N° RG 19/04911 - N° Portalis DBV2-V-B7D-ILUO
COUR D'APPEL DE ROUEN
CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE
SECURITE SOCIALE
ARRET DU 07 JUILLET 2022
DÉCISION DÉFÉRÉE :
Jugement du CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE ROUEN du 21 Novembre 2019
APPELANTE :
Madame [R] [P]
[Adresse 4]
[Localité 3]
représentée par Me Philippe DUBOS de la SCP DUBOS, avocat au barreau de ROUEN
INTIMEES :
S.A.S. VOXENS
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par Me Cécile GILBERT de la SELARL CABESTAN AVOCATS, avocat au barreau de l'EURE
S.A.R.L. MD CONSULTING
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par Me Cécile GILBERT de la SELARL CABESTAN AVOCATS, avocat au barreau de l'EURE
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 805 du Code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 01 Juin 2022 sans opposition des parties devant Madame BACHELET, Conseillère, magistrat chargé du rapport.
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente
Madame BACHELET, Conseillère
Madame BERGERE, Conseillère
GREFFIER LORS DES DEBATS :
M. GUYOT, Greffier
DEBATS :
A l'audience publique du 01 Juin 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 07 Juillet 2022
ARRET :
CONTRADICTOIRE
Prononcé le 07 Juillet 2022, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
signé par Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente et par Mme WERNER, Greffière.
EXPOSÉ DES FAITS, DE LA PROCÉDURE ET DES PRÉTENTIONS DES PARTIES
Mme [R] [P] a été engagée par la société Voxens à compter du 7 novembre 2011 par divers contrats à durée déterminée et ce, jusqu'au 6 juillet 2018.
Elle a par ailleurs, également sur cette période, été engagée par quelques contrats à durée déterminée par la société MD consulting.
Par requête du 5 juillet 2019, elle a saisi le conseil de prud'hommes de Rouen en requalification des contrats à durée déterminée en un unique contrat à durée indéterminée, ainsi qu'en paiement de rappel de salaires et indemnités.
Par jugement du 21 novembre 2019, le conseil de prud'hommes a, avec le bénéfice de l'exécution provisoire :
- dit qu'il n'y avait pas de co-emploi,
- requalifié la relation contractuelle en temps plein,
- condamné la société MD consulting à payer à Mme [P] la somme de 484,44 euros bruts à titre de rappel de salaire, outre 48,44 euros bruts au titre des congés payés afférents,
- condamné la société Voxens à régler à Mme [P] les sommes suivantes :
rappel de salaire : 2 874,82 euros bruts
congés payés afférents : 287,48 euros bruts
dommages et intérêts pour absence de formation : 1 000 euros
indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile : 2 000 euros
- condamné Mme [P] à rembourser à la société MD consulting la somme de 858,98 euros bruts versée indûment au titre de l'indemnité de précarité en juillet 2017,
-débouté Mme [P] du surplus de ses demandes et les sociétés Voxens et MD consulting de leur demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- laissé la charge des dépens aux sociétés Voxens et MD consulting.
Mme [P] a interjeté appel de cette décision le 16 décembre 2019.
Par conclusions remises le 12 mars 2020, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé des moyens, Mme [P] demande à la cour de :
- réformer le jugement et prononcer la requalification des contrats à durée déterminée effectués en un seul et unique contrat à durée indéterminée à compter du 7 novembre 2011, et ce, avec les co-employeurs Voxens et MD consulting,
-confirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la requalification de la relation contractuelle à temps partiel en une relation à temps plein mais le réformer sur le quantum et condamner solidairement les sociétés Voxens et MD consulting à lui payer :
rappel de salaire : 5 740,72 euros
congés payés afférents : 574,07 euros
-et, à titre subsidiaire, si le co-emploi n'était pas retenu, condamner la société MD consulting à lui payer la somme de 1 480,84 euros et 148,08 euros au titre des congés payés afférents et condamner la société Voxens à lui payer 4 259,98 euros, outre 425,99 euros au titre des congés payés afférents,
- fixer le montant de son salaire de référence à 1 328,23 euros et en conséquence, condamner solidairement les sociétés Voxens et MD consulting à lui payer les sommes suivantes :
indemnité de requalification : 2 764,46 euros
indemnité de préavis : 2 764,46 euros
congés payés afférents : 276,44 euros
indemnité légale de licenciement : 2 213,73 euros
dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 9 297,61 euros
dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de formation : 1 000 euros
indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile : 2 000 euros
- condamner in solidum les sociétés Voxens et MD consulting aux intérêts de droit à compter de la saisine du conseil de prud'hommes ainsi qu'aux entiers dépens.
Par conclusions remises le 29 avril 2022, les sociétés Voxens et MD consulting demandent à la cour de :
- réformer le jugement en ce qu'il a requalifié la relation contractuelle en temps plein et a condamné la société MD consulting à payer à Mme [P] la somme de 484,44 euros bruts à titre de rappel de salaire, outre 48,44 euros bruts au titre des congés payés afférents et la société Voxens à lui régler à 2 874,82 euros bruts à titre de rappel de salaire et 287,48 euros bruts au titre des congés payés afférents, 1 000 euros à titre de dommages et intérêts pour absence de formation et 2 000 euros au titre de l'indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile, et, en conséquence, débouter Mme [P] de l'ensemble de ses demandes,
- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné Mme [P] à rembourser à la société MD consulting la somme de 858,98 euros bruts versée indûment au titre de l'indemnité de précarité en juillet 2017,
- subsidiairement, retenir un salaire de référence de 1 021,34 euros et modérer significativement les demandes de Mme [P],
-condamner Mme [P] à leur verser une somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens en cause d'appel.
L'ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 12 mai 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
A titre liminaire, il convient de relever que Mme [P] ne sollicite pas l'infirmation du jugement en ce qu'il l'a condamnée à rembourser à la société MD consulting la somme de 858,98 euros bruts à titre d'indemnité de précarité indûment versée, aussi, convient-il de confirmer cette disposition conformément à la demande présentée par les sociétés Voxens et MD consulting.
Sur le co-emploi
Alors que Mme [P] invoque le co-emploi, les sociétés Voxens et MD consulting ne lui apportent aucune contradiction et produisent au contraire une décision du tribunal d'instance du 25 janvier 2016 ayant fait droit à une demande de reconnaissance d'une unité économique et sociale entre les sociétés Voxens, MD consulting et Voxens assurances, présentée à l'époque par M. [K], représentant des sociétés parties à la présente instance.
Si, en soi, la seule reconnaissance d'une unité économique et sociale ne conduit pas nécessairement à la reconnaissance d'un co-emploi, il doit être relevé qu'en l'espèce il ressort de la motivation de cette décision et des arguments mêmes développés à cette occasion par le représentant des sociétés Voxens et MD consulting qu'elles avaient toutes deux un même siège social, des activités similaires ou complémentaires, que les salariés travaillaient en un même endroit selon des conditions salariales identiques, avec des possibilités de permutation entre les différentes sociétés et surtout, qu'elles entretenaient des liens capitalistiques croisés conduisant à une concentration des pouvoirs au profit de deux personnes, MM. [K] et [C].
Il ressort ainsi suffisamment de cette décision qu'au-delà de la reconnaissance d'une unité économique et sociale, il existait une confusion d'intérêts, d'activités et de direction des deux sociétés, aussi, convient-il de retenir l'existence d'un co-emploi entre les sociétés Voxens et MD consulting.
Sur la demande de requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée
Alors que Mme [P] fait valoir que les contrats à durée déterminée avaient pour objet de pourvoir à un emploi durable et permanent et que les sociétés Voxens et MD consulting ne justifient pas de la réalité des motifs de recours aux contrats à durée déterminée, ces dernières n'apportent là encore aucune contradiction à cette argumentation.
En effet, elles expliquent que dès 2013, elles ont eu conscience de la nécessité de recourir à un emploi durable et permanent et ont donc proposé à Mme [P] un contrat à durée indéterminée qu'elle a refusé en précisant même renoncer à solliciter une requalification, ce qui s'est à nouveau passé en juillet 2017 et juillet 2018, sans que Mme [P] puisse valablement arguer que ces propositions auraient été faites de mauvaise foi en ne lui permettant pas de prendre des congés alors même qu'elles démontrent que d'autres salariés ayant accepté ces propositions en ont bénéficié dès qu'ils en ont fait la demande.
Aussi, elles estiment qu'au regard de la mauvaise foi de Mme [P] qui n'a été maintenue en contrats à durée déterminée qu'en raison de son refus de signer un contrat à durée indéterminée, elle doit être déboutée de sa demande de requalification et en conséquence de l'ensemble de ses demandes en découlant.
Par courrier du 22 juillet 2013, Mme [P] a écrit à la société Voxens 'Vous m'avez proposé un contrat à durée indéterminée en date du 19 juillet 2013 pour commencer le 19 août 2013. Pour des raisons personnelles, je me vois dans l'obligation de refuser. Toutefois, je souhaite tout de même continuer un contrat à durée déterminée avec vous et m'engage à ne jamais vous réclamer un contrat à durée indéterminée.'
Néanmoins, alors que le salarié ne peut renoncer par avance au bénéfice d'un droit qu'il tient de dispositions d'ordre public avant que ce droit ne soit né, Mme [P] ne pouvait renoncer à intenter une action en requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée pour les contrats conclus postérieurement au 22 juillet 2013.
En outre, au regard de l'imprécision de ce courrier quant à la connaissance exacte des droits auxquels il pourrait être renoncé, il ne peut davantage s'apparenter à une renonciation non équivoque à intenter une action en requalification portant sur les contrats antérieurs.
Enfin, et s'il est exact que Mme [P] a, par la suite, refusé à deux reprises, en juillet 2017 et juillet 2018, de signer un contrat à durée indéterminée, ceci ne saurait cependant la priver de son droit à solliciter la requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée dès lors qu'il doit être rappelé que la signature même d'un contrat à durée indéterminée à la suite de contrats à durée déterminée irréguliers n'interdit au salarié ni de solliciter la requalification de ses contrats antérieurs, ni de solliciter l'indemnité de requalification, étant au surplus relevé qu'en l'espèce, les sociétés Voxens et MD consulting, tout en ayant pleinement conscience de l'irrégularité desdits contrats, ont continué à les proposer à Mme [P].
Il convient en conséquence d'infirmer le jugement et de prononcer la requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée à compter du premier contrat irrégulier, soit à compter du 7 novembre 2011 à défaut de tout élément sur la réalité de l'accroissement temporaire d'activité invoqué dans ce contrat.
Sur la demande de requalification des contrats à temps partiel en contrat à temps plein
Mme [P] explique que l'ensemble des contrats à durée déterminée ont été conclus à temps partiel à hauteur de 30 heures par semaine avec pour mention que les horaires seraient du lundi au vendredi de 9h à 12h et de 14h à 17h ou du lundi au vendredi de 11h à 14h et de 17h à 20h, avec possibilité de modification en fonction des besoins du service selon un délai de prévenance de 72 heures et notification faite par courrier remis en main propre ou envoyé en recommandé.
Aussi, constatant que ses horaires ont toujours varié dans la plage horaire très étendue visée au contrat compte tenu de l'alternative prévue, soit entre 9h et 20h, sans qu'elle ne soit informée préalablement des modifications dans le respect des délais et formes posés par la loi, la convention collective et les contrats, elle soutient que cela a impliqué qu'elle soit à la disposition permanente de l'employeur et elle réclame en conséquence un rappel de salaire sur la période de juillet 2015 à juillet 2018.
En réponse, les sociétés Voxens et MD consulting constatent que les contrats sont conformes aux prescriptions légales et qu'il appartient en conséquence à Mme [P] de rapporter la preuve que des modifications impliquant qu'elle se tienne à leur disposition permanente lui auraient été imposées.
Selon l'article L. 3123-6 du code du travail, le contrat de travail du salarié à temps partiel est un contrat écrit.
Il mentionne :
1° La qualification du salarié, les éléments de la rémunération, la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue et, sauf pour les salariés des associations et entreprises d'aide à domicile et les salariés relevant d'un accord collectif conclu en application de l'article L. 3121-44, la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ;
2° Les cas dans lesquels une modification éventuelle de cette répartition peut intervenir ainsi que la nature de cette modification ;
3° Les modalités selon lesquelles les horaires de travail pour chaque journée travaillée sont communiqués par écrit au salarié. Dans les associations et entreprises d'aide à domicile, les horaires de travail sont communiqués par écrit chaque mois au salarié ;
4° Les limites dans lesquelles peuvent être accomplies des heures complémentaires au delà de la durée de travail fixée par le contrat.
L'avenant au contrat de travail prévu à l'article L. 3123-22 mentionne les modalités selon lesquelles des compléments d'heures peuvent être accomplis au delà de la durée fixée par le contrat.
Si les contrats de travail sont conformes aux prescriptions de l'article L. 3123-6 du code du travail qui n'exige pas la mention de la tranche horaire et qu'il appartient en conséquence à Mme [P] de démontrer qu'elle devait travailler chaque jour selon des horaires dont elle n'avait pas eu préalablement connaissance, ce qui lui imposait de rester en permanence à disposition de l'employeur, il résulte suffisamment de la teneur même des contrats et des plannings produits par les sociétés Voxens et MD consulting qu'en fixant un horaire alternatif à Mme [P], celle-ci était en réalité tenue d'être à la disposition permanente de son employeur de 9h à 20h, ce qui se confirme par l'étude des plannings qui démontrent que les horaires, certes toujours contenus dans cette plage horaire, étaient cependant très variables pouvant ainsi être dès le 15 juillet de 13h à 16h et de 17h à 20h, puis à compter du 24 août de 12h à 15h et de 17h à 20h ou encore en septembre 2015 de 10h à 13h et de 16h à 19h, et ce, sans qu'il ne soit justifié du moindre délai de prévenance alors même qu'il ne s'agit pas des horaires alternatifs prévus au contrat.
Aussi, et alors que ce temps partiel était réparti sur cinq jours de la semaine et sur des horaires très larges compris de 9h à 20h, il convient de retenir que Mme [P] devait travailler chaque jour selon des horaires dont elle n'avait pas eu préalablement connaissance et qui lui imposaient de rester en permanence à disposition de l'employeur, sans que l'attestation de Mme [O], très imprécise sur les arrangements qui auraient été accordés à Mme [P] pour se rendre à des rendez-vous médicaux ne remette en cause cette analyse.
Il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il a requalifié les contrats à temps partiel en contrat à temps plein mais de l'infirmer sur le quantum des sommes accordées.
Néanmoins, si Mme [P] produit un calcul précis du rappel de salaire sollicité, lequel proratise le salaire perçu à raison de 30 heures par semaine en le calculant sur une base de 35 heures, ce qui permet de s'assurer qu'elle n'a tenu compte d'aucune période intermédiaire entre les différents contrats conclus, elle n'a cependant pas tenu compte des heures complémentaires qui lui ont été payées, aussi, déduction faite de celles-ci, il lui est dû 4 408,50 euros à titre de rappel de salaire pour la période de juillet 2015 à juillet 2018, outre 440,85 euros au titre des congés payés afférents.
Sur les conséquences de la requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée
Compte tenu de la requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, Mme [P] peut prétendre à une indemnité de requalification qui ne peut être inférieure au dernier salaire perçu, et, tenant compte des sommes accordées au titre de la requalification de ses contrats à temps partiel en contrat à temps plein, il convient de condamner solidairement les sociétés Voxens et MD consulting à payer à Mme [P] la somme de 1 350 euros à titre d'indemnité de requalification, sans qu'elle puisse prétendre à un préjudice supérieur compte tenu de son refus de conclure un contrat à durée indéterminée, et ce, à trois reprises.
Par ailleurs, dès lors que les contrats à durée déterminée ont été requalifiés en contrat à durée indéterminée, la rupture intervenue le 6 juillet 2018 s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse quand bien même Mme [P] a refusé à cette date la poursuite de son contrat en contrat à durée indéterminée, cette circonstance ne pouvant être prise en compte qu'au titre du préjudice subi.
Il convient en conséquence de condamner solidairement les sociétés Voxens et MD consulting à payer à Mme [P] la somme de 2 564,32 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis correspondant à deux mois de salaire sur la base d'un temps plein, outre 256,43 euros au titre des congés payés afférents.
Par ailleurs, contrairement à ce que soutient Mme [P] le salaire de référence pour calculer l'indemnité de licenciement en tenant compte de la requalification de ses contrats à temps partiel en contrat à temps plein est plus avantageux sur les trois derniers mois et s'établit à 1 223,22 euros, aussi, compte tenu de son ancienneté de six ans et dix mois, préavis compris, il convient de condamner solidairement les sociétés Voxens et MD consulting à lui payer la somme de 2 089,68 euros à titre d'indemnité légale de licenciement correspondant à (1223,22x6/4)+(1 223,22x10/12/4).
Enfin, conformément à l'article L. 1235-3, dans sa version applicable au litige, compte tenu de l'ancienneté de Mme [P], l'indemnité due est comprise entre trois et sept mois de salaire bruts, aussi, à défaut de tout élément sur sa situation professionnelle postérieurement à la rupture et du contrat à durée indéterminée qu'il lui a été proposé et qu'elle a refusé, il convient de condamner solidairement les sociétés Voxens et MD consulting à lui payer la somme de 3 850 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Sur le remboursement des indemnités Pôle emploi
Conformément à l'article L 1235-4 du code du travail, il convient d'ordonner aux sociétés Voxens et MD consulting, in solidum, de rembourser à Pôle emploi les indemnités chômage versées à Mme [P] du jour de son licenciement au jour de la présente décision, dans la limite de huit jours.
Sur la demande de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de formation
Outre que les sociétés Voxens et MD consulting justifient que Mme [P] a participé à de nombreuses actions de formation consistant à débriefer des appels pour améliorer constamment la qualité de ceux-ci, ce qui était de nature à favoriser son adaptation au poste de travail conformément à l'article L. 6313-3 du code du travail, en tout état de cause, Mme [P] ne justifie d'aucun préjudice en lien avec un manque de formation et il convient de la débouter de cette demande de dommages et intérêts.
Sur les intérêts
Les sommes allouées en première instance et en appel à caractère salarial porteront intérêts au taux légal à compter de la convocation de l'employeur en conciliation et celles à caractère indemnitaire à compter du jugement de première instance pour les dispositions confirmées et du présent arrêt pour les dispositions infirmées.
Sur les dépens et frais irrépétibles
En qualité de partie succombante, il y a lieu de condamner les sociétés Voxens et MD consulting aux entiers dépens, y compris ceux de première instance, de les débouter de leur demande formulée en application de l'article 700 du code de procédure civile et de confirmer le jugement les ayant condamnées à payer à Mme [P] la somme de 2 000 euros sur ce même fondement.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Statuant contradictoirement,
Infirme le jugement en toutes ses dispositions sauf celles relatives à l'article 700 du code de procédure civile, aux dépens, au remboursement de l'indemnité de précarité et à la requalification des contrats à temps partiel en contrat à temps plein ;
Statuant à nouveau,
Dit qu'il existe une situation de co-emploi entre la SAS Voxens et la SARL MD consulting ;
Ordonne la requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée à compter du 7 novembre 2011 ;
Dit que la rupture intervenue le 6 juillet 2018 s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Condamne solidairement la SAS Voxens et la SARL MD consulting à payer à Mme [R] [P] les sommes suivantes :
rappel de salaire au titre de la requalification des
contrats à temps partiel en contrat à temps plein : 4 408,50 euros
congés payés afférents : 440,85 euros
indemnité de requalification : 1 350,00 euros
indemnité compensatrice de préavis : 2 564,32 euros
congés payés afférents : 256,43 euros
indemnité de licenciement : 2 089,68 euros
dommages et intérêts pour licenciement sans
cause réelle et sérieuse : 3 850,00 euros
Déboute Mme [R] [P] de sa demande de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de formation ;
Dit que les sommes allouées en première instance et en appel à caractère salarial porteront intérêts au taux légal à compter de la convocation de l'employeur en conciliation et celles à caractère indemnitaire à compter du jugement de première instance pour les dispositions confirmées et du présent arrêt pour les dispositions infirmées ;
Ordonne à la SAS Voxens et à la SARL MD consulting, in solidum, de rembourser à Pôle emploi les indemnités chômage versées à Mme [R] [P] du jour de son licenciement au jour de la présente décision, dans la limite de huit jours ;
Déboute la SAS Voxens et la SARL MD consulting de leur demande formulée en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne in solidum la SAS Voxens et la SARL MD consulting aux entiers dépens.
La greffièreLa présidente