pas avoir repris un emploi à temps plein au sein de son nouvel établissement.

Il n'est pas établi que Mme [A] se soit maintenue à la disposition de l'école [8].

Son absence au sein de l'établissement à compter de la rentrée scolaire 2018 a précédemment été jugé fautif.

Au regard de ces éléments, de l'absence de fourniture de travail par la salariée, il y a lieu de débouter Mme [A] de sa demande de rappel de salaire.

Le jugement entrepris est confirmé de ce chef.

Sur la remise des documents

Il sera ordonné la remise par l'employeur des documents de fin de contrat conformes au présent arrêt, sans que le prononcé d'une astreinte soit nécessaire à ce stade de la procédure.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Chacune des parties succombant partiellement dans ses prétentions conservera la charge de ses frais irrépétibles et de ses dépens.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Statuant contradictoirement et en dernier ressort ;

Infirme le jugement du conseil de prud'hommes d'Evreux du 29 septembre 2020 en ce qu'il a dit le licenciement justifié par une faute grave ;

Le confirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau du chef infirmé et y ajoutant :

Dit le licenciement de Mme [E] [A] justifié par une cause réelle et sérieuse ;

Condamne la société Ecole [9] Ecole [8] à verser à Mme [E] [A] les sommes suivantes :

6 794,18 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 679,41 euros au titre des congés payés afférents,

10 889,27 euros brut au titre de l'indemnité légale de licenciement,

avec intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation ;

Ordonne la remise à Mme [A] des documents de fin de contrat de travail conformes au présent arrêt ;

Dit n'y avoir lieu à astreinte ;

Déboute les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel ;

Dit que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens d'appel.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20/03190
Date de la décision : 12/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-12;20.03190 ?
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