COUR D'APPEL
DE RIOM
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
Du 23 juillet 2024
N° RG 23/00244 - N° Portalis DBVU-V-B7H-F6OY
-LB- Arrêt n° 346
G.A.E.C. [V], [K] [V] / [M] [G] épouse [P]
Jugement au fond, origine Tribunal paritaire des baux ruraux de SAINT-FLOUR, décision attaquée en date du 12 Janvier 2023, enregistrée sous le n° 51-21-000008
Arrêt rendu le MARDI VINGT TROIS JUILLET DEUX MILLE VINGT QUATRE
COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :
M. Philippe VALLEIX, Président
M. Daniel ACQUARONE, Conseiller
Mme Laurence BEDOS, Conseiller
En présence de :
Mme Céline DHOME, greffier lors de l'appel des causes et Mme Marlène BERTHET, greffier du prononcé
ENTRE :
G.A.E.C. [V]
[Adresse 9]
[Adresse 9]
et
M. [K] [V]
[Adresse 9]
[Adresse 9]
assistés de Maître Frédéric DELAHAYE, suppléé par Maître Yann LEMASSON, avocat au barreau de CLERMONT- FERRAND
APPELANTS
ET :
Mme [M] [G] épouse [P]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
assistée de Maître Jean Antoine MOINS de la SCP MOINS, avocat au barreau d'AURILLAC
INTIMEE
DÉBATS :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 13 mai 2024, en application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. VALLEIX et Mme BEDOS, rapporteurs.
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 23 juillet 2024 après prorogé du délibéré initialement prévu le 02 juillet 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
Signé par M. VALLEIX, président et par Mme BERTHET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DES FAITS, DE LA PROCÉDURE ET DES PRÉTENTIONS DES PARTIES
Mme [M] [G] épouse [P] est propriétaire des parcelles agricoles suivantes :
- parcelle cadastrée section [Cadastre 16] (ancienne parcelle [Cadastre 15]), lieu-dit [Localité 6],
- parcelle cadastrée section [Cadastre 18] lieu-dit [Localité 13],
- parcelle cadastrée section [Cadastre 17] lieu-dit [Localité 11],
situées sur le territoire de la commune de [Localité 7],
- parcelle cadastrée section [Cadastre 14] lieu-dit [Localité 10], située sur le territoire de la commune [Localité 8].
Mme [M] [P], qui détenait sur ces biens des droits indivis recueillis dans la succession de sa mère, [J] [Z] veuve [G], décédée le 26 septembre 2009, en est devenue pleinement propriétaire en vertu de l'acte authentique en date du 29 juillet 2014 aux termes duquel son oncle, [N] [Z], lui a cédé les droits indivis qu'il détenait lui-même sur les parcelles.
Le 18 juin 2021, maître [I], commissaire de justice, a adressé à Mme [P] un courrier dénonçant l'installation par ses soins d'une clôture gênant l'accès à la parcelle numéro [Cadastre 18], exploitée selon lui par M. [K] [V] en vertu d'un bail rural consenti par [N] [Z].
Par courrier en réponse en date du 1er juillet 2021, le conseil de Mme [M] [P] a contesté l'existence d'un bail rural au profit de M. [K] [V] sur la parcelle numéro [Cadastre 18], lui faisant défense de l'occuper ou de la traverser.
Le 29 juillet 2021, Mme [M] [P] a fait délivrer à M. [K] [V] et au GAEC [V] une sommation interpellative réclamant qu'il soit justifié par l'un et l'autre du titre en vertu duquel ils occupaient les parcelles cadastrées section [Cadastre 15] et [Cadastre 18] et de libérer ces parcelles.
En réponse, M. [K] [V] a indiqué :
« Depuis 2011, nous exploitons ces parcelles (plus exactement s'agissant des bêtes depuis 2012 puisque Monsieur [Z] a vendu ses bêtes courant 2011). Jusqu'en 2020, il n'y a jamais eu de bovins.
Depuis 2012, les loyers ont été réglés par chèque à Monsieur [Z] et depuis 2019, ils ont été payés à Monsieur [Z] par virement. Cette année (pour l 'année 2020), la totalité a été payée comme de coutume mais déduction faite du dégrèvement de la taxe foncière ».
Par requête en date du 9 septembre 2021, Mme [M] [P] a saisi le tribunal paritaire des baux ruraux de Saint-Flour pour obtenir notamment l'expulsion de M. [K] [V] et du GAEC [V] des parcelles litigieuses.
Par jugement du 15 novembre 2022, le tribunal paritaire des baux ruraux d'Aurillac a statué en ces termes :
-Ordonne l'expulsion de M. [K] [V] et du GAEC [V] des parcelles propriétés de Mme [M] [P] cadastrées section [Cadastre 16], anciennement [Cadastre 15], lieu-dit [Localité 6], [Cadastre 18] lieu-dit [Localité 13], commune de [Localité 7], [Cadastre 14] lieu-dit [Localité 10], commune du [Localité 8], [Cadastre 17] lieu-dit [Localité 11], commune de [Localité 7] ;
-Prononce une astreinte de 50 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai d'un mois à compter de la signification de la présente décision ;
-Rappelle que l'exécution provisoire est de droit ;
-Condamne M. [K] [V] et le GAEC [V] à verser à Mme [M] [P] la somme de 1000 euros à titre de dommages et intérêts ;
-Condamne M. [K] [V] et le GAEC [V] à verser à Mme [M] [P] la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
-Constate que Mme [M] [P] ne formule pas de demande de condamnation in solidum ;
-Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;
-Condamne M. [K] [V] et le GAEC [V] aux entiers dépens de l'instance, avec distraction au profit de maître Moins, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Par jugement du 9 février 2024, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Saint-Flour a liquidé l'astreinte prononcée par le tribunal paritaire des baux ruraux à la somme de 8100 euros, pour la période du 9 mars au 18 août 2023, date à laquelle M. [V] a libéré les lieux de toute occupation.
M. [K] [V] et le GAEC [V] ont relevé appel du jugement du 15 novembre 2022 par acte enregistré au greffe le 6 février 2023.
Vu les conclusions en date du 3 mai 2024 aux termes desquelles M. [K] [V] et le GAEC [V] présentent à la cour les demandes suivantes :
« Vu les dispositions de l'article L. 411-1 du Code rural et de la pêche maritime,
Accueillir l'appel formé par Monsieur [K] [V] et le GAEC [V] suivant déclaration enregistrée le 10 février 2023 dirigé à l'encontre du jugement rendu par le Tribunal Paritaire des Baux Ruraux de SAINT FLOUR en date du 12 janvier 2023 et les déclarer parfaitement fondés.
Infirmer la décision entreprise en ce qu'elle a :
- Ordonné l'expulsion de Monsieur [K] [V] et du GAEC [V] des parcelles propriété de Madame [M] [P], cadastrées section [Cadastre 16], anciennement [Cadastre 15], lieudit « [Localité 6] », [Cadastre 18], lieudit « [Localité 13] », commune de [Localité 7], [Cadastre 14], lieudit « [Localité 10] », commune du [Localité 8], [Cadastre 17], lieudit « [Localité 11] », commune de [Localité 7] ;
- Prononcé une astreinte de 50 € par jour de retard à l'expiration d'un délai d'un mois à compter de la signification du jugement ;
- Rappelé que l'exécution provisoire est de plein droit ;
- Condamné Monsieur [K] [V] et le GAEC [V] à verser à Madame [M] [P] la somme de 1.000 € à titre de dommages et intérêts ;
- Condamné Monsieur [K] [V] et le GAEC [V] à verser à Madame [M] [P] la somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
- Débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;
- Condamné Monsieur [K] [V] et du GAEC [V] aux entiers dépens de l'instance avec distraction au profit de Maître MOINS, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.
Statuant à nouveau,
Déclarer Monsieur [K] [V] titulaire d'un bail à ferme conclu en 1997 portant sur les parcelles cadastrées section [Cadastre 14], lieudit « [Localité 10] », située commune de [Localité 8] et [Cadastre 17], lieudit « [Localité 11] », située commune de [Localité 7] et d'un bail à ferme conclu en 2013 portant sur les parcelles cadastrées section [Cadastre 16], anciennement [Cadastre 15], lieudit « [Localité 6] » et [Cadastre 18], lieudit « [Localité 13] », situées commune de [Localité 7].
Rejeter l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions de Madame [M] [P] comme étant mal fondées.
Condamner Madame [M] [P] ainsi que tous occupants de son chef à libérer les parcelles cadastrées section [Cadastre 14], lieudit « [Localité 10] », située commune de [Localité 8], [Cadastre 17], lieudit « [Localité 11] », [Cadastre 16], lieudit « [Localité 6] », et [Cadastre 18], lieudit « [Localité 13] », situées commune de [Localité 7] et ce sous astreinte de 150 € par jour de retard à l'expiration d'un délai d'un mois à compter de la signification de l'arrêt à intervenir.
Autoriser Monsieur [K] [V] à ne pas payer le fermage à compter du 18 août 2023 et ce jusqu'à la date à laquelle la restitution des parcelles cadastrées section [Cadastre 14], lieudit « [Localité 10] », située commune de [Localité 8], [Cadastre 17], lieudit « [Localité 11] », [Cadastre 16], lieudit « [Localité 6] », et [Cadastre 18], lieudit « [Localité 13] », situées commune de [Localité 7], interviendra à son profit.
En tout état de cause,
Condamner Madame [M] [P] à payer et porter au profit de Monsieur [K] [V] et du GAEC [V] une somme de 5.000 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, outre aux entiers dépens.»
Vu les conclusions en date du 16 avril 2024 aux termes desquelles Mme [M] [P] présente à la cour les demandes suivantes :
« Vu les articles 815-3, 883 du Code Civil, L 411-1 du Code Rural.
Rejetant toutes fins, moyens et conclusions contraires,
DECLARER Monsieur [K] [V] et le GAEC [V] irrecevables et mal fondés en toutes leurs demandes et les en DEBOUTER.
En conséquence, CONFIRMER en toutes ses dispositions le jugement rendu par le Tribunal Paritaire des Baux Ruraux de Saint-Flour le 15 novembre 2022.
ÉCARTER toutes conclusions contraires.
CONDAMNER Monsieur [K] [V] et le GAEC [V], solidairement, à payer à la concluante la somme de 3.000 € en application de Particle 700 du Code de Procédure Civile.
CONDAMNER les mêmes aux entiers dépens. »
En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions susvisées pour l'exposé complet des prétentions respectives des parties et de leurs moyens.
MOTIFS DE LA DÉCISION
-Sur la preuve de l'existence d'un bail rural sur les parcelles litigieuses :
En application de l'article L. 411-1du code rural et de la pêche maritime, toute mise à disposition à titre onéreux d'un immeuble à usage agricole en vue de l'exploiter pour y exercer une activité agricole définie à l'article L. 311-1 est régie par les dispositions du titre du code relatif au statut du fermage, sous les réserves prévues à l'article L. 411-2 qui énumèrent les exceptions. Cette disposition est d'ordre public.
Si aux termes de l'article L. 411-4 alinéa 1 du code rural, les contrats de baux ruraux doivent être écrits, le bail verbal est valable, comme cela résulte de l'alinéa 2 du même article qui précise que « A défaut d'écrit enregistré avant le 13 juillet 1946, les baux conclus verbalement avant ou après cette date sont censés faits pour neuf ans aux clauses et conditions fixées par le contrat type établi par la commission consultative des baux ruraux. ».
En application de l'article L. 411-1 du code rural, la preuve de l'existence du contrat de bail, qui pèse sur celui qui revendique la qualité de preneur des terres, peut être apportée par tous moyens.
En l'espèce, les appelants exposent que dès l'année 1997, [N] [Z] a permis à M. [K] [V] d'exploiter les parcelles cadastrées section [Cadastre 17] sur la commune de [Localité 7] et [Cadastre 14] sur la commune de [Localité 8] (15), puis qu'à partir de 2007, en complément des parcelles déjà exploitées, les parcelles cadastrées section [Cadastre 5], [Cadastre 2], [Cadastre 3] et [Cadastre 4], sises commune de [Localité 8], dénommées entre les parties « [Localité 12] » ont également été mises à sa disposition, et qu'enfin [N] [Z] lui a consenti en 2013 la mise à disposition des parcelles cadastrées section [Cadastre 16] et [Cadastre 18] situées commune de [Localité 7]. Ils soutiennent que la mise à disposition de toutes ces parcelles est intervenue moyennant une contrepartie onéreuse.
Pour démontrer que M. [V] est titulaire d'un bail rural sur les parcelles litigieuses, appartenant désormais à Mme [M] [P], les appelants produisent les éléments suivants :
- Cinq attestations confirmant que M. [V], associé du GAEC [V], exploite, depuis 1997 les parcelles section [Cadastre 17] sur la commune de [Localité 7] et [Cadastre 14] sur la commune de [Localité 8], depuis 2007 les parcelles correspondant à la « [Localité 12] » et depuis 2013, suite à la cessation d'activité de [N] [Z] en 2012, les parcelles cadastrées section [Cadastre 16] et [Cadastre 18]. Deux des témoins font état de la relation très proche qu'entretenaient [N] [Z] et [K] [V] ;
-Des relevés d'exploitation auprès de la mutualité sociale agricole (MSA) pour les parcelles cadastrées section [Cadastre 17] sur la commune de [Localité 7] et [Cadastre 14] sur la commune de [Localité 8], établis au nom de M. [V] pour les années 1997 à 2000, puis au nom du GAEC [V] pour les années 2021 et 2022 ;
-Une convention de mise à disposition en date du 2 juillet 2007 conclue entre M. [K] [V] et l'EARL [V] ((ultérieurement transformée en GAEC) concernant les parcelles cadastrées section [Cadastre 17] sur la commune de [Localité 7] et [Cadastre 14] sur la commune de [Localité 8] ;
-Une attestation d'affiliation auprès de la MSA dont il ressort que M. [K] [V] est chef d'exploitation agricole depuis le 25 mars 1992 et membre de l'EARL [V] depuis le 2 juillet 2007.
Les appelants établissent suffisamment par la communication de ces pièces la réalité de la mise à disposition des parcelles litigieuses au profit de M. [V] en vue de leur exploitation agricole.
Par ailleurs, M. [V] verse aux débats des justificatifs des paiements suivants effectués au profit de [N] [Z] :
- février 1997 : 13 510 francs
- avril 1998 : 6400 francs
- octobre 1998 : 5300 francs
- avril 2000 : 10 300 francs
-juin 2010 : 3 000 euros
- juin 2011 : 2500 euros
- décembre 2011 : 2415 euros
- juin 2012 : 3477 euros
- août 2013 : 3200 euros
- novembre 2013 : 3200 euros
- juin 2014 : 4000 euros
- novembre 2014 : 4000 euros
- mai 2015 : 3 658,78 euros
- octobre 2015 : 3800 euros.
Mme [P] souligne d'une part que ces versements sont irréguliers, ce qui est toutefois indifférent à la recherche de la preuve de l'existence d'un bail rural, d'autre part que rien ne permet d'affirmer que ces paiements soient intervenus en contrepartie de la mise à disposition des parcelles dont l'occupation est contestée, alors que par ailleurs, M. [V] est effectivement locataire des parcelles situées sur la commune de [Localité 8], cadastrées section [Cadastre 5], [Cadastre 2], [Cadastre 3],[Cadastre 4]. Elle relève encore que M. [V] était locataire depuis 2006 d'un bâtiment agricole appartenant à [N] [Z] et que celui-ci lui a finalement vendue le 4 juillet 2008.
Toutefois, ainsi que le font valoir M. [V] et le GAEC, l'évolution à la hausse des règlements intervenus entre 1997 et 2015 est cohérente avec l'historique des mises à disposition par [N] [Z] telles qu'elles sont décrites par les appelants : en effet, en 2010, M. [K] [V] s'est acquitté de la somme de 3000 euros, puis de la somme totale de 4915 euros en 2011 et de celle de 3477 euros en 2012 et il apparaît que le montant annuel versé a à nouveau nettement augmenté ensuite puisqu'il s'est acquitté de la somme totale de 6400 euros en 2013, puis de celle de 8000 euros en 2014 et enfin de la somme de 7458 euros en 2015.
M. [V] démontre par ailleurs par l'avis d'un expert foncier et agricole émis le 17 avril 2024
que la valeur locative des seuls fonds correspondant à la « [Localité 12] » ne peut en aucun cas justifier le versement d'un fermage annuel compris entre 6000 et 8000 euros.
L'ensemble de ces éléments permet de démontrer en définitive que les versements opérés par M. [V] ne peuvent correspondre qu'à une augmentation du fermage annuel liée à l'augmentation de la surface agricole exploitée et qu'ainsi la preuve d'un bail rural verbal conclu avec [N] [Z] est effectivement rapportée s'agissant des parcelles litigieuses, manifestement mises à sa disposition en vue de leur exploitation agricole moyennant une contrepartie onéreuse.
-Sur l'opposabilité du contrat de bail à Mme [M] [P] :
Mme [P] soutient qu'en toute hypothèse le bail rural revendiqué sur les parcelles dont elle est propriétaire lui est inopposable en application des dispositions de l'article 815-3 du code rural dont il résulte qu'un contrat de bail sur un bien en indivision requiert l'accord unanime des indivisaires, cette obligation étant sanctionnée par l'inopposabilité au coïndivisaire évincé du contrat conclu au mépris de ses droits.
Elle rappelle qu'à la suite des décès d'[D] [Z] et [A] [Y], décès survenus respectivement les 17 novembre 1978 et 12 janvier 1972, les parcelles litigieuses ont toujours été en indivision, jusqu'à ce qu'elle en devienne pleinement propriétaire en 2014, de sorte que [N] [Z] ne pouvait conclure seul un bail rural que ce soit en 2007 et ou 2013.
Elle souligne en outre qu'il est expressément stipulé dans l'acte du 29 juillet 2014, aux termes duquel [N] [Z] lui a fait donation de ses droits indivis dans les parcelles litigieuses, que les biens donnés étaient libres « de toute location ou occupation ».
Il sera observé en premier lieu qu'il existe dans les écritures des parties une certaine confusion quant à la date de décès de [J] [Z] veuve [G], s'ur de [N] [Z] et mère de [M] [P]. En effet, il est indiqué dans les écritures de Mme [M] [P] en page 5 que [J] [Z] est décédée le 26 septembre 2009 et en page 12 que celle-ci est décédée le 26
septembre 2019, tandis qu'il est indiqué dans les écritures de M. [K] [V] que [J] [Z] est décédée le 26 septembre 2019.
Il est toutefois mentionné en page 5 de l'acte notarié dressé le 29 juillet 2014 par maître [X], notaire, aux termes duquel M. [K] [V] a fait donation à Mme [M] [P] des droits indivis qu'il détenait dans les parcelles litigieuses : « Étant précisé que Mme [P], donataire, est propriétaire du surplus des biens donnés pour les avoir recueillis dans la succession de sa mère Mme [J] [B] [Z] veuve de M. [W] [G] ».
Il apparaît ainsi que la mention de la date du 26 septembre 2019 résulte d'une erreur matérielle commise dans les écritures des parties et que [J] [Z] est décédée le 26 septembre 2009.
Il en résulte que la situation des parcelles litigieuses relevait d'une situation d'indivision entre [N] [Z] et [J] [Z] jusqu'à la date du décès de celle-ci, le 26 septembre 2009, de sorte qu'il ne pouvait conclure un bail rural sans l'accord de cette dernière sur ces biens. En conséquence, le bail rural consenti par [N] [Z] en 1997 au profit de M. [V] était inopposable à [J] [Z]. Or, contrairement à ce que soutient M. [V], et dans la mesure où aucun partage n'est intervenu entre [N] [Z] et [J] [Z] du fait du décès de cette dernière, le bail rural consenti au mépris des dispositions de l'article 815-3 du code civil n'est pas davantage opposable à Mme [M] [P], qui a hérité des droits indivis de sa mère dans les parcelles litigieuses.
Par ailleurs, à partir du 26 septembre 2009 et jusqu'au 29 juillet 2014, [N] [Z] se trouvait en indivision avec Mme [M] [P] sur les parcelles litigieuses, de sorte qu'il ne pouvait consentir un bail rural sans l'accord de celle-ci.
Il résulte de ces explications que les baux revendiqués par M. [V] sont inopposables à Mme [M] [P] et qu'en conséquence M. [V] se trouvait occupant sans droit ni titre des parcelles litigieuses qu'il a libérées en août 2023.
Il convient en conséquence de confirmer le jugement, par substitution de motifs toutefois, sans qu'il y ait lieu d'examiner les demandes supplémentaires présentées par M. [V].
- Sur les dépens et les frais irrépétibles :
Les dispositions du jugement relatives aux dépens et à l'application de l'article 700 du code de procédure civile seront confirmées.
M. [V] et le GAEC [V] supporteront les dépens d'appel et seront condamnés à payer à Mme [P] la somme de 2500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés pour les besoins de la procédure devant la cour.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant publiquement et contradictoirement,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions, par substitution de motifs,
Condamne in solidum M. [K] [V] et le GAEC [V] à supporter les dépens d'appel ;
Condamne in solidum M. [K] [V] et le GAEC [V] à payer à Mme [M] [G] épouse [P] la somme de 2500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Le greffier Le président