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01/12/2022 | FRANCE | N°20/02069

France | France, Cour d'appel de Rouen, Chambre sociale, 01 décembre 2022, 20/02069


N° RG 20/02069 - N° Portalis DBV2-V-B7E-IP57





COUR D'APPEL DE ROUEN



CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE

SECURITE SOCIALE



ARRET DU 01 DECEMBRE 2022











DÉCISION DÉFÉRÉE :





Jugement du CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE DIEPPE du 09 Juin 2020





APPELANT :





Monsieur [S] [F]

[Adresse 2]

[Localité 4]



représenté par Me François GARRAUD de la SCP GARRAUD OGEL LARIBI HAUSSETETE, avocat au barreau de DIEPPE su

bstituée par Me Anne-Sophie LEBLOND, avocat au barreau de DIEPPE











INTIMEE :





Société TRANSDEV NORMANDIE INTERURBAIN (TNI), venant aux droits de la Société VOYAGES ET TRANSPORTS DE NORMANDIE INTERURBAIN (VT...

N° RG 20/02069 - N° Portalis DBV2-V-B7E-IP57

COUR D'APPEL DE ROUEN

CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE

SECURITE SOCIALE

ARRET DU 01 DECEMBRE 2022

DÉCISION DÉFÉRÉE :

Jugement du CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE DIEPPE du 09 Juin 2020

APPELANT :

Monsieur [S] [F]

[Adresse 2]

[Localité 4]

représenté par Me François GARRAUD de la SCP GARRAUD OGEL LARIBI HAUSSETETE, avocat au barreau de DIEPPE substituée par Me Anne-Sophie LEBLOND, avocat au barreau de DIEPPE

INTIMEE :

Société TRANSDEV NORMANDIE INTERURBAIN (TNI), venant aux droits de la Société VOYAGES ET TRANSPORTS DE NORMANDIE INTERURBAIN (VTNI)

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Stéphane SELEGNY de la SELARL AXLAW, avocat au barreau de ROUEN

COMPOSITION DE LA COUR  :

En application des dispositions de l'article 805 du Code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 20 Octobre 2022 sans opposition des parties devant Madame BIDEAULT, Présidente, magistrat chargé du rapport.

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame BIDEAULT, Présidente

Madame ALVARADE, Présidente

Madame POUGET, Conseillère

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme WERNER, Greffière

DEBATS :

A l'audience publique du 20 Octobre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 01 Décembre 2022

ARRET :

CONTRADICTOIRE

Prononcé le 01 Décembre 2022, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

signé par Madame BIDEAULT, Présidente et par Mme WERNER, Greffière.

EXPOSÉ DES FAITS, DE LA PROCÉDURE ET DES PRÉTENTIONS DES PARTIES

Vu le jugement en date du 9 juin 2020 par lequel le conseil de prud'hommes de Dieppe, statuant dans le litige opposant M. [S] [F] à son ancien employeur, la société Voyages et Transports de Normandie, a débouté le salarié de l'intégralité de ses demandes, a débouté les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile et a condamné M. [F] aux entiers dépens ;

Vu l'appel interjeté par voie électronique le 3 juillet 2020 par M. [F] à l'encontre de cette décision qui lui a été notifiée le 17 juin précédent ;

Vu la constitution d'avocat de la société Transdev Normandie Interurbain, venant aux droits de la société Voyages et Transports de Normandie, intimée, effectuée par voie électronique le 22 juillet 2020 ;

Vu les conclusions enregistrées au greffe et notifiées par voie électronique le 25 février 2021 par lesquelles le salarié appelant, sollicitant la requalification de la relation contractuelle en contrat de travail à durée indéterminée, estimant ne pas avoir été intégralement rempli de ses droits au titre de l'exécution des contrats de travail, contestant le motif de la rupture et considérant celle-ci abusive, sollicite l'infirmation du jugement entrepris, demande à la cour de :

- requalifier le contrat de travail à durée déterminée du 8 mars 2016 en contrat de travail à durée indéterminée à temps complet,

- subsidiairement, requalifier les contrats de travail à durée déterminée du 1er septembre 2016 et du 28 novembre 2016 en contrat de travail à durée indéterminée,

- en conséquence, condamner la société à lui verser une indemnité de requalification à hauteur de 3 000 euros,

- condamner la société à lui verser :

2 000 euros à titre de dommages et intérêts au titre de l'absence de visite d'information et de prévention,

5 014,02 euros au titre des rappels de salaire de décembre 2016 à novembre 2017 outre 501,40 euros au titre des congés payés afférents,

633,48 euros au titre de rappel de prime 13ème mois,

1 623 euros au titre de rappel de congés payés de mars 2016 à octobre 2017,

430 euros au titre de rappel de prime de participation,

10 000 euros de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail,

300 euros à titre d'indemnité de licenciement,

3 000 euros à titre d'indemnité de préavis et 300 euros au titre des congés payés afférents,

2 000 euros au titre de la remise tardive des documents relatifs au contrat de travail,

2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir,

- condamner l'employeur aux dépens ;

Vu les conclusions enregistrées au greffe et notifiées par voie électronique le 31 décembre 2020 aux termes desquelles la société intimée, réfutant les moyens et l'argumentation de la partie appelante, demande à la cour de déclarer irrecevables les demandes du salarié tendant aux règlements d'un rappel de prime de 13 ème mois et d'un rappel de congés payés, soutenant la validité de l'ensemble des contrats de travail à durée déterminée conclus avec M. [F], demandant à la cour de constater l'absence de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement moral, affirmant que les griefs mentionnés au sein de la lettre de rupture sont fondés et justifiaient la rupture anticipée du contrat de travail, considérant que le salarié a été intégralement rempli de ses droits au titre de l'exécution des contrats de travail, sollicite pour sa part la confirmation de la décision déférée, le débouté de l'ensemble des demandes formées par l'appelant et sa condamnation au paiement d'une indemnité de procédure (4 000 euros) ainsi qu'aux dépens ;

Vu l'ordonnance de clôture en date du 22 septembre 2022 renvoyant l'affaire pour être plaidée à l'audience du 20 octobre 2022 ;

Vu les conclusions transmises le 25 février 2021 par l'appelant et le 31 décembre 2020 par l'intimée auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé détaillé des prétentions et moyens présentés en cause d'appel ;

SUR CE, LA COUR

La société Transdev Normandie Interurbain (TNI), qui vient aux droits de la société Voyages et Transports de Normandie Interurbain (VTNI), a pour activité le transport en commun de personnes en mode interurbain. Elle emploie plus de 11 salariés et applique la convention collective des transports routiers et activités auxiliaires du transport.

M. [F] a été embauché par la société VTNI en qualité de conducteur période scolaire aux termes d'un contrat de travail à durée déterminée à compter du 9 mars 2016 en remplacement partiel et temporaire de Mme [M] [E].

Le contrat de travail a pris fin le 5 juillet 2016 au soir.

M. [F] a de nouveau été embauché par la société VTNI en qualité de conducteur période scolaire aux termes d'un contrat de travail à durée déterminée en remplacement partiel et temporaire de M. [Z] à compter du 1er septembre 2016.

Le contrat de travail a pris fin le 4 novembre 2016.

M. [F] a ensuite été embauché par la société VTNI en qualité de conducteur période scolaire aux termes d'un contrat de travail à durée déterminée à compter du 28 novembre 2016 en remplacement de Mme [P].

M. [F] a été convoqué à un entretien préalable à une éventuelle rupture anticipée du contrat de travail à durée déterminée fixé au 20 octobre 2017 par lettre du 12 octobre précédent, mis à pied à titre conservatoire, la rupture anticipée du contrat de travail à durée déterminée pour faute grave lui étant notifiée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 30 octobre 2017 motivée comme suit :

'Nous vous avons reçu le 20/10/2017 pour l'entretien préalable à la mesure de rupture anticipée de votre contrat de travail que nous envisageons de prendre à votre encontre. Vous étiez accompagné de Madame [C] [X], représentante du personnel. J'étais moi-même accompagné de Monsieur [T] [B], responsable d'exploitation.

Les faits sont les suivants :

Le 24 août 2017, vous vous êtes rendu au service ressources humaines et avez rencontré [R] [N], assistante ressources humaines, pour lui faire part de votre mécontentement relatif au recrutement d'un nouveau conducteur en contrat à durée indéterminée sur le secteur de [Localité 6] au mois de septembre 2017 secteur auquel vous êtes rattaché. Vous avez alors accusé ouvertement votre responsable de secteur, Monsieur [L] [I] de pratiquer à votre encontre du harcèlement moral et de la discrimination sans toutefois relater d'éléments factuels.

Le lendemain, à savoir le 25 août 2017, Madame [N], assistante ressources humaines, vous a informé par téléphone de la poursuite de votre contrat de travail à durée déterminée. Vous avez souhaité alors rencontrer de nouveau Madame [R] [N] et vous êtes alors déplacé au dépôt principal. Vous avez réitéré vos accusations de harcèlement moral et de discrimination dont vous auriez été victime par Monsieur [I] sans toutefois nous apporter d'éléments très factuels. Vous avez également déclaré que vous étiez en attente des consignes de votre avocat et que vous ne vous présenteriez pas à votre prise de service le 4 : septembre 2017, jour de la rentrée scolaire.

Après avoir été reçu par [R] [N], vous avez adopté les mêmes propos accusatoires auprès de Monsieur [U] [A] [J], adjoint au responsable d'exploitation.

En tant que président du CHSCT et en raison de la gravité des accusations portées à l'encontre d'un de nos responsables de secteurs, j'ai souhaité déclencher un CHSCT extraordinaire qui s'est tenu le 6 septembre 2017. Après échange avec l'ensemble des membres du CHSCT, nous avons collégialement décidé de créer une commission d'enquête qui aurait pour objectif d'éclaircir la situation : recueillir le cas échéant des éléments factuels appuyant vos accusations et mettre en place un plan d'actions adapté et pertinent.

La première réunion de la commission d'enquête s'est tenue le 27 septembre 2017. Vous étiez invité afin d'être auditionné par la commission d'enquête. Vous ne vous êtes pas présenté à cette audition pour laquelle vous aviez reçu une invitation en date du 14 septembre 2017. Il vous avait été pourtant en amont précisé que cette commission était constituée suite à vos différentes alertes et que dans ce cadre votre participation était absolument nécessaire.

La commission ayant été constituée afin de faire toute la lumière sur les événements relatés par vous-même, elle a alors décidé de vous ré-inviter à être auditionné le 11 octobre 2017. A cette occasion, les 15 conducteurs du dépôt de [Localité 6] et Monsieur [L] [I], responsable de secteur ont également été conviés pour être entendus par la commission. A la suite des différentes auditions, la commission d'enquête a conclu qu'il n'existait pas de faits de harcèlement moral ni de discrimination à votre encontre de la part de votre responsable de secteur Monsieur [L] [I].

Suite à cette commission d'enquête, vous avez été reçu par Monsieur [W] [O], directeur dans le cadre d'un entretien préalable. Lors de cet entretien, vous avez réitéré vos propos relatifs à du harcèlement moral et de discrimination en déclarant 'que ces faits venaient du plus petit salarié jusqu'à la direction'. Vous avez également déclaré lors de cet entretien que ' vous sentiez bien dans l'entreprise depuis le retour de Mme [X] ; retour qui date du mois d'avril 2017, et l'arrivée de Monsieur [U] [A] [J].'

En effet, les faits que vous nous avez rapportés lors de cet entretien ne sont pas des faits isolés à votre encontre, et notamment concernant le stationnement des cars. Monsieur [L] [I], responsable de secteur de [Localité 6], a demandé à plusieurs conducteurs de garer correctement leurs cars. Vous savez pertinemment que nous partageons le dépôt de [Localité 6] avec une autre entreprise, ce qui nécessite que nos cars soient garés correctement. Les rappels à l'ordre que Monsieur [L] [I] a pu vous faire sur ce sujet ne justifient pas vos accusations outrancières à son égard.

Nous vous rappelons que l'article 31 du règlement intérieur dispose qu'un salarié qui a dénoncé de façon mensongère des faits inexistants de harcèlement moral dans le but de déstabiliser un supérieur hiérarchique ou un collègue pourra être sanctionné.

Nous considérons que ces faits constituent une faute grave rendant impossible votre maintien, même temporaire, dans l'entreprise.

En conséquence, nous vous signifions par la présente votre rupture anticipée pour faute grave qui prendra effet à la date d'envoi de cette lettre recommandée, soit le 30 octobre 2017.

Nous vous signalons à cet égard qu'en raison de la gravité des faits qui vous sont reprochés, le salaire correspondant à la période pendant laquelle nous vous mis à pied à titre conservatoire ne vous sera pas payé.

Cette rupture anticipée pour faute grave ne nous permet pas de maintenir votre prime de précarité. (...)'

Sollicitant la requalification de la relation contractuelle en contrat de travail à durée indéterminée, contestant la légitimité de la rupture de son contrat de travail et estimant ne pas avoir été rempli de ses droits au titre de cette rupture et de l'exécution des contrats de travail, M. [F] a saisi le conseil de prud'hommes de Dieppe, qui, statuant par jugement du 9 juin 2020, dont appel, s'est prononcé comme indiqué précédemment.

Sur le moyen tiré de l'irrecevabilité des demandes formées par le salarié tendant au règlement d'un rappel de prime de 13ème mois et d'un rappel de congés payés de mars 2016 à octobre 2017

La société demande à la cour de déclarer irrecevables les demandes de M. [F] tendant aux règlements d'un rappel de prime de 13ème mois et d'un rappel de congés payés au motif que ces deux demandes ont été présentées pour la première fois le 27 août 2019 sans faire l'objet d'une instance différente et sans que le préliminaire de conciliation n'ait été respecté.

Sur ce ;

M. [F] a saisi le conseil de prud'hommes de Dieppe le 23 août 2019.

L'ancien article R. 1452-7 du Code du travail relatif à la procédure prud'homale qui imposait le préliminaire de conciliation obligatoire a été abrogé par le décret n° 2016-660 du 20 mai 2016 relatif à la justice prud'homale et au traitement judiciaire du contentieux du travail.

La procédure devant le conseil de prud'homme présentant un caractère oral, le salarié était recevable à former de nouvelles demandes en cours de procédure.

Par confirmation du jugement entrepris, il y a lieu de rejeter ce moyen d'irrecevabilité des demandes.

Sur la requalification des contrats de travail à durée déterminée

M. [F] demande à la cour de requalifier le contrat de travail à durée déterminée du 8 mars 2016 en contrat de travail à durée indéterminée à temps complet. A titre subsidiaire, il sollicite la requalification des contrats du 1er septembre 2016 et du 28 novembre 2016 en contrat de travail à durée indéterminée à temps complet, sollicitant le versement d'une indemnité de requalification à hauteur de 3 000 euros.

Il soutient que les conditions exigées par le code du travail ne sont pas remplies en ce qu'il n'a pas remplacé les salariés effectivement mentionnés au sein de ses contrat de travail, ceux-ci étant présents au sein de l'entreprise mais affectés à un autre poste.

Il considère que les conditions du 'remplacement en cascade' ne sont pas davantage réunies en ce que les contrats ne mentionnaient pas le nom et la qualification du salarié réellement absent.

L'employeur conclut au débouté de la demande. Il soutient que les contrats de travail à durée déterminée de M. [F] sont parfaitement justifiés et conformes aux dispositions légales. Il indique qu'en cas de remplacement 'en cascade' l'article L 1242-12 du code du travail ne permet pas au salarié embauché de demander la requalification de son contrat au motif que celui-ci mentionne la qualification du salarié effectivement remplacé mais pas celle du salarié absent.

En outre, la société soutient qu'il n'y a aucune priorité d'embauche en CDI imposée à l'employeur au profit des salariés employés en CDD.

Sur ce ;

L'article L.1242-2 du code du travail dispose que, sous réserve des contrats spéciaux prévus à l'article L.1242-3, un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire et seulement dans les cinq cas qu'il énumère, parmi lesquels figurent le remplacement d'un salarié, l'accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise et les emplois saisonniers ou pour lesquels, dans certains secteurs d'activité définis par décret ou par convention ou accord collectif étendu, il est d'usage de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois.

Au terme de l'article L. 1242-12 du code du travail, le contrat de travail à durée déterminée est établi par écrit et comporte la définition précise de son motif, et notamment les mentions énumérées par ce texte ; à défaut, il est réputé être conclu pour une durée indéterminée.

Selon l'article L.1245-1 du code du travail, est réputé à durée indéterminée tout contrat conclu en méconnaissance des dispositions des articles L.1242-1 à L.1242-4, et 1242- 6 à L.1242- 8, et 1242-12 alinéa 1, et 1243-11 alinéa 1, L.1243-13, et 1244-3 et L.1244-4 du même code.

Le motif du recours à un contrat de travail à durée déterminée s'apprécie au jour de sa conclusion.

Il est de jurisprudence constante que l'article L. 1242-12 du code du travail ne permet pas au salarié embauché sous CDD de demander la requalification de son CDD en CDI au motif que celui-ci mentionne la qualification du salarié effectivement remplacé, mais non celle du salarié absent.

En l'espèce, il n'est pas contesté que les différents CDD sont écrits, signés, qu'ils font mention des dates de début et de fin de contrat ou à tout le moins de l'événement dont la survenance entraîne le terme du contrat, qu'ils mentionnent un motif précis.

Le premier contrat du 9 mars 2016 indique pour motif le remplacement de Mme [E] déplacée sur le poste de Monsieur [D] [Z] employée en qualité de conducteur période scolaire au coefficient 137 V groupe 7 bis de la convention collective.

L'employeur justifie des mutations temporaires de Madame [E] et de Monsieur [Z] sur la période considérée, le contrat précisant effectivement la qualification de la salariée remplacée.

Il est également justifié de l'absence effective d'une salariée de l'entreprise, Mme [P], absente jusqu'au 15 décembre 2016 en raison d'un arrêt de travail.

Le deuxième contrat effectif à compter du 1er septembre 2016 mentionne comme motif le remplacement partiel et temporaire de M. [Z] affecté sur le service de nuit de Penly, employé en qualité de conducteur receveur au coefficient 140V groupe 9 de la convention collective.

L'employeur justifie des mutations temporaires de Monsieur [Z] sur la période considérée, le contrat précisant effectivement la qualification du salarié remplacé.

Il est également justifié de l'absence effective d'une salariée de l'entreprise, Mme [P], absente jusqu'au 15 décembre 2016 en raison d'un arrêt de travail.

Le troisième contrat conclu à compter du 28 novembre 2016 mentionne comme motif le remplacement de Mme [P], employée en qualité de conducteur période scolaire coefficient 137 V groupe 7 bis pendant son absence liée à la maladie.

L'employeur produit les justificatifs des absences de Mme [P] sur la période comprise entre le 28 novembre 2016 et le 20 octobre 2017, date de rupture de la relation contractuelle, en versant au débats les arrêts de travail de Mme [P].

Il ressort de l'article 7 du contrat de travail qu'en dehors des périodes d'activité scolaire, le contrat de travail de M. [F], comme précédemment celui de Mme [P], était suspendu.

En raison de cette suspension, M. [F] a accepté et signé trois avenants le 29 juin 2017 prévoyant qu'il travaillerait du 10 au 13 juillet 2017 en remplacement de M. [I] en congés payés, du 31 juillet au 4 août 2017 en remplacement de M. [I] en congés payés puis du 14 au 25 août en remplacement de M. [Y] en congés payés.

Au vu de ces éléments, les motifs de recours aux contrats de travail à durée déterminée étant justifiés, les contrats étant réguliers, aucune requalification n'est encourue, de sorte que la cour confirme le jugement entrepris.

Par voie de conséquence, M. [F] doit être débouté de sa demande d'indemnité de requalification et d'indemnité subséquente.

Sur la demande de dommages et intérêts pour absence de visite d'information et de prévention

M. [F] soutient, qu'alors que son employeur connaissait sa qualité de travailleur handicapé, il n'a bénéficié d'une visite d'information et de prévention à l'embauche que le 6 février 2017. En outre, il indique que lors de cette visite, des préconisations ont été mentionnées par le médecin du travail dont l'employeur n'a pas tenu compte.

Il considère que ces manquements lui ont causé un préjudice dont il demande réparation à hauteur de 2000 euros de dommages et intérêts.

L'employeur soutient que le salarié ne justifie d'aucun préjudice lié à l'absence temporaire de visite. Il justifie avoir organisé une visite auprès des services de la médecin du travail le 6 février 2017.

Il soutient avoir respecté les préconisations du médecin du travail, le salarié ayant notamment bénéficié d'un bus avec siège adapté.

Sur ce ;

L'article R.4624-10 du code du travail, dans sa version applicable en 2016, dispose que le salarié bénéficie d'un examen médical avant l'embauche ou au plus tard avant l'expiration de la période d'essai par le médecin du travail.

Il ressort des éléments produits que le premier contrat de travail du salarié au sein de l'entreprise a débuté le 8 mars 2016 et que la visite d'information et de prévention prévue à compter du 1er janvier 2017 n'a été organisée que le 6 février 2017.

Il appartient cependant à M. [F] de démontrer que ce retard dans l'organisation de la visite médicale d'embauche a engendré le préjudice dont il demande réparation. En l'espèce, il n'invoque ni ne démontre aucune inaptitude à l'emploi occupé au cours de l'exécution de son contrat de travail non plus que de conséquences médicales résultant directement de la défaillance de l'employeur.

A défaut de démonstration d'un préjudice à ce titre, il y a lieu de débouter le salarié de sa demande de dommages et intérêts sur ce fondement.

A l'issue de la visite médicale du 6 février 2017, le médecin du travail a rendu les préconisations suivantes :' contre indication au poste les bras en élévation, contre-indication aux efforts répétés, mise à disposition d'un bus avec siège confort adapté (réglage lombaire)'.

En application de l'article L 4121-1 du code du travail, l'employeur, tenu d'une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l'entreprise, doit en assurer l'effectivité.

Dès lors qu'il s'agit d'une obligation de sécurité de résultat à la charge exclusive de l'employeur, la charge de la preuve de son bon accomplissement incombe à ce dernier et non au salarié.

En l'espèce, l'employeur justifie avoir respecté les préconisations du médecin du travail en ce qu'il produit des éléments aux fins d'établir que l'ensemble des bus fait l'objet d'une révision complète tous les 6 mois, que les cars sont équipés de siège sur coussin d'air. Il ressort des témoignages de M. [G], chef d'atelier et de M. [B], responsable d'exploitation, que M. [F] a bénéficié d'un siège réglable sur coussin d'air permettant d'amortir les chocs verticaux et réglable pour sa taille, son poids à la hauteur voulue.

Il ne relevait pas des missions du salarié d'effectuer des missions les bras en élévation ou des efforts répétés, ce qui n'est d'ailleurs pas particulièrement soutenu par M. [F].

Au vu de ces éléments, par confirmation du jugement entrepris, le salarié doit être débouté de sa demande de dommages et intérêts.

Sur la demande de rappel de salaire

Aux termes de l'article L 3171-4 du code du travail en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Si la preuve des horaires de travail effectués n'incombe ainsi spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.

M. [F] soutient ne pas avoir été intégralement rempli de ses droits au titre de son salaire pour la période comprise entre décembre 2016 et novembre 2017.

Il affirme qu'une durée hebdomadaire de travail de 31 heures était prévue pour la période comprise entre le 1er septembre 2016 et le 8 juillet 2017 alors qu'il effectuait 32 heures de travail par semaine. Il revendique en conséquence un rappel de salaire à hauteur de 15 minutes par jour.

En outre à compter du 2 octobre 2017, il soutient que si son temps de trajet quotidien a bien été évalué à 6h40 au lieu de 6h20 par son employeur, soit un temps hebdomadaire de 32 heures, il n'a jamais été rémunéré de cette heure supplémentaire.

Au soutien de ses allégations, le salarié produit ses contrats de travail, avenants et annexes précisant ses horaires de travail, la durée hebdomadaire de travail.

Il ressort de la comparaison des annexes du 15 septembre 2017 et du 2 octobre 2017 que le temps de travail du salarié est passé de 31 heures à 32 heures sans que la nature de son activité ne soit modifiée.

Le salarié verse ainsi des éléments préalables qui peuvent être discutés par l'employeur et qui sont de nature à étayer sa demande.

L'employeur conclut au débouté de la demande. Il justifie des horaires de travail effectués par le salarié en versant les annexes au contrat de travail.

Il rappelle que les contrats de travail du salarié prévoyaient des modulations du temps de travail en lien notamment avec les périodes de vacances scolaires, M. [F] étant embauché en qualité de conducteur scolaire.

Ainsi, il expose que le salarié travaillait 31 heures par semaine au cours de l'année scolaire 2016/2017, 32 heures par semaine au cours de l'année 2017/2018, que son contrat de travail était suspendu durant les périodes de vacances scolaires, qu'il était rémunéré des éventuelles heures complémentaires effectuées, rappelant en outre qu'au cours de l'été 2017, conformément aux stipulations contractuelles, il a bénéficié d'avenants temporaires lui permettant de remplacer des salariés absents.

L'employeur verse aux débats les contrats de travail et les bulletins de salaire de M. [F] aux fins d'établir qu'il a été rempli de ses droits au titre de son salaire et des heures complémentaires effectuées.

Il ressort des bulletins de paie et des contrats que le salarié était rémunéré sur la base des jours travaillés hors période de vacances scolaires, des tableaux des horaires contractuellement prévus par les documents intitulés annexes.

Il ressort de la lecture des bulletins de paie que le salarié a régulièrement perçu des heures complémentaires dénommées 'heures supplémentaires majorées à 25 %'.

En outre, il sera constaté que le salarié, qui forme une demande forfaitaire pour les périodes de vacances scolaires et les périodes hors vacances scolaires ne peut légitiment soutenir avoir effectué la même tournée de ramassage des élèves au cours des mois estivaux alors même qu'il ne conteste pas avoir été employé dans le cadre d'autres missions.

Au vu des éléments produits de part et d'autre, et sans qu'il soit besoin d'une mesure d'instruction, la cour a la conviction au sens du texte précité que M. [F] n'a pas effectué d'heures complémentaires non rémunérées.

Au vu de ces éléments, le jugement entrepris qui a débouté M. [F] de sa demande de rappel de salaire doit être confirmé.

Sur la demande de rappel de la prime de 13ème mois

M. [F] rappelle que la convention collective applicable prévoit le versement d'un treizième mois au profit des salariés ayant une année d'ancienneté au 31 décembre de chaque année.

Considérant avoir acquis plus d'un an d'ancienneté en ce qu'il a été embauché le 8 mars 2016, le salarié considère qu'il aurait dû percevoir cette prime.

Constatant que l'employeur lui a versé à ce titre une somme de 444,22 euros au lieu et place de la somme de 1 370 euros, il sollicite sa condamnation au paiement de la somme résiduelle de 926 euros.

L'employeur soutient que le salarié ne justifiait pas d'une année d'ancienneté à la date de la rupture de la relation contractuelle rappelant qu'aucun contrat n'a été signé entre les parties entre le 6 juillet et le 31 août 2016 et entre le 5 et le 27 novembre 2016.

La société indique que par accord d'entreprise de 1988 la société a abaissé la condition d'ancienneté prévue par les dispositions conventionnelles en accordant aux salariés ayant une ancienneté comprise entre 6 mois et une année une prime égale à la moitié du salaire de base, de sorte que M. [F] s'est vu accorder une prime dite '13ème mois' à hauteur de 444,22 euros.

Sur ce ;

Il sera rappelé que la cour a débouté le salarié de sa demande de requalification de la relation contractuelle en contrat de travail à durée indéterminée.

A la date de la rupture du contrat de travail (30 octobre 2017), le salarié, embauché depuis le 28 novembre 2016, disposait d'une ancienneté inférieure à une année.

La société établit avoir appliqué l'accord d'entreprise de 1988 en octroyant au salarié une prime correspondant à une ancienneté comprise entre 6 mois et une année.

Au vu de ces éléments, la cour constate que M. [F] a été rempli de ses droits.

Le jugement entrepris est confirmé de ce chef.

Sur la demande de rappel de prime de participation

Le salarié soutient qu'il est versé à chaque salarié une prime de participation aux bénéfices, qu'au titre de l'année 2017 il a été versé une prime de 430 euros à chaque salarié et qu'en conséquence il est bien fondé à obtenir le paiement de cette prime.

L'employeur produit l'accord de participation en vigueur au sein de l'entreprise, soutient qu'une somme de 273,62 euros a été versée à M. [F] en juillet 2017 au titre de la participation, que n'ayant pas été présent sur toute la période de référence, il a été rempli de ses droits à ce titre.

Sur ce ;

Il résulte de l'accord de participation du 26 novembre 2009 en vigueur que chaque salarié comptant au moins trois mois d'ancienneté dans l'entreprise peut prétendre au versement de la prime de participation.

Il est en outre précisé que lorsque le salarié n'a pas accompli une année entière de présence dans l'entreprise, les plafonds sont calculés au prorata de la durée de présence, chaque mois commencé étant compté pour un mois entier.

Il ressort de la lecture du bulletin de paie de juillet 2017 que M. [F] a perçu la somme de 273,62 euros au titre de la participation.

Au vu de ces éléments, il apparaît que le salarié a été rempli de ses droits à ce titre.

Le jugement entrepris est confirmé de ce chef.

Sur la demande de rappel de congés payés

M. [F] soutient que l'employeur ne l'a pas rempli de ses droits au titre des congés payés en ce qu'au regard de la requalification du CDD en CDI il aurait dû bénéficier de 50 jours de congés payés de mars 2016 à octobre 2017 soit une somme équivalente à 3 441,40 euros ; que déduction faite des sommes versées, l'employeur demeure redevable de la somme de 1 623 euros.

La société conclut au débouté de la demande au motif que le salarié ne peut solliciter le bénéfice de congés payés pour les périodes pendant lesquelles il n'y a pas eu de relation contractuelle. Elle produit un tableau récapitulatif des sommes versées au titre des congés payés pour chaque période travaillée précisant qu'une erreur a été commise pour la période comprise entre décembre 2016 et août 2017 rectifiée sur le bulletin de paie d'août 2017 par le versement de la somme de 562,27 euros au titre de 16 jours de congés payés.

Sur ce ;

La relation contractuelle n'a pas été requalifiée en contrat de travail à durée indéterminée.

M. [F] ne peut en conséquence prétendre au bénéfice des congés payés que pour les mois effectivement travaillés dans le cadre de ses différents contrats de travail à durée déterminée.

Les décomptes et justificatifs produits par l'employeur, non utilement contestés par le salarié, établissent que M. [F] a été rempli de ses droits au titre des congés payés.

Le jugement entrepris, qui a débouté le salarié de sa demande, doit être confirmé de ce chef.

Sur la rupture du contrat de travail

M. [F] demande à la cour de juger dépourvu de cause réelle et sérieuse la rupture de son contrat de travail. Il conteste le motif de la rupture du contrat, rappelle qu'en application de l'article L 1152-2 du code du travail, aucun salarié ne peut être licencié pour avoir témoigné ou relaté des faits de harcèlement moral, sauf mauvaise foi. Il soutient qu'en l'espèce, depuis son embauche au sein de l'entreprise, il a fait l'objet d'un traitement particulier, que ses conditions de travail se sont dégradées, qu'il a été victime de propos racistes et n'a jamais bénéficié de contrat de travail à durée indéterminée.

Il affirme avoir été victime de harcèlement moral et de discrimination à raison de ses origines.

L'employeur soutient que M. [F] n'a été victime d'aucune dégradation de ses conditions de travail, d'aucune discrimination, d'aucun harcèlement moral, le seul fait qu'un contrat de travail à durée indéterminée ne lui ait pas été proposé étant insuffisant à établir l'existence d'une discrimination.

La société indique avoir diligenté une enquête suite aux accusations formulées par le salarié, observant que M. [F] ne s'est pas présenté lors de la première convocation de la commission d'enquête et qu'il n'a décrit aucun fait précis lors de sa seconde convocation.

L'intimée soutient que le salarié a fait preuve d'une particulière mauvaise foi, ses contestations et allégations étant dépourvues de tout fondement , qu'il s'est montré agressif dans ses propos et que moins de deux mois après la rupture anticipée de son contrat, M. [F] a de nouveau postulé pour intégrer la société VTNI au poste de conducteur, sur le même secteur d'[Localité 6], supervisé par M. [I], son prétendu harceleur.

Sur ce ;

Pour satisfaire à l'exigence de motivation posée par l'article L.1232-6 du code du travail, la lettre de licenciement doit comporter l'énoncé de faits précis et contrôlables.

La lettre de licenciement, précisée le cas échéant par l'employeur, qui fixe les limites du litige, lie les parties et le juge qui ne peut examiner d'autres griefs que ceux qu'elle énonce.

La faute grave s'entend d'une faute d'une particulière gravité ayant pour conséquence d'interdire le maintien du salarié dans l'entreprise.

La preuve des faits constitutifs de faute grave incombe à l'employeur et à lui seul et il appartient au juge du contrat de travail d'apprécier au vu des éléments de preuve figurant au dossier si les faits invoqués dans la lettre de licenciement sont établis, imputables au salarié, et s'ils ont revêtu un caractère de gravité suffisant pour justifier l'éviction immédiate du salarié de l'entreprise.

En l'espèce, il ressort de la lettre de rupture reproduite ci-dessus que le contrat de travail de M. [F] a été rompu l'employeur lui reprochant d'avoir dénoncé de façon mensongère des faits de discrimination et de harcèlement moral à l'encontre notamment de son supérieur.

M. [F] soutenant avoir été effectivement victime de discrimination et de harcèlement moral au cours de la relation contractuelle, il appartient en premier lieu à la cour d'examiner ces allégations.

Aux termes de l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Aux termes de l'article L.1132-1 du code du travail, aucune personne ne peut notamment faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie par l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008, notamment en matière de licenciement, en raison de ses origines.

Tout licenciement prononcé en méconnaissance de ces textes est nul.

Selon les textes, applicables en matière de discrimination et de harcèlement, le salarié a la charge de présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement ou d'une discrimination et il incombe ensuite à la partie défenderesse de prouver que les faits qui lui sont imputés ne sont pas constitutifs de harcèlement ou de discrimination et qu'ils sont justifiés par des éléments objectifs étrangers et à tout harcèlement ou discrimination.

Dès lors qu'ils peuvent être mis en rapport avec une dégradation des conditions de travail, les certificats médicaux produits par la salariée figurent au nombre des éléments à prendre en considération pour apprécier l'existence d'une situation de harcèlement laquelle doit être appréciée globalement au regard de l'ensemble des éléments susceptibles de la caractériser.

Il en résulte que le harcèlement moral est constitué, indépendamment de l'intention de son auteur, dès lors que sont caractérisés des agissements répétés ayant pour effet une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d'altérer sa santé ou de compromettre son avenir professionnel.

En l'espèce, il y a lieu de constater que M. [F] invoque avoir été victime de discrimination à raison de ses origines et de harcèlement moral de la part de son employeur sans précisément distinguer ces deux demandes.

M. [F] expose que son employeur n'a pas respecté les préconisations du médecin du travail, qu'il n'a jamais bénéficié de contrat de travail à durée indéterminée alors que plusieurs embauches ont eu lieu au sein de l'entreprise, notamment au profit de membres des familles d'autres salariés, qu'il a été victime de propos racistes de la part de plusieurs de ses collègues, que son chef de site, M. [I], alerté, n'a pas pris en considération ses mauvaises conditions de travail mais les a accentué en lui demandant systématiquement de procéder au nettoyage des différents bus, de se déplacer régulièrement sur le site de [Localité 5] pour y faire les pleins des véhicules.

Il soutient avoir alerté M. [O], directeur générale de TNI sans succès et avoir pris l'attache de Mme [N] pour lui faire part de ses difficultés.

Au soutien de ses allégations, M. [F] produit :

- ses contrats de travail,

- le courrier adressé le 8 mars 2017 à M. [O],

- des échanges SMS au sein desquels il demande à un collègue de lui fournir une attestation relative aux propos discriminants accompagné d'un refus de ce dernier,

- une partie de ses feuilles de route mentionnant l'existence de pleins de gasoils,

- la copie d'offres d'emplois au sein de la société,

- l'attestation Mme [X], déléguée du personnel indiquant avoir demandé à trois reprises à l'employeur les raisons pour lesquelles M. [F] n'avait pas reçu de proposition de travail,

- l'attestation de Mme [K], agent de comptoir, sa compagne qui relate avoir entendu M. [F] demandé que le compte rendu de la commission d'enquête soit établi par écrit et avoir entendu M. [H] indiquer que son directeur voulait 'éjecter' M. [F] de la société.

Il ressort de ces éléments que les pièces produites par le salarié ne permettent pas d'établir l'existence matérielle de propos racistes tenus à son encontre par son employeur, son supérieur hiérarchique ou ses collègues.

Il ne résulte pas davantage des éléments versés aux débats que le salarié ait été astreint à des tâches subalternes telles que faire les pleins des véhicules ou procéder à leur nettoyage dans des proportions différentes de celles attribuées à ses collègues.

M. [F] ne verse pas aux débats d'éléments tendant à établir la dégradation de ses conditions de travail ou la détérioration de son état de santé en lien avec ses conditions de travail.

Il a été précédemment jugé que l'employeur avait respecté les préconisations du médecin du travail.

Les éléments produits permettent d'établir qu'alors que le salarié travaillait au sein de l'entreprise dans le cadre d'un contrat de travail à durée déterminée, des offres d'embauche en contrat de travail à durée indéterminée ont été diffusées.

Si M. [F] justifie avoir demandé par courrier du 8 mars 2017 à M. [O] quel était son avenir au sein de la société et les raisons pour lesquelles aucun contrat de travail à durée indéterminée ne lui était proposé, il ne produit pas d'élément relatif au profil des salariés effectivement recrutés ne mettant pas la cour en mesure d'évaluer les raisons pour lesquelles il aurait été écarté de ce procédé de recrutement.

Au regard de ces éléments, il y a lieu de constater que M. [F] ne produit pas d'éléments de nature à établir l'existence de faits précis de nature à laisser supposer l'existence de la discrimination invoquée ou l'existence de faits de harcèlement moral.

Il sera rappelé qu'aucune personne ayant témoigné de bonne foi d'un agissement discriminatoire ou d'un harcèlement, ou l'ayant relaté, ne peut être traitée défavorablement de ce fait.

Ainsi, le salarié qui relate des faits de harcèlement moral ou de discrimination ne peut être licencié pour ce motif, sauf mauvaise foi, laquelle ne peut résulter de la seule circonstance que les faits dénoncés ne sont pas établis.

En outre, la mauvaise foi ne peut résulter que de la méconnaissance, par le salarié, de la fausseté des faits qu'il dénonce.

L'absence éventuelle dans la lettre de licenciement de mention de la mauvaise foi avec laquelle le salarié a relaté des agissements de harcèlement moral n'est pas exclusive de la mauvaise foi de l'intéressé, laquelle peut être alléguée par l'employeur devant le juge.

En l'espèce, l'employeur soutient la mauvaise foi du salarié caractérisée en ce que d'une part M. [F] ne s'est pas présenté lors de sa convocation le 27 septembre 2017 par la commission d'enquête, d'autre part n'a fourni aucun élément tangible lors de son audition par la commission mais s'est emporté avec agressivité et enfin, a postulé moins de deux mois après la rupture de son contrat de travail au poste dont il avait été évincé.

Il ressort des éléments produits par l'employeur qu'en raison des faits dénoncés par le salarié, la société VTNI a saisi le CHSCT et a mené une enquête.

Régulièrement convoqué le 27 septembre 2017 par la commission d'enquête, M. [F] ne s'est pas présenté sans motif légitime.

Auditionné à l'issue d'une seconde convocation le 11 octobre 2017, le salarié n'a décrit aucun fait, a indiqué qu'il avait communiqué les éléments aux représentants du personnel, n'a rien souhaité ajouter et a décidé de quitter la salle sans raison, la représentante du personnel, Mme [X] indiquant ne pas avoir entendu de propos racistes tenus à l'encontre du salarié, ne pas avoir assisté ou constaté des faits de harcèlement ou de discrimination.

L'employeur justifie que le 25 janvier 2018, soit moins de quatre mois après la fin de l'enquête CHSCT et moins de trois mois après la rupture anticipée de son contrat de travail, M. [F] a postulé pour intégrer de nouveau la société et occuper un poste de conducteur sur le secteur d'[Localité 6], supervisé par M. [I] dont il avait évoqué le harcèlement.

Au regard de ces éléments, il doit être jugé que la mauvaise foi de M. [F] est établie. Le fait d'avoir relaté mensongèrement des faits de harcèlement moral et de discrimination caractérise un comportement fautif justifiant la rupture anticipée du contrat de travail.

Le jugement entrepris est confirmé de ce chef.

Le salarié doit par conséquent être débouté de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement illégitime ainsi que de ses prétentions relatives aux indemnités de rupture.

Sur les dépens et frais irrépétibles

M. [F], succombant en son appel, est condamné aux dépens.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de l'employeur les frais non compris dans les dépens qu'il a pu exposer.

Il convient en l'espèce de condamner M. [F], appelant succombant dans la présente instance, à lui verser la somme de 400 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel.

Il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge du salarié les frais irrépétibles exposés par lui.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Statuant contradictoirement et en dernier ressort ;

Confirme en toutes ses dispositions le jugement du conseil de prud'hommes de Dieppe du 9 juin 2020 ;

Y ajoutant :

Condamne M. [S] [F] à verser à la société Transdev Normandie Interurbain (TNI) la somme de 400 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel ;

Rejette toute autre demande ;

Condamne M. [S] [F] aux entiers dépens d'appel.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20/02069
Date de la décision : 01/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-01;20.02069 ?
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