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24/08/2022 | FRANCE | N°19/00648

France | France, Cour d'appel de Rouen, 1ère ch. civile, 24 août 2022, 19/00648


N° RG 19/00648 - N° Portalis DBV2-V-B7D-IDBX







COUR D'APPEL DE ROUEN



1ERE CHAMBRE CIVILE



ARRET DU 24 AOUT 2022









DÉCISION DÉFÉRÉE :



14/00356

Tribunal de grande instance de Dieppe du 29 novembre 2018





APPELANTE :



Sa AVIVA ASSURANCES

[Adresse 1]

[Localité 8]



représentée et assistée par Me Joël CISTERNE de la Scp CISTERNE Avocats, avocat au barreau de Rouen







INTIMES :



Monsieur [U] [B]

né le 20 juillet 1977 à Bamako (Mali)

[Adresse 4]

[Localité 7]



représenté et assisté par Me Caroline FLIN, avocat au barreau de Dieppe



(bénéficie d'une aide juridictionnelle partielle numéro 2019/003634 du 01/0...

N° RG 19/00648 - N° Portalis DBV2-V-B7D-IDBX

COUR D'APPEL DE ROUEN

1ERE CHAMBRE CIVILE

ARRET DU 24 AOUT 2022

DÉCISION DÉFÉRÉE :

14/00356

Tribunal de grande instance de Dieppe du 29 novembre 2018

APPELANTE :

Sa AVIVA ASSURANCES

[Adresse 1]

[Localité 8]

représentée et assistée par Me Joël CISTERNE de la Scp CISTERNE Avocats, avocat au barreau de Rouen

INTIMES :

Monsieur [U] [B]

né le 20 juillet 1977 à Bamako (Mali)

[Adresse 4]

[Localité 7]

représenté et assisté par Me Caroline FLIN, avocat au barreau de Dieppe

(bénéficie d'une aide juridictionnelle partielle numéro 2019/003634 du 01/04/2019 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Rouen)

Madame [Z] [K] épouse [B]

née le 21 janvier 1976 à Segou (Mali)

[Adresse 4]

[Localité 7]

représentée et assistée par Me Caroline FLIN, avocat au barreau de Dieppe

(bénéficie d'une aide juridictionnelle partielle numéro 2019/003635 du 01/04/2019 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Rouen)

Sas BDR & Associés

prise en la personne de Mme [R] [D] [G] ès qualités de liquidateur judiciaire de la société LES MAISONS D'AUJOURD'HUI

[Adresse 3]

[Localité 6]

non constituée bien que régulièrement assignée par acte d'huissier de justice remis le 24 novembre 2021 à personne morale

Sa LES MAISONS D'AUJOURD'HUI

[Adresse 2]

[Localité 5]

représentée par Me Ahmed AKABA de la Selarl NORMANDIE-JURIS, avocat au barreau de Rouen

Scp BROUARD - DAUDE

prise en la personne de Mme [R] [D] ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de la société LES MAISONS D'AUJOURD'HUI

[Adresse 3]

[Localité 6]

représentée par Me Ahmed AKABA de la Selarl NORMANDIE-JURIS, avocat au barreau de Rouen

COMPOSITION DE LA COUR  :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 4 mai 2022 sans opposition des avocats devant Mme Magali DEGUETTE, rapporteur,

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée :

Mme Edwige WITTRANT, présidente de chambre,

M. Jean-François MELLET, conseiller,

Mme Magali DEGUETTE, conseillère,

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme [C] [V],

DEBATS :

A l'audience publique du 4 mai 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 24 août 2022.

ARRET :

REPUTE CONTRADICTOIRE

Rendu publiquement le 24 août 2022, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

signé par Mme WITTRANT, présidente et par Mme CHEVALIER, greffier.

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Le 23 décembre 2006, M. [U] [B] et Mme [Z] [K], son épouse ont conclu avec la Sa Les Maisons d'Aujourd'hui un contrat de construction d'une maison individuelle avec sous-sol sur un terrain situé [Adresse 9]. Par procès-verbal du 29 juillet 2009, les travaux ont été réceptionnés avec réserves.

Se plaignant de désordres affectant notamment le sous-sol de leur habitation, M. [U] [B] et Mme [Z] [K], son épouse ont fait assigner la Sa Les Maisons d'Aujourd'hui en référé expertise le 3 octobre 2011.

Par ordonnance du 1er décembre 2011, le juge des référés du tribunal de grande instance de Dieppe a ordonné la réalisation d'une expertise et a désigné à cet effet M. [A] [T]. Cette mesure a été étendue à la Sa Aviva Assurances, assureur décennal de la Sa Les Maisons d'Aujourd'hui, le 10 janvier 2013. M. [E] [M], expert remplaçant M. [A] [T], a établi son rapport d'expertise le 2 septembre 2013.

Suivant acte d'huissier de justice du 19 février 2014, M. [U] [B] et Mme [Z] [K], son épouse ont fait assigner la Sa Les Maisons d'Aujourd'hui devant le tribunal de grande instance de Dieppe en indemnisation de leurs préjudices sur la base de l'article 1792 du code civil.

Par jugement du 6 septembre 2016, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de sauvegarde à l'égard de la Sa Les Maisons d'Aujourd'hui.

Suivant exploit du 11 octobre 2016, M. [U] [B] et Mme [Z] [K], son épouse ont fait intervenir la Scp [F], en la personne de [R] [D], ès qualités de mandataire judiciaire de la Sa Les Maisons d'Aujourd'hui.

A l'audience du 22 février 2017, le tribunal a procédé à l'audition de l'expert judiciaire et de son sapiteur la Sarl Technosol Normandie qui a réalisé les 17 octobre 2012 et 24 janvier 2013 une étude géotechnique en vue de rechercher l'origine des rétentions d'eau présentes dans le sous-sol de la maison, notamment au moment des périodes d'intempéries, et de définir les travaux de reprise.

Par acte d'huissier de justice du 28 février 2017, M. [U] [B] et Mme [Z] [K], son épouse ont fait assigner la Sa Aviva Assurances en indemnisation de leurs préjudices.

Suivant jugement du 29 novembre 2018, le tribunal de grande instance de Dieppe a :

- fixé la créance de M. [U] [B] et Mme [Z] [B] au passif de la procédure de sauvegarde de la Sa Les Maisons d'Aujourd'hui à la somme de 40 874,49 euros Ttc au titre des travaux de reprise des désordres,

- condamné solidairement la Sa Aviva Assurances et la Sa Les Maisons d'Aujourd'hui à verser ladite somme à M. [U] [B] et Mme [Z] [B],

- dit que les sommes recouvrées par les époux [B] à l'encontre de la Sa Les Maisons d'Aujourd'hui et la Sa Aviva Assurances ne sauraient excéder la somme de 40 874,49 euros au titre des travaux de reprise des désordres,

- fixé la créance de M. [U] [B] et Mme [Z] [B] au passif de la procédure de sauvegarde de la Sa Les Maisons d'Aujourd'hui à la somme de

5 000 euros au titre de leur préjudice moral,

- condamné solidairement la Sa Aviva Assurances avec la Sa Les Maisons d'Aujourd'hui à verser ladite somme à M. [U] [B] et Mme [Z] [B],

- dit que les sommes recouvrées par les époux [B] à l'encontre de la Sa Les Maisons d'Aujourd'hui et la Sa Aviva Assurances ne sauraient excéder la somme de 5 000 euros au titre du préjudice moral,

- rejeté la demande de M. [U] [B] et Mme [Z] [B] au titre de leur trouble de jouissance,

- fixé la créance de M. [U] [B] et Mme [Z] [B] à l'égard de la Sa Les Maisons d'Aujourd'hui à la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et condamné in solidum la Sa Aviva Assurances et la société Les Maisons d'Aujourd'hui au paiement de cette somme,

- condamné in solidum la Sa Les Maisons d'Aujourd'hui et la Sa Aviva Assurances aux dépens de l'instance, incluant le coût de l'expertise judiciaire, dont distraction au profit de Me Caroline Flin, avocate au barreau de Dieppe.

Par déclaration du 11 février 2019, la Sa Aviva Assurances a formé un appel contre ce jugement à l'égard de M. [U] [B], Mme [Z] [K], son épouse et la Sa Les Maisons d'Aujourd'hui 'ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de la Sa Les Maisons d'Aujourd'hui'.

Par déclaration du 27 août 2019, la Sa Aviva Assurances a formé un appel contre ce jugement à l'égard de M. [U] [B], Mme [Z] [K], son épouse et la Scp [G] [D] en la personne de Me [R] [D], ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de continuation de la Sa Les Maisons d'Aujourd'hui.

Par ordonnance du 14 janvier 2020, le conseiller de la mise en état a notamment :

- déclaré caduque la déclaration d'appel du 27 août 2019, enregistrée sous le numéro RG19/3465, à l'égard de la Sa Les Maisons d'Aujourd'hui et de la Scp [G] [D] en la personne de Me [R] [D], ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de continuation de la Sa Les Maisons d'Aujourd'hui, sur le fondement de l'article 908 du code de procédure civile,

- constaté que seuls les époux [B] restaient intimés dans la procédure d'appel enregistrée sous le numéro RG19/3465,

- ordonné la jonction de la procédure d'appel enregistrée sous le numéro RG19/3465 avec la procédure numéro RG19/00648.

Par exploit du 23 janvier 2020, la Sa Aviva Assurances a fait assigner en intervention forcée la Scp [G] [D] en la personne de Me [R] [D], ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de continuation de la Sa Les Maisons d'Aujourd'hui.

Par jugement du 6 juillet 2021, le tribunal de commerce de Paris a prononcé la résolution du plan de continuation et a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la Sa Les Maisons d'Aujourd'hui.

En suite de ce jugement et sur demande de renvoi du conseil de la Sa les Maisons d'aujourd'hui et de la Scp [G] [D], ès qualités de commissaire à l'exécution du plan, déchargé de son mandat, la cour a révoqué l'ordonnance de clôture par arrêt du 23 février 2022 pour fixer une nouvelle date et la plaidoirie à l'audience du 4 mai 2022.

La Sas Bdr & Associés prise en la personne de Me [R] [D] [G], ès qualités de liquidateur judiciaire de la Sa Les Maisons d'Aujourd'hui, assignée en intervention forcée à personne habilitée le 24 novembre 2021 par M. et Mme [B], n'a pas constitué avocat. Les intimés ont signifié par cet acte les différents actes de procédure.

EXPOSE DES PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par dernières conclusions notifiées le 17 novembre 2020, la Sa Aviva Assurances demande de voir réformer le jugement dont appel en ce qu'il a :

- condamné solidairement la Sa Aviva Assurances et la Sa Les Maisons d'Aujourd'hui à verser à M. [U] [B] et Mme [Z] [B] la somme de 40 874,49 euros au titre des travaux de reprise des désordres,

- dit que les sommes recouvrées par les époux [B] à l'encontre de la Sa Les Maisons d'Aujourd'hui et la Sa Aviva Assurances ne sauraient excéder la somme de 40 874,49 euros au titre des travaux de reprise des désordres,

- condamné solidairement la Sa Aviva Assurances et la Sa Les Maisons d'Aujourd'hui à verser à M. [U] [B] et à Mme [Z] [B] la somme de 5 000 euros au titre de leur préjudice moral,

- dit que les sommes recouvrées par les époux [B] à l'encontre de la Sa Les Maisons d'Aujourd'hui et la Sa Aviva Assurances ne sauraient excéder la somme de 5 000 euros au titre du préjudice moral,

- condamné in solidum la Sa Les Maisons d'Aujourd'hui et la Sa Aviva Assurances à verser à M. [U] [B] et à Mme [Z] [B] la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de l'instance, incluant le coût de l'expertise judiciaire, dont distraction au profit de Me Caroline Flin, avocate au barreau de Dieppe,

et statuant à nouveau, vu les articles 1792 et suivants, 1356, du code civil,

- prononcer sa mise hors de cause,

- rejeter toutes les demandes des époux [B], de la Sa Les Maisons d'Aujourd'hui et de la Scp [G] [D], prise en la personne de Me [D], ès qualités de commissaire à l'exécution du plan,

- condamner les époux [B] et/ou la Sa Les Maisons d'Aujourd'hui à la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, en plus de tous les dépens dont distraction au profit de la Scp Cisterne Avocats, avocat, aux offres de droit.

Elle expose qu'elle n'assure que la responsabilité décennale de la Sa Les Maisons d'Aujourd'hui ; que le désordre lié aux infiltrations en sous-sol était parfaitement connu des époux [B] dès le 15 juin 2009 ; qu'il a fait l'objet d'un protocole d'accord le 1er juillet 2009 et n'a pas été réservé dans le procès-verbal de réception du 29 juillet 2009 ; que la responsabilité contractuelle de la Sa Les Maisons d'Aujourd'hui est seule engagée en raison du non-respect de ce protocole d'accord, que sa garantie n'est donc pas mobilisable.

Par dernières conclusions notifiées le 10 janvier 2022, M. [U] [B] et Mme [Z] [K], son épouse sollicitent de voir :

- confirmer la décision entreprise en ce que la garantie décennale doit être retenue,

- condamner solidairement la Sa Aviva Assurances et la Sa Les Maisons d'Aujourd'hui à leur payer la somme de 40 874,49 euros Ttc au titre des travaux de reprise des désordres,

- fixer leur créance au passif de la procédure de liquidation de la Sa Les Maisons d'Aujourd'hui à la somme de 69 242,50 euros au titre du préjudice de jouissance subi et arrêté au 4 mai 2022,

- condamner solidairement la Sa Aviva Assurances avec la Sa Les Maisons d'Aujourd'hui à leur verser ladite la somme,

- condamner la Sa Les Maisons d'Aujourd'hui, solidairement avec la Sa Aviva Assurances, au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens dont distraction au profit de Me Caroline Flin, avocat au barreau de Dieppe, sur le fondement de l'article 699 du code précité, lesquels comprendront le coût de l'expertise judiciaire.

Ils font valoir que, comme l'a jugé le tribunal, les infiltrations et inondations affectant leur sous-sol n'ont été révélées dans leur ampleur et leur conséquence qu'après la réception et relèvent donc de la garantie décennale ; que le protocole d'accord conclu le 1er juillet 2009 l'a été en vue de transformer le sous-sol en cave et de créer un garage attenant à leur maison ; qu'il n'a pas mentionné que le sous-sol subissait des inondations, que leur courrier adressé à la Sa Les Maisons d'Aujourd'hui pour lui signaler l'inondation du sous-sol est postérieur à la réception.

Ils ajoutent que la Sa Aviva Assurances ne peut pas prétendre que les désordres relèveraient de la seule garantie de parfait achèvement, dès lors que l'article 1792-6 du code civil n'est pas exclusif de l'article 1792 ; qu'elle ne peut pas davantage invoquer le fondement de la responsabilité contractuelle puisque le protocole ne vise pas les infiltrations et inondations et prévoit des travaux de reprise à réaliser moins importants que ceux arrêtés par le tribunal.

Ils précisent enfin que les conclusions de l'expert judiciaire et les éléments qu'ils communiquent sur la surface et le montant de loyers permettent d'évaluer leur préjudice de jouissance.

La clôture de l'instruction a été ordonnée le 20 avril 2022.

MOTIFS

Sur la garantie décennale de la Sa Les Maisons d'Aujourd'hui

Selon l'article 1792 du code civil, tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.

Une réception prononcée sans réserve malgré la présence d'un vice connu du maître de l'ouvrage met obstacle à l'action en garantie décennale.

En l'espèce, l'existence d'infiltrations d'eau a été constatée dans le sous-sol de l'habitation des époux [B] tant par Me [J], huissier de justice mandaté par ces derniers le 13 décembre 2010, que par l'expert judiciaire.

A l'issue de ses investigations et du diagnostic géotechnique effectué par son sapiteur, l'expert judiciaire a conclu que la nature du sol était en cause, que, lors de temps pluvieux, l'eau circulait au-dessus des sols argileux qui n'étaient pas perméables et que l'eau coulait selon la pente du terrain jusqu'à la maison en contrebas. Il a également imputé les infiltrations au positionnement trop haut du drain de la maison qui était défectueux. Il a ajouté que le sous-sol avait été creusé trop profond (1,30 mètres de plus à la suite d'une erreur de lecture du plan initial), ce qui n'avait pas favorisé cet état de fait.

Il a écarté au final l'impact d'un fourreau électrique dont l'extrémité, située sous le tableau électrique dans le sous-sol, laissait s'écouler de l'eau. En effet, malgré la neutralisation de celui-ci depuis son point de départ lors de la réunion d'expertise du 11 juillet 2012, les infiltrations d'eau n'avaient pas cessé. Lors de la réunion d'expertise du 17 octobre 2012, l'ensemble du sous-sol était inondé et les murs ruisselaient d'eau en partie haute sous plancher.

Lors de son audition par le tribunal le 22 février 2017, M. [O], directeur de projet au sein de la Sarl Technosol Normandie, interrogé sur les difficultés en cause, a confirmé que le drain aurait dû être positionné plus bas (environ 30 centimètres sous la dalle en-dessous de l'arase du dallage) et que le remblai aurait dû être réalisé avec des terres sableuses et non pas argileuses. Il a ajouté que l'étanchéification aurait dû être effectuée de l'extérieur et non pas de l'intérieur et que le creusage trop profond du sous-sol n'était pas la cause du problème.

Aux termes d'un protocole d'accord transactionnel conclu le 1er juillet 2009, les maîtres de l'ouvrage et la Sa Les Maisons d'Aujourd'hui ont convenu, à la suite des points évoqués lors de leur entrevue sur le chantier le 15 juin 2009, que celle-ci s'engageait à la réalisation des travaux suivants :

1°) la pose de quatre ventilations dans le sous-sol actuellement réalisé qui va se transformer en cave lors du prochain dépôt de permis de construire modificatif,

2°) l'exécution d'un garage sur terre-plein,

3°) la déviation des eaux pluviales du puisard vers des tranchées drainantes à réaliser sur la partie arrière du terrain,

4°) la vérification de l'imperméabilisation des parois enterrées du sous-sol et la réalisation si nécessaire du terrassement du sous-sol en périphérie,

5°) l'exécution du dallage en béton armé dans le sous-sol actuel,

6°) la livraison du pavillon pour fin juillet 2009 et la réalisation du garage accolé dans un délai de deux mois à compter de l'accord du permis de construire modificatif,

7°) la remise en conformité électrique avant la livraison prévue pour fin juillet 2009,

8°) le rehaussement du puisard situé actuellement devant la porte de garage du sous-sol avec les buses nécessaires pour le mettre au niveau du terrain fini et la réalisation du remblaiement de la descente du sous-sol.

Le premier juge a estimé que ce protocole d'accord avait été conclu en vue de la transformation du sous-sol en cave et de la création d'un garage attenant à la maison et qu'il ne faisait aucune allusion à l'existence d'inondations dans le sous-sol. Il a également souligné que, si des infiltrations existaient à la date de son établissement, les maîtres de l'ouvrage, profanes en matière de construction, avaient pu légitimement penser que les démarches prévues dans ce protocole permettraient d'y mettre fin.

Cependant, il ressort des courriers recommandés suivants adressés par les maîtres de l'ouvrage à leur constructeur et/ou au courtier d'assurances la société Verspieren que la survenue d'infiltrations d'eau dans leur sous-sol était connue dès la réunion du 15 juin 2009, soit avant la réception des travaux :

- 'nous vous rappelons que le 5ème point du Protocol qui prévoit le dallage du sous sol en béton armé n'a pas été respecté également.

En effet ces travaux n'ont pas été réalisés dans les conditions normales ; à savoir la porte de garage était murée, donc dans l'obscurité totale, et enfin le béton a été coulé sur un sol inondé.' (courrier du 4 novembre 2009 adressé à la Sa Les Maisons d'Aujourd'hui),

- 'Nous avons établit ensemble en présence de votre assureur un protocole d'accord, ci-joint, en date du 15/06/2009. Les termes de ce protocole vous engagent à assurer l'imperméabilisation des parois enterrés du sous-sol de notre maison.

' Les travaux entrepris depuis cette date n'ont toujours pas permis de résoudre définitivement le problème d'infiltration d'eau dans le sous-sol' (courrier du 5 septembre 2010 adressé à la Sa Les Maisons d'Aujourd'hui et à la société Vespieren).

Cette analyse est corroborée par l'expert judiciaire à la page 19 de son rapport d'expertise, lequel a relaté :

- qu'un constat d'huissier du 13 décembre 2010 avait fait état d'un problème d'infiltrations d'eau dans le sous-sol et qu'en fait, de l'eau arrivait dans le sous-sol du pavillon par le fourreau libre, rendant le local impropre à sa destination,

- que, 'Ce qui a été tenté :

- Un protocole d'accord avait été conclu entre Monsieur [B] le propriétaire, et le constructeur concernant le problème des infiltrations.

- En fait, le problème n'a jamais été réglé.'.

A la page 21, il a de nouveau mentionné qu'un protocole d'accord avait été conclu le 1er juillet 2009 pour mettre fin au problème d'infiltration dans le sous-sol. 'C'est ainsi que les travaux suivant ont été entrepris par le constructeur :

1. La pose d'un drain au pied de la façade (travaux pris en charge par Monsieur [B] pour un montant de 2.000,00 €, facture page 81).

2. L'enduit des murs intérieurs du sous-sol, bétonnage du sol, avec la mise en place d'un regard équipé d'une pompe de relevage (photo page 30) à fin d'évacuer l'eau vers un puisard.

3. La ventilation du local par percements des murs pour créer un courant d'air de séchage.

4. L'isolation du plafond à l'aide de dalles en polystyrène.

- Les travaux 2,3 et 4 ont été pris en charge par le constructeur.'.

Cette présentation des faits n'a pas été remise en cause par les maîtres de l'ouvrage.

Il ressort en outre de l'audition par le tribunal de l'expert judiciaire et de son sapiteur le 22 février 2017, que tant le constructeur que M. [B] avaient connaissance des infiltrations lors de la réalisation des travaux, notamment du dallage du sous-sol, objets du protocole d'accord (point 5°). L'expert judiciaire a ainsi indiqué que le dallage du sous-sol avait été fait et qu'un endroit avait été prévu pour une pompe. M. [B] a expliqué sur question que cette pompe avait été installée 'car l'eau entrait par les drains et par les murs. On a eu un niveau d'eau de 70 cm. Ils m'ont amené une pompe pour cela mais l'eau entrait encore. Je voulais qu'il étanchéise par l'extérieur ms ils l'ont fait par l'intérieur.'.

Les maîtres de l'ouvrage avaient d'ailleurs adressé un courrier à leur constructeur dès le 22 avril 2008 pour lui signaler l'existence d'une fissure sur les fondations qui étaient recouvertes de plus de 80 centimètres d'eau.

Enfin, M. et Mme [B] s'étaient réservés les prestations de fourniture et de pose d'un drain en périphérie, ainsi que de remblayage au pourtour de l'habitation. S'il n'est pas démontré qu'ils étaient des professionnels en matière de construction, il s'en déduit que l'objet et l'incidence des travaux prévus dans le protocole d'accord étaient compréhensibles pour eux lors de sa conclusion comme étant destinés à mettre fin aux infiltrations d'eau affectant leur sous-sol.

Ce désordre à l'origine d'inondations et dont ils avaient connaissance dès la conclusion du protocole d'accord avec la Sa Les Maisons d'Aujourd'hui le 1er juillet 2009 n'a pas été réservé lors de la réception le 29 juillet 2009. La mise en jeu de la garantie décennale est donc exclue. M. [B] et Mme [K], son épouse seront déboutés de toutes leurs demandes et la Sa Aviva Assurance mise hors de cause en l'absence de garantie mobilisable. Le jugement du tribunal ayant accueilli les prétentions des maîtres de l'ouvrage sera infirmé, sauf en ce qu'il a rejeté leur demande au titre de leur trouble de jouissance.

Sur les demandes accessoires

Les dispositions de première instance sur les dépens et les frais irrépétibles seront infirmées.

Parties perdantes, M. [B] et Mme [K], son épouse seront condamnés aux dépens de première instance et d'appel avec bénéfice de distraction au profit des avocats qui en ont fait la demande.

Il n'est pas inéquitable de les condamner également à payer à la Sa Aviva Assurances la somme de 2 500 euros au titre des frais non compris dans les dépens qu'elle a engagés pour les procédures de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt réputé contradictoire, rendu publiquement par mise à disposition au greffe, et en dernier ressort,

Infirme le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a rejeté la demande de M. [U] [B] et Mme [Z] [K], son épouse au titre de leur trouble de jouissance,

Confirme le jugement de ce chef,

Et statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Déboute M. [U] [B] et Mme [Z] [K], son épouse de leur demande indemnitaire au titre des travaux de reprise des désordres,

Prononce la mise hors de cause de la Sa Aviva Assurances,

Condamne solidairement M. [U] [B] et Mme [Z] [K], son épouse à payer à la Sa Aviva Assurances la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne solidairement M. [U] [B] et Mme [Z] [K], son épouse aux dépens, incluant notamment le coût de l'expertise judiciaire, et avec bénéfice de distraction au profit de la Scp Cisterne Avocats et de Me Caroline Flin, avocats, en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Le greffierLa présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Formation : 1ère ch. civile
Numéro d'arrêt : 19/00648
Date de la décision : 24/08/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-08-24;19.00648 ?
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