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07/09/2022 | FRANCE | N°21/02982

France | France, Cour d'appel de Rouen, 1ère ch. civile, 07 septembre 2022, 21/02982


N° RG 21/02982 - N° Portalis DBV2-V-B7F-I2YR







COUR D'APPEL DE ROUEN



1ERE CHAMBRE CIVILE



ARRET DU 07 SEPTEMBRE 2022







DÉCISION DÉFÉRÉE :



19/02395

Tribunal judiciaire de Rouen du 14 juin 2021





APPELANTS :



Monsieur [K] [J]

né le [Date naissance 4] 1973 à [Localité 11]

[Adresse 7]

[Localité 10]



représenté et assisté par Me Aurélie BLOQUET de la Selarl FILLATRE-METAYER BLOQUET, avocat au barreau de Rouen







Madame [V] [W] épouse [J]

en son nom personnel et ès qualités de représentante légale de sa fille mineure, [D] [J]

née le [Date naissance 1] 1965 à [Localité 11]

[Adresse 7]

[Localité 10]



représenté...

N° RG 21/02982 - N° Portalis DBV2-V-B7F-I2YR

COUR D'APPEL DE ROUEN

1ERE CHAMBRE CIVILE

ARRET DU 07 SEPTEMBRE 2022

DÉCISION DÉFÉRÉE :

19/02395

Tribunal judiciaire de Rouen du 14 juin 2021

APPELANTS :

Monsieur [K] [J]

né le [Date naissance 4] 1973 à [Localité 11]

[Adresse 7]

[Localité 10]

représenté et assisté par Me Aurélie BLOQUET de la Selarl FILLATRE-METAYER BLOQUET, avocat au barreau de Rouen

Madame [V] [W] épouse [J]

en son nom personnel et ès qualités de représentante légale de sa fille mineure, [D] [J]

née le [Date naissance 1] 1965 à [Localité 11]

[Adresse 7]

[Localité 10]

représentée et assistée par Me Aurélie BLOQUET de la Selarl FILLATRE-METAYER BLOQUET, avocat au barreau de Rouen

Madame [Z] [J] épouse [B]

née le [Date naissance 1] 1994

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 10]

représentée et assistée par Me Aurélie BLOQUET de la Selarl FILLATRE-METAYER BLOQUET, avocat au barreau de Rouen

Monsieur [H] [J]

né le [Date naissance 6] 2002

[Adresse 7]

[Localité 10]

représenté et assistée par Me Aurélie BLOQUET de la Selarl FILLATRE-METAYER BLOQUET, avocat au barreau de Rouen

(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 2021/009632 du 22/01/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Rouen)

INTIMEES :

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE ROUEN [Localité 13] [Localité 12]

[Adresse 8]

[Adresse 8]

non constituée bien que régulièrement assignée par acte d'huissier de justice remis le 1er octobre 2021 à personne habilitée

Association PRO BTP

[Adresse 2]

[Adresse 2]

non constituée bien que régulièrement assignée par acte d'huissier de justice remis le 1er octobre 2021 à personne habilitée

FONDS DE GARANTIE DES ASSURANCES OBLIGATOIRES DE DOMMAGES

[Adresse 9]

[Adresse 9]

représenté et assisté par Me Caroline SCOLAN de la Selarl GRAY SCOLAN, avocat au barreau de Rouen

COMPOSITION DE LA COUR  :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 18 mai 2022 sans opposition des avocats devant Mme Edwige WITTRANT, présidente de chambre, rapporteur,

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée :

Mme Edwige WITTRANT, présidente de chambre,

M. Jean-François MELLET, conseiller,

Mme Magali DEGUETTE, conseillère,

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Catherine CHEVALIER,

DEBATS :

A l'audience publique du 18 mai 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 7 septembre 2022.

ARRET :

REPUTE CONTRADICTOIRE

Rendu publiquement le 7 septembre 2022, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

signé par Mme WITTRANT, présidente et par Mme CHEVALIER, greffier.

*

* *

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

 

Le 14 novembre 2010, alors qu'il était piéton sur un chemin départemental, M. [K] [J] été victime d'un accident de la circulation et a été gravement blessé.

 

Le fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages a missionné le Dr [A] en qualité d'expert afin de procéder à l'évaluation des préjudices subis. Après communication de différents rapports les 14 novembre 2012, 30 septembre 2013, 13 novembre 2014, le professionnel a déposé un rapport définitif, soutenu par un bilan neuro psychiatrique réalisé les 21 février 2013 et 2 juillet 2015, avec les conclusions suivantes quant aux conséquences de l'accident, précisant notamment :

- une date de consolidation fixée au 18 juillet 2014,

- un déficit fonctionnel permanent de 17 %,

- des souffrances endurées de 4,5/7,

- un préjudice esthétique de 1,5/7,

- l'existence d'une incidence professionnelle.

 

Une offre d'indemnisation a été présentée le 12 août 2015, certains postes étant portés pour mémoire dans l'attente de pièces complémentaires concernant les créances des tiers payeurs. Cette offre a été refusée le 22 décembre 2015, le conseil du demandeur annonçant une contre-proposition.

 

La CPAM a produit ses débours dans un état définitif le 19 septembre 2018 alors que la caisse PRO-BTP n'a jamais communiqué son décompte.

 

Après relance du 22 février 2017, réponse de la victime le 2 mars 2017, M. [J] a finalement transmis ses demandes au fonds de garantie le 19 janvier 2019. Le fonds de garantie a alors opposé la forclusion de la demande au visa de l'article R. 421-12 du code des assurances qui prévoit un délai de cinq ans pour signer un accord ou pour assigner le fonds de garantie, la forclusion étant en l'espèce acquise depuis le 14 novembre 2015.

 

Par actes des 29 avril et 5 juin 2019, M. [K] [J], Mme [V] [W], son épouse tant en son nom personnel qu'en qualité de représentante légale de sa fille [D] née le [Date naissance 3] 2005, Mme [Z] [J] et puis sur intervention volontaire, M. [H] [J] ont agi contre le fonds de garantie, et ont appelé en la cause la CPAM de [Localité 14] et la caisse PRO-BTP afin d'obtenir l'indemnisation de leurs préjudices à hauteur de :

- la somme de 725 287,54 euros pour M. [J],

- la somme de 152 152 euros pour Mme [J], son épouse,

- la somme de 35 000 euros pour chacun des enfants, [Z], [H] et [D].

   

Ils invoquent l'article R. 421-12 dernier alinéa du code des assurances prévoyant la possibilité d'écarter la forclusion dans le cas d'une impossibilité d'agir avant l'expiration des délais impartis, se référant particulièrement aux obstacles créés par la transmission tardive des éléments concernant les créances des tiers payeurs.  

 

Par jugement réputé contradictoire du 14 juin 2021, le tribunal judiciaire de Rouen a constaté la forclusion de l'action en indemnisation formées et a déclaré en conséquence irrecevables les demandes indemnitaires par chaque membre de la famille, laissé les dépens à la charge des consorts [J].

 

Par déclaration reçue au greffe le 19 juillet 2021, M. [K] [J], Mme [V] [W], son épouse tant en son nom personnel qu'en qualité de représentante légale de sa fille [D] née le [Date naissance 3] 2005, Mme [Z] [J] et M. [H] [J] ont formé appel du jugement.

 

EXPOSE DES PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par dernières conclusions notifiées le 27 septembre 2021, les appelants demandent à la cour, au visa de la loi du 5 juillet 1985 et des articles R. 421-12 et suivants du code des assurances de réformer la décision entreprise en ce qu'elle a constaté la forclusion de leur action et les a condamnés aux dépens et en conséquence, de :

à titre principal,

- débouter le fonds de garantie de sa demande de forclusion,

à titre subsidiaire,

- à supposer la forclusion acquise, constater que le fonds de garantie a renoncé à s'en prévaloir,

et,

- liquider le préjudice corporel de M. [J] comme suit :  

* les préjudices patrimoniaux

. les préjudices temporaires soit la somme de 48 190 euros au titre des dépenses de santé actuelles, de 23 760,50 euros au titre de la perte des gains professionnels actuels,

. les préjudices permanents soit la somme de 887 583,67 euros au titre de la perte des gains futurs et de 100 000 euros au titre de l'incidence professionnelle,

soit une somme totale de 1 059 534,17 euros dont à déduire la créance de la CPAM à hauteur de 327 010,86 euros soit un solde dû de 732 523,31 euros,

* les préjudices extra-patrimoniaux

. les préjudices temporaires soit la somme de 14 865 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire, de 35 000 euros au titre des souffrances endurées,

. les préjudices permanents soit la somme de 38 165 euros au titre du déficit fonctionnel permanent, de 6 000 euros au titre du préjudice esthétique,

soit une somme de 94 030 euros dont il y a lieu de déduire les provisions de

25 000 euros soit un solde dû de 69 030 euros,

- condamner le fonds de garantie à payer ces sommes,

- liquider le préjudice des victimes par ricochet comme suit :

* fixer le préjudice de Mme [J] à la somme de 97 152 euros comprenant les frais divers (42 152 euros), le préjudice d'affection (25 000 euros), les préjudices patrimoniaux exceptionnels (30 000 euros),

* fixer les préjudices des trois enfants à la somme de 15 000 euros au titre du préjudice d'affection, de 10 000 euros au titre des préjudices patrimoniaux exceptionnels,

- condamner le fonds de garantie à payer ces sommes,

- déclarer la décision à intervenir commune aux organismes sociaux régulièrement appelés à la cause,

- condamner le fonds de garantie à payer à M. [J] une somme de 2 000 euros, aux autres appelants la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, en raison des frais irrépétibles engagés,

- condamner le fonds de garantie aux dépens de première instance et d'appel.  

 

S'agissant de la forclusion de l'action, ils font valoir que les premiers échanges entre le fonds de garantie et M. [J] ont été entrepris en juillet 2011 ; que le Dr [A], médecin choisi par le fonds, a rendu plusieurs rapports avant de déposer un document définitif le 2 juillet 2015 ; que la proposition du fonds de garantie du 12 août 2015 était clairement incomplète précisément dans l'attente de la « créance détaillée et définitive de l'organisme de protection sociale » en caractères gras ; que les éléments relatifs aux créances des tiers payeurs étaient dès lors indispensables au chiffrage des préjudices et justifient le délai des pourparlers qui se sont poursuivis ; qu'en effet, le fonds de garantie a encore écrit à la victime en 2017 en rappelant les termes de son offre ; qu'en janvier 2019, M. [J] a notifié sa demande au fonds de garantie qui a rappelé les textes applicables sans opposer expressément la forclusion.

 

Ils ajoutent que l'article R. 421-12 du code des assurances prévoit deux délais distincts : un délai de trois ans pour présenter sa demande au fonds de garantie, un délai de cinq ans pour liquider le préjudice amiablement ou judiciairement ; que la forclusion ne peut être opposée alors que près de cinq années ont été nécessaires pour obtenir le rapport définitif du médecin, pièce indispensable pour chiffrer le montant des indemnisations réclamées par la victime et ses proches ; que ce rapport était également indispensable pour la CPAM afin d'établir le relevé de ses débours ; qu'aucun accord ne pouvait intervenir sans l'ensemble de ces éléments ; que la CPAM n'a produit sa créance que le 19 septembre 2018 tandis que la caisse PRO-BTP n'a jamais répondu ; que les victimes se trouvaient effectivement dans l'impossibilité d'agir dans le délai imparti.

 

Si ce moyen n'était pas retenu, ils invoquent la renonciation du fonds de garantie à se prévaloir de la forclusion puisqu'en 2017, il restait « dans l'attente de nouvelles de votre part » et a donc tacitement, de manière non équivoque, renoncé à opposer ce moyen ; que le fonds de garantie ne peut désormais revenir sur son intention de poursuivre les négociations.

 

Ils développent les arguments relatifs à la nature et la portée des différents postes de préjudice justifiant une indemnisation.

 

Par dernières conclusions notifiées le 23 décembre 2021, le fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages demande à la cour, au visa des articles 122 du code de procédure civile et R. 421-12 du code des assurances de :

- déclarer irrecevables les demandes d'indemnisation formées,

subsidiairement,

- renvoyer l'affaire à la mise en état pour lui permettre de conclure sur la liquidation des préjudices,

- débouter les consorts [J] de leurs demandes au titre des frais irrépétibles et statuer ce que de droit sur les dépens qui ne sauraient être, en tout état, mis à sa charge.

 

Il soutient qu'en application des articles R. 421-12 et R. 421-20 du code des assurances, seule la date de l'accident est le point de départ du délai de forclusion de cinq ans ; que les délais prévus par ces textes sont impératifs et dérogatoires du droit commun ; qu'en l'espèce, aucun accord n'a été conclu entre le Fonds et la victime directe ; que la demande d'indemnisation n'a été formée que le 15 janvier 2019 et l'action engagée le 15 janvier 2019 soit neuf années après l'accident et donc hors délai ; que les motifs invoqués pour justifier d'une impossibilité d'agir ne sont pas pertinents.

 

L'introduction de l'instance n'exige pas la consolidation de l'état de la victime de sorte que les délais retenus pour le dépôt du rapport définitif du médecin désigné en 2015, après consolidation en 2014 ne peuvent constituer l'impossibilité alléguée. Elle ne dépend pas de la créance des tiers payeurs et particulièrement de la CPAM puisque la victime peut les assigner pour connaître précisément le montant des sommes visées. En outre, la lettre du fonds du 22 février 2017 qui acte le refus de la proposition et constate le défaut de communication de pièces ne peut valoir renonciation à se prévaloir de la forclusion.    

 

Malgré significations de la déclaration d'appel et des conclusions des appelants le 1er octobre 2021 à personne habilitée, la CPAM de [Localité 14]-[Localité 13]-[Localité 12] et la caisse PRO-BTP ne se sont pas constituées intimées,

 

La clôture de l'instruction a été prononcée le 27 avril 2022.

   

 

MOTIFS

 

Sur la forclusion de l'action

 

Le 14 novembre 2010, M. [J] a été victime d'un accident de la circulation commis par un conducteur inconnu. 

 

Selon l'article R. 421-12 du code des assurances, lorsque le responsable des dommages est inconnu, la demande des victimes ou de leurs ayants droit tendant à la réparation des dommages qui leur ont été causés doit être adressée au fonds de garantie dans le délai de trois ans à compter de l'accident' En outre, les victimes ou leurs ayants droit doivent, dans le délai de cinq ans à compter de l'accident : a) Si le responsable est inconnu, avoir réalisé un accord avec le fonds de garantie ou exercé contre celui-ci l'action prévue à l'article R. 421-14 ; '

Les délais prévus aux alinéas précédents ne courent que du jour où les intéressés ont eu connaissance du dommage, s'ils prouvent qu'ils l'ont ignoré jusque-là'Ces différents délais sont impartis à peine de forclusion, à moins que les intéressés ne prouvent qu'ils ont été dans l'impossibilité d'agir avant l'expiration desdits délais.

L'article R. 421-14 dudit code précise qu'à défaut d'accord du fonds de garantie avec la victime ou ses ayants droit soit sur la transaction intervenue, soit sur la fixation de l'indemnité lorsque le responsable des dommages est inconnu ou lorsque la décision de justice invoquée est inopposable au fonds de garantie, soit sur l'existence des diverses conditions d'ouverture du droit à l'indemnité, la victime ou ses ayants droit saisissent le tribunal judiciaire. Le litige peut être porté devant la juridiction du lieu où l'accident s'est produit.

 

L'accident s'est produit le 14 novembre 2010 ; les actes introductifs d'instance ont été délivrés les 29 avril et 5 juin 2019 : la forclusion est dès lors acquise sauf à démontrer l'impossibilité pour les victimes d'agir.

 

A l'échéance du délai pour agir, le 14 novembre 2015, M. [J], assisté d'un avocat depuis 2011, disposait du rapport définitif du médecin désigné par le fonds de garantie depuis le 2 juillet 2015 sans qu'une transaction ne soit intervenue avec le fonds de garantie ; que dès lors, rien ne s'opposait à l'introduction d'une instance afin de présenter les demandes d'indemnisation, y compris avec des réserves relatives aux créances des tiers payeurs.

 

En effet, la connaissance des dites créances ne constitue pas une exigence préalable et irréductible de l'assignation visant notamment, dans le cadre des prétentions des demandeurs à obtenir des organismes sociaux le relevé de leurs débours. En outre, les pièces du dossier permettent de vérifier que la victime avait la faculté de solliciter les caisses dès 2011, en leur communiquant les rapports médicaux provisoires comportant déjà de nombreuses précisions quant aux frais concernés en date des 12 décembre 2011, 14 novembre 2012, 30 septembre 2013 et 13 novembre 2014 et d'obtenir, à tout le moins des décomptes provisoires et de mettre en mouvement l'action avant expiration du délai de forclusion.

 

Le fonds de garantie a formulé une offre d'indemnisation, le 12 août 2015, précise pour partie des postes mais « pour mémoire » s'agissant de la perte de gains professionnels actuels et de l'incidence professionnelle en sollicitant différentes pièces dont la créance détaillée et définitive de l'organisme de protection sociale. La réponse quant à l'évaluation des préjudices ne sera apportée par le conseil de la victime que le 15 janvier 2019 soit plus de trois ans après l'offre refusée et plus de huit ans après l'accident.

 

Si un relevé des débours a été émis par la CPAM le 19 septembre 2018, il n'est justifié d'aucune demande formée antérieurement ni durant le délai pour agir ni postérieurement. En outre, même si ce relevé porte la mention du versement d'une pension d'invalidité de 2016 à 2018 et de l'évaluation du capital invalidité à compter du 6 septembre 2018, l'évolution de la situation de la victime était susceptible d'être intégrée aux débats judiciaires relatifs à la détermination des indemnisations. Ces points ne constituent pas un obstacle péremptoire à l'action.  

 

En l'absence d'impossibilité d'agir, la forclusion ne peut être écartée à l'égard de la victime.

 

Alors même que leur créance est détachée des postes susceptibles de concerner les organismes sociaux, son épouse et ses enfants n'ont formulé aucune demande avant janvier 2019 amiablement, et avant avril 2019 judiciairement. Ils ne développent aucun argument relatif à leur impossibilité d'introduire une action, dès lors forclose également, au terme du délai de cinq ans fixé par l'article R. 421-12 du code des assurances.

 

Les appelants soutiennent encore que le fonds de garantie aurait renoncé à opposer la forclusion à la victime. Ce moyen ne peut être discuté qu'à l'égard de M. [J] victime directe de l'accident et seul interlocuteur du fonds de garantie jusqu'en 2019.

 

Par lettre du 22 février 2017, le fonds de garantie sollicitait le conseil de M. [J] en rappelant :

« Par courrier du 22/12/2015, vous m'indiquiez que votre client refusait la proposition d'indemnisation du Fonds de Garantie et que vous transmettrez votre évaluation du préjudice au début de l'année 2016.

Sauf erreur de ma part, je n'ai encore rien reçu à ce jour et reste dans l'attente de nouvelles de votre part. ».

 

Alors que le Fonds a versé une provision et formulé une offre, il ne fait qu'interroger le conseil de victime silencieuse depuis quatorze mois sur le sort du dossier. Les termes de la correspondance n'excluent pas toute perspective d'indemnisation mais ne comporte pas l'expression d'une volonté, claire et non équivoque, du fonds de garantie à renoncer au moyen tiré de la forclusion.

 

En pièce 14 du dossier, M. [J] produit la demande d'indemnisation formulée le 15 janvier 2019 et annonce, dans le bordereau de communication de pièces notifié le 27 septembre 2021 la pièce « 15. Courrier du FGAO à Me [O] du 28/01/19 ». Matériellement, le document produit n'est que la copie de la pièce 14 soit la lettre du conseil et non la réponse du fonds de garantie. Dans ses conclusions, le conseil de M. [J] vise en toutes hypothèses une correspondance rappelant les dispositions de la loi du 5 juillet 1985 et du code des assurances susvisées et en aucun cas, un débat entretenu par le fonds de garantie sur les conditions de l'indemnisation comportant renonciation à la forclusion des demandes, ce d'autant plus qu'elle était acquise depuis 38 mois.

 

En conséquence, les consorts [J] échouent dans leur démonstration ; le jugement entrepris sera confirmé.

 

Sur les dépens et les frais irrépétibles       

 

En application de l'article 696 du code de procédure civile, les consorts [J] sont condamnés in solidum aux dépens et ne peuvent en conséquence prétendre au bénéfice des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

 

PAR CES MOTIFS

 

La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire mis à disposition au greffe et en dernier ressort,

 

Confirme le jugement entrepris,

 

Condamne in solidum M. [K] [J], Mme [V] [W], son épouse tant en son nom personnel qu'en qualité de représentante légale de sa fille mineure [D], Mme [Z] [J] et M. [H] [J] aux dépens.  

 

 

Le greffier,La présidente de chambre,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Formation : 1ère ch. civile
Numéro d'arrêt : 21/02982
Date de la décision : 07/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-07;21.02982 ?
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