N° RG 20/00799 - N° Portalis DBV2-V-B7E-INKJ
COUR D'APPEL DE ROUEN
CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE
SECURITE SOCIALE
ARRET DU 24 NOVEMBRE 2022
DÉCISION DÉFÉRÉE :
Jugement du CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE ROUEN du 20 Janvier 2020
APPELANT:
S.A.R.L. EMAS GROUP
[Adresse 1]
[Localité 7]
représentée par Me SCOLAN de la SELARL GRAY SCOLAN, avocat au barreau de ROUEN
INTIME :
Monsieur [X] [W]
[Adresse 2]
[Localité 6]
représenté par Me Tamara LOWY, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS
INTERVENANT FORCE :
Association AGS - CGEA DE [Localité 9]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 9]
n'ayant pas constitué avocat
régulièrement assignée par acte d'huissier en date du 27/04/2022
INTERVENANT VOLONTAIRE :
Me [B] [J] - Mandataire liquidateur de la S.A.R.L. EMAS GROUP
[Adresse 3]
[Localité 5]
représenté par Me SCOLAN de la SELARL GRAY SCOLAN, avocat au barreau de ROUEN
COMPOSITION DE LA COUR :
Lors des débats et du délibéré :
Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente
Madame ALVARADE, Présidente
Madame BACHELET, Conseillère
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme WERNER, Greffière
DEBATS :
A l'audience publique du 18 Octobre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 24 Novembre 2022
ARRET :
REPUTE CONTRADICTOIRE
Prononcé le 24 Novembre 2022, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
signé par Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente et par Mme WERNER, Greffière.
EXPOSÉ DES FAITS, DE LA PROCÉDURE ET DES PRÉTENTIONS DES PARTIES
M. [X] [W] a été engagé par la société Emas group en qualité d'aide frigoriste par contrat de travail à durée indéterminée du 22 avril 2014.
Les relations contractuelles étaient soumises à la convention collective nationale de l'aéraulique, thermique et frigorifique.
Par requête du 18 mars 2016, le salarié a saisi le conseil de prud'hommes de Rouen en résiliation judiciaire de son contrat de travail, ainsi qu'en paiement de rappel de salaires et indemnités.
Il a été licencié le 11 août 2016 pour faute grave dans les termes suivants :
'(...) Vous ne vous êtes pas présenté à cet entretien fixé au 8 août 2016 et vous n'avez fourni aucun justificatif à votre absence ou pour une demande de report.
Nous vous informons que nous avons décidé de vous licencier pour faute grave pour les raisons suivantes :
Vous prétendez exercer un droit de retrait depuis l'agression du 15 avril 2016 commise par
M. [D] [M] à votre égard sur le lieu de travail. Vous avez fait valoir l'exercice de votre droit de retrait en vertu de l'article L. 4131-1 du code du travail par lettre du 22 avril 2016.
Vous avez justifié votre absence par un arrêt maladie du 15 au 24 avril 2016, puis par une prolongation d'arrêt maladie du 20 avril jusqu'au 8 mai 2016. Après cette date, vous n'avez transmis aucun justificatif d'absence à la direction.
Nous n'avons eu de cesse de vous demander de réintégrer votre poste de travail et de vouloir organiser un entretien avec vous pour organiser votre retour.
Nous vous avons toujours assuré que les conditions de sécurité seraient, bien évidemment, garanties. Pour autant, vous avez toujours refusé la moindre perspective de retour malgré les garanties qui vous étaient données. Vous vous limitez à persister dans votre refus sans motif légitime, invoquant le fait que vous seriez amené à croiser quotidiennement M. [D] [M] sur le lieu de travail. Cette circonstance ne suffit pas à elle seule pour prétendre que votre sécurité ne serait pas garantie. Vous ne vous montrez aucunement enclin à trouver une solution.
Aussi, nous considérons que vous exercez abusivement votre droit de retrait depuis plusieurs mois et que, d'une certaine manière, vous adoptez une posture de dénigrement à l'égard de la direction dans sa capacité à prendre les mesures de sécurité adéquates.
Nous considérons que ce comportement n'est pas admissible, ainsi que les accusations proférées de harcèlement sur votre dernier courrier du 25 juillet 2016, tendant à gagner du temps sont inacceptables.
Le 7 juillet 2016, nous avons de nouveau contesté le bien fondé de votre exercice du droit de retrait depuis avril 2016 et que nous n'acceptions qu'un droit de retrait de deux jours après le terme de votre arrêt de travail. C'est pourquoi nous vous avons mis en demeure d'avoir à justifier votre absence à compter du 11 mai 2016 sous 48 heures.
Vous n'avez pas cru devoir obtempérer à cette mise en demeure. Nous considérons que ce comportement est fautif et qu'il y a donc absence injustifiée depuis le 11 mai 2016.
Nous considérons que l'ensemble de ces faits constitue une faute grave rendant impossible votre maintien, même temporaire, dans l'entreprise, et justifie donc votre licenciement pour faute grave. (...)'
Par jugement du 20 janvier 2020, le conseil de prud'hommes a :
- dit que le licenciement de M. [W] était nul et a condamné la société Emas group à lui verser les sommes suivantes :
dommages et intérêts pour atteinte à l'intégrité physique et violation d'une liberté fondamentale : 20 000 euros,
rappel de salaire du 8 mai au 13 août 2016 : 5 291 euros,
congés payés sur rappel de salaire : 529 euros,
rappel de salaire au titre des heures supplémentaires : 25 502 euros,
congés payés y afférent : 2 550 euros,
dommages et intérêts pour défaut d'information relatif au repos compensateur : 1 500 euros,
indemnité forfaitaire pour travail dissimulé : 10 065,96 euros,
indemnité compensatrice légale de préavis : 3 355,32 euros,
congés payés y afférent : 335 euros,
indemnité spéciale de licenciement : 1 150 euros,
indemnité pour licenciement nul :10 065,96 euros,
indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile : 1 200 euros,
- ordonné la délivrance des bulletins de salaire, d'un certificat de travail et d'une attestation Pôle emploi conformes et ce sous astreinte de 10 euros par jour de retard à compter de la mise à disposition du jugement, le conseil se réservant la liquidation de l'astreinte,
- débouté M. [W] de son autre demande et laissé les dépens de la présente instance à la charge de la société Emas group.
La société Emas group a interjeté appel de cette décision le 12 février 2020.
Par jugement du 25 mars 2021, le tribunal de commerce de Versailles a prononcé la liquidation judiciaire de la société Emas group, et nommé la SELARL ML Conseils prise en la personne de M. [B], en qualité de mandataire liquidateur.
Par conclusions remises le 12 mai 2021, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé de ses moyens, la société Emas group et la SELARL ML Conseils, ès qualités, demandent à la cour de donner acte à la SELARL ML Conseils de son intervention volontaire et reprise d'instance, d'infirmer le jugement rendu en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a débouté M. [W] de sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral, en conséquence, débouter M. [W] de ses demandes, le condamner à leur verser la somme de 3 600 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont le montant sera recouvré par la SELARL Gray & Scolan, avocats, pour ceux la concernant, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Par conclusions remises le 15 septembre 2022, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé de ses moyens, M. [W] demande à la cour de :
- recevoir la demande d'intervention forcée et en déclaration de jugement commun à l'égard de l'AGS-CGEA de [Localité 9] et la demande d'intervention volontaire de la SELARL MLConseils prise en la personne de M. [B] en qualité de liquidateur de la société Emas group,
- confirmer le jugement en son principe en ce qu'il a prononcé les condamnations ci-dessous, et en réformer le cas échéant les montants, en conséquence, fixer au passif de la société Emas group les sommes suivantes :
dommages et intérêts pour atteinte à l'intégrité physique et violation d'une liberté fondamentale : 20 000 euros,
rappel de salaire du 8 mai au 13 août 2016 : 5 291 euros,
congés payés afférents : 529 euros,
rappel de salaire au titre des heures supplémentaires : 25 502 euros,
congés payés afférents : 2 550 euros,
dommages et intérêts pour défaut d'information relatif au repos compensateur : 6 130 euros [montant réformé],
indemnité forfaitaire pour travail dissimulé : 17 256 euros [montant réformé],
indemnité compensatrice légale de préavis : 5 752 euros [montant réformé],
congés payés afférents : 575 euros [montant réformé]
indemnité spéciale de licenciement : 1 150 euros,
indemnité pour licenciement nul, et à titre subsidiaire, sans cause réelle et sérieuse : 43 140 euros [montant réformé],
- infirmer le jugement en ce qu'il l'a débouté de sa demande de dommages-intérêts pour harcèlement moral et fixer au passif de la société EMAS Group la somme de 20 000 euros à ce titre,
- dire les AGS tenues de garantir les sommes fixées au passif de la société,
- ordonner la délivrance des bulletins de salaires, d'un certificat de travail et d'une attestation Pôle emploi conformes, et ce, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir, la cour se réservant la liquidation de l'astreinte,
- dire que les sommes porteront intérêts au taux légal et ordonner leur capitalisation,
- condamner la SELARL ML Conseils, à lui verser la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens,
Assignée en intervention forcée le 27 avril 2022, l'AGS-CGEA de [Localité 9] a indiqué le 9 mai 2022 qu'elle ne serait pas représentée.
L'ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 29 septembre 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur le rappel d'heures supplémentaires
Aux termes de l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.
Il résulte des articles L. 3171-2 à L. 3171-4 du code du travail, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.
En l'espèce, M. [W], tout en précisant qu'il n'a tenu compte que des temps de trajet effectués entre le dépôt de la société à [Localité 7] et les chantiers, lesquels sont assimilés à du temps de travail effectif en vertu de l'article 5-2 de la convention collective, produit un décompte, jour par jour, précisant les horaires de début et de fin de service, ainsi que le temps de la pause déjeuner.
Il verse par ailleurs aux débats deux attestations d'anciens collègues, à savoir M. [S], qui a travaillé au sein de la société de mars 2015 à décembre 2016, et M. [R] qui y a travaillé de mars 2016 à mars 2017.
Ainsi, M. [S] expose qu'il travaillait conjointement avec M. [W] sur des journées commençant aux environs de 8 heures et finissant aux environs de 19 heures, avec une heure seulement de pause déjeuner, précisant qu'il travaillait souvent six jours par semaine, surtout en 2015, et même parfois sept jours, et que lorsqu'ils se rendaient sur des chantiers en province, ils prenaient la route en milieu de nuit pour débuter le chantier à 8-9 heures et reprenaient la route après la fin du chantier, pour arriver en milieu de nuit, voire le matin suivant, et ce, en passant au siège social de l'entreprise à [Localité 7].
M. [R] indique quant à lui avoir souvent travaillé en équipe avec M. [W] et que leurs horaires de travail étaient 'grosso modo' 8h-17h avec une heure seulement de pause déjeuner et quelques rares fois le samedi et le dimanche, notant qu'ils finissaient souvent tard leurs chantiers en province et qu'ils devaient rentrer au dépôt situé à [Localité 7] pour y décharger le matériel avant de pouvoir être libérés, expliquant prendre souvent la route au petit matin pour commencer en début de matinée et, de même, pour le retour, dans la soirée.
M. [W], dont les plannings sont conformes aux horaires ainsi décrits, présente des éléments suffisamment précis permettant à la société Emas group, qui assure le contrôle des heures effectuées, de pouvoir y répondre utilement.
Or, en l'espèce, la SELARL ML Conseils et la société Emas group se contentent d'indiquer que les temps de trajet entre le domicile et l'entreprise ne sont pas assimilables à du temps de travail effectif, que M. [W] n'a jamais sollicité le paiement d'heures supplémentaires pour l'année 2014 dans ses courriers des 2 et 12 février 2016 alors qu'il en réclamait pour 2015 et que, s'agissant de cette période, il a été régularisé les heures supplémentaires impayées du 29 décembre 2014 au 21 novembre 2015, avec précision du nombre d'heures effectuées par semaine et des dimanches travaillés.
Outre que la seule absence de réclamation d'heures supplémentaires ne permet pas en soi d'en déduire qu'elles n'ont pas été effectuées, en l'espèce, contrairement à ce qu'affirment la SELARL ML Conseils et la société Emas group, dès le 10 février 2016, M. [W] en a sollicité le paiement pour 2014 en expliquant les raisons l'ayant conduit à ne pas les réclamer dans son courrier du 2 février, à savoir qu'il n'avait fait état que des horaires dont il se souvenait. Ainsi, dès le 10 février, il a demandé à la société Emas group de se référer aux devis, factures de clients ou tous autres documents en sa possession pour le faire bénéficier des majorations de salaires auxquelles il pouvait prétendre.
Par ailleurs, M. [W] a soustrait de sa demande les heures supplémentaires payées par la société Emas group en février 2016, lesquelles n'étaient nullement conformes à ses réclamations, pourtant particulièrement explicitées dans son courrier du 2 février.
Enfin, il explique n'avoir tenu compte que des trajets entre l'entreprise et les chantiers, à l'exclusion des trajets entre son domicile et l'entreprise ou les chantiers, sans que la SELARL ML Conseils et la société Emas group n'apportent la moindre contradiction utile à cette assertion.
Aussi, à défaut de tout élément produit par la SELARL ML Conseils et la société Emas group pour remettre en cause la réalité des heures ainsi réclamées par M. [W], il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a intégralement fait droit à sa demande et lui a alloué la somme de 25 502 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires, outre 2 550 euros au titre des congés payés afférents.
Sur la demande de dommages et intérêts pour absence d'information sur les repos compensateurs
Rappelant que le contingent annuel d'heures supplémentaires est fixé à 220 heures et qu'il a effectué 752 heures supplémentaires en 2014 et 1 026 en 2015, M. [W] réclame la somme de 6 130 euros correspondant à 50 % du taux horaire de 532 heures et 806 heures.
En réponse, la SELARL ML Conseils et la société Emas group font valoir que l'article 4.1.3 de la convention collective permet aux entreprises de choisir de remplacer le paiement de tout ou partie des heures supplémentaires par un repos compensateur équivalent, choix que la société Emas group n'a pas fait, préférant payer les heures et que, par ailleurs, il n'y a pas eu de dépassement du contingent légal de 220 heures.
Il résulte des développements présentés par M. [W] que sa réclamation porte en réalité sur l'absence d'information sur la contrepartie obligatoire en repos, et non pas sur les repos compensateurs, aussi, au regard des heures supplémentaires qui lui ont été accordées, il en ressort qu'il a dépassé le contingent légal d'heures supplémentaires tel qu'il l'indique dans ses conclusions, sans qu'aucune information ne lui ait été apportée sur ses droits quant à la contrepartie obligatoire en repos, et il convient en conséquence d'infirmer le jugement sur le montant accordé et de faire droit à sa demande en lui allouant la somme de 6 130 euros, laquelle correspond à la contrepartie obligatoire en repos à laquelle il pouvait prétendre.
Sur la demande de dommages et intérêts pour atteinte à l'intégrité physique et violation d'une liberté fondamentale
M. [W] soutient que l'agression physique dont il a été victime de la part de M. [M], mari de la gérante et gérant de fait de la société Emas group, était la résultante de sa décision de saisir le conseil de prud'hommes en paiement des heures supplémentaires, aussi réclame t-il des dommages et intérêts pour atteinte à son intégrité physique et violation de sa liberté fondamentale de saisir une juridiction pour faire valoir ses droits.
La SELARL ML Conseils et la société Emas group contestent que M. [M] ait voulu empêcher M. [W] de saisir le conseil de prud'hommes et expliquent que la gérante n'a pu anticiper cette agression qui est intervenue en raison de la tension que M. [W] avait lui-même créée par ses paroles.
En l'espèce, il résulte de l'audition de M. [W] devant les services de gendarmerie que la relation se passait bien jusqu'en septembre 2015, qu'il a néanmoins constaté qu'il n'était pas payé de ses heures supplémentaires, que quelques jours avant son retour de congé en août 2015, M. [M] l'a contacté pour lui dire de ne pas se présenter à l'entreprise mais qu'ayant été informé par son avocat qu'il ne pouvait le licencier de la sorte, il lui a permis de réintégrer son poste jusqu'au mois de janvier 2016, qu'il a néanmoins continué à réclamer les heures supplémentaires effectuées, qu'en février 2016, sa propre avocate a saisi le conseil de prud'hommes, lequel a convoqué les parties à une audience de conciliation par courrier du 4 avril 2016 dont M. [M] n'a cependant pris connaissance que le 14 avril à son retour de Turquie.
Ainsi, il indique que le 15 avril, son épouse l'a déposé au travail, que M. [M] est arrivé pour lui dire qu'il avait reçu le courrier et lui demander des explications sur cette saisine, qu'ayant répondu qu'il en avait marre d'attendre la régularisation, le ton est monté, que M. [M] l'a insulté, que le collègue présent est venu calmer la situation mais qu'au moment où il lui a dit que son avocate prenait en charge l'affaire, cela a énervé M. [M] qui s'est alors mis à le frapper, qu'il lui a donné un premier coup au visage sur son nez avec sa main, puis l'a serré fort au niveau du cou, lui a porté deux coups de pied, puis à nouveau des coups avec sa main au niveau du visage pour finalement lui arracher les cheveux à l'avant de la tête.
A l'appui de cette audition, M. [W] produit le certificat médical qui lui a été délivré par le service des urgences le 15 avril et qui fait état de dermabrasions cervicales gauches, d'une petite plaie nasale, de douleur à la palpation du bassin, des régions zygomatiques droite et gauche et nasale avec une prévision d'incapacité temporaire totale de 12 jours, ainsi qu'un arrêt de travail du 15 avril au 8 mai 2016.
M. [M], également entendu par les services de gendarmerie, explique qu'ils sont cousins germains, que leur relation au travail a commencé à se dégrader deux-trois mois avant car les clients ont commencé à se plaindre de son travail, notamment parce qu'il multipliait les pauses, que ce 15 avril, il revenait d'un déplacement lors duquel, à nouveau, un client s'était plaint, qu'il en a donc fait la remarque à M. [W] qui a alors haussé le ton et que, se sentant provoqué, il l'a poussé en arrière en mettant sa main à plat sur son visage et l'a tiré par les vêtements, sans autre geste de violence, précisant qu'il ne pense pas que les traces sur son visage soient liées à ce geste et notant qu'il n'a jamais eu de contact avec le bas de son corps.
Pour ces faits, M. [M] a fait l'objet d'un rappel à la loi le 7 juin 2016.
Si ce rappel à la loi ne permet pas à lui seul de s'assurer ni des violences exactes retenues pour déclarer M. [M] coupable, ni surtout du contexte dans lequel ces violences sont intervenues, l'attestation de M. [R] est au contraire de nature à éclairer la cour en ce qu'elle émane d'un tiers au conflit.
Ainsi, il explique que le 15 avril 2016, il a été témoin de l'agression dont a été victime M. [W] alors qu'il était sur le point d'effectuer sa prise de poste à 8h, que M. [M] s'est dirigé vers lui, visiblement très énervé en l'interpellant sur sa décision d'avoir saisi le conseil de prud'hommes, qu'il s'est alors montré insultant en rabaissant M. [W] en turc, à savoir 'fils de pute', 'tu n'étais rien, c'est grâce à moi que tu as de quoi manger ton pain et c'est comme ça que tu me remercies', 'ingrat', 'honte à toi', qu'il s'est également montré menaçant lui disant 'tu vas voir ce qui va t'arriver si tu annules pas ta procédure' et qu'enfin il s'en est pris physiquement à M. [W] en lui donnant des coups de poing et de pied, qu'il a couru pour s'interposer de peur que M. [M] ne puisse s'arrêter de le frapper.
Il indique enfin que M. [M] a dit à M. [W] 'même si le conseil des prud'hommes te donne raison, je ne te paierai pas un centime, et s'il le faut, ma femme et moi, on clôturera même l'entreprise' mais aussi, en attendant l'arrivée des gendarmes, qu'il lui réserverait le même accueil à chaque fois qu'il se présenterait à son travail.
Il résulte ainsi suffisamment des éléments du dossier que M. [M] n'a pas seulement poussé violemment M. [W] mais l'a frappé et ce, en raison de la saisine du conseil de prud'hommes, droit fondamental appartenant au salarié qui s'estime lésé dans la relation contractuelle.
Il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il a alloué des dommages et intérêts pour atteinte à l'intégrité physique et violation d'une liberté fondamentale, tout en l'infirmant sur les dommages et intérêts accordés, disproportionnés par rapport au préjudice établi tel qu'il ressort de l'arrêt de travail du 15 avril au 8 mai 2016, des anxiolytiques prescrits pour dix jours et du certificat médical décrivant les lésions présentées.
Ainsi, il convient d'allouer à M. [M], une somme de 1 500 euros en réparation du préjudice subi, lequel prend également en compte le fait que ces violences se sont inscrites dans un contexte de violation d'un droit fondamental.
Sur le harcèlement moral
M. [W] explique que la société Emas group a souhaité se séparer de lui dès août 2015 à la suite de ses congés payés, qu'elle lui a demandé de ne plus se présenter, qu'ayant néanmoins pris contact avec son avocat qui lui a expliqué qu'elle ne pouvait se séparer de lui de la sorte, elle a multiplié les pressions pour qu'il parte avant de lui faire interdiction d'accéder aux locaux de l'entreprise à compter de février 2016, et ce, dans un contexte de reproches et menaces de licenciement, ce que contestent la SELARL ML Conseils et la société Emas group qui relèvent que M. [W] n'établit pas les faits reprochés, à l'exception de l'altercation du 15 avril, et qu'un fait unique, serait-il grave, n'est pas constitutif de harcèlement moral.
Aux termes de l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
L'article L. 1154-1 du même code prévoit qu'en cas de litige, le salarié concerné présente des éléments de faits laissant supposer l'existence d'un harcèlement et il incombe à l'employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
A l'appui du harcèlement moral invoqué, M. [W] produit l'attestation de M. [R], engagé à compter du 10 mars 2016, lequel explique, au-delà de l'agression du 15 avril déjà reprise précédemment, que tout au long de sa présence en tant que salarié, il a vu l'agressivité de M. [M] avec M. [W], qu'il lui faisait souvent des reproches injustifiés et menaçait de le licencier, qu'il lui a pendant un moment interdit l'utilisation du véhicule de la société, contrairement aux autres salariés, l'obligeant à se rendre par ses propres moyens sur les lieux d'intervention en Ile de France et qu'enfin, les clés de l'entreprise (portail, dépôt) lui ont été retirées.
Il doit néanmoins être relevé que M. [R] n'a pu travailler avec M. [W] que du 10 mars au 15 avril 2016 et que s'il a assisté à l'altercation du 15 avril comme cela ressort très clairement de son attestation telle que reprise précédemment, il n'est cependant pas apporté d'éléments suffisamment précis et circonstanciés pour accréditer le fait qu'il aurait été témoin direct des autres faits exposés et, au contraire, il ressort des courriers mêmes de M. [W] que le refus de le laisser accéder aux locaux daterait de février 2016.
Néanmoins, au-delà de cette attestation trop imprécise pour pouvoir être probante à elle seule, les allégations de M. [W] sont corroborées par le SMS du 31 août 2015 envoyé par Mme [M] à la compagne de M. [W] aux termes duquel elle lui indique que son mari, [D], est sûr de lui pour donner fin au contrat de M. [W] et qu'il n'est peut être pas judicieux de prendre un appartement vers [Localité 7] car cela risque d'être embêtant de faire ce long trajet s'ils travaillent tous deux sur [Localité 8].
Elles le sont également par le placement de M. [W] en absences non rémunérées du 7 au 10 septembre 2015 à la suite de ses congés payés.
En outre, alors que dans un courrier du 10 février 2016 ayant pour objet :'Notification de NON ABANDON de poste suite à l'interdiction d'accéder à l'entreprise à partir du 9 février 2016", M. [W] explique que M.et Mme [M] l'ont menacé de s'en prendre à lui physiquement s'il devait se présenter dans les locaux de l'entreprise et qu'ils n'ont de cesse de faire pression sur lui par menaces et insultes pour le faire accepter une proposition de rupture conventionnelle sous peine d'être licencié pour faute grave, Mme [M] lui transmet pour seule réponse le 18 février 2016 une proposition de rupture conventionnelle, sans aucune remise en question de l'objet même de la correspondance du 10 février.
Il est encore avéré que, comme l'indiquait M. [W] dans sa plainte envoyée à l'inspecteur du travail le 10 juin 2016, son salaire du mois d'avril 2016 n'avait effectivement pas été payé puisqu'il ne lui a été versé que le 13 juillet.
Au vu de ces différents éléments, couplés à l'agression dont a été victime M. [W] le 15 avril 2016, celui-ci présente des faits de nature à laisser supposer l'existence d'un harcèlement moral sans que la SELARL ML Conseils et la société Emas group n'apportent aucun élément objectif justifiant les décisions ainsi prises.
Il convient en conséquence de retenir l'existence d'un harcèlement moral et d'allouer à M. [W] une somme de 1 500 euros à titre de dommages et intérêts, le préjudice ainsi subi étant plus large que celui résultant de la seule agression pour s'être déroulé sur plusieurs mois avec la mise en oeuvre de pressions régulières.
Sur la demande de rappel de salaire du 8 mai au 13 août 2016
M. [W] fait valoir qu'il a légitimement exercé son droit au retrait dès lors qu'il a été victime d'une agression de l'un des salariés de l'entreprise, que celui-ci l'a menacé à cette occasion de lui réserver le même accueil à chaque fois qu'il se présenterait à son travail et ce, sans que la gérante, épouse de l'agresseur, n'ait pris aucune mesure de protection, ni d'ailleurs aucune mesure de sanction, sachant qu'elle a même reconnu ce droit de retrait légitime durant deux jours avant de ne plus le considérer comme tel alors qu'aucune organisation spécifique n'avait été mise en place pour le protéger.
La SELARL ML Conseils et la société Emas group soutiennent que M. [W] ayant fait valoir son droit de retrait alors qu'il était en arrêt de travail, ne pouvait prétendre être confronté à un danger imminent, et à supposer que, tenant compte de ce que Mme [M] a reconnu le bien-fondé de ce droit de retrait du 8 au 11 mai, la cour le considère régulier, en tout état de cause, M. [W] n'avait plus aucun motif raisonnable de penser que la situation présentait alors un danger grave et imminent, d'autant qu'elle avait pris les mesures nécessaires pour assurer sa sécurité, sachant que MM. [W] et [M] effectuaient des tâches distinctes.
Selon l'article L. 4131-1 du code du travail, le travailleur alerte immédiatement l'employeur de toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu'elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ainsi que de toute défectuosité qu'il constate dans les systèmes de protection. Il peut se retirer d'une telle situation. L'employeur ne peut demander au travailleur qui a fait usage de son droit de retrait de reprendre son activité dans une situation de travail où persiste un danger grave et imminent résultant notamment d'une défectuosité du système de protection.
En l'espèce, suite à l'agression physique dont a été l'objet M. [W], celui-ci a transmis à la société Emas group alors qu'il était en arrêt de travail, un courrier daté du 22 avril 2016, parvenu à la société le 6 mai, pour lui faire savoir qu'il exerçait son droit de retrait dans la mesure où, en contact avec M. [D] [M] tous les jours sur son lieu de travail, il considérait encourir un danger grave et imminent au regard du risque de se faire agresser à tout moment.
Par courrier du 31 mai 2016, la société Emas group, prise en la personne de sa gérante, Mme [M], lui a répondu qu'elle veillerait au maintien d'une situation de travail conforme, tout en contestant le fait qu'il encourrait un danger grave et imminent et lui a proposé une rencontre le 8 juin à 10h afin d'envisager avec lui les conditions de sa reprise, rencontre à laquelle M. [W] a fait savoir qu'il ne pouvait se présenter pour avoir reçu le courrier le jour-même, et ce, tout en rappelant qu'il n'avait pas été payé de ses salaires d'avril et mai et qu'il n'avait pas davantage été transmis les attestations de salaire nécessaires pour qu'il soit indemnisé de son arrêt de travail, courrier auquel Mme [M] a répondu favorablement sur un report de l'entretien, sans cependant apporter aucune précision sur la question des salaires.
Suite à cet entretien, une nouvelle correspondance a été envoyée le jour même par M. [W] pour mentionner qu'il lui avait été demandé d'abandonner la procédure prud'homale, de justifier de ses absences et que lorsqu'il était arrivé, M. [M] était descendu à ce même moment de son domicile, situé à l'étage supérieur même des locaux de l'entreprise, et donc de son lieu de travail, avant de se diriger vers son véhicule, y charger du matériel, tout en le fixant du regard, courrier auquel Mme [M] a répondu le 7 juillet pour lui assurer qu'elle veillerait à ce qu'il ne soit plus au contact permanent de son mari sans cependant contester sa présence telle que relatée par M. [W].
Alors qu'il résulte de l'attestation de M. [R] que M. [M], époux de la gérante, a menacé le 15 avril M. [W] de lui réserver à chaque fois le même accueil s'il se présentait à son travail, il en résulte suffisamment l'existence d'un danger grave et imminent pour la santé de M. [W] dès lors que M. [M] habitait sur place et qu'il existait donc un risque réel de rencontre, quand bien même il assurait par ailleurs des déplacements sur d'autres chantiers que ceux de M. [W].
Par ailleurs, et si le premier courrier tendant à faire valoir le droit de retrait a été transmis durant l'arrêt de travail de M. [W], ce dernier a réitéré ce droit postérieurement et la teneur des échanges précités ne permet en aucune manière de considérer que la société Emas group aurait mis à profit cette période d'absence pour organiser concrètement la sécurité de M. [W].
Au contraire, il ressort des courriers échangés que la gravité de l'agression n'était pas pleinement reconnue par la gérante qui parlait au conditionnel des blessures qu'elle aurait engendrées, sachant que si M. [M] a fait l'objet d'un rappel à la loi, il n'a, au contraire, jamais été sanctionné par la société Emas group.
Enfin, la sécurité de M. [W] n'était pas plus assurée par un apaisement des tensions dès lors que la saisine du conseil de prud'hommes était toujours actuelle, qu'il s'y ajoutait le non-paiement des salaires depuis le mois d'avril et qu'il lui était réclamé des justificatifs pour la période d'absence qu'il ne pouvait évidemment fournir pour être en lien avec le droit de retrait revendiqué.
Aussi, et alors qu'aucun des courriers de Mme [M] n'a pu être de nature à rassurer M. [W] sur sa sécurité au sein de la société Emas group, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a retenu la légitimité du droit de retrait exercé, ainsi que sur le rappel de salaire accordé, à savoir, 5 291 euros pour la période du 8 mai au 13 août 2016, outre 529 euros au titre des congés payés afférents.
Sur le licenciement
Selon l'article L. 4131-3 du code du travail, aucune sanction, aucune retenue de salaire ne peut être prise à l'encontre d'un travailleur ou d'un groupe de travailleurs qui se sont retirés d'une situation de travail dont ils avaient un motif raisonnable de penser qu'elle présentait un danger grave et imminent pour la vie ou pour la santé de chacun d'eux.
Le caractère illicite du motif du licenciement prononcé, même en partie, pour des faits liés à l'exercice du droit de retrait entraîne à lui seul la nullité du licenciement.
En l'espèce, alors qu'il a été jugé que M. [W] avait légitimement exercé son droit de retrait, il ne peut qu'être prononcée la nullité du licenciement, celui-ci étant fondé sur les absences de M. [W] liées à ce droit de retrait.
En ce qui concerne l'indemnité de préavis due à M. [W], alors qu'il résulte des tableaux produits que le nombre d'heures supplémentaires effectuées avaient sensiblement diminué depuis le début de l'année 2016, il convient de retenir que le salaire qu'aurait perçu M. [W] s'il avait travaillé durant son préavis aurait été de 2 204,39 euros, aussi, convient-il de lui allouer au titre de l'indemnité de préavis la somme de 4 408,78 euros, outre 440,88 euros au titre des congés payés afférents.
En ce qui concerne l'indemnité de licenciement, il convient de tenir compte de la moyenne des salaires la plus favorable sur les trois ou douze derniers mois, soit en l'espèce celle des douze derniers mois représentant un salaire de référence de 2 758,40 euros, et dans les limites de l'ancienneté de deux ans retenue par M. [W], il convient de lui allouer la somme de 1 103,36 euros.
Enfin, compte tenu de la nullité du licenciement, M. [W] a droit à des dommages et intérêts qui ne sauraient être inférieurs à six mois de salaire, et il convient en conséquence, au regard de son ancienneté dans la société Emas group, de son âge, à savoir 23 ans, et de la précarisation de sa situation dont il justifie jusqu'en 2018, de lui allouer la somme de 18 000 euros
Sur la demande d'indemnité pour travail dissimulé
Aux termes de l'article L. 8221-5 du Code du travail, est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur : 1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ; 2° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 3243-2, relatif à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli(...).
Selon l'article L. 8223-1, en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.
En l'espèce, l'importance des heures supplémentaires accordées mais également le caractère inhabituel des horaires effectuées dans la mesure où un certain nombre d'entre eux portent sur des heures effectuées les samedis et dimanches, et ce, de manière régulière, mais aussi sur des trajets effectués hors des horaires de travail habituels et ce, en passant par le siège social de l'entreprise à [Localité 7], comme cela ressort des deux attestations de MM. [R] et [S], permettent de caractériser l'intention de dissimulation, sans que la régularisation rapide d'un certain nombre d'heures dès la réclamation de février 2016 ne puisse remettre en cause cette analyse, bien au contraire, en ce qu'elle démontre que l'employeur connaissait la réalité des heures supplémentaires effectuées.
Il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il a retenu l'existence du travail dissimulé mais il doit être infirmé sur le montant alloué dès lors qu'il n'a pas été tenu compte des heures supplémentaires réalisées, ainsi, il convient d'accorder à M. [W] la somme de 15 776,71 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé, cette somme tenant compte des heures supplémentaires accomplies sur les six derniers mois antérieurement au droit de retrait.
Sur la remise de documents
Il convient d'ordonner à la SELARL ML Conseils, ès qualités, de remettre à M. [W] un certificat de travail, une attestation Pôle emploi et un bulletin de salaire récapitulatif dûment rectifiés, sans que les circonstances de la cause justifient de prononcer une astreinte.
Sur les intérêts
Les sommes allouées en première instance et en appel à caractère salarial porteront intérêts au taux légal à compter de la convocation de l'employeur en conciliation et celles à caractère indemnitaire à compter du jugement de première instance pour les dispositions confirmées et du présent arrêt pour les dispositions infirmées.
Les intérêts échus produiront intérêts, dés lors qu'ils seront dus au moins pour une année entière à compter de l'arrêt, conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil.
La cour rappelle que le jugement d'ouverture de la procédure arrête le cours des intérêts légaux et conventionnels, ainsi que tous intérêts de retard et majorations.
Sur la garantie de l'UNEDIC délégation AGS CGEA de [Localité 9]
Compte tenu de la nature des sommes allouées, l'AGS CGEA doit sa garantie dans les termes des articles L. 3253-8 et suivants du code du travail, en l'absence de fonds disponibles.
Sur les dépens et frais irrépétibles
En qualité de partie succombante, il y a lieu de condamner la SELARL ML conseils aux entiers dépens, y compris ceux de première instance, de la débouter de sa demande formulée en application de l'article 700 du code de procédure civile et de la condamner à payer à M. [W] la somme de 1 800 euros sur ce même fondement, en plus de la somme allouée en première instance.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Confirme le jugement en ce qu'il a dit le licenciement nul et en ses dispositions relatives aux dépens, à l'article 700 du code de procédure civile, aux rappels de salaire et congés payés afférents pour la période du 8 mai au 13 août 2016 et pour heures supplémentaires, sauf à préciser qu'au vu de l'évolution du litige, les sommes sont fixées au passif de la liquidation judiciaire de la SARL Emas group ;
L'infirme pour le surplus ;
Statuant à nouveau,
Fixe au passif de la liquidation judiciaire de la SARL Emas group la créance de M. [X] [W] aux sommes suivantes :
dommages et intérêts pour atteinte à l'intégrité
physique et violation d'une liberté fondamentale : 1 500,00 euros
dommages et intérêts pour harcèlement moral : 1 500,00 euros
dommages et intérêts pour défaut d'information
relatif aux repos compensateurs : 6 130,00 euros
indemnité pour travail dissimulé : 15 776,71 euros
indemnité compensatrice de préavis : 4 408,78 euros
congés payés afférents : 440,88 euros
indemnité de licenciement : 1 103,36 euros
dommages et intérêts pour licenciement nul : 18 000,00 euros
Ordonne à la SELARL ML Conseils, en qualité de mandataire liquidateur de la SARL Emas group, de remettre à M. [X] [W] un certificat de travail, une attestation Pôle emploi et un bulletin de salaire récapitulatif dûment rectifiés ;
Dit n'y avoir lieu à astreinte ;
Dit que les sommes allouées en première instance et en appel à caractère salarial porteront intérêts au taux légal à compter de la convocation de l'employeur en conciliation et celles à caractère indemnitaire à compter du jugement de première instance pour les dispositions confirmées et du présent arrêt pour les dispositions infirmées ;
Dit que les intérêts échus produiront intérêts, dés lors qu'ils seront dus au moins pour une année entière à compter de l'arrêt ;
Rappelle que le jugement d'ouverture de la procédure arrête le cours des intérêts légaux et conventionnels, ainsi que tous intérêts de retard et majorations ;
Déclare l'UNEDIC délégation AGS-CGEA de [Localité 9] tenue à garantie pour ces sommes dans les termes des articles L. 3253-8 et suivants du code du travail, en l'absence de fonds disponibles ;
Déboute la SELARL ML Conseils, en qualité de mandataire liquidateur de la SARL Emas group, et la SARL Emas group de leur demande formulée en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la SELARL ML Conseils, en qualité de mandataire liquidateur de la SARL Emas group, à payer à M. [X] [W] la somme de 1 800 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la SELARL ML Conseils, en qualité de mandataire liquidateur de la SARL Emas group, aux entiers dépens.
La greffière La présidente