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16/12/2011 | FRANCE | N°11/02568

France | France, Cour d'appel de Rouen, Chambre des tutelles, 16 décembre 2011, 11/02568


R. G : 11/ 02568 COUR D'APPEL DE ROUEN
CHAMBRE DES TUTELLES
Protection juridique des mineurs
ARRÊT DU 16 DÉCEMBRE 2011

DÉCISION DÉFÉRÉE :
Décision rendue par le juge aux affaires familiales délégué aux tutelles mineurs du Tribunal de grande instance de ROUEN en date du 26 Avril 2011 inscrit sous le no RG : 08- A-00360
Concernant le MINEUR PROTÉGÉ :
Monsieur Avtandili X... né le 07 Septembre 1994 à ODJIO DISTRICT AKHMETA-GEORGIE-Chez son tuteur M. le responsable de L'ASE Hôtel du département Cours Clémenceau 76100 ROUEN
comparant en personne,

assisté de Me Marie-hélène MERIGOT, avocat au barreau de ROUEN

Dans la procédure d'appel...

R. G : 11/ 02568 COUR D'APPEL DE ROUEN
CHAMBRE DES TUTELLES
Protection juridique des mineurs
ARRÊT DU 16 DÉCEMBRE 2011

DÉCISION DÉFÉRÉE :
Décision rendue par le juge aux affaires familiales délégué aux tutelles mineurs du Tribunal de grande instance de ROUEN en date du 26 Avril 2011 inscrit sous le no RG : 08- A-00360
Concernant le MINEUR PROTÉGÉ :
Monsieur Avtandili X... né le 07 Septembre 1994 à ODJIO DISTRICT AKHMETA-GEORGIE-Chez son tuteur M. le responsable de L'ASE Hôtel du département Cours Clémenceau 76100 ROUEN
comparant en personne, assisté de Me Marie-hélène MERIGOT, avocat au barreau de ROUEN

Dans la procédure d'appel, ont été également convoqués par diligences du greffe en date du 22 juin 2011
M. LE PRESIDENT DU CONSEIL GENERAL SEINE-MARITIME Hôtel du Département Quai Jean Moulin-BP. 3049 76010 ROUEN CEDEX
APPELANT-représenté par Mme Sabrina DORMOY assistée par Me Arnaud DE SAINT REMY, avocat au barreau de ROUEN substitué par Me Marielle MALEYSSON, avocat au barreau de ROUEN,
Madame Maradi X......... 35300 FOUGERES
comparant en personne
Monsieur Gogi X......... 35300 FOUGERES
comparant en personne

Madame Lali Y... épouse Z...... 76140 LE PETIT QUEVILLY
présente à l'audience en sa qualité d'expert interprète en langue géorgienne

COMPOSITION DE LA COUR :
Lors des débats et du délibéré :
Madame MANTION, Conseiller, présidant l'audience, entendue en son rapport oral de la procédure avant débats et plaidoiries Madame HOLMAN, Conseiller, assesseur Monsieur CHALACHIN, Conseiller, assesseur

EN PRÉSENCE DU MINISTÈRE PUBLIC :
auquel le dossier a été communiqué avant ouverture des débats Représenté par Madame le Substitut Général VANNIER entendue en ses réquisitions orales

GREFFIER LORS DES DÉBATS :
Séverine BOURDON greffier placé
DÉBATS :
En chambre du conseil le 18 Novembre 2011,
L'affaire a été mise en délibéré au 16 Décembre 2011.

ARRÊT :
CONTRADICTOIRE
Prononcé le 16 Décembre 2011 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, signé par Madame le Conseiller MANTION et par Mme BOURDON, greffier placé, présente à cette audience.
Le 25 septembre 2008, le conseil général de Seine-Maritime informait le juge des tutelles de la situation du mineur X... Avtandili né le 7 septembre 1994 à ODJO district AKHMETA en GEORGIE, mineur étranger isolé accueilli provisoirement depuis le 22 septembre 2008, dans le cadre d'un accueil d'urgence au foyer du Val d'Aubette (76).
Avtandili arrivé en France avec sa mère et son frère a été séparé fortuitement de sa famille à la gare saint Lazare où il était pris en charge par une personne parlant sa langue, M. A... qui est apparu comme une personne ressource pour ce jeune qui s'est parfaitement intégré en classe de 5ème au collège Jean-Jacques ROUSSEAU de DARNETAL, progressant rapidement dans l'apprentissage de la langue française.
Par jugement en date du 18 novembre 2009, le juge des tutelles de ROUEN à ouvert la tutelle du mineur et constatant sa vacance l'a déférée au conseil général de Seine-Maritime, service de l'Aide Sociale à l'Enfance.
Le 28 septembre 2010, le conseil général a informé le juge des tutelles de ce que le jeune X... Avtandili avait retrouvé ses parents, Mme X... étant domiciliée au centre d'accueil des demandeurs d'asile (...) de FOUGERES.
Depuis, X... Avtandili pouvait rencontrer sa mère et son jeune frère au centre d'accueil des demandeurs d'asile (...) à FOUGERES où M. X... Gogi, le père d'Avtandili les a rejoints le 14 janvier 2011.
Entendue le 22 février 2011 sur commission rogatoire par le juge des tutelles de RENNES, la mère faisait part d'un recours contre une décision de rejet de sa demande d'asile et de son souhait que son fils reste au foyer du Val d'Aubette, conformément au voeu de ce dernier.
Le père du mineur formait une demande d'asile, le recours de la mère contre la décision de rejet n'ayant pas abouti, le couple et leurs deux jeunes enfants dont Saba né le 6 juin 2011, demeuraient ensemble au foyer du..., des démarches ayant été entreprises auprès de la préfecture pour obtenir la régularisation du séjour de la famillle qui ayant pris connaissance du dispositif d'aide au retour volontaire, a signifié ne pas vouloir reprendre contact avec l'OFII pour un retour en Géorgie.
Dans ces conditions le juge des tutelles a par jugement du 26 avril 2011 rejeté la demande de mainlevée de la tutelle formé par le président du conseil général de Seine-Maritime.
Le jugement a été frappé d'un appel formé par le président du Conseil Général de Seine-Maritime par déclaration reçue au greffe le 10 mai 2011.
Les parties ont été régulièrement convoquées et ont comparu à l'audience du 23 septembre 2011. L'affaire a été renvoyée à l'audience du 18 novembre 2011, pour requérir l'assistance d'un interprète en langue géorgienne.
A l'audience du 18 novembre 2011, M. Gogi X... a indiqué qu'il réside dans un appartement mis à disposition par le... comportant une pièce principale et deux chambres qu'il occupe avec son épouse et leur fils Archili et leur dernier enfant Saba né le 6 juin 2011. Il reste la plupart du temps au foyer car il n'a pas l'autorisation de travailler. Il souhaite le bien de son fils Advantili qui ne vient pas souvent au foyer, ses relations avec son fils étant conflictuelles. Il dit que son fils ne prend pas en compte ses conseils et qu'il ne l'écoute pas. Il précise qu'avant son arrivée en France en 2009, il a vécu séparé de son épouse depuis 2005.
Mme X... a indiqué à la cour qu'elle vient d'avoir connaissance du rejet de sa demande de droit d'asile et que la famille est maintenue provisoirement au... avec une aide financière pour les enfants. Elle a déposé une demande en vue de la régularisation de son séjour en France auprès de la préfecture de l'Ile et Vilaine. Elle suit des cours de français une fois par semaine. S'agissant de son fils Avtandili, elle souhaite ce qui est le mieux pour lui et confirme les relations difficiles entretenues par Advantili et son père lors des visites au foyer du... où l'enfant paraît renfermé et triste, sa présence étant source de conflits entre elle même et son mari. Elle précise que M. X... Gogi bénéficie d'un suivi pour une hépatite C et d'un suivi psychiatrique. Elle pense qu'Advantili est bien intégré au foyer du Val d'Aubette et remercie les éducateurs qui l'encadrent.
Advantili, a indiqué à la cour qu'il poursuit sa scolarité au lycée des métiers de GRIEU en seconde professionnelle et qu'il souhaite poursuivre sa scolarité dans cet établissement sachant qu'il s'est fait des amis notamment dans le cadre d'activités sportives. Il dit avoir vu ses parents au... de Fougères lors des vacances mais que cela ne se passe pas bien. Il estime que depuis longtemps il a dû se débrouiller sans leur aide et qu'ils n'étaient pas là quand il avait besoin d'eux. Il précise que son père était séparé de sa mère lorsqu'il vivait en Géorgie et qu'il les a quittés quand il était encore très jeune. Il semble imputer à ce dernier la situation qui a conduit la famille à quitter la Géorgie. Il dit que sa mère avait peur et qu'elle est partie en Ukraine avant de venir en France.
Par conclusions déposées le 21 septembre 2011, et développées oralement devant la cour, le conseil général fait valoir que la décision du juge des tutelles est irrégulière au fond en ce qu'il n'existe plus de vacance de l'autorité parentale qui justifierait le maintien de la tutelle confiée à l'Aide Sociale à l'Enfance.
En la forme, dans le cas d'une administration légale pure et simple, la tutelle n'est possible que pour une cause grave et suppose la réunion d'un conseil de famille, chargé de désigner le tuteur, cette formalité n'ayant pas été respectée.
Dans tous les cas la décision du juge des tutelles doit donc être réformée et l'éventuelle situation de danger du mineur justifierait la saisine éventuelle du juge des enfants de RENNES.
Ainsi, le conseil général de Seine-Maritime demande à la cour de :- constater que la tutelle n'est pas vacante ;- constater qu'aucun conseil de famille n'a été réuni ;- ordonner la mainlevée de la tutelle départementale prévue par jugement du 18 novembre 2009.

Le conseil du mineur a fait valoir que Advantili est accueilli au Val d'Aubette depuis le 22 septembre 2008 et confié à l'Aide Sociale à l'Enfance dans le cadre de la tutelle ouverte le 18 novembre 2009, la demande du conseil général de " démissionner " de la tutelle étant contraire à sa mission de protection de l'enfance.
S'agissant des parents titulaires de l'autorité parentale, ils sont en situation irrégulière en France et leur demande de droit d'asile leur a été refusée, de telle sorte qu'ils ne sont pas en mesure d'exercer leur autorité parentale et ce d'autant qu'ils sont maintenus provisoirement au... et sans ressources autres que les aides versées pour leurs deux plus jeunes enfants et sans possibilité d'accéder à un emploi.
Ni l'enfant, ni les parents ne souhaitent le retour d'Avtandili qui ne saurait lui être imposé eu égard aux difficultés relationnelles existant particulièrement avec M. X..., une fugue du mineur étant à craindre.
Par ailleurs, le Conseil Général de Seine-Maritime qui a été interrogé par le juge des tutelles sur les autres possibilités de prises en charge, notamment au titre d'une mesure administrative, a indiqué dans un courrier du 22 avril 2011 au juge des tutelles : " je vous informe ne pas engager, si la tutelle est levée, la prise en charge du jeune Advantili au titre d'un accueil provisoire jusqu'à ses dix huit ans ".
Dans ces conditions, le conseil du mineur demande à la cour de confirmer purement et simplement le jugement entrepris.
Le ministère public a requis la confirmation du jugement au motif qu'il existe un conflit entre les parents et le mineur et que l'intérêt de ce dernier qui doit seul être pris en compte, justifie le maintien de la mesure de tutelle exercée par le département de Seine-Maritime.
SUR CE :
Par jugement devenu définitif en date du 18 novembre 2009, le juge des tutelles de ROUEN a constaté qu'aucun élément ne permettait alors de s'assurer de la présence en France des parents du jeune X... Avtandili, ses derniers n'étant pas en mesure d'exercer leur autorité parentale. Il a donc ouvert la tutelle du mineur et constatant sa vacance, l'a déférée au Président du Conseil Général de Seine-Maritime, à charge pour lui de la déléguer à l'Aide Sociale à l'Enfance.
Or, les parents d'Avtandili ayant été retrouvés et réunis au... de Fougères, le Conseil Général de Seine-Maritime sollicite de la cour qu'elle constate que les conditions de la vacance de la tutelle ne sont plus remplies et qu'elle en ordonne la mainlevée.
Il se fonde en cela sur les textes relatifs à l'ouverture de la tutelle qui ne sont pas en cause à ce stade de la procédure, s'agissant notamment de la réunion d'un conseil de famille exigée par l'article 391 du code civil.
En effet la question qui se pose est celle de la mainlevée de la tutelle qui sous réserve des dispositions de l'article 392 du code civil concernant l'enfant qui vient à être reconnu après l'ouverture de la tutelle, prend fin dans les autres cas visés à l'article 393 du code civil à l'émancipation du mineur ou à sa majorité. Elle prend fin également en cas de jugement de mainlevée passé en force de chose jugée ou en cas de décès de l'intéressé, aucune condition n'étant posée pour la mainlevée qui ne saurait dès lors intervenir si elle n'apparaît pas conforme à l'intérêt de l'enfant.
En l'espèce, il résulte des éléments du dossier et des auditions que les parents d'Avtandili X..., se trouvent actuellement maintenus à titre précaire dans un appartement comportant deux chambres pour quatre personnes dont deux adultes et deux enfants et bénéficient de 450 € d'aide mensuelle.
Leur situation administrative n'étant pas à ce jour régularisée s'agissant de leur séjour en France, ils ne peuvent entreprendre aucune démarche pour améliorer leur situation, l'accès à un emploi leur étant interdit.
Par ailleurs, l'accueil d'Avtandili par ses parents a révélé des difficultés relationnelles particulièrement à l'égard de M. Gogi X... qui est apparu très marqué à l'audience de la cour, avouant son impuissance à se faire entendre de son fils qui revendique une autonomie par rapport à ses parents et une volonté de s'en sortir sans eux " parce qu'ils n'étaient pas là quand il avait besoin d'eux ".
Or, le Conseil Général de Seine-Maritime appelant et tuteur d ‘ Avtandili et à ce titre garant de son intérêt ne pouvait se faire juge de la situation du mineur pour l'exclure à priori de tout dispositif de prise en charge au titre de l'enfance en danger alors que seul le juge des enfants pouvait se prononcer de manière impartiale sur ce point, l'absence de saisine de ce magistrat n'étant pas conforme à la mission du tuteur de protection de la personne du mineur qui lui incombe jusqu'à la mainlevée de la tutelle.
Ainsi, il ressort de ce qui précède que l'intérêt du mineur X... Avtandili exclut de prononcer la mainlevée de la mesure de tutelle qui prendra fin normalement à sa majorité.
En conséquence, il y a lieu de débouter le Conseil Général de Seine-Maritime de son appel et de confirmer le jugement du 26 avril 2011 en toutes ses dispositions.

PAR CES MOTIFS
La cour, statuant en chambre du conseil, par arrêt rendu contradictoirement en dernier ressort,
En la forme,
Déclare l'appel recevable,
Au fond,
Déboute le Conseil Général de Seine-Maritime de toutes ses demandes,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris,
Laisse les dépens à la charge de l'appelant.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Formation : Chambre des tutelles
Numéro d'arrêt : 11/02568
Date de la décision : 16/12/2011
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.rouen;arret;2011-12-16;11.02568 ?
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