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11/10/2022 | FRANCE | N°22/01474

France | France, Cour d'appel de Rouen, 1ère ch. civile, 11 octobre 2022, 22/01474


N° RG 22/01474 - N° Portalis DBV2-V-B7G-JCGM





COUR D'APPEL DE ROUEN



1ERE CHAMBRE CIVILE



ORDONNANCE DU 11 OCTOBRE 2022













DÉCISION DÉFÉRÉE :



17/00831

Tribunal judiciaire de Beauvais du 13 septembre 2021





DEMANDEUR A L'INCIDENT :



Monsieur [Y] [M]

né le 14 août 1967 à [Localité 10]

[Adresse 4]

[Localité 5]



représenté et assisté par Me Yannick ENAULT de la Selarl ENAULT et HENRY, avocat a

u barreau de Rouen





Madame [D] [F] épouse [M]

née le 2 novembre1967 à [Localité 7]

[Adresse 3]

[Localité 6]



représenté et assisté par Me Yannick ENAULT de la Selarl ENAULT et HENRY, avocat au barreau de Rouen




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N° RG 22/01474 - N° Portalis DBV2-V-B7G-JCGM

COUR D'APPEL DE ROUEN

1ERE CHAMBRE CIVILE

ORDONNANCE DU 11 OCTOBRE 2022

DÉCISION DÉFÉRÉE :

17/00831

Tribunal judiciaire de Beauvais du 13 septembre 2021

DEMANDEUR A L'INCIDENT :

Monsieur [Y] [M]

né le 14 août 1967 à [Localité 10]

[Adresse 4]

[Localité 5]

représenté et assisté par Me Yannick ENAULT de la Selarl ENAULT et HENRY, avocat au barreau de Rouen

Madame [D] [F] épouse [M]

née le 2 novembre1967 à [Localité 7]

[Adresse 3]

[Localité 6]

représenté et assisté par Me Yannick ENAULT de la Selarl ENAULT et HENRY, avocat au barreau de Rouen

DEFENDEUR A L'INCIDENT :

Monsieur [L] [T]

né le 2 novembre 1957 à [Localité 9]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représenté et assisté par Me Vincent MOSQUET de la Selarl LEXAVOUE NORMANDIE avocat au barreau de Rouen

Madame [B] [R] épouse [T]

né le 14 décembre 1959 à [Localité 9]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée et assistée par Me Vincent MOSQUET de la Selarl LEXAVOUE NORMANDIE avocat au barreau de Rouen

Nous, Mme Edwige WITTRANT, présidente de la mise en état, à la 1ère chambre civile, assistée de Mme Catherine CHEVALIER, greffier,

Après avoir entendu les parties en leurs observations lors de l'audience publique du 13 septembre 2022, l'affaire a été mise en délibéré, pour décision être rendue ce jour.

* * * * *

* * *

M. [L] [T] et Mme [B] [R], son épouse ont acquis le 10 novembre 2004 une maison à usage d'habitation sise à [Adresse 8]. Par acte du 24 novembre 2012, ils ont revendu l'immeuble à M. [Y] [M] et Mme [D] [F], son épouse.

A la suite d'infiltrations et après expertise judiciaire, M. et Mme [M] ont fait assigner M. et Mme [T] afin d'obtenir une indemnisation de leurs préjudices sur le fondement de la garantie des vices cachés.

Par jugement du 13 septembre 2021, le tribunal judiciaire de Beauvais a essentiellement, avec exécution provisoire :

- déclaré recevable M. et Mme [M] en leurs demandes,

- condamné solidairement M. et Mme [T] à payer à M. et Mme [M] les sommes de 78 576,48 euros au titre du coût des travaux de reprise, de 2 500 euros en réparation du préjudice de jouissance, de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration reçue le 15 février 2022, M. et Mme [T] ont formé appel du jugement. M. et Mme [M] se sont constitués intimés.

Par ordonnance du 27 avril 2022, le conseiller de la mise en état de la cour d'appel d'Amiens a ordonné le renvoi de l'affaire devant la cour d'appel de Rouen en application de l'article 47 du code de procédure civile.

Les appelants se sont constitués devant notre cour le 18 mai 2022, les intimés le 19 mai 2022.

Les premières conclusions des appelants ont été notifiées le 25 mai 2022, des intimés le 24 août 2022.

Par conclusions sur incident notifiées le 20 mai 2022 puis le 4 juillet 2022, M. et Mme [M] soulèvent, au visa de l'article 908 du code de procédure civile, à titre principal, le moyen tiré de la caducité de l'appel pour défaut de conclusions des appelants dans le délai de trois de mois suivant la déclaration d'appel et au visa de l'article 524 du code de procédure civile, à titre subsidiaire, la radiation de l'affaire du rôle de la cour pour défaut d'exécution du jugement entrepris. Ils demandent paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile à l'encontre de M. et Mme [T] outre la condamnation de ces derniers aux dépens.

Par conclusions notifiées le 13 juin 2022 puis le 13 septembre 2022, M. et Mme [T] demandent le débouté des prétentions de M. et Mme [M] et proposent de consigner le montant des condamnations prononcées par le jugement entrepris. Ils demandent paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile à l'encontre de M. et Mme [M] outre la condamnation de ces derniers aux dépens.

Ils rétorquent que les décisions invoquées par M. et Mme [T] au soutien de leur argumentation quant à l'application des délais de procédure concernent la péremption de l'instance alors que les dispositions alléguées ne sont pas déclinées lorsqu'il s'agit d'un renvoi devant une autre juridiction en vertu de l'article 47 du code de procédure civile. M. et Mme [T] pouvaient conclure entre le 25 avril et le 12 mai 2022 puis entre le 12 mai et le 16 mai 2022. A défaut de suspension ou d'interruption du délai pour conclure, de démonstration d'un cas de force majeure, la déclaration d'appel est caduque. S'agissant de la radiation de l'affaire sollicitée, ils relèvent que M. et Mme [T] ne produisent aucune pièce au soutien de leur demande de débouté et consigntion des sommes dues.

Ils invoquent les articles 47, 82, 908 et 910-3 du code de procédure civile et 6-1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et la jurisprudence de la Cour de cassation qui précise qu'aucune diligence n'incombe aux parties avant la réception de la lettre recommandée du greffe prévue par l'article 82 du code de procédure civile. En outre, les sanctions peuvent être écartées en cas de force majeure : en l'espèce, l'avis du greffe de la cour d'appel de Rouen n'a été adressé aux parties que le 12 mai 2022 ; le délai de l'article 908 du code de procédure civile a été suspendu voire interrompu pendant 15 jours entre le prononcé de l'ordonnance et cet avis. Leurs conclusions sont dès lors recevables, la caducité de l'appel étant exclue. Une solution différente serait contraire à l'article 6-1 de la convention susvisée qui pose le principe du droit à un procès équitable.

Par ailleurs, l'exécution provisoire du jugement entrepris doit tenir compte des facultés du débiteur de s'en acquitter. En outre, ils souhaitent obtenir la garantie de restitution des fonds et offre de mettre en oeuvre la consignation des fonds. Ils versent aux débats un chèque du montant des condamnations en date du 1er septembre 2022 libellé au nom du bâtonnier.

L'affaire a été plaidée à l'audience du 13 septembre 2022.

MOTIFS

Sur la caducité de l'appel

L'article 47 du code de procédure civile dispose que lorsqu'un magistrat ou un auxiliaire de justice est partie à un litige qui relève de la compétence d'une juridiction dans le ressort de laquelle celui-ci exerce ses fonctions, le demandeur peut saisir une juridiction située dans un ressort limitrophe. Le défendeur ou toutes les parties en cause d'appel peuvent également demander le renvoi devant une juridiction choisie dans les mêmes conditions ; il est alors procédé comme il est dit à l'article 97.

L'article 82 du même code précise qu'en cas de renvoi devant une juridiction désignée, le dossier de l'affaire lui est transmis par le greffe, avec une copie de la décision de renvoi, à défaut d'appel dans le délai. Dès réception du dossier, les parties sont invitées par tout moyen par le greffe de la juridiction désignée à poursuivre l'instance et, s'il y a lieu, à constituer avocat dans le délai d'un mois à compter de cet avis. Lorsque devant la juridiction désignée les parties sont tenues de se faire représenter, l'affaire est d'office radiée si aucune d'elles n'a constitué avocat dans le mois de l'invitation qui leur a été faite en application de l'alinéa précédent.

S'agissant de la procédure ordinaire devant la cour d'appel, l'article 908 du code de procédure civile dispose qu'à peine de caducité de la déclaration d'appel, relevée d'office, l'appelant dispose d'un délai de trois mois à compter de la déclaration d'appel pour remettre ses conclusions au greffe.

L'article 910-3 de ce code prévoit toutefois qu'en cas de force majeure, le président de la chambre ou le conseiller de la mise en état peut écarter l'application des sanctions prévues aux articles 905-2 et 908 à 911.

L'article 2234 du code de procédure civile précise que la prescription ne court pas ou est suspendue contre celui qui est dans l'impossibilité d'agir par suite d'un empêchement résultant de la loi, de la convention ou de la force majeure.

A l'exception de la demande de radiation de l'affaire du rôle de la cour, la saisine du conseiller de la mise en état n'emporte pas d'effet suspensif des délais de procédure. Ainsi, les appelants disposaient du délai écoulé entre la déclaration d'appel reçue au greffe le 15 février 2022 jusqu'à la décision emportant dessaisissement de la cour d'appel d'Amiens prononcée le 27 avril 2022.

Le délai de trois mois visé par l'article 908 du code de procédure civile n'était pas expiré : les appelants bénéficiaient encore de 18 jours jusqu'au 15 mai 2022 sauf règles applicables au dimanche.

Entre le 27 avril 2022 et l'avis du greffe du 12 mai 2022 emportant notification aux parties d'avoir à poursuivre l'instance en constituant avocat, les appelants étaient placés dans l'impossibilité matérielle de remettre régulièrement, conformément aux dispositions fixées par l'article 908 susvisé, leurs conclusions au greffe compétent en l'absence de saisine de la cour de renvoi de sorte qu'au visa de l'article 2234 ci-dessus rappelé cette impossibilité procédurale justifie la suspension du délai pour conclure.

Les conclusions des appelants ont été remises au greffe le 25 mai 2022 soit dans le délai réglementaire subsistant après renvoi. Ces écritures sont en conséquence recevables, la déclaration d'appel n'étant pas atteinte de caducité.

Le moyen soulevé est rejeté.

Sur la radiation de l'affaire du rôle de la cour

L'article 524 du code de procédure civile dispose que lorsque l'exécution provisoire est de droit ou a été ordonnée, le premier président ou, dès qu'il est saisi, le conseiller de la mise en état peut, en cas d'appel, décider, à la demande de l'intimé et après avoir recueilli les observations des parties, la radiation du rôle de l'affaire lorsque l'appelant ne justifie pas avoir exécuté la décision frappée d'appel ou avoir procédé à la consignation autorisée dans les conditions prévues à l'article 521, à moins qu'il lui apparaisse que l'exécution serait de nature à entraîner des conséquences manifestement excessives ou que l'appelant est dans l'impossibilité d'exécuter la décision.

M. et Mme [T] ne produisent aucune pièce relative à leur situation financière. L'émission d'un chèque de 86 076,48 euros est au contraire la démonstration de leur capacité à exécuter le jugement prononcé le 13 septembre 2021, exécutoire par provision.

Ils ne justifient d'aucune circonstance laissant craindre l'insolvabilité de la partie adverse ce d'autant plus que M. [M] exerce une activité professionnelle et que le couple est propriétaire de l'immeuble vendu par les appelants le 24 novembre 2012 pour un prix de 570 000 euros.

L'émission d'un chèque au nom de M. le Bâtonnier ne vaut pas exécution de la décision entre les mains des créanciers. En conséquence, faute pour les appelants de justifier des conditions permettant d'échapper à la sanction, l'affaire sera radiée du rôle de la cour.

Sur les dépens et frais irrépétibles

Parties perdantes, M. et Mme [T] supporteront solidairement les dépens en application de l'article 696 du code de procédure civile.

En équité, ils seront condamnés à payer aux intimés la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

statuant par ordonnance contradictoire mise à disposition au greffe,

Rejette le moyen tiré de la caducité de la déclaration d'appel de M. [L] [T] et Mme [B] [R], son épouse le 15 février 2022 devant la cour d'appel d'Amiens,

Ordonne la radiation de l'affaire enregistrée sous le n° RG 22/01474 du rôle de la cour,

Précise que l'affaire ne pourra être de nouveau enrôlée que sur la production des pièces justifiant le paiement des créances dues aux intimés,

Condamne solidairement M. [L] [T] et Mme [B] [R], son épouse à payer à M. [Y] [M] et Mme [D] [F], son épouse la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne solidairement M. [L] [T] et Mme [B] [R], son épouse aux dépens de l'incident.

Le greffier,La présidente de chambre,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Formation : 1ère ch. civile
Numéro d'arrêt : 22/01474
Date de la décision : 11/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-11;22.01474 ?
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