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21/09/2022 | FRANCE | N°21/00905

France | France, Cour d'appel de Rouen, 1ère ch. civile, 21 septembre 2022, 21/00905


N° RG 21/00905 - N° Portalis DBV2-V-B7F-IWNC





COUR D'APPEL DE ROUEN



1ERE CHAMBRE CIVILE



ARRET DU 21 SEPTEMBRE 2022







DÉCISION DÉFÉRÉE :



13/00169

Tribunal de grande instance de Dieppe du 31 mai 2017





APPELANTS ET INTIMÉS :



Monsieur [OH] [E]

né le 25 mai 1935 à [Localité 32]

[Adresse 26]

[Localité 14]



et



Madame [NX] [F] épouse [E]

née le 22 avril 1937 à [Localité 25]

[Adresse 26

]

[Localité 14]



représentés et assistés par Me Sophie CATTELET, avocat au barreau de Dieppe





INTIMÉS ET APPELANTS :



Madame [A] [MG] épouse [K]

venant aux droits de [G] [MG]

née le 06 septembre 1961 à [Localité 10]

[...

N° RG 21/00905 - N° Portalis DBV2-V-B7F-IWNC

COUR D'APPEL DE ROUEN

1ERE CHAMBRE CIVILE

ARRET DU 21 SEPTEMBRE 2022

DÉCISION DÉFÉRÉE :

13/00169

Tribunal de grande instance de Dieppe du 31 mai 2017

APPELANTS ET INTIMÉS :

Monsieur [OH] [E]

né le 25 mai 1935 à [Localité 32]

[Adresse 26]

[Localité 14]

et

Madame [NX] [F] épouse [E]

née le 22 avril 1937 à [Localité 25]

[Adresse 26]

[Localité 14]

représentés et assistés par Me Sophie CATTELET, avocat au barreau de Dieppe

INTIMÉS ET APPELANTS :

Madame [A] [MG] épouse [K]

venant aux droits de [G] [MG]

née le 06 septembre 1961 à [Localité 10]

[Adresse 41]

[Localité 17]

et

Madame [SJ] [MG] épouse [FM]

venant aux droits de [G] [MG]

née le 13 décembre 1963 à [Localité 10]

[Adresse 8]

[Localité 13]

et

Madame [U] [MG] épouse [DW]

venant aux droits de [G] [MG]

née le 14 avril 1973 à [Localité 27]

[Adresse 1]

[Localité 12]

et

Madame [ZI] [R] veuve [MG]

née le 27 novembre 1938 à [Localité 29]

[Adresse 28]

[Adresse 42]

[Localité 10]

représentés et assistés par Me Antoine DECHANCE, avocat au barreau de Dieppe

INTIMES :

Madame [PY] [SE]

née le 19 mai 1961 à [Localité 10]

[Adresse 5]

[Localité 19]

représentée et assistée par Me Karine DESCAMPS de la Scp DESCAMPS PERISSERE, avocat au barreau de Dieppe

Bénéficie d'une aide juridictionnelle totale n°2018/005640 accordée le 31-07-2018 par le bureau d'aide juricitionnelle de Rouen

Madame [KV] [SE]

née le 06 octobre 1956 à [Localité 10]

[Adresse 5]

[Localité 19]

représentés et assistés par Me Karine DESCAMPS de la Scp DESCAMPS PERISSERE, avocat au barreau de Dieppe

Monsieur [B] [SE]

né le 24 août 1951 à [Localité 10]

[Adresse 30]

[Localité 15]

non constitué bien que régulièrement assigné par acte d'huissier remis le 7 et 16 mars 2018 à personne

Madame [T] [ML] en qualité d'ayant droit de M. [PY] [ML] lui-même ayant droit de Mme [V] [SE]

née le 08 janvier 1978 à [Localité 27]

[Adresse 9]

[Localité 11]

non constituée bien que régulièrement assignée par acte d'huissier remis à personne le 23 juin 2021

Monsieur [HD] [ML] en qualité d'ayant droit de M. [PY] [ML] lui-même ayant droit de Mme [V] [SE]

né le 02 mars 1982 à [Localité 27]

[Adresse 7]

[Localité 16]

non constituée bien que régulièrement assignée par acte d'huissier remis à l'étude le 23 juin 2021

Monsieur [M] [ML] en qualité d'ayant droit de M. [PY] [ML] lui-même ayant droit de Mme [V] [SE]

né le 04 août 1986 à [Localité 27]

[Adresse 6]

[Localité 18]

non constituée bien que régulièrement assignée par acte d'huissier remis à personne le 24 juin 2021

Monsieur [Y] [Z]

né le 22 octobre 1979 à [Localité 37]

précédemment [Adresse 40]

et actuellement [Adresse 38]

[Adresse 24]

CONAKRY (Guinée)

non constitué, bien que régulièrement assigné à Parquet par actes des 12 et 27 mars 2018 sans retour de l'acte de la Guinée

Madame [OC] [L]

née le 14 mars 1978 à Berlin (Allemagne)

précédemment [Adresse 40]

et actuellement [Adresse 38]

[Adresse 24]

CONAKRY (Guinée)

non constituée, bien que régulièrement assignée à Parquet par actes des 12 et 27 mars 2018 sans retour de l'acte de la Guinée

COMPOSITION DE LA COUR  :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 30 mai 2022 sans opposition des avocats devant Mme Magali DEGUETTE, conseiller, rapporteur,

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée :

Mme Edwige WITTRANT, présidente de chambre,

M. Jean-François MELLET, conseiller,

Mme Magali DEGUETTE, conseillère,

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Catherine CHEVALIER,

DEBATS :

A l'audience publique du 30 mai 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 21 septembre 2022.

ARRET :

PAR DEFAUT

Rendu publiquement le 21 septembre 2022, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

signé par Mme WITTRANT, présidente et par Mme CHEVALIER, greffier.

*

* *

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

M. [G] [MG] et son épouse Mme [ZI] [R] sont propriétaires d'une parcelle cadastrée section [Cadastre 4], située au lieu-dit [Adresse 31], (76) [Localité 44], et accessible depuis la voie communale n°9 par une bande de terrain séparant d'un côté le fonds des consorts [SE], cadastré section [Cadastre 35], et de l'autre côté, le fonds de M. [OH] [E] et de son épouse Mme [NX] [F], cadastré section [Cadastre 21] et [Cadastre 2].

Par ordonnance du 27 janvier 2011, le juge des référés du tribunal de grande instance de Dieppe, saisi les 9 et 10 août 2010 par les époux [MG] alléguant que les consorts [SE] avaient déplacé la clôture de leur propriété en 2003 des bornes A et B vers les bornes D et Q, a fait droit à leur demande de réalisation d'une expertise concernant les limites de propriété au contradictoire de Mmes [PY] et [KV] [SE] et des époux [E] et a désigné à cet effet M. [O] [BR].

Ce dernier a établi son rapport d'expertise le 27 juin 2011, aux termes duquel il a conclu que :

- les époux [MG] étaient propriétaires de la languette de terrain, matérialisée entre les points ou les bornes BAFEDQ figurant sur le plan reproduit dans son annexe 3, située entre la parcelle [Cadastre 35] des consorts [SE] et la parcelle [Cadastre 21] des époux [E], et rattachée au cadastre à la parcelle [Cadastre 4] des époux [MG],

- selon le titre de propriété du 7 avril 1971, les époux [MG] bénéficieraient d'une servitude de passage sur la parcelle [Cadastre 21].

Par acte notarié du 27 octobre 2011, Mmes [PY], [V], [KV] et [B] [SE] ont vendu à M. [Y] [Z] et à Mme [OC] [L] la parcelle [Cadastre 35]. Y a été mentionnée l'existence de cette procédure judiciaire dont les frais et ses suites restaient à la charge des vendeurs, les acquéreurs n'étant pas subrogés dans les droits de ces derniers à ce sujet.

Suivant actes d'huissier de justice des 20 décembre 2011 et 20 mars 2012, les époux [MG] ont fait assigner les consorts [SE] devant le tribunal d'instance de Dieppe aux fins d'homologation du rapport d'expertise de M. [BR]. Ils ont aussi demandé la condamnation de Mmes [PY] et [KV] [SE], de M. [Z] et de Mme [L], à repositionner à son emplacement d'origine la clôture déplacée en 2003, la clôture actuelle restreignant l'accès, notamment des engins agricoles, à leur parcelle cadastrée section [Cadastre 34] (actuelle [Cadastre 4]) depuis le chemin communal. Ils leur ont en outre réclamé le bénéfice d'une astreinte et de dommages et intérêts.

Ledit tribunal s'est déclaré incompétent par jugement du 24 janvier 2013 et a renvoyé l'examen de ce litige au tribunal de grande instance de Dieppe.

M. [G] [MG] est décédé le 08 mai 2014. Il a laissé pour lui succéder son épouse et leurs trois filles Mmes [A] [MG] épouse [K], [SJ] [MG] épouse [FM] et [U] [MG] épouse [DW].

Par jugement du 31 mai 2017, le tribunal de grande instance de Dieppe a :

- dit que Mme [ZI] [R] veuve [MG], Mme [A] [MG] épouse [K], Mme [SJ] [MG] épouse [FM], Mme [U] [MG] épouse [DW] ne sont propriétaires d'aucun espace entre la parcelle [Cadastre 34] et le chemin communal,

- dit que par prescription acquisitive, la parcelle ABQDEF était la propriété des dames [SE] transmis à leurs acquéreurs M. [Z] et Mme [L] par acte en date du 27 octobre 2011,

- dit que les époux [E] sont propriétaires de la parcelle [Cadastre 21] (et du chemin privé cadastré [Cadastre 4]), la limite séparative de propriété de ces terrains avec la parcelle [SE] étant matérialisée par la ligne (et les bornes) QDE,

- constaté que Mme [ZI] [R] veuve [MG] dispose d'un droit de passage sur la parcelle [Cadastre 21] des époux [E] s'exerçant sur le chemin privé inclus dans la propriété des époux [E] et jouxtant la limite séparative des propriétés [SE] [E] passant par les bornes QDE,

- débouté Mme [ZI] [R] veuve [MG], Mme [A] [MG] épouse [K], Mme [SJ] [MG] épouse [FM] et Mme [U] [MG] épouse [DW] de leurs entières demandes dirigées contre Mmes [SE],

- débouté Mme [ZI] [R] veuve [MG], Mme [A] [MG] épouse [K], Mme [SJ] [MG] épouse [FM] et Mme [U] [MG] épouse [DW] de leurs demandes dirigées contre Mme [L] et M. [Z],

- condamné Mme [R] veuve [MG], Mme [A] [MG] épouse [K], Mme [SJ] [MG] épouse [FM] et Mme [U] [MG] épouse [DW] à payer à Mmes [SE] la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté toute demande plus ample ou contraire des parties,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- condamné Mme [R] veuve [MG], Mme [A] [MG] épouse [K], Mme [SJ] [MG] épouse [FM] et Mme [U] [MG] épouse [DW] aux dépens.

Par déclarations respectives des 14 et 21 décembre 2017, les consorts [MG] et les époux [E] ont formé un appel contre ledit jugement.

La jonction de ces deux instances a été ordonnée le 21 novembre 2018.

Par ordonnance du 25 septembre 2019, le conseiller de la mise en état a ordonné d'office la radiation de l'affaire au motif que les parties s'étaient abstenues d'accomplir les actes de la procédure dans les délais impartis, aucune diligence n'ayant été faite pour justifier de l'absence d'hérédité de Mme [V] [SE], décédée le 11 juin 2013.

Cette affaire a été réinscrite au rôle le 26 février 2021 à la suite de conclusions de reprise d'instance des époux [E] notifiées le même jour et signifiées le 8 mars 2021 à M. [B] [SE], M. [Y] [Z] et Mme [OC] [L]. Selon l'acte de notoriété dressé le 30 juillet 2013 par Me [H] [W], notaire de la Scp Laurent Vatigniez-[H] [W], notaires associés à Offranville, Mme [V] [SE], décédée sans postérité, avait institué son compagnon M. [PY] [ML] comme son légataire universel par testament du 4 juin 1999.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET DES MOYENS DES PARTIES

Par dernières conclusions notifiées le 14 mars 2018 et signifiées le 16 mars 2018 à M. [B] [SE] et le 27 mars 2018 à M. [Y] [Z] et à Mme [OC] [L], Mme [ZI] [R] veuve [MG], Mme [A] [MG] épouse [K], Mme [SJ] [MG] épouse [FM] et Mme [U] [MG] épouse [DW] demandent de voir :

- infirmer le jugement en ce qu'il a dit que les consorts [SE] ont acquis par prescription acquisitive la parcelle ABQDEF et dit que les consorts [MG] ne sont propriétaires d'aucun espace entre la parcelle [Cadastre 34] et le chemin communal,

- réformer celui-ci : entériner le rapport d'expertise de M. [BR] et dire que les consorts [MG] sont bien propriétaires d'une parcelle située entre les consorts [SE] (aujourd'hui consorts [L] et [Z]) (AE n°159) et les époux [E] (AE n°240), cette parcelle ABQDEF mesure 2,21 mètres entre A et D, 1,54 mètres entre B et Q sur une longueur de 28 mètres et fait partie de la parcelle [Cadastre 4],

- condamner les consorts [SE] et les consorts [E] solidairement au paiement de la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts,

- condamner les consorts [SE], Mme [L] et M. [Z], à replacer la clôture déplacée conformément au plan de bornage qui existait et qui a été reconnu par l'expert sous astreinte de 200 euros par jour de retard,

- condamner solidairement les consorts [SE] et les consorts [E] au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner les consorts [SE] et les consorts [E] au paiement des frais d'expertise de M. [BR], outre les dépens de première instance et ceux de la présente instance.

Elles font valoir que le plan inséré dans les motifs du jugement est erroné ; que les revendications entre les consorts [SE] et les époux [E] sont contradictoires ; que le document d'arpentage et le plan établis en 1971 par M. [UF], géomètre, et confirmés par le plan cadastral édité le 21 août 2008, mentionnent un espace rattaché à la parcelle [Cadastre 34] devenue [Cadastre 4] ; que M. [G] [MG] n'avait pas à demander sur cet espace un droit de passage puisqu'il en était de fait propriétaire et avait le bénéfice d'une servitude de passage sur la parcelle [Cadastre 21], laquelle sera constatée dans la décision à venir.

Elles avancent que les époux [E] fondent leurs prétentions sur la description de leur parcelle [Cadastre 21] qui figure dans l'acte de propriété du 7 avril 1971 qui précède le titre du 5 janvier 1983 mais qui n'est pas reprise dans ce dernier acte ; que le raisonnement de ces derniers est erroné ; que si la bande de terrain était rattachée à la parcelle [Cadastre 21], la surface de celle-ci en serait augmentée, ce qui n'est pas le cas puisque la parcelle [Cadastre 21] ne peut avoir qu'une superficie de 160 m² selon le plan de M. [UF] ; que les époux [E] ne peuvent pas revendiquer la propriété de cette languette de terrain.

Elles ajoutent que les consorts [SE] ne peuvent pas occulter l'existence des bornes A et B qui ont été reconnues en 1971 par M. [UF] lequel a installé les bornes C et D ; qu'en 1971 aucune prescription n'était acquise et ne l'a été ultérieurement ; que Mmes [PY] et [KV] [SE] étaient même disposées à remettre les limites de leur propriété là où elles étaient initialement en 2003.

Par dernières conclusions notifiées le 15 juin 2021 et signifiées le 23 juin 2021 à Mme [T] [ML] et M. [HD] [ML], ayants droit de M. [PY] [ML], décédé le 14 juillet 2018, lui-même ayant droit de Mme [V] [SE], et le 24 juin 2021 à M. [M] [ML], ayant droit de M. [PY] [ML] lui-même ayant droit de Mme [V] [SE], M. [OH] [E] et son épouse Mme [NX] [F] sollicitent de voir en application de l'article 544 du code civil :

- ordonner la réinscription au rôle de la présente procédure compte tenu de leurs diligences,

- infirmer le jugement rendu le 31 mai 2017 par le tribunal de grande instance de Dieppe en ce qu'il a :

. dit que par prescription acquisitive, la parcelle ABQDEF était la propriété des dames [SE] transmise à leurs acquéreurs M. [Z] et Mme [L] par acte en date du 27 octobre 2011,

. dit que les époux [E] sont propriétaires de la parcelle [Cadastre 21] (et du chemin privé cadastré [Cadastre 4]), la limite séparative de propriété de ces terrains avec la parcelle [SE] étant matérialisée par la ligne (et les bornes) QDE,

. constaté que Mme [ZI] [R] veuve [MG] dispose d'un droit de passage sur la parcelle [Cadastre 21] des époux [E] s'exerçant sur le chemin privé inclus dans la propriété des époux [E] et jouxtant la limite séparative des propriétés [SE] [E] passant par les bornes QDE,

. rejeté toute demande plus ample ou contraire des parties,

Statuant à nouveau :

- dire n'y avoir lieu à entériner le rapport d'expertise de M. [BR],

- débouter les consorts [MG] et les consorts [SE] de l'intégralité de leurs demandes,

- faire droit à leurs demandes reconventionnelles tendant à :

* dire qu'ils sont propriétaires de la parcelle [Cadastre 21] dont les limites de propriété sont fixées sur le plan figurant en annexe 3 du rapport d'expertise depuis le point F par ABCJI jusqu'à la voie communale n°9,

* condamner conjointement et in solidum avec M. [Z] et Mme [L] les consorts [SE] à remettre en place la clôture qu'ils ont déplacée en limite de la propriété [Cadastre 35] à savoir dans l'axe compris entre les points A et B du plan figurant en annexe 3 du rapport d'expertise de M. [BR] sous astreinte de

50 euros par jour de retard dans les 30 jours suivant la signification de l'arrêt à intervenir,

* condamner conjointement et in solidum les consorts [SE] et les consorts [MG] à leur verser une indemnité de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et en tous les dépens de première instance et d'appel qui comprendront les frais d'expertise judiciaire, le timbre fiscal, les frais des différentes significations rendues nécessaires en cause d'appel et les frais de la sommation interpellative délivrée à M. [B] [SE].

Ils exposent que l'expert judiciaire a commis une erreur de droit et de fait en qualifiant les époux [MG] de propriétaires de la parcelle ABQDEF ; que le titre de propriété des consorts [MG] du 25 juin 1987 n'apporte aucune indication sur l'éventuelle propriété de ces dernières sur la bande de terrain litigieuse et sur une servitude de passage à leur bénéfice sur la parcelle [Cadastre 21] ; que, d'après le titre de propriété des consorts [SE] du 18 décembre 1954, la largeur du chemin de 5 mètres est incluse dans la parcelle [Cadastre 21] ; que les indications portées dans le titre de propriété du 7 avril 1971 de leurs auteurs précisent formellement que la parcelle [Cadastre 21] est bornée d'un côté par M. [CY] [SE] et sont conformes à la réalité, que, si cette parcelle devait être bornée d'un côté par les bornes C et D, le notaire l'aurait expressément mentionné ; que si M. [N] [XM] s'est réservé un droit de passage sur la parcelle de leur auteur M. [X] [CF], c'est qu'il n'était plus propriétaire d'aucune bande de terrain entre le chemin communal et sa parcelle [Cadastre 34].

Ils font ensuite valoir que Mmes [PY] et [KV] [SE] ne peuvent pas revendiquer une prescription acquisitive sur la bande de terrain ;qu'en 2003, elles ont empiété sans raison sur celle-ci alors qu'elle est englobée dans leur parcelle [Cadastre 21], ce qui est l'origine du présent litige ; qu'ils ont réagi immédiatement en les sommant de retirer les piquets qu'elles venaient de fixer sur le chemin relevant de leur fonds.

Ils indiquent enfin qu'aucune servitude de passage sur leur parcelle [Cadastre 21] ne figure dans le titre de propriété du 25 juin 1987 des consorts [MG] ; qu'il ne s'agit pas d'un oubli du notaire ; qu'en réalité, ces dernières bénéficient depuis leurs différentes propriétés d'autres accès directs sur le chemin communal n°9 sans avoir besoin de passer sur la parcelle [Cadastre 21].

Par dernières conclusions notifiées le 15 juin 2021, Mmes [PY] et [KV] [SE] demandent de voir en application des articles 2272 et suivants du code civil :

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel,

- constater qu'elles viennent aux droits de leur père M. [CY] [SE] et sont bien fondées à faire valoir la prescription acquisitive sur la parcelle litigieuse appelée par l'expert 'languette BAFEDQ',

- débouter les consorts [MG] et les époux [E] de l'intégralité de leurs demandes,

- à titre subsidiaire, si par extraordinaire la cour infirmait la décision dont appel :

* débouter les époux [MG] de leur demande de dommages et intérêts et dire n'y avoir lieu au paiement d'un article 700 du code de procédure civile,

* dire et juger que les frais d'expertise seront partagés par moitié et débouter les époux [MG] de leur demande sur le fondement de l'article 700 du code précité,

* condamner les époux [MG] et [E] au réglement d'une somme de 2 000 sur le fondement du texte précité ainsi qu'aux entiers dépens.

Elles précisent qu'en 2003, elles ont souhaité refaire la clôture existante à la suite d'un cambriolage et qu'elles l'ont implantée sur les bornes d'origine dans le prolongement de la borne D. Elles font valoir qu'elles ont toujours été propriétaires de leur terrain dans les limites qui étaient celles de la propriété appartenant à leur père depuis 1953, ce qui est confirmé par l'acte de vente du 7 avril 1971 entre M. [N] [XM] et M. [X] [CF] qui mentionne que la parcelle [Cadastre 21] est bornée dans son ensemble par la voie communale n°9 et d'un côté par M. [SE], que celui-ci et elles-mêmes ont toujours entretenu la bande de terrain litigieuse et s'en sont considérés comme réels propriétaires pendant plus de 30 ans.

La clôture de l'instruction a été ordonnée le 11 mai 2022. A ladite date, M. [B] [SE], à qui les déclarations d'appel avaient été signifiées les 7 et 16 mars 2018 à sa personne, M. [Y] [Z] et Mme [OC] [L] à qui les déclarations d'appel avaient été signifiées les 12 et 27 mars 2018 à parquet, Mme [T] [ML] et M. [HD] [ML], ayants droit de M. [PY] [ML] lui-même ayant droit de Mme [V] [SE], assignés par les époux [E] le 23 juin 2021 respectivement à personne et par dépôt à l'étude, et M. [M] [ML], ayant droit de M. [PY] [ML] lui-même ayant droit de Mme [V] [SE], assigné par les époux [E] le 24 juin 2021 à personne, n'avaient pas constitué avocat.

MOTIFS

Sur les droits respectifs des parties sur la bande de terrain ABQDEF

Les modes de preuve de la propriété immobilière sont libres et le juge de la revendication dispose d'un pouvoir souverain pour dégager les présomptions de propriété les meilleures et les plus caractérisées. Mais, les énonciations du cadastre et les délimitations cadastrales n'ont aucune valeur, en présence de titres clairs et précis ou d'une possession certaine, paisible et propre à prescrire.

En l'espèce, à l'origine, les parcelles respectives des parties appartenaient à

M. [N] [XM], lequel, au fil du temps, les a cédées ou léguées à des tiers qui sont les auteurs des parties selon les actes suivants :

- le 18 décembre 1954, M. [N] [XM] a vendu à M. [CY] [SE] (père des consorts [SE]) 'Une parcelle de terrain située à [Localité 44], lieudit '[Adresse 45]' Contenant, d'après arpentage fait en vue des présentes, cinq cents mètres carrés, Cadastrée section [Cadastre 20], Bornée d'un bout par le chemin vicinal ordinaire Numéro 9 des Routières, d'autre bout et d'un côté, par Monsieur [XM], et d'autre côté par M. [XM] sur une largeur de cinq mètres.'. A cet acte, a été annexé un projet de division de la propriété de M. [XM] établi par M. [P], géomètre-expert, reproduisant cette parcelle rectangulaire de 500 m² et mentionnant sur sa droite à l'angle avec le chemin n°9 l'indication '5.00'. Cette parcelle est aujourd'hui cadastrée section [Cadastre 35].

Lors de ses opérations d'expertise en 2011, M. [BR] a relevé l'existence :

. de la borne A à gauche en partant de la rue, à l'angle de la parcelle [Cadastre 35], au pied d'un gros poteau en ciment peint en vert,

. d'un grillage à grosses mailles sur cornières entre les bornes A et B,

. en D, d'une grosse cornière avec jambe de force, pieu d'angle d'une ancienne clôture édifiée par les consorts [SE] à 2,15 mètres de la borne A,

. depuis l'existence de cette cornière, en parallèle du grillage, des bordurettes délimitant une banquette en gazon et arbustes de haie en direction de B, sur une quinzaine de mètres environ,

. entre B et C, d'une clôture en fils barbelés délimitant l'herbage de la parcelle [Cadastre 4].

Après reconnaissance des lieux, il a constaté la présence de grosses bornes en ciment à tête aux angles ABKL représentant la parcelle [Cadastre 35] des consorts [SE] et a mesuré une distance entre A et L de 18,60 mètres pour 18,50 mètres mentionnés sur le plan de M. [P] de 1954,

- le 7 avril 1971, M. [N] [XM] a vendu à M. [X] [CF] et à Mme [UK] [KP] épouse [CF] une parcelle de terrain en nature de pré, de forme allongée, cadastrée section [Cadastre 21], d'une surface de 01a 60ca, 'bornée dans son ensemble, d'un bout par la voie communale numéro 9, d'un côté par Monsieur [CY] [SE] et le vendeur, d'autre bout par le vendeur et d'autre côté par Monsieur [E] et l'acquéreur. Ainsi que ledit immeuble se trouve au surplus figuré en un plan dressé par Monsieur [UF], Géomètre-Expert à [Localité 27], à l'échelle de 1/200° et qui demeurera annexé aux présentes après avoir été approuvé par les parties et revêtu de la mention d'usage par le notaire soussigné. [...] Cet immeuble provient de la division d'un plus grand immeuble qui figurait précédemment au cadastre, savoir :

- Section AE, [Cadastre 33] pour une contenance de [...] 86a 09ca [...] et dont le surplus, après division, se trouve maintenant cadastré, section AE, [Cadastre 34] pour une contenance de [...] 84a 49ca. Ainsi qu'il résulte d'un document d'arpentage dressé par Monsieur [UF], Géomètre-Expert sus-nommé, vérifié et numéroté au service départemental du cadastre à [Localité 39], le [18 janvier 1971].'

[...] 'Le vendeur se réserve expressément un droit de passage, pour lui, ses héritiers et représentants, à perpétuité sur la bande de terrain présentement vendue pour accéderàla propriété restant lui appartenir, cadastrée, section AE, [Cadastre 34], ce qui est accepté par l'acquéreur.'.

Sur ce document d'arpentage daté du 16 janvier 1971 a été représentée une languette entre les parcelles [Cadastre 35] et [Cadastre 21]. Celle-ci apparaît sur le plan dressé le 27 janvier 1971 également par M. [UF] mais sans que l'extrémité de cette bande ne soit fermée au niveau de la borne B de la parcelle [Cadastre 35],

- le 16 avril 1973, M. [N] [XM] a vendu à Mme [AI] une parcelle [Cadastre 22] issue de la division de la parcelle [Cadastre 34] en [Cadastre 22] et [Cadastre 3]. Il a conservé la parcelle [Cadastre 3],

- le 5 janvier 1983, les cinq héritiers de M. [X] [CF] et de Mme [UK] [KP] épouse [CF] ont vendu plusieurs parcelles à M. [OH] [E] et à son épouse Mme [NX] [F] dont la parcelle [Cadastre 21] d'une surface de 01a 60ca. L'acte vise, aux pages 7 et 15, le droit de passage bénéficiant à M. [XM] et ses héritiers et représentants sur cette parcelle. Enfin, à la page 32, il a été ajouté la mention suivante signée de toutes les parties : 'Renvoi numéro 1 : Ledit immeuble actuellement borné d'un côté à l'Ouest par Monsieur [E], acquéreur aux présentes, et par enhachement, le passage donnant accès à la [Adresse 43], au Nord par Madame [WB], à l'Est par Monsieur [G] [MG] et au Sud par Monsieur [D] et Monsieur [I].',

- le 25 juin 1987, Mme [S] [WB], légataire universelle de M. [N] [XM] décédé sans enfant le 30 juillet 1974, a vendu à M. [G] [MG] et à son épouse Mme [ZI] [R] plusieurs parcelles dont la parcelle [Cadastre 3] qui a ultérieurement été partagée en parcelles cadastrées [Cadastre 23] et [Cadastre 4]. Par acte notarié du 2 septembre 1991, les époux [MG] ont échangé la parcelle [Cadastre 23] au profit des consorts [VW] et ont conservé la parcelle [Cadastre 4].

- Sur le droit des consorts [MG] et des époux [E]

Il ressort des éléments précités que la parcelle [Cadastre 35] a été très précisément délimitée dans sa forme (rectangulaire) et dans sa surface (500 m²) lors de sa vente par M. [N] [XM] à M. [CY] [SE]. Elle n'inclut pas le terrain matérialisé autour et restant la propriété de M. [N] [XM], notamment la largeur de cinq mètres mentionnée sur le projet de division établi par M. [P] au moyen de l'indication '5.00' à l'angle avec le chemin vicinal n°9 des Routières.

De plus, lors de la vente de la parcelle voisine [Cadastre 21] par M. [N] [XM] aux époux [IZ] le 7 avril 1971, la parcelle de M. [CY] [SE] (AE n°159) et la parcelle voisine qui était encore à l'époque propriété de M. [N] [XM] (AE n°239) et qui est devenue ultérieurement celle des époux [MG] ([Cadastre 4]) constituaient toutes deux la délimitation successive de la parcelle [Cadastre 21] sur sa longueur. En effet, si la languette de terrain représentée par M. [UF] sur son document d'arpentage avait été la propriété de M. [N] [XM] à partir du chemin communal et au-delà de l'actuelle borne B, il n'aurait pas été fait mention de la parcelle de M. [SE] qui se serait trouvée juste derrière. D'ailleurs, M. [BR] a mesuré entre les bornes A et L une distance de 18,60 mètres, soit quasiment les 18,50 mètres mentionnés sur le plan de M. [P] de 1954, ce qui signifie que la surface de la parcelle rectangulaire [Cadastre 35], si la mesure de sa largeur part de la borne A, et non pas de la borne D, est correcte.

La languette de terrain représentée par M. [UF] sur le document d'arpentage n'a pas été délimitée en ses deux extrémités par quatre bornes mais uniquement par deux (représentées par un petit cercle), ce qui veut dire qu'elle n'est pas une parcelle distincte. D'ailleurs, aucun numéro cadastral ne lui a été attribué sur ce document. Le fait de l'avoir distinguée s'explique par la volonté de matérialiser l'assiette de la servitude de passage bénéficiant à la parcelle [Cadastre 34] appartenant à M. [N] [XM] sur la parcelle [Cadastre 21], devenue la propriété des auteurs des époux [E]. Cette représentation n'enlève pas la force probante attachée à la description de la parcelle [Cadastre 21] faite dans les énonciations de l'acte de vente qui n'évoque aucun espace libre entre elle et la parcelle [Cadastre 35]. Cette représentation vient juste préciser l'assiette du droit de passage.

Le plan établi par M. [UF] ne vient pas davantage remettre en cause lesdites énonciations uniquement opposables entre M. [N] [XM] et les époux [IZ] et leurs successeurs à cet acte, c'est-à-dire les époux [E] et les consorts [MG]. Le droit de propriété de M. [SE] sur sa parcelle [Cadastre 35] n'a pas du tout été modifié. Comme le mentionne M. [UF] sur son plan, les bornes C et D, qui délimitent l'assiette du droit de passage de l'auteur des consorts [MG] sur la parcelle [Cadastre 21], ont été plantées le 26 janvier 1971.

Elles n'ont pas changé la limite séparative avec le fonds voisin appartenant à M. [SE] matérialisé par les bornes A et B qui ont été reconnues le 26 janvier 1971. La mention suivante indiquée sur ce plan 'Surplus restant appartenir à Monsieur [XM] [N]' désigne le reste de la parcelle [Cadastre 34] après la vente de la parcelle [Cadastre 21] aux auteurs des époux [E].

Contrairement à ce que soutiennent les consorts [MG], la surface totale de la parcelle [Cadastre 21], égale à 160 m², n'a pas été augmentée par le rattachement de la bande de terrain puisque celle-ci y est incluse. Preuve en est le fait que cette surface est toujours précisée comme égale à 160 m² sur les documents versés aux débats. Aucune preuve contraire n'est apportée pour combattre cette explication.

M. [BR] n'a pas mesuré la surface totale de la parcelle [Cadastre 21]. S'appuyant uniquement sur le plan de 1971, il n'a pas davantage mesuré celle de la parcelle [Cadastre 4] estimant cette opération inutile. Le moyen des consorts [MG] tiré de la surface restante de la parcelle [Cadastre 4] après les divisions des parcelles plus grandes [Cadastre 33], puis, [Cadastre 34] et [Cadastre 3], est dès lors inopérant. Les époux [E] précisent en outre sans être contestés que la parcelle [Cadastre 4] n'est pas bornée. Sur ce point, l'expert judiciaire avait indiqué qu'une partie des limites de cette parcelle n'était pas visible.

L'extrait du plan cadastral édité le 21 août 2008, transmis par la société de géomètres-experts Euclyd mandatée par les consorts [MG], et qui englobe la bande de terrain dans la parcelle [Cadastre 4] n'a aucune valeur en présence des éléments précités et des indications précises contenues dans le titre du 7 avril 1971.

Comme l'a souligné justement le premier juge, l'existence d'une servitude de passage au profit de M. [N] [XM] et de ses successeurs sur la parcelle [Cadastre 21] est antinomique avec un droit de propriété sur une partie de celle-ci la longeant.

Contrairement à ce qu'avancent les consorts [MG], elles ne peuvent pas être titulaires à la fois d'une servitude de passage sur la parcelle [Cadastre 21] et d'un droit de propriété sur une parcelle contigüe qui débouchent toutes deux sur la même voie communale n°9. L'existence de la bande de terrain n'est mentionnée dans aucun des actes authentiques précités, alors qu'y figure clairement dans les actes de 1971 et de 1983 le bénéfice d'un droit de passage sur le fonds servant appartenant aux auteurs des époux [E].

La référence à un 'enhachement' dans le renvoi effectué à la fin de l'acte de vente du 5 janvier 1983 confirme, contrairement à ce qu'avancent les consorts [MG], que la bande de terrain litigieuse est destinée au seul usage de ce droit de passage permettant l'accès à la [Adresse 43].

Les consorts [MG] produisent un courrier du 5 mars 2015 de Me [C] [HI], notaire à [Localité 36], répondant à Mme [ZI] [R] veuve [MG], que c'est à tort et par erreur si dans l'acte de vente du 7 avril 1971 il a été indiqué que la parcelle [Cadastre 21] était bornée ' d'un côté par Monsieur [CY] [SE] et le vendeur'.

De même, l'expert judiciaire écarte cette mention au motif qu'il s'agit d'indications de riverains purement formelles, très souvent fournies par les vendeurs et non vérifiées, qui n'engagent pas le notaire.

Ces avis, non fondés objectivement, ne sont pas de nature à contredire les énonciations claires contenues dans l'acte authentique du 7 avril 1971 auxquelles aucune des parties à cet acte n'ont renoncé ou n'y ont apporté une modification substantielle.

En définitive, la bande de terrain litigieuse ABQDEF est incluse dans la parcelle [Cadastre 21], propriété des époux [E]. Le jugement du tribunal qui a dit que les consorts [MG] n'étaient pas propriétaires de cette bande de terrain et qui a rejeté leur demande tendant à entériner le rapport d'expertise judiciaire de M. [BR] sera confirmé.

- Sur le droit de Mmes [PY] et [KV] [SE]

Celles-ci estiment qu'elles ont acquis la bande de terrain en cause par usucapion pendant 30 ans de 1954 à 2003, que leur père l'avait conservée à titre de passage sur son fonds qui lui permettait d'accéder à l'arrière de sa propriété, qu'un jeu y avait d'ailleurs été implanté afin que, lorsqu'elles étaient enfants, elles puissent y jouer en toute sécurité, que la clôture implantée entre A et B s'est retrouvée à l'intérieur des bornes Q et D, que leur père entretenait régulièrement ce terrain.

Les clichés photographiques que Mmes [PY] et [KV] [SE] versent aux débats et qui datent de cette période montrent qu'au fond de leur propriété existaient une première clôture grillagée et à quelques mètres une haie. Ils montrent aussi la présence d'enfants sur la bande de terrain entre ces deux délimitations.

Toutefois, cette configuration des lieux était équivoque car cette bande de terrain constituait l'assiette du droit de passage de M. [XM] et de ses successeurs depuis 1971 et, comme indiqué ci-dessus, le titre de 1954 et le projet de division annexé, tous deux opposables à M. [CY] [SE], mentionnaient la conservation par

M. [XM] d'une portion large de 5 mètres longeant le fonds AE n°159.

De plus, la présence ponctuelle et datée de manière non certaine de personnes sur une portion de terrain est insuffisante à faire la preuve des éléments constitutifs et des qualités de la possession exigés par les anciens articles 2228 et suivants du code civil applicables à la cause. Les deux attestations produites par Mmes [PY] et [KV] [SE] précisent qu'elles ont entretenu régulièrement cette bande de terrain, mais sans indiquer aucune date, ni aucun autre élément matérialisant un acte de possession utile. L'attestation de M. [B] [SE], partie à cette instance, n'est pas probante.

L'aide apportée par M. [MG] à l'occasion du déplacement par Mmes [PY] et [KV] [SE] de la clôture des bornes AB vers les points ou bornes DQ en 2003, manifestant sa reconnaissance de leur qualité de propriétaires de la bande de terrain litigieuse comme souligné par le premier juge, ne remet pas en cause les caractères équivoque et discontinue de la possession alléguée.

En définitive, Mmes [PY] et [KV] [SE] n'ont acquis aucun droit de propriété par prescription sur la bande de terrain ABQDEF. Le jugement du tribunal ayant jugé en ce sens sera infirmé.

Sur la servitude de passage sur la parcelle [Cadastre 21]

M. [E] et son épouse sollicitent l'infirmation de la disposition du jugement ayant constaté la reconnaissance d'une servitude de passage au bénéfice de Mme [R] veuve [MG] sur leur parcelle [Cadastre 21].

Aux termes du dispositif de leurs conclusions, les consorts [MG] ne revendiquent pas l'infirmation de cette disposition. Elles sollicitent d'ailleurs dans le corps de leurs écritures de voir constater le bénéfice de cette servitude à leur profit.

La servitude se transmet en même temps que le fonds dont elle est un accessoire. Elle s'impose aux propriétaires successifs du fonds servant et profitent aux propriétaires successifs du fonds dominant. Elle constitue donc un droit réel et perpétuel, sauf réunion des deux fonds entre les mains du même propriétaire, prévue par l'article 705 du code civil, ou prescription extinctive par un non-usage pendant 30 ans, prévue par les articles 706 et suivants du même code.

Le titre de propriété des époux [E] du 5 janvier 1983, qui renvoie à l'acte du 7 avril 1971, prévoit que la parcelle [Cadastre 21] est affectée de la charge d'un droit de passage au bénéfice de la parcelle [Cadastre 34]. Celle-ci est devenue depuis la parcelle [Cadastre 3] et à ce jour la parcelle [Cadastre 4] appartenant aux consorts [MG].

Les époux [E] ne démontrent pas que cette servitude s'est éteinte dans les conditions prévues par les textes précités du code civil. Leur moyen selon lequel les consorts [MG] bénéficient d'autres accès sur la voie publique est indifférent.

Dès lors, cette servitude doit perdurer au bénéfice des consorts [MG]. Le jugement sera infirmé à ce titre en ce qu'il a retenu une limite séparative des propriétés [SE]/[E] passant par les bornes QDE.

Sur la demande indemnitaire des consorts [MG]

Celles-ci sollicitent l'indemnisation de toutes les démarches entreprises pour faire reconnaître une situation des lieux qui n'avait jamais posé de difficulté auparavant et qui avait été acquise de bonne foi et fondée sur des documents archivés régulièrement et publiés.

Mmes [PY] et [KV] [SE] répondent qu'à aucun moment, elles ne se sont comportées de façon fautive pensant légitimement être les réelles propriétaires de la bande de terrain en cause.

Les époux [E] ne développe aucun moyen.

L'engagement de frais est une conséquence inhérente à l'action judiciaire dont les consorts [MG] ont été à l'initiative et à laquelle elles ont succombé en première instance et en appel. Le coût des démarches qu'elles allèguent de manière générale restera à leur charge. Cette prétention dirigée en appel contre les époux [E] sera rejetée. Le jugement du tribunal ayant rejeté cette demande présentée uniquement à l'encontre de Mmes [PY] et [KV] [SE] en 1ère instance sera confirmé.

Sur le déplacement de la clôture séparative avec la parcelle [Cadastre 35]

La dernière pièce la plus récente versée aux débats sur la situation des lieux, notamment sur l'existence d'un empiétement de Mmes [PY] et [KV] [SE] sur la bande de terrain litigieuse, est un procès-verbal de constat dressé le 7 décembre 2011 par Me [J], huissier de justice, à la demande des époux [MG]. Il a constaté que Mmes [SE] continuaient d'y empiéter sur 1,40 mètres à la borne A et sur 80 centimètres à la borne B.

Ni Mmes [PY] et [KV] [SE], ni M. [Z] et Mme [L] qui ne sont pas subrogés dans les droits de ces dernières, ne produisent de pièces justifiant de l'emplacement actuel de la limite séparative entre la parcelle [Cadastre 35] et la parcelle [Cadastre 21].

Ils seront donc condamnés in solidum à remettre en place la clôture séparative entre ces deux parcelles dans l'axe compris entre les points A et B du plan figurant en annexe 3 du rapport d'expertise de M. [BR]. Aucun motif, notamment lié à l'urgence, n'est justifié pour assortir l'exécution de cette condamnation par une astreinte. Celle-ci sera rejetée. Le jugement sera infirmé.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Les dispositions de première instance sur les dépens et les frais irrépétibles seront confirmées.

Parties perdantes, les consorts [MG] seront condamnées aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux textes sur l'aide juridictionnelle.

Il n'est pas inéquitable de les condamner également à payer aux époux [E] la somme de 3 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens qu'ils ont exposés pour cette procédure. L'équité commande de rejeter le surplus des demandes de frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt par défaut, rendu publiquement par mise à disposition au greffe, et en dernier ressort,

Infirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a :

- dit que Mme [ZI] [R] veuve [MG], Mme [A] [MG] épouse [K], Mme [SJ] [MG] épouse [FM], Mme [U] [MG] épouse [DW] ne sont propriétaires d'aucun espace entre la parcelle [Cadastre 34] et le chemin communal,

- débouté Mme [ZI] [R] veuve [MG], Mme [A] [MG] épouse [K], Mme [SJ] [MG] épouse [FM] et Mme [U] [MG] épouse [DW] de leurs entières demandes dirigées contre Mmes [SE],

- débouté Mme [ZI] [R] veuve [MG], Mme [A] [MG] épouse [K], Mme [SJ] [MG] épouse [FM] et Mme [U] [MG] épouse [DW] de leurs demandes dirigées contre Mme [L] et M. [Z],

- condamné Mme [R] veuve [MG], Mme [A] [MG] épouse [K], Mme [SJ] [MG] épouse [FM] et Mme [U] [MG] épouse [DW] à payer à Mmes [SE] la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Mme [R] veuve [MG], Mme [A] [MG] épouse [K], Mme [SJ] [MG] épouse [FM] et Mme [U] [MG] épouse [DW] aux dépens.

Confirme le jugement de ces chefs,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Dit que M. [OH] [E] et son épouse Mme [NX] [F] sont propriétaires de la parcelle cadastrée section [Cadastre 21] incluant la bande de terrain matérialisée entre les points ou les bornes ABQDEF figurant sur le plan reproduit dans l'annexe 3 du rapport d'expertise judiciaire de M. [O] [BR], la limite séparative de propriété avec la parcelle cadastrée section [Cadastre 35], appartenant initialement à Mmes [PY] et [KV] [SE] et depuis le 27 octobre 2011 à M. [Y] [Z] et à Mme [OC] [L], étant matérialisée par la ligne (et les bornes) AB,

Déboute Mmes [PY] et [KV] [SE] de leur demande tendant à constater qu'elles bénéficient de la prescription acquisitive sur ladite bande de terrain,

Constate que Mme [ZI] [R] veuve [MG] dispose d'un droit de passage sur la parcelle cadastrée section [Cadastre 21] de M. [OH] [E] et de son épouse Mme [NX] [F] s'exerçant sur le chemin privé inclus dans la propriété de ces derniers et jouxtant la limite séparative avec la parcelle cadastrée section [Cadastre 35],

Condamne in solidum Mmes [PY] et [KV] [SE], M. [Y] [Z] et Mme [OC] [L], à remettre en place la clôture séparative entre les parcelles cadastrées section [Cadastre 21] et [Cadastre 35] dans l'axe compris entre les points A et B du plan précité,

Condamne Mme [ZI] [R] veuve [MG], Mme [A] [MG] épouse [K], Mme [SJ] [MG] épouse [FM] et Mme [U] [MG] épouse [DW] à payer à M. [OH] [E] et à son épouse Mme [NX] [F] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel,

Rejette le surplus des demandes,

Condamne Mme [ZI] [R] veuve [MG], Mme [A] [MG] épouse [K], Mme [SJ] [MG] épouse [FM] et Mme [U] [MG] épouse [DW] aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions applicables en matière d'aide juridictionnelle.

Le greffier,La présidente de chambre,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Formation : 1ère ch. civile
Numéro d'arrêt : 21/00905
Date de la décision : 21/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-21;21.00905 ?
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