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19/10/2022 | FRANCE | N°20/01980

France | France, Cour d'appel de Rouen, Chambre sociale, 19 octobre 2022, 20/01980


N° RG 20/01980 - N° Portalis DBV2-V-B7E-IPXJ





COUR D'APPEL DE ROUEN



CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE

SECURITE SOCIALE





ARRET DU 19 OCTOBRE 2022











DÉCISION DÉFÉRÉE :



Jugement du POLE SOCIAL DU TJ D'EVREUX du 30 Avril 2020







APPELANTE :



Société [4]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 3]



représentée par Me Grégory KUZMA, avocat au barreau de LYON substituée par Me Cyril CAPACCI, a

vocat au barreau de ROUEN







INTIMEE :



CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE L'EURE

[Adresse 1]

[Localité 2]



représentée par Me François LEGENDRE, avocat au barreau de ROUEN





























COMPOSITION D...

N° RG 20/01980 - N° Portalis DBV2-V-B7E-IPXJ

COUR D'APPEL DE ROUEN

CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE

SECURITE SOCIALE

ARRET DU 19 OCTOBRE 2022

DÉCISION DÉFÉRÉE :

Jugement du POLE SOCIAL DU TJ D'EVREUX du 30 Avril 2020

APPELANTE :

Société [4]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 3]

représentée par Me Grégory KUZMA, avocat au barreau de LYON substituée par Me Cyril CAPACCI, avocat au barreau de ROUEN

INTIMEE :

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE L'EURE

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me François LEGENDRE, avocat au barreau de ROUEN

COMPOSITION DE LA COUR  :

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 13 Septembre 2022 sans opposition des parties devant Madame BIDEAULT, Présidente, magistrat chargé d'instruire l'affaire.

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame BIDEAULT, Présidente

Madame ROGER-MINNE, Conseillère

Madame POUGET, Conseillère

GREFFIER LORS DES DEBATS :

M. CABRELLI, Greffier

DEBATS :

A l'audience publique du 13 Septembre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 19 Octobre 2022

ARRET :

CONTRADICTOIRE

Prononcé le 19 Octobre 2022, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

signé par Madame BIDEAULT, Présidente et par M. CABRELLI, Greffier.

* * *

EXPOSE DU LITIGE

Le 4 mai 2017, la société [4] a établi une déclaration d'accident du travail pour le compte de son salarié, M. [X] [S], exerçant la profession de monteur électromécanique, au titre d'un accident survenu le 3 mai 2017 à 11h00 décrit comme suit : 'en soulevant la gaine pour la chauffer avec la chaufferaine a ressenti une douleur dans le coude gauche. Siège des lésions : coude gauche. Nature des lésions : douleur.'

Le certificat médical initial établi le 4 mai 2017 fait état d'une 'épicondylite gauche', le médecin prescrivant un arrêt de travail jusqu'au 13 mai 2017, arrêt régulièrement prolongé jusqu'au 30 novembre 2019.

Par décision du 10 juillet 2017 la caisse primaire d'assurance maladie de l'Eure a pris en charge cet accident au titre de la législation sur les risques professionnels.

La société [4] a contesté cette décision devant la commission de recours amiable qui a rejeté son recours le 23 novembre 2018. Elle a contesté cette décision devant le pôle social du tribunal judiciaire d'Evreux qui, par jugement du 30 avril 2020 a :

- rejeté son recours et l'a déboutée de ses demandes,

- confirmé la décision explicite de rejet de la commission de recours amiable de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Eure du 23 novembre 2018,

- condamné la société [4] aux dépens nés après le 1er janvier 2019.

La société [4] a interjeté appel par lettre recommandée du 17 juin 2020 de ce jugement qui lui avait été notifié le 15 juin précédent.

Par conclusions remises le 29 décembre 2021, soutenues oralement à l'audience, auxquelles il convient de se référer pour l'exposé des moyens et prétentions, la société [4] demande à la cour de :

- infirmer la décision rendue par le tribunal judiciaire d'Evreux et, statuant à nouveau ;

- à titre principal juger inopposables à l'employeur les arrêts de travail non imputables à l'accident du travail prescrits à compter du 28 juillet 2017 ;

- à titre subsidiaire, ordonner avant-dire droit, une mesure d'expertise judiciaire sur pièces et nommer un expert, dont la mission consistera notamment à déterminer si l'ensemble des lésions à l'origine de l'ensemble des arrêts de travail pris en charge peuvent résulter directement et uniquement de l'accident du 3 mai 2017, à déterminer quels sont les arrêts et lésions directement et uniquement imputables à cet accident, déterminer si une pathologie évoluant pour son propre compte et indépendante de l'accident du 3 mai 2017 est à l'origine d'une partie des arrêts de travail, fixer la date à laquelle l'état de santé de M. [S] doit être considéré comme consolidé ;

- juger que les frais d'expertise seront entièrement mis à la charge de la caisse,

- dans l'hypothèse où les arrêts de travail ne seraient pas en lien de causalité directe et certain avec les lésions initiales, déclarer que ces arrêts lui sont inopposables ;

- condamner la caisse aux entiers dépens.

La société fait valoir qu'il existe un doute sérieux sur le lien de causalité direct et certain entre le sinistre déclaré et l'ensemble des arrêts de travail, la durée de ces arrêts (573 jours) apparaissant disproportionnée compte tenu de la nature de la lésion déclarée et du fait accidentel relaté.

L'appelante se prévaut notamment du barème Ameli qui précise qu'une épicondylite se résorbe en 75 jours maximum et de l'avis médical rédigé par le docteur [K], médecin de la société, lequel, après avoir pris connaissance des éléments médicaux de M. [S] indique que les arrêts en lien avec l'accident du 3 mai 2017 n'étaient justifiés que jusqu'au 28 juillet 2017.

Par conclusions remises le 18 juillet 2022, soutenues oralement à l'audience, auxquelles il convient de se référer pour l'exposé des moyens et prétentions, la CPAM de l'Eure demande à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société [4] de son recours et de l'ensemble de ses demandes ;

- en tant que de besoin confirmer la décision de la CPAM de l'Eure valant prise en charge des arrêts de travail au titre de la législation sur les risques professionnels ainsi que celle de la commission de recours amiable du 23 novembre 2018 ;

- condamner la société [4] à lui verser une indemnité de 2 200 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société [4] aux entiers dépens.

La caisse soutient que l'employeur n'apporte aucune indication justifiant soit de l'existence d'un état pathologique à l'origine des conséquences de l'accident, soit d'un autre élément susceptible d'étayer ses allégations. Elle observe que l'ensemble des certificats médicaux établis fait état de la même lésion constante, à savoir une épicondylite gauche.

L'intimée considère qu'il existe une continuité des soins et arrêts de travail de la date de survenance de l'accident jusqu'à la date de guérison de M. [S]. Elle précise que le médecin conseil de la caisse a considéré l'arrêt de travail du salarié justifié.

Enfin, la caisse soutient que la demande d'expertise faite par la société n'est pas justifiée, cette dernière n'apportant pas suffisamment d'éléments.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'imputabilité des arrêts de travail prescrits au salarié

Il résulte des articles 1353 du code civil et L 411-1 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable, que la présomption d'imputabilité au travail des lésions apparues à la suite d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, dès lors qu'un arrêt de travail a été initialement prescrit ou que le certificat médical initial d'accident du travail est assorti d'un arrêt de travail, s'étend pendant toute la durée d'incapacité de travail précédant soit la guérison complète, soit la consolidation de l'état de la victime, et il appartient à l'employeur qui conteste cette présomption d'apporter la preuve contraire.

L'existence d'un état antérieur n'est pas, en soi, constitutif de cette preuve dès lors qu'il n'est pas démontré que la lésion et/ou les arrêts de travail subséquents ont une cause totalement étrangère au travail.

En l'espèce, il convient de relever que la société ne remet pas en cause l'imputabilité au travail de l'accident initial, que le certificat médical initial prescrit un arrêt de travail à M. [S], de sorte que la présomption d'imputabilité doit s'appliquer sans que la caisse ait à justifier de la continuité des soins et des arrêts de travail.

Aussi, si la société entend contester l'imputabilité des arrêts de travail prescrits à M. [S] jusqu'à la date de consolidation, il lui appartient de démontrer l'absence de lien de causalité entre les lésions décrites dans les arrêts de travail contestés et celles résultant de l'accident du travail.

M. [S] a été placé en arrêt de travail pour une épicondylite gauche le 4 mai 2017 par le médecin ayant rempli le certificat médical initial, arrêt de travail régulièrement prolongé jusqu'au 30 novembre 2019. L'intégralité des arrêts de travail délivrés au salarié mentionne, de manière constante, la même lésion à savoir une épicondylite gauche. Si le certificat de prolongation du 27 juillet 2017 ne prescrit plus d'arrêt de travail, il prescrit cependant des soins jusqu'au 31 août 2017, date à compter de laquelle M. [S] bénéficiera à nouveau d'arrêts de travail.

Si la société se prévaut de l'avis médico-légal rédigé le 5 décembre 2019 par le docteur [K], son médecin conseil, il y a lieu de constater que ce dernier s'exprime essentiellement en termes généraux, qu'il ne mentionne aucune pathologie antérieure du salarié, qu'il déduit de la durée des arrêts de travail délivrés l'absence de prise en charge d'une affection aiguë.

En outre, comme justement constaté par les premiers juges, si le docteur [K] indique que le LM2A du 16 février 2018 mentionne que 'les conditions pour entreprendre et terminer une formation sont remplies', l'employeur n'explicite pas cet avis, ne le produit pas, le terme LM2A n'étant pas défini.

Il ressort de ces éléments que la société échoue à démontrer l'absence de lien de causalité entre les blessures décrites dans les arrêts de travail contestés et celles résultant de l'accident du travail, celle-ci se limitant à produire l'avis médico-légal de son médecin conseil.

La durée prétendue excessive des arrêts et soins subis par le salarié avant la consolidation de son état de santé ne constitue pas un motif suffisant pour qu'une expertise soit ordonnée.

En l'absence de tout élément pertinent de nature à étayer les prétentions de l'employeur, il n'y a pas lieu d'ordonner une expertise, laquelle ne peut avoir pour objet de suppléer à la carence probatoire de la société.

Dès lors, il convient de confirmer la décision déférée en ce qu'elle a débouté l'appelante de ses demandes.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Succombant en son appel, la société [4] est condamnée aux dépens.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de la caisse les frais non compris dans les dépens qu'elle a pu exposer. Il convient en l'espèce de condamner la société, appelante succombant dans la présente instance, à lui verser la somme de 2 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant contradictoirement et en dernier ressort ;

Confirme en toutes ses dispositions le jugement du pôle social du tribunal judiciaire d'Evreux du 30 avril 2020 ;

Y ajoutant :

Condamne la société [4] à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Eure la somme de 2 200 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel ;

Rejette toute autre demande ;

Condamne la société [4] aux entiers dépens d'appel.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20/01980
Date de la décision : 19/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-19;20.01980 ?
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