N° RG 21/01085 - N° Portalis DBV2-V-B7F-IWYX
COUR D'APPEL DE ROUEN
1ERE CHAMBRE CIVILE
ARRET DU 12 OCTOBRE 2022
DÉCISION DÉFÉRÉE :
11-19-2283
Tribunal judiciaire de Rouen du 08 février 2021
APPELANTS :
Monsieur [N] [U]
né le 24 ocotbre 1972 à [Localité 10]
[Adresse 3]
[Localité 8]
comparant, représenté et assisté par Me Marie-Perrine PHILIPPE, avocat au barreau de Rouen
Madame [I] [H] épouse [U]
née le 29 janvier 1971 à [Localité 11]
[Adresse 3]
[Localité 8]
représentée et assistée par Me Marie-Perrine PHILIPPE, avocat au barreau de Rouen
INTIMEE :
Madame [Z] [V] épouse [Y]
née le 16 août 1932 à [Localité 8]
[Adresse 5]
[Localité 8]
représentée et assistée par Me Pascal MARTIN-MENARD de la Scp EMO AVOCATS, avocat au barreau du Havre
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 27 juin 2022 sans opposition des avocats devant M. Jean-François MELLET conseiller, rapporteur,
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée :
Mme Edwige WITTRANT, présidente de chambre,
M. Jean-François MELLET, conseiller,
Mme Magali DEGUETTE, conseillère,
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme [P] [C],
DEBATS :
A l'audience publique du 27 juin 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 12 octobre 2022.
ARRET :
CONTRADICTOIRE
Rendu publiquement le 12 octobre 2022, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
signé par Mme WITTRANT, présidente et par Mme CHEVALIER, greffier.
*
* *
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
M. [N] [U] se déclare propriétaire d'un bien immobilier sis [Adresse 3] (76). Mme [Z] [Y] née [V] est propriétaire d'un bien immobilier sis [Adresse 5].
Par déclaration au greffe du tribunal de grande instance de Rouen du 19 septembre 2019, M. [N] [U] a fait convoquer Mme [Z] [Y] aux fins de bornage de deux parcelles situées [Adresse 4].
Par jugement contradictoire du 8 février 2021, le tribunal judiciaire de Rouen a débouté M. [U] et l'a condamné aux dépens, outre une somme de 800 euros au titre des frais irrépétibles.
Par déclaration reçue au greffe le 11 mars 2021, M. [U] a interjeté appel de la décision.
EXPOSE DES PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par dernières conclusions notifiées le 25 mai 2022, M. [N] [U] et Mme [I] [H], son épouse, intervenante volontaire, demandent à la cour, au visa des articles 646 et suivants du code civil, de réformer le jugement en ce qu'il les a déboutés et de :
- homologuer le bornage effectué par le cabinet GE360, expert géomètre à [Adresse 9],
à titre subsidiaire,
- ordonner un bornage judiciaire des parcelles, celle appartenant à M. et Mme [U] située sur la commune de [Adresse 3], contiguë à celle appartenant à Mme [V], située sur la commune de [Adresse 5],
- désigner un expert, avec pour mission de :
. se rendre sur les lieux, les décrire dans leur état actuel et en dresser le plan en tenant compte, le cas échéant, des bornes existantes,
. consulter les titres des parties, en décrire le contenu en précisant les limites et les contenances y figurant,
. rechercher tout indice permettant d'établir les caractères et la durée des possessions éventuelles invoquées,
. rechercher tout autre indice notamment ceux résultant de la configuration des lieux et du cadastre,
. proposer la délimitation des parcelles et l'emplacement des bornes à implanter pour les parcelles suivantes : parcelle AB n°[Cadastre 7] avec la parcelle AB n° [Cadastre 6], entre les points A et G délimités par le géomètre,
. dire si la haie entre les parcelles AB n°[Cadastre 7] et AB n° [Cadastre 6] est mitoyenne ou si elle est propriété exclusive de Mme [Y] née [V] ou de M. et Mme [U],
. dire et juger que les frais de bornage seront à la charge de Mme [Y] née [V] ;
- débouter Mme [Y] née [V] de ses demandes ;
- condamner Mme [Y] née [V] à payer à M. et Mme [U] une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner Mme [Y] née [V] aux entiers dépens.
Ils soutiennent en substance ce qui suit :
- ils ont été autorisés à édifier un bâtiment sur la limite de propriété et doivent donc la déterminer avec certitude ;
- M. [U] a tenté à plusieurs reprises de trouver une issue amiable ;
- le projet de bornage amiable a été réalisé conformément aux règles de l'art et le géomètre a retenu les présomptions usuelles en la matière ;
- les différents actes de vente ne mentionnent pas la limite ni ne déterminent la propriété de la haie qui sépare les fonds ;
- le principe de mitoyenneté doit s'appliquer sur cette haie séparative.
Par dernières conclusions notifiées le 7 juin 2022, Mme [Z] [V] épouse [Y] demande à la cour d'appel, de :
- débouter M. [N] [U] et Mme [I] [H] épouse [U] de leur demande d'homologation du bornage proposé par le cabinet GE 360 ;
pour le cas où il serait fait droit à cette demande,
- interdire à M. [N] [U] et Mme [I] [H] épouse [U] de procéder à l'arrachage de la haie dès lors qu'ils la qualifient de mitoyenne ;
- ordonner le bornage judiciaire à la demande de M. [N] [U] et Mme [I] [H] épouse [U] ;
- désigner à cet effet tel géomètre-expert qu'il plaira à la cour, à l'exclusion du cabinet GE 360, et aux frais avancés de M. [N] [U] et Mme [I] [H] épouse [U], avec mission de :
. se rendre sur les lieux, les décrire dans leur état actuel et en dresser le plan en tenant compte, le cas échéant, des bornes existantes,
. consulter les titres des parties, en décrire le contenu en précisant les limites et les contenances y figurant,
. rechercher tout indice permettant d'établir les caractères et la durée des possessions éventuelles invoquées,
. rechercher tout autre indice notamment ceux résultant de la configuration des lieux et du cadastre,
. proposer la délimitation des parcelles et l'emplacement des bornes à implanter pour les parcelles suivantes : parcelle AB n°[Cadastre 7] avec la parcelle AB n° [Cadastre 6],
. donner aux juridictions ultérieurement saisies, tous éléments de fait de nature à leur permettre de se prononcer sur la propriété de la haie entre les parcelles AB n°[Cadastre 7] et AB n° [Cadastre 6].
- débouter M. [N] [U] et Mme [I] [H] épouse [U] de leur demande de condamnation à la charge de Mme [Z] [Y] née [V], des frais de bornage ;
- débouter M. [N] [U] et Mme [I] [H] épouse [U] de leur demande de condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;
- condamner in solidum M. [N] [U] et Mme [I] [H] épouse [U] à payer à Mme [Z] [Y] née [V], une indemnité de
2 000 eurors sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner in solidum M. [N] [U] et Mme [I] [H] épouse [U] aux dépens, dont distraction au profit de la Scp Emo avocats, représentée par Me Pascal Martin-Menard.
Elle soutient en substance ce qui suit :
- le bornage proposé par le cabinet GE 360 fixe la limite séparative sur la haie existante, conformément aux souhaits de l'appelant ;
- la haie lui appartient et la limite de propriété doit être déterminée en fonction de son caractère privatif ;
- le bâtiment à construire doit suivre la même limite de propriété que l'habitation existante de M. et Mme [U] ;
- le plan de délimitation cabinet GE 360 est en contradiction avec les limites de propriété.
Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures visées ci-dessus conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 8 juin 2022.
MOTIFS
Sur l'action en bornage
Aux termes de l'article 646 du code civil, tout propriétaire peut obliger son voisin au bornage de leurs propriétés contiguës. Le bornage se fait à frais commun.
Le tribunal a relevé d'office un défaut de qualité tiré à raison de l'absence, au dossier de M. [U], du titre de propriété, et l'a débouté.
M. et Mme [U] justifient en appel de leur titre de propriété, qui établit leur qualité à agir, et des démarches amiables entreprises auprès de Mme [Y]. Ces démarches, entreprises auprès du conciliateur de justice, se sont soldées par un échec.
Le cabinet Ge 360 a dressé un procès-verbal de carence le 24 juin 2019. A défaut d'accord, ce projet, joint en pièce n° 6, dressé par le géomètre choisi unilatéralement par M. et Mme [U], ne peut pas être homologué. Il n'est d'ailleurs pas utile pour un bornage compte tenu de ses modalités de rédaction.
Il y a donc lieu d'ordonner, après infirmation du jugement entrepris, une expertise aux fins de bornage et de mettre la consignation à la charge des demandeurs.
Sur les dépens et frais irrépétibles
Les dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles de première instance sont infirmés.
Il y a lieu de faire masse des dépens de première instance et d'appel et de condamner chacune des parties à les payer par moitié, sous bénéfice de distraction au profit de la Scp Emo avocats, représentée par Me Pascal Martin-Menard.
L'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe et en dernier ressort,
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Ordonne le bornage judiciaire et confie à cette fin une expertise à M. [D] [W], géomètre-expert, expert inscrit sur la liste de la cour d'appel de Rouen, domicilié [Adresse 2], (tél : [XXXXXXXX01]),
avec pour mission de :
- se rendre sur les lieux, les décrire dans leur état actuel et en dresser le plan en tenant compte, le cas échéant, des bornes existantes,
- consulter les titres des parties, en décrire le contenu en précisant les limites et les contenances y figurant,
- rechercher tout indice permettant d'établir les caractères et la durée des possessions éventuelles invoquées,
- rechercher tout autre indice notamment ceux résultant de la configuration des lieux et du cadastre,
- proposer la délimitation des parcelles et l'emplacement des bornes à implanter pour les parcelles suivantes : parcelle AB n°[Cadastre 7] avec la parcelle AB n° [Cadastre 6],
- donner aux juridictions ultérieurement saisies, tous éléments de fait de nature à leur permettre de se prononcer sur la propriété de la haie entre les parcelles AB n°[Cadastre 7] et AB n° [Cadastre 6].
Dit que l'expert devra adresser un pré-rapport, aux parties qui disposeront alors d'un délai d'un mois pour faire connaître leurs observations ;
Dit que l'expert désigné déposera son projet de bornage en deux exemplaires au greffe du tribunal judiciaire de Rouen et notifiera à chacune des parties le rapport avant le 30 juin 2023, sauf prorogation expresse accordée par le juge chargé du contrôle des expertises du tribunal judiciaire de Rouen ;
Fixe à 2 000 euros le montant de la consignation que devront avancer, avant le 12 décembre 2022, M. [N] [U] et Mme [I] [H], son épouse auprès de la régie du tribunal judiciaire de Rouen sous peine de caducité de la mesure ;
Déboute les parties pour le surplus des demandes ;
Fait masse des dépens de première instance et d'appel et condamne M. [N] [U] et Mme [I] [H] épouse [U] d'une part, Mme [Z] [Y] née [V] d'autre part, à les payer par moitié, sous bénéfice de distraction au profit de la Scp Emo avocats, représentée par Me Pascal Martin-Menard.
Le greffier,La présidente de chambre,