N° RG 21/00547 - N° Portalis DBV2-V-B7F-IVVJ
COUR D'APPEL DE ROUEN
1ERE CHAMBRE CIVILE
ARRET DU 05 OCTOBRE 2022
DÉCISION DÉFÉRÉE :
18/00732
Tribunal judiciaire de Dieppe du 04 janvier 2021
APPELANT :
Monsieur [Y] [H]
né le 15 juillet 1965 à [Localité 18]
[Adresse 17]
[Localité 6]
représenté par Me Corinne MORIVAL de la Scp MORIVAL AMISSE MABIRE, avocat au barreau de Dieppe et assisté par Me WACQUET de la Selarl WACQUET, avocat au barreau d'Amiens plaidant par Me LUMBROSO
INTIMES :
Madame [D] [U] épouse [S]
née le 11 septembre 1948 à [Localité 13]
[Adresse 10]
[Localité 16]
représentée et assistée par Me Guillaume DES ACRES DE L'AIGLE de la Scp BONIFACE DAKIN & ASSOCIES, avocat au barreau de Rouen
Monsieur [I] [P]
né le 11 mars 1969 à [Localité 16]
[Adresse 4]
[Localité 7]
représenté et assisté par Me Guillaume DES ACRES DE L'AIGLE de la Scp BONIFACE DAKIN & ASSOCIES, avocat au barreau de Rouen
Madame [A] [P] épouse [J]
née le 02 septembre 1970 à [Localité 14]
[Adresse 3]
[Localité 8]
représentée et assistée par Me Guillaume DES ACRES DE L'AIGLE de la Scp BONIFACE DAKIN & ASSOCIES, avocat au barreau de Rouen
Madame [G] [P]
née le 08 mai 1973 à [Localité 14]
[Adresse 5]
[Localité 16]
représentée et assistée par Me Guillaume DES ACRES DE L'AIGLE de la Scp BONIFACE DAKIN & ASSOCIES, avocat au barreau de Rouen
Madame [F] [P] épouse [O]
née le 09 décembre 1977 à [Localité 16]
[Adresse 2]
[Localité 11]
représentée et assistée par Me Guillaume DES ACRES DE L'AIGLE de la Scp BONIFACE DAKIN & ASSOCIES, avocat au barreau de Rouen
Monsieur [K] [P]
né le 26 janvier 1982 à [Localité 16]
[Adresse 9]
[Localité 12]
représenté et assisté par Me Guillaume DES ACRES DE L'AIGLE de la Scp BONIFACE DAKIN & ASSOCIES, avocat au barreau de Rouen
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 15 juin 2022 sans opposition des avocats devant Mme Magali DEGUETTE, conseillère, rapporteur,
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée :
Mme Edwige WITTRANT, présidente de chambre,
M. Jean-François MELLET, conseiller,
Mme Magali DEGUETTE, conseillère,
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme [B] [E],
DEBATS :
A l'audience publique du 15 juin 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 5 octobre 2022.
ARRET :
CONTRADICTOIRE
Rendu publiquement le 5 octobre 2022, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
signé par Mme WITTRANT, présidente et par Mme CHEVALIER, greffier.
*
* *
EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
Par promesse notariée du 26 mai 2014, Mme [D] [U] épouse [S] et ses cinq enfants M. [I] [P], Mme [A] [P] épouse [J], Mme [G] [P], Mme [F] [P] épouse [O] et M. [K] [P], se sont engagés à vendre à M.[Y] [H] leur immeuble situé [Adresse 1], pour le prix de 390 000 euros. Cette promesse a été consentie pour une durée expirant le 14 juillet 2016 à 16 heures.
Cet acte a également été assorti notamment des conditions suspensives suivantes :
- la signature d'une convention d'occupation précaire laquelle a eu lieu le même jour entre les parties. M. [Y] [H], qui était en instance de divorce, s'est vu consentir un droit d'occupation des lieux à compter du 15 juillet 2014 pour une durée de deux ans non renouvelable, soit jusqu'au 14 juillet 2016, moyennant une redevance mensuelle de 1 000 euros,
- l'obtention d'une ou plusieurs offres définitives de prêt au plus tard le 15 mai 2016 d'un montant maximum de 390 000 euros remboursable sur 20 ans.
Par acte d'huissier de justice du 21 octobre 2016, les consorts [P] ont fait sommer M. [Y] [H] de quitter le jour même l'immeuble sous astreinte de
100 euros par jour de retard.
Un procès-verbal de constat d'état des lieux de sortie a été dressé le 14 novembre 2016 par huissier de justice en présence de M. [Y] [H] et de Mme [D] [U] épouse [S].
Par exploit d'huissier de justice du 22 juin 2018, les consorts [P] ont fait assigner M. [Y] [H] devant le tribunal de grande instance de Dieppe en paiement de la clause pénale stipulée dans la promesse, d'une indemnité d'occupation, de l'astreinte prévue dans la convention d'occupation précaire et du prorata des taxes foncières de l'immeuble.
Suivant jugement du 4 janvier 2021, le tribunal judiciaire de Dieppe a :
- constaté que la condition suspensive insérée à la promesse de vente en date du 26 mai 2014 conclue entre M. [Y] [H], Mme [D] [U] épouse [S], M. [I] [P], Mme [A] [P] épouse [J], Mme [G] [P], Mme [F] [P] épouse [O] et M. [K] [P] portant sur un immeuble situé commune de [Adresse 15] cadastré section [Cadastre 19], d'une contenance de 1ha 70a 60ca est réputée non réalisée,
- dit que la clause pénale contenue dans ladite promesse de vente est acquise à Mme [D] [U] épouse [S], à M. [I] [P], à Mme [A] [P] épouse [J], à Mme [G] [P], à Mme [F] [P] épouse [O] et à M. [K] [P],
- condamné en application de ladite clause pénale M. [Y] [H] à payer à Mme [D] [U] épouse [S], à M. [I] [P], à Mme [A] [P] épouse [J], à Mme [G] [P], à Mme [F] [P] épouse [O] et à M. [K] [P] la somme de 39 000 euros,
- condamné M. [Y] [H] à payer à Mme [D] [U] épouse [S], à
M. [I] [P], à Mme [A] [P] épouse [J], à Mme [G] [P], à Mme [F] [P] épouse [O] et à M. [K] [P] la somme de :
. 460,30 euros au titre d'une indemnité d'occupation correspondant à la redevance mensuelle contractuellement prévue et calculée au prorata de 14 jours d'occupation impayés,
. 2 400 euros au titre d'une indemnité d'astreinte conventionnelle correspondant aux 24 jours écoulés entre la sommation de quitter les lieux délivrée à M. [Y] [H] le 21 octobre 2016 et son départ effectif le 14 novembre 2016,
. 569,22 euros ramenée à 272,25 euros au titre de la taxe foncière au prorata de l'occupation de l'immeuble du 1er janvier au 14 novembre 2016 conformément à la demande des consorts [P] telle qu'est faite dans le dispositif de leurs dernières conclusions,
- dit que l'ensemble de ces sommes porteront intérêt au taux légal à compter du 18 septepmbre 2017,
- ordonné la capitalisation des intérêts,
- condamné solidairement Mme [D] [U] épouse [S], M. [I] [P], Mme [A] [P] épouse [J], Mme [G] [P], Mme [F] [P] épouse [O] et M. [K] [P] à payer à M. [Y] [H] la somme de 2 000 euros en remboursement de son dépôt de garantie,
- débouté M. [Y] [H] de sa demande en paiement au titre des réparations faites dans l'immeuble situé commune de [Adresse 15],
- débouté M. [Y] [H] de sa demande de délais de paiement,
- débouté M. [Y] [H] de sa demande de paiement en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. [Y] [H] à payer à Mme [D] [U] épouse [S], à
M. [I] [P], à Mme [A] [P] épouse [J], à Mme [G] [P], à Mme [F] [P] épouse [O] et à M. [K] [P] une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. [Y] [H] aux dépens dont distraction au profit de Me [X] en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
- ordonné l'exécution provisoire.
Par déclaration du 8 février 2021, M. [Y] [H] a formé un appel contre ce jugement.
EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET DES MOYENS DES PARTIES
Par dernières conclusions notifiées le 6 août 2021, M. [Y] [H] demande, en application des articles 1134, 1152, 1162, 1178, et 1244-1 du code civil dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, de :
à titre principal,
- voir infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Dieppe le 4 janvier 2021, sauf en ce qu'il a condamné les consorts [P] à lui payer la somme de 2000 euros en remboursement de son dépôt de garantie,
- voir débouter les consorts [P] de toutes leurs demandes,
- voir condamner solidairement les consorts [P] à lui rembourser la somme de 1 102,97 euros au titre des réparations, avec intérêts au taux légal à compter du 26 novembre 2018, date de la première demande,
- voir confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné les consorts [P] à lui payer la somme de 2 000 euros en remboursement de son dépôt de garantie avec intérêts au taux légal à compter du 26 novembre 2018,
- voir condamner les consorts [P] à lui payer la somme de 6 000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de la présente instance dont distraction faite à Me Morival,
subsidiairement,
- voir réduire le montant de la clause pénale à un euro et, en tout état de cause, à de plus justes proportions,
- voir réduire le montant de l'astreinte conventionnelle à un euro et, en tout état de cause, à de plus justes proportions,
- voir ordonner la compensation des sommes dues entre les parties le cas échéant,
- se voir accorder les plus larges délais de paiement le cas échéant,
- voir débouter les consorts [P] de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Il fait valoir que la promesse conclue avec les intimés, qui contient l'engagement ferme et définitif du promettant de vendre et la faculté d'acquérir du bénéficiaire, est une promesse unilatérale de vente, que le tribunal l'a dénaturée, que la discussion relative à la réalisation ou non d'une condition suspensive d'obtention d'un prêt est sans emport.
Il ajoute que la clause pénale n'est pas applicable en l'absence d'une obligation contractuelle dont il aurait été débiteur dès lors qu'il n'a pas levé l'option d'acquisition, ni demandé la réalisation de la vente ; qu'en toutes hypothèses, il a effectué les diligences pour obtenir un prêt, qu'aucun formalisme particulier n'était requis pour proroger le délai de réalisation de la promesse de vente ou de la condition suspensive d'obtention d'un prêt, que les consorts [P] y ont tacitement consenti et qu'ils ne lui ont pas adressé la mise en demeure prévue par la promesse, qu'il lui était impossible d'obtenir un prêt quelles qu'en soient les conditions sollicitées notamment de durée eu égard à son endettement de 66 % et à l'instance en divorce et en liquidation de son régime matrimonial toujours pendante et qui était parfaitement connue des consorts [P], de sorte que la condition suspensive pouvait être considérée comme défaillie, mais pas en raison de sa faute ; qu'en tout état de cause, les consorts [P] ne l'ont jamais mis en demeure de régulariser la vente qui est un préalable à la mise en oeuvre de la clause pénale.
Il précise, s'agissant de la convention d'occupation précaire, qu'elle ne prévoyait aucune astreinte aux termes de la clause ayant trait à sa fin, que la durée de la promesse ayant été prorogée tacitement, il ne s'est pas maintenu dans les lieux sans droit ni titre au-delà du 14 juillet 2016, qu'il a quitté les lieux le 25 septembre 2016 ce que savaient les intimés qui lui ont pourtant fait délivrer une sommation de quitter les lieux, qu'il n'a pas à supporter les conséquences de leurs indisponibilités calendaires lui imposant la date de l'état des lieux le 14 novembre 2016, qu'en toutes hypothèses, l'astreinte conventionnelle a le caractère d'une clause pénale dont le juge peut modérer le montant ; qu'il n'est pas redevable du coût des grosses réparations que sont le remplacement de la pompe de chauffage, le débouchage des canalisations et du préparateur d'eau chaude et le déblocage des robinets thermostatiques, ce que ne contestent pas les intimés.
Il indique enfin qu'il a de lourdes charges qui l'empêchent, en cas de condamnation, de verser d'ores et déjà la totalité des sommes revendiquées, que les intimés disposent de capacités suffisantes pour lui accorder le bénéfice d'un échelonnement.
Par dernières conclusions notifiées le 6 mai 2022, les consorts [P] sollicitent de voir sur la base des articles 1134 et 1178 du code civil applicables au jour de la promesse de vente et de la convention d'occupation précaire :
- confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Dieppe du 4 janvier 2021 en ce qu'il a condamné M. [Y] [H] à leur payer diverses sommes,
- condamner M. [Y] [H] à leur payer les sommes suivantes :
. 39 000 euros en application de la clause pénale du compromis de vente,
. 2 400 euros au titre de l'astreinte conventionnelle comprise dans la convention d'occupation précaire,
. 500 euros au titre de l'indemnité d'occupation du 1er au 14 novembre 2014,
. 272,25 euros au titre du prorata temporis dû sur la taxe foncière 2016 du 1er au 14 novembre 2016,
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il les a condamnés à payer à M. [Y] [H] la somme de 2 000 euros à titre de remboursement du dépôt de garantie,
- confirmer le jugement entrepris en ses autres dispositions,
y ajoutant,
- condamner M. [Y] [H] à leur payer la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, en plus des entiers dépens de première instance et d'appel.
Ils exposent que la promesse de vente est synallagmatique car elle contient des obligations, portant sur des conditions suspensives à la charge de M. [Y] [H], et une clause pénale, qu'en tout état de cause, même si cette promesse était unilatérale, M. [Y] [H] en a levé l'option d'achat en ayant effectué des démarches d'obtention de prêt, qu'au surplus, même en cas de non levée de celle-ci, l'appelant a empêché l'accomplissement de la condition suspensive d'obtention d'un prêt conforme aux dispositions contractuelles et est responsable de sa défaillance conformément à l'ancien article 1178 du code civil, que cette faute doit être sanctionnée par l'application de la clause pénale, qu'il n'y a pas eu de prorogation implicite du délai de réalisation de ladite condition suspensive, qu'ils n'étaient pas obligés de mettre en demeure M. [Y] [H] en vue de la réitération de l'acte de vente dès lors que les conditions suspensives n'étaient pas remplies.
Ils ajoutent que, s'agissant de son départ des lieux, M. [Y] [H] ne prouve pas qu'il a remis les clés avant l'établissement du procès-verbal de constat d'état des lieux le 14 novembre 2016 ; qu'il ne justifie pas davantage des sommes qu'il indique avoir avancées au titre de grosses réparations pour lesquelles il n'a pas obtenu leur accord, que la nécessité du détartrage du ballon d'eau chaude n'est pas prouvée ; que l'état déplorable dans lequel M. [Y] [H] a laissé la maison justifie que le dépôt de garantie ne lui soit pas restitué.
Ils précisent enfin que les délais de paiement sollicités par M. [Y] [H] lui ont déjà été accordés de fait depuis 2016 et qu'il ne justifie pas de sa situation financière actuelle, que Mme [D] [U] épouse [S] ne perçoit des revenus qu'à hauteur de 900 euros par mois.
La clôture de l'instruction a été ordonnée le 25 mai 2022.
MOTIFS
M. [H] soulève l'irrecevabilité de cette demande dans le corps de ses conclusions, mais n'a pas formalisé de prétention en ce sens dans le dispositif. En application de l'article 954 alinéa 3 du code de procédure civile, la cour d'appel n'est donc pas saisie d'une exception d'irrecevabilité.
Sur le paiement de la clause pénale
Selon l'article 12 du code de procédure civile, il appartient au juge de donner à l'acte son exacte qualification sans s'attacher à celle que lui ont donnée les parties.
En l'espèce, à la page 4, l'objet de l'acte du 26 mai 2014 est qualifié expressément de 'PROMESSE UNILATERALE DE VENTE'. Cette mention est reprise à la page 7 et les termes de 'promettant' et de 'bénéficiaire' sont utilisés pour désigner les parties.
Les obligations des parties sont les suivantes : 'Le PROMETTANT confère au BENEFICIAIRE la faculté d'acquérir, si bon lui semble, le BIEN ci-dessous identifié.
Le PROMETTANT prend cet engagement pour lui-même ou ses ayants-droit même protégés.
Le BENEFICIAIRE accepte la présente promesse de vente en tant que promesse, mais se réserve la faculté d'en demander ou non la réalisation suivant qu'il lui conviendra.' (page 4).
Aux pages 6 et 7, il est indiqué que : 'La réalisation de la promesse aura lieu :
1) - soit par la signature de l'acte authentique constatant le caractère définitif de la vente, accompagnée du paiement du prix et du versement des frais par virement dans le délai ci-dessus [au plus tard le 14 juillet 2016 à 16h] ;
2 - soit par la levée d'option faite par le BENEFICIAIRE dans le même délai accompagné du versement du prix et des frais par virement entre les mains du notaire, puis de la signature de l'acte de vente au plus tard dans les cinq jours ouvrés suivant celle-ci.
[...]
- CARENCE
Au cas où la vente ne serait pas réalisée par acte authentique dans l'un ou l'autre cas et délai ci-dessus, avec paiement du prix et des frais comme indiqué, le BENEFICIAIRE sera de plein droit déchu du bénéfice de la promesse auxdites dates sans qu'il soit besoin d'une mise en demeure de la part du PROMETTANT qui disposera alors librement du BIEN nonobstant toutes manifestations ultérieures de la volonté d'acquérir qu'aurait exprimées le BENEFICIAIRE.
[...]
CLAUSE D'EXECUTION FORCEE
Il est expressément convenu entre les parties qu'en raison de l'acceptation de la promesse unilatérale de vente par le BENEFICIAIRE en tant que simple promesse, il s'est formé entre les parties une convention de promesse unilatérale dans les termes de l'article 1134 du Code civil. Dans la commune intention des parties, et pendant toute la durée du contrat, celle-ci ne pourra être révoquée que par leur consentement mutuel et ce conformément au deuxième alinéa dudit article.
Il en résulte notamment que :
1°) Le PROMETTANT a, pour sa part, définitivement consenti à la vente et qu'il est d'ores et déjà débiteur de l'obligation de transférer la propriété au profit du BENEFICIAIRE aux conditions des présentes ; '.
A la page 8, les parties ont convenu de ne pas stipuler d'indemnité d'immobilisation et, à la page 21, de ne pas publier au service de la publicité foncière cette promesse qui n'opère pas de transfert de propriété au sens de l'article 28 du décret n°55-22 du 4 janvier 1955.
L'existence d'une faculté d'option d'acquérir ou non laissée à la discrétion du bénéficiaire parallèlement à celle de l'engagement ferme du promettant de vendre, ainsi que les termes utilisés, l'absence de fixation d'une indemnité d'immobilisation à la charge du bénéficiaire et de publication de cet acte au service chargé de la publicité foncière, permettent de qualifier cette promesse de promesse unilatérale de vente.
Le moyen des consorts [P] visant à affirmer qu'il s'agit d'une promesse synallagmatique, parce que, dans son courrier du 27 mai 2014, le notaire instrumentaire a informé M. [H] du bénéfice d'un délai de rétractation de sept jours, est inopérant, dès lors que l'article L.271-1 du code de la construction et de l'habitation dans sa version en vigueur à ladite date prévoyait que ce délai de rétractation s'appliquait également à la promesse unilatérale de vente.
M. [H] n'a jamais levé l'option d'acquérir l'immeuble, objet de cette promesse, dans le délai prévu jusqu'au 14 juillet 2016, date à laquelle les consorts [P] ne lui ont pas davantage adressé une mise en demeure d'y procéder.
Comme l'indiquent à juste titre ces derniers, ce terme du 14 juillet 2016 n'a pas fait l'objet d'une prorogation tacite. Les seuls échanges par courriels entre Mme [U] épouse [S], et M. [H] après ladite date n'engageaient pas ses coïndivisaires et ne peuvent, en outre, constituer une telle prorogation alors que dès le 7 septembre 2016, par sms, M. [H] lui avait notifié l'impossibilité d'acquérir le bien.
La promesse du 26 mai 2014 est ainsi devenue caduque le 14 juillet 2016 à 16 heures. Elle n'emporte aucune sanction à l'encontre de M. [H].
En effet, d'une part, les parties n'avaient pas prévu qu'elle soit sanctionnée par le maintien au promettant du gain d'une indemnité d'immobilisation qu'ils ont volontairement écartée.
D'autre part, la clause pénale portée à la page 8 ne s'applique pas dans la présente hypothèse d'une absence de levée d'option par le bénéficiaire.
Elle était ainsi rédigée : 'Au cas où, toutes les conditions relatives à l'exécution des présentes étant remplies, l'une des parties, après avoir été mise en demeure, ne régulariserait pas l'acte authentique et ne satisferait pas ainsi aux obligations alors exigibles, elle devra verser à l'autre partie la somme de [...] (39.000,00 EUR), à titre de clause pénale, conformément aux dispositions des articles 1152 et 1226 du Code civil, indépendamment de tous dommages-intérêts.
Il est ici expressément précisé et convenu entre les parties que cette clause pénale a également pour objet de sanctionner le comportement de l'une des parties dans la mesure où il n'a pas permis de remplir toutes les conditions d'exécution de la vente.'.
Ses termes, tant dans son premier alinéa que dans son second alinéa, visent les conditions d'exécution de la vente, ce qui suppose au préalable la levée de l'option de se porter acquéreur par le bénéficiaire au cours du délai prévu. Dans l'hypothèse d'une promesse devenue synallagamatique par la levée de l'option par le bénéficiaire, la sanction attachée à la clause pénale aurait pu alors se décliner suivant l'alinéa 1 ou l'alinéa 2 de la clause si les conditions suspensives avaient été remplies ou ne l'étaient pas en raison du comportement de l'une des parties, ce qui n'est pas le cas de l'espèce.
La discussion sur la réalisation de la condition suspensive de l'obtention d'une ou plusieurs offres définitives de prêt est donc inopérante.
Il ne sera pas fait droit à la demande de paiement en exécution de la clause pénale, inapplicable en l'espèce. La décision du premier juge l'ayant accueillie sera infirmée.
Sur le paiement de l'astreinte conventionnelle et d'une indemnité d'occupation
La convention d'occupation précaire stipule, à la page 4, que 'Lorsque 'l'Occupant' aura reçu une sommation de quitter les lieux, par lettre recommandée avec accusé de réception ou par exploit d'huissier, il devra libérer les locaux et restituer les clés à la date indiquée dans le courrier ou la sommation, à défaut il encourra une astreinte de cent euros (100,00 eur) par jour de retard.'.
M. [H] s'est vu sommer de quitter les lieux par acte d'huissier de justice du 21 octobre 2016, qui visait l'astreinte conventionnelle.
La clause relative à la fin de la convention d'occupation précaire et à la remise des clefs, visée par M. [H] à la page 11 de la convention et qui ne précise pas le montant de l'astreinte, est applicable dans l'hypothèse de la résiliation unilatérale par l'une des parties avant la fin de la convention. Ce cas n'est pas celui de l'espèce qui a trait à l'expiration de la durée de la convention. Cette clause ne s'applique donc pas.
Si l'astreinte conventionnelle s'analyse en une clause pénale au sens de l'ancien article 1152 du code civil dont le montant peut être modéré par le juge, il n'est pas démontré dans le cas présent que son montant de 2 400 euros (100 euros x 24 jours du 21 octobre au 14 novembre 2016) est manifestement disproportionné avec le préjudice réellement subi par les intimés du fait du dépassement de la durée de la convention d'occupation précaire et de l'absence de libération des lieux par
M. [H]. En effet, celui-ci n'a restitué les clés de l'immeuble que lors de l'établissement du procès-verbal de constat de l'état des lieux le 14 novembre 2016. S'il a pu matériellement quitter les lieux antérieurement, ce fait ne le dispensait pas de son obligation de régler la contrepartie de son occupation des lieux dès lors qu'il restait en possession des clés. La libération des lieux n'a été effective que lors de la remise par M. [H] des 23 clés à Mme [U] épouse [S], coïndivisaire, le 14 novembre 2016. Ce dernier ne peut pas reprocher aux intimés son retard dans le respect de ses obligations, alors que plus d'un mois s'est écoulé entre son départ allégué le 25 septembre 2016 et la remise des clés le 14 novembre 2016.
La décision du premier juge ayant fait droit aux prétentions financières des consorts [P] sera confirmée.
Sur le remboursement des grosses réparations et du dépôt de garantie
La convention d'occupation précaire prévoit, au titre de l'entretien, à la page 8, que ' 'L'Occupant' maintiendra les lieux en bon état pendant la durée de la présente convention et il les rendra de même au terme de celle-ci. [...] A l'exception des grosses réparations qui demeureront à la charge du ''Propriétaire', l''Occupant' aura la charge de toutes les réparations et devra rendre les locaux à sa sortie en bon état desdites réparations.'.
Elle ne définit pas ce que recouvre les grosses réparations. L'article 606 du code civil mentionne que ce sont celles des gros murs et des voûtes, le rétablissement des poutres et des couvertures entières, des digues, des murs de soutènement et de clôture. Toutes les autres réparations sont d'entretien.
M. [H] produit une facture du 30 avril 2016 de fourniture et de pose d'une pompe de chauffage d'un montant de 430,10 euros et une facture du 12 septembre 2016 de démontage du préparateur d'eau chaude sanitaire pour le débouchage des canalisations et du préparateur de 672,87 euros.
Par leur nature et leur montant, ces interventions constituent des dépenses d'entretien restant à la charge de l'occupant. La demande de leur remboursement sera rejetée. La décision du tribunal ayant statué en ce sens sera confirmée.
Concernant le dépôt de garantie, la convention d'occupation précaire précise à la page 12 que le dépôt de garantie de 2 000 euros a été versé par M. [H] 'pour sûreté et garantie de l'exécution des obligations de toute nature résultant de la présente convention à la charge de 'L'Occupant' '.
Elle mentionne à la page 4 que ''l'Occupant' prendra les locaux dans l'état où ils se trouveront au moment de l'entrée en jouissance, sans pouvoir exiger du 'Propriétaire' aucune réparation ni remise en état.'.
Les consorts [P] invoquent un état absolument déplorable de la maison à la lecture du procès-verbal de constat du 14 novembre 2016 pour s'opposer à la restitution du dépôt de garantie.
Cependant, ils ne spécifient pas les dégradations ou les manquements de M. [H] durant son occupation des lieux du 15 juillet 2014 au 14 novembre 2016.
De plus, aucun état des lieux d'entrée n'a été établi, ce qui ne permet pas d'imputer à M. [H] les griefs allégués contre lui.
La décision du tribunal ayant condamné les consorts [P] à lui restituer le dépôt de garantie sera confirmée. Les intérêts au taux légal courront à compter du 15 octobre 2019, date des dernières conclusions notifiées par M. [H] devant le tribunal et contenant cette prétention.
Sur les délais de paiement
L'article 1343-5 du code civil permet au juge, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, de reporter ou d'échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.
En l'espèce, d'une part, M. [H] ne justifie pas de sa situation actuelle.
D'autre part, depuis son assignation le 22 juin 2018, il a bénéficié de fait d'un délai de deux années.
Dès lors, sa demande sera rejetée. La décision du tribunal ayant statué en ce sens sera confirmée.
Sur les demandes accessoires
La compensation des sommes dues entre les parties sera ordonnée.
Les dispositions du jugement sur le sort des dépens seront infirmées. Si les consorts [P] obtiennent le bénéfice d'une condamnation à l'encontre de M. [H], les sommes retenues en appel sont moindres de sorte que l'appel de ce dernier était au moins partiellement et amplement fondé.
Il sera fait masse des dépens avec condamnation in solidum de M. [H] et des consorts [P], avec répartition à hauteur de 50 % dans leur rapport entre eux, et avec bénéfice de distraction au profit de l'avocat qui en a fait la demande.
Les dispositions prises en première instance sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile seront confirmées en ce qu'elles répartissent équitablement les charges.
En revanche, l'équité ne commande pas qu'il soit fait application de ce texte dans le cadre de cette instance d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire, rendu publiquement par mise à disposition au greffe, et en dernier ressort,
Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a :
- constaté que la condition suspensive insérée à la promesse de vente en date du 26 mai 2014 conclue entre M. [Y] [H], Mme [D] [U] épouse [S], M. [I] [P], Mme [A] [P] épouse [J], Mme [G] [P], Mme [F] [P] épouse [O] et M. [K] [P] portant sur un immeuble situé commune de [Adresse 15] cadastré section [Cadastre 19], d'une contenance de 1ha 70a 60ca est réputée non réalisée,
- dit que la clause pénale contenue dans ladite promesse de vente est acquise à Mme [D] [U] épouse [S], à M. [I] [P], à Mme [A] [P] épouse [J], à Mme [G] [P], à Mme [F] [P] épouse [O] et à M. [K] [P],
- condamné en application de ladite clause pénale M. [Y] [H] à payer à Mme [D] [U] épouse [S], à M. [I] [P], à Mme [A] [P] épouse [J], à Mme [G] [P], à Mme [F] [P] épouse [O] et à M. [K] [P] la somme de 39 000 euros,
- condamné M. [Y] [H] aux dépens dont distraction au profit de Me [X] en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
Statuant à nouveau de ces chefs infirmés et y ajoutant,
Déboute Mme [D] [U] épouse [S], M. [I] [P], Mme [A] [P] épouse [J], Mme [G] [P], Mme [F] [P] épouse [O] et M.[K] [P], de leur demande de paiement de la somme de 39 000 euros en application de la clause pénale de la promesse unilatérale de vente du 26 mai 2014,
Dit que les intérêts au taux légal sur la somme de 2 000 euros que Mme [D] [U] épouse [S], M. [I] [P], Mme [A] [P] épouse [J], Mme [G] [P], Mme [F] [P] épouse [O] et M. [K] [P] sont condamnés solidairement à payer à M. [Y] [H] en remboursement de son dépôt de garantie, courront à compter du 15 octobre 2019,
Ordonne la compensation des sommes dues entre les parties,
Déboute les parties du surplus de leurs demandes,
Fait masse des dépens et condamne in solidum d'une part M. [Y] [H] et d'autre part Mme [D] [U] épouse [S], M. [I] [P], Mme [A] [P] épouse [J], Mme [G] [P], Mme [F] [P] épouse [O] et M. [K] [P], pris ensemble, aux dépens de première instance et d'appel et dit que, dans leur rapport entre eux, ils sont condamnés chacun à en supporter la moitié, avec bénéfice de distraction au profit de Me Morival, avocate, en application de l'article 699 du code de procédure civile.
Le greffier,La présidente de chambre,