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27/04/2022 | FRANCE | N°19/04759

France | France, Cour d'appel de Rouen, Chambre sociale, 27 avril 2022, 19/04759


N° RG 19/04759 - N° Portalis DBV2-V-B7D-ILKW





COUR D'APPEL DE ROUEN



CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE

SECURITE SOCIALE





ARRET DU 27 AVRIL 2022











DÉCISION DÉFÉRÉE :



Jugement du TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE ROUEN du 22 Octobre 2019





APPELANTE :



URSSAF HAUTE NORMANDIE

61 rue Pierre Renaudel

CS 92035

76040 ROUEN CEDEX 1



représentée par Mme [L] [B] munie d'un pouvoir





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INTIMEE :



Société EIFFAGE CONSTRUCTION HAUTE-NORMANDIE

6 rue Jean Rostand

76142 PETIT QUEVILLY



représentée par Me Alexandra DABROWIECKI, avocat au barreau de LILLE substituée par Me Simon MOSQUET-LEVENEUR, avocat au barreau ...

N° RG 19/04759 - N° Portalis DBV2-V-B7D-ILKW

COUR D'APPEL DE ROUEN

CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE

SECURITE SOCIALE

ARRET DU 27 AVRIL 2022

DÉCISION DÉFÉRÉE :

Jugement du TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE ROUEN du 22 Octobre 2019

APPELANTE :

URSSAF HAUTE NORMANDIE

61 rue Pierre Renaudel

CS 92035

76040 ROUEN CEDEX 1

représentée par Mme [L] [B] munie d'un pouvoir

INTIMEE :

Société EIFFAGE CONSTRUCTION HAUTE-NORMANDIE

6 rue Jean Rostand

76142 PETIT QUEVILLY

représentée par Me Alexandra DABROWIECKI, avocat au barreau de LILLE substituée par Me Simon MOSQUET-LEVENEUR, avocat au barreau de CAEN

COMPOSITION DE LA COUR  :

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 02 Mars 2022 sans opposition des parties devant Monsieur POUPET, Président, magistrat chargé d'instruire l'affaire.

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur POUPET, Président

Madame ROGER-MINNE, Conseillère

Madame POUGET, Conseillère

GREFFIER LORS DES DEBATS :

[Y] [G]

DEBATS :

A l'audience publique du 02 Mars 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 06 avril 2022, prorogé au 13 avril 2022 puis au 27 avril 2022

ARRET :

CONTRADICTOIRE

Prononcé le 27 avril 2022, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

Signé par Madame ROGER-MINNE, Conseillère, suppléante du Président et par Mme LAKE, Greffière.

* * *

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

L'Urssaf de Haute-Normandie a procédé à un contrôle de la société Eiffage Construction Haute-Normandie et de son établissement de Petit-Quevilly pour la période allant du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016, au terme duquel elle a notifié à cette dernière plusieurs chefs de redressement.

Par jugement du 22 octobre 2019, le tribunal de grande instance de Rouen a :

- infirmé la décision de la commission de recours amiable de l'Urssaf en ce qui concerne le chef de redressement «'contribution patronale sur les attributions d'options de souscription, d'achat d'actions'»,

- annulé la mise en demeure du 21 décembre 2017 en ce qui concerne ledit chef de redressement,

- condamné l'Urssaf à payer à la société Eiffage Construction HN la somme de 6'744 euros avec intérêts au taux légal à compter du 17 mai 2018,

- maintenu le redressement pour le surplus,

- débouté la société Eiffage Construction HN du surplus de ses demandes.

L'Urssaf a relevé appel de ce jugement et, par conclusions remises le 2 décembre 2021, soutenues oralement lors de l'audience, demande à la cour de l'infirmer en ce qui concerne le redressement invalidé, de confirmer ledit redressement, de confirmer le jugement pour le surplus, de débouter la société Eiffage Construction HN de ses demandes et de condamner celle-ci aux dépens.

La société, par conclusions du 30 juin 2021 soutenues lors de l'audience, demande pour sa part à la cour de :

- confirmer le jugement en ce qui concerne le chef de redressement «'contribution patronale sur les attributions d'options de souscription, d'achat d'actions'» et la condamnation de l'Urssaf à lui payer 6'744 euros avec intérêts au taux légal à compter du 17 mai 2018,

- l'infirmer pour le surplus, annuler la mise en demeure du 21 décembre 2017 en ce qui concerne le chef de redressement relatif aux frais professionnels non justifiés, condamner l'Urssaf à lui rembourser les sommes correspondantes,

- à titre subsidiaire, condamner l'Urssaf à lui rembourser la somme de 2124 euros relative à la contribution patronale indûment versée au titre des stock-options, avec intérêts au taux légal à compter de la demande de remboursement adressée à l'Urssaf,

- condamner cette dernière à lui verser 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il est renvoyé aux conclusions des parties pour le détail de leur argumentation.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le chef de redressement «'contribution patronale sur les attributions d'options de souscription ou d'achat d'actions'»

L'article L 137-13 du code de la sécurité sociale, dans ses rédactions en vigueur lors de la période sur laquelle a porté le contrôle, dispose notamment que :

- Il est institué, au profit de la Caisse nationale des allocations familiales, une contribution due par les employeurs :

* sur les options consenties dans les conditions prévues aux articles L 225-177 à L'225-186 du code de commerce,

* sur les actions attribuées dans les conditions prévues aux articles L 225-197-1 à L'225-197-6 du même code ;

- en cas d'options de souscription ou d'achat d'actions, cette contribution s'applique, au choix de l'employeur, sur une assiette égale soit à la juste valeur des options telle qu'elle est estimée pour l'établissement des comptes consolidés pour les sociétés appliquant les normes comptables internationales adoptées par le règlement (CE) n°'1606/2002 du Parlement européen et du Conseil du 19 juillet 2002 sur l'application des normes comptables internationales, soit à 25 % de la valeur des actions sur lesquelles portent ces options, à la date de décision d'attribution ; ce choix est exercé par l'employeur pour la durée de l'exercice pour l'ensemble des options de souscription ou d'achat d'actions qu'il attribue ; il est irrévocable durant cette période.

En l'espèce, la société a choisi comme assiette des contributions la juste valeur susvisée.

Le règlement (CE) n° 1606/2002 du Parlement européen et du Conseil du 19 juillet 2002 sur l'application des normes comptables internationales, auquel renvoie l'article L'137-13 précité, a rendu obligatoire, pour les entreprises soumises à l'obligation de présenter des comptes consolidés pour elles-mêmes et leurs filiales, les normes internationales d'information financière (International Financial Reporting Standards ou IFRS).

Ce règlement a été complété, notamment, par le règlement (CE) n° 211/2005 de la commission du 4 février 2005, composé d'une Norme et de trois annexes.

Il résulte des articles 11, 16 et 17 de la Norme que la juste valeur des actions ou options sur action est déterminée à la date de leur attribution, en tenant compte des caractéristiques et conditions spécifiques auxquelles elles ont été attribuées, sous réserve des dispositions des articles 19 à 22.

L'article 19 ainsi visé apporte la précision suivante :

«'L'attribution d'instruments de capitaux propres peut être subordonnée à la satisfaction de conditions d'acquisition des droits spécifiées. Par exemple, l'attribution d'actions ou

d'options sur action à un membre du personnel est habituellement subordonnée au fait que ce membre reste au service de l'entité pendant une période déterminée.

Il peut exister certaines conditions de performance à remplir, par exemple le fait pour l'entité de réaliser une croissance bénéficiaire prédéterminée, ou une hausse prédéterminée du prix de l'action.

Les conditions d'acquisition autres que des conditions de marché ne doivent pas être prises en considération lors de l'estimation de la juste valeur des actions ou des options sur action à la date d'évaluation'».

Il en résulte qu'il ne peut être tenu compte, ab initio, de ce que des actions, probablement, ne seront finalement pas attribuées ou achetées, notamment parce que la condition de présence du salarié dans la société au moment de la levée de l'option ne sera pas remplie, pour une raison ou une autre (départ à la retraite, démission, licenciement ...).

Or, il n'est pas contesté, au cas présent, que la société a déterminé l'assiette de sa contribution en appliquant au nombre d'options distribuées le «'taux de départ'» qui lui est propre (donnée statistique), ce qui conduit à une sous-estimation de l'action (9,64'€ au lieu de 11,35 € pour 2014 ; 9,44 € au lieu de 11,11 € pour 2015), de sorte que le redressement est justifié et que le jugement doit être infirmé.

Sur la demande subsidiaire de remboursement de la contribution patronale indûment versée au titre des stock-options

L'article L 137-13 susvisé dispose en son paragraphe II que la contribution instaurée est exigible le mois suivant la date de la décision d'attribution des options ou des actions visées au I.

Dans une décision n° 2017-627/628 QPC du 28 avril 2017, le Conseil

constitutionnel a décidé que les mots « ou des actions » figurant dans cette phrase étaient conformes à la Constitution, sous une réserve formulée en ces termes : « les dispositions contestées ne sauraient faire obstacle à la restitution de cette contribution lorsque les conditions auxquelles l'attribution des actions gratuites était subordonnée ne sont pas satisfaites'».

La société se prévaut de cette décision pour demander la condamnation de l'Urssaf à lui rembourser la différence entre la contribution calculée conformément aux principes exposés ci-dessus, autrement dit sur l'estimation de l'avantage a priori consenti aux bénéficiaires de l'attribution d'options, et cette contribution corrigée en fonction de la non réalisation de la condition tenant à la présence persistante des salariés dans l'entreprise à la date de levée de l'option et donc de l'avantage effectivement consenti en définitive aux salariés.

L'Urssaf s'oppose à cette demande en faisant valoir que la décision du Conseil constitutionnel ne concerne que l'attribution d'actions gratuites.

Toutefois, dès lors que cette décision est fondée sur le principe que le législateur «'ne peut, sans créer une rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques, imposer l'employeur à raison de rémunérations non effectivement versées », elle doit trouver à s'appliquer aux cotisations payées sur l'octroi d'options d'attribution ou d'achat d'actions finalement non levées.

L'Urssaf ne discute pas le quantum de la demande de remboursement, assortie de pièces justificatives, à laquelle il y a lieu par conséquent de faire droit.

Sur le chef de redressement relatif aux frais professionnels non justifiés

C'est par une motivation n'appelant pas de critiques et que la cour adopte, rappelant la différence entre avantages en nature et frais professionnels que la société ne peut raisonnablement ne pas connaître ni prétendre ne pas comprendre, que le tribunal a rejeté la contestation de cette dernière et validé le chef de redressement litigieux, de sorte que le jugement doit être confirmé sur ce point.

Sur les autres demandes

La solution du litige conduit à laisser à chacune des parties la charge de ses dépens et autres frais.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

confirme le jugement entrepris en ce qu'il a maintenu le redressement du chef de frais professionnels non justifiés,

l'infirme pour le surplus et, statuant à nouveau,

déboute la société de sa contestation du redressement du chef de la contribution patronale sur les attributions d'options de souscription ou d'achat d'actions,

condamne en revanche l'Urssaf de Haute-Normandie à rembourser à la société Eiffage Construction HN la somme de 2124 euros sur cette contribution avec intérêts au taux légal à compter de la demande de remboursement adressée à l'Urssaf,

dit que chacune des parties conservera la charge des dépens et autres frais par elle exposés en première instance comme en cause d'appel.

La Greffière La Conseillère


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19/04759
Date de la décision : 27/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-27;19.04759 ?
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