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02/07/2024 | FRANCE | N°23/01204

France | France, Cour d'appel de Riom, 2ème chambre, 02 juillet 2024, 23/01204


COUR D'APPEL

DE RIOM

Deuxième Chambre Civile







ARRET N° 281

DU : 02 juillet 2024



AFFAIRE N° : N° RG 23/01204 - N° Portalis DBVU-V-B7H-GBF3

FB/RG/VP



ARRÊT RENDU LE DEUX JUILLET DEUX MILLE VINGT QUATRE



ENTRE :



Madame [G] [T]

née le [Date naissance 3] 1974 à [Localité 9] (63)

demeurant [Adresse 7]

[Localité 1]

Représentée par Me Sophie GIRAUD de la SCP GIRAUD-NURY, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND



APPELANTE



ET :



Monsieur [W] [C]

né le [Date naissance 4] 1985 à [Localité 10] (63)

demeurant [Adresse 2]

[Localité 8]

Représenté par Me Jean-françois CANIS de la SCP CANIS, avocat au barreau de CLERMONT-FER...

COUR D'APPEL

DE RIOM

Deuxième Chambre Civile

ARRET N° 281

DU : 02 juillet 2024

AFFAIRE N° : N° RG 23/01204 - N° Portalis DBVU-V-B7H-GBF3

FB/RG/VP

ARRÊT RENDU LE DEUX JUILLET DEUX MILLE VINGT QUATRE

ENTRE :

Madame [G] [T]

née le [Date naissance 3] 1974 à [Localité 9] (63)

demeurant [Adresse 7]

[Localité 1]

Représentée par Me Sophie GIRAUD de la SCP GIRAUD-NURY, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

APPELANTE

ET :

Monsieur [W] [C]

né le [Date naissance 4] 1985 à [Localité 10] (63)

demeurant [Adresse 2]

[Localité 8]

Représenté par Me Jean-françois CANIS de la SCP CANIS, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

INTIMÉ

Décision déférée à la Cour :

jugement au fond, origine juge aux affaires familiales de CUSSET, décision attaquée en date du 01 juin 2023, enregistrée sous le n° 22/00613

COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :

Monsieur Alexandre GROZINGER, Président

Madame Florence BREYSSE, Conseiller

Madame Anne Céline BERGER, Conseiller

GREFFIER :

Madame Rémédios GLUCK, Greffier lors de l'appel de la cause et du prononcé

DÉBATS : A l'audience tenue en chambre du conseil du 04 juin 2024

Sur le rapport de Florence BREYSSE

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 02 juillet 2024, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Monsieur GROZINGER, président, et par Madame GLUCK, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Monsieur [W] [C] et Madame [G] [T] ont vécu en concubinage de 2017 à mai 2021.

Ils ont acquis un immeuble en indivision par moitié situé au [Adresse 6] à [Localité 11] en 2017 et l'ont vendu le 8 décembre 2021 au prix de 129.000€.

Par acte d'huissier en date du 28 mars 2022, Monsieur [C] a fait assigner Madame [T] devant le tribunal judiciaire de CUSSET aux fins de voir, notamment, juger qu'il est le propriétaire des chiens de race bouledogue français dénommés Rose et Roméo et ordonner la remise immédiate par la défenderesse des chiens sous astreinte, outre la voir condamner à lui verser des dommages intérêts.

Par jugement rendu le 1er juin 2023, le juge aux affaires familiales de CUSSET a notamment  :

- dit que Madame [G] [T] devra restituer à Monsieur [W] [C] les chiens Rose et Roméo ;

- dit que la restitution devra intervenir dans le délai de deux mois à compter de la signification de la présente décision et ce, sous peine d'astreinte de vingt euros (20 €) par jour de retard pendant un délai de deux mois ;

- condamné Madame [G] [T] à verser à Monsieur [W] [C] la somme de cinq cents euros (500 €) à titre de dommages et intérêts ;

- condamné Monsieur [W] [C] à verser à Madame [G] [T] la somme de trois mille quinze euros (3.015 €) au titre de l'indemnité d'occupation de l'immeuble indivis ;

- débouté Monsieur [W] [C] de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné Monsieur [W] [C] et Madame [G] [T] aux dépens par moitié ;

- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement ;

Madame [G] [T] a interjeté appel de cette décision par déclaration du 24 juillet 2023.

Dans ses dernières conclusions, notifiées le 29 mai 2024, Madame [G] [T], réclame de voir :

- débouter Monsieur [C] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

Vu l'article 547 du code civil, la déclarer légitime propriétaire des chiens Rose et Roméo,

- juger n'y avoir lieu, en conséquence, à restitution à Monsieur [C] des chiens Rose et Roméo,

- juger n'y avoir lieu à dommages intérêts au profit de Monsieur [C],

- condamner Monsieur [C] à lui restituer le chien Roméo sous astreinte de 50 € par jour de retard à l'expiration d'un délai de 15 jours suivant la signification de l'arrêt à intervenir,

- condamner Monsieur [C] à lui payer et porter la somme de 1.500 € de dommages intérêts,

- condamner Monsieur [C] à lui verser la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile dans le cadre de la procédure de première instance,

y ajoutant,

- condamner Monsieur [C] à lui payer et porter la somme de 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Dans ses dernières conclusions, notifiées le 21 mai 2024, Monsieur [W] [C], réclame de voir :

- confirmer le jugement déféré qui a dit que Madame [T] doit lui restituer les chiens Rose et Roméo ;

- dire que la restitution des chiens devra intervenir dans le délai d'un mois à compter de la signification de la présente décision et ce, sous astreinte de 200 € par jour de retard ;

- condamner Madame [G] [T] à lui payer et porter la somme de 5.000 € en réparation de son préjudice moral ;

- fixer à la somme de 163,78 € sa créance à l'égard de l'indivision;

condamner Madame [G] [T] à lui payer et porter la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure de première instance ;

En tout état de cause,

- la condamner à lui payer et porter la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

La clôture a été signée le 3 juin 2024. Conformément à la demande de Monsieur [C], motivée par la signification par Madame [T] d'une nouvelle pièce en date du 1er juin 2024, l'ordonnance de clôture est révoquée et repoussée au 4 juin 2024.

SUR CE,

Sur la propriété des chiens

Madame [T] soutient que les chiens bouledogue Rose et Roméo lui appartiennent en vertu de la théorie de l'accession définie par l'article 547 du code civil. En effet, elle indique qu'elle est propriétaire de la chienne Nina qui a donné naissance aux chiens Rose et Roméo de sorte qu'elle est l'unique propriétaire de ceux-ci. Elle s'en est toujours occupée (vétérinaire, promenades) et, contrairement à ce qu'indique Monsieur [C], elle ne les lui a pas vendus. Elle ajoute que ce dernier s'est emparé en cours de procédure du chien Roméo de sorte qu'elle n'a plus en sa possession que les chiens Nina et Rose.

Monsieur [C] fait valoir que, pendant la vie commune, il a acquis avec Madame [T] la chienne Nina. La théorie de l'accession n'a pas lieu à s'appliquer. En juin 2020, cette chienne a mis bas plusieurs chiots dont certains ont été vendus. Il a souhaité avoir l'entière propriété des deux restants et a acheté les chiens à sa compagne en octobre 2020. Les deux chiens ont été mis à son nom sur les certificats d'identification. Il a financé les frais vétérinaires. Il a pu récupérer le chien Roméo mais l'appelante détient toujours le chien Rose.

Il convient de rappeler que les animaux sont des biens meubles (515-4 du code civil) et que la propriété d'un bien se prouve par tout moyens.

En l'espèce, il est produit aux débats un document intitulé 'certificat de vente' dont il résulte que Madame [T] et Monsieur [C] ont acquis ensemble de Madame [Y] le chien Nina né le [Date naissance 5] 2017. Ce document est signé du vendeur et des deux acquéreurs.

Il en résulte que cet animal est un meuble indivis. A défaut de précision, les parties sont réputées en être propriétaire par moitié chacune. S'agissant de l'origine du financement, elle est indifférente sur la propriété de ce chien.

Il convient d'observer que si Monsieur [C] ne revendique pas la possession du chien Nina, il n'en reste pas moins qu'il en est juridiquement propriétaire indivis par moitié.

Les chiens Roméo et Rose, étant les croix des animaux au sens de l'article 547 du code civil, sont des fruits naturels du bien indivis qui accroissent à l'indivision. Monsieur [C] et Madame [T] en sont propriétaires indivis par moitié.

S'agissant des autres éléments de preuve, ils ne sont pas probants :

- le certificat d'identification est déclaratif sur le nom du détenteur/propriétaire et non signé ; il ne constitue pas un titre de propriété ;

- le livret de santé est également déclaratif ; il n'a pas vocation à identifier juridiquement le ou les propriétaires mais uniquement le possesseur dans l'objectif de suivre la santé de l'animal;

- Les virements de Monsieur [C] sur le compte de sa compagne effectués plus de 6 mois après la naissance des deux chiens sont insuffisants pour établir qu'il a réglé un prix de vente à celle-ci, étant observé, d'une part, que les concubins avaient d'autres intérêts en commun que ces deux animaux et, notamment, un immeuble et que, d'autre part, un des virements lui a été immédiatement rétrocédé par Madame [T];

- les discussions par SMS entre les parties dans le cadre d'une séparation qui plus est conflictuelle ne sont pas de nature à remettre en cause les mentions figurant sur le certificat de vente précité ;

- il en est de même de l'attestation de l'éleveuse qui indique qu'elle a cédé le chien Nina à Madame [T] en 2024, cette attestation ayant été établie plus de 6 ans après la vente ;

En conséquence, dans le cadre des opérations de partage et de liquidation de l'indivision des chiens Roméo et Rose, il convient de dire que chacune des parties, au regard de ses droits dans l'indivision, conservera le chien qui est en sa possession, sauf meilleur accord de leur part.

Le jugement sera modifié en ce sens.

Les demandes de condamnation sous astreinte seront rejetées puisque chacune des parties est en possession du chien qui lui a été attribué.

S'agissant des dommages intérêts sollicités en 1ère instance et en appel, chacune des parties sera déboutée de ses demandes, faute de caractériser une faute et un préjudice. Le jugement déféré sera également infirmé sur ce point.

Sur les comptes de l'indivision relatifs à l'immeuble situé [Adresse 6] à [Localité 11]

-sur les travaux et les factures

Le jugement déféré a dit que Monsieur [C] devait payer à Madame [T] une somme de 2573,77€ au titre des travaux réalisés dans l'immeuble indivis et du paiement des factures d'eau.

Monsieur [C] soutient que ces sommes doivent être réduites notamment en ce qui concerne une facture de carrelage d'un montant de 1980,98€, le matériel ayant été conservé par Madame [T] à la séparation. Par ailleurs, il a lui-même réalisé des travaux à ses frais pour une somme de 2999,98€ et sollicite la compensation.

Madame [T] réclame la confirmation du jugement déféré et le rejet des prétentions de Monsieur [C] qui, selon elle, ne justifie pas avoir réglé les factures avec ses deniers.

L'article 815-13 du code civil dispose que lorsqu'un indivisaire a amélioré à ses frais l'état d'un bien indivis, il doit lui en être tenu compte selon l'équité, eu égard à ce dont la valeur du bien se trouve augmentée au temps du partage ou de l'aliénation. Il doit lui être pareillement tenu compte des dépenses nécessaires qu'il a faites de ses deniers personnels pour la conservation des dits biens, encore qu'elles ne les aient point améliorés.

Il résulte de ce texte que les dépenses d'entretien courant ne sont pas susceptibles d'un remboursement par l'indivision.

Il convient de rappeler que les parties ont acquis un immeuble d'habitation situé [Adresse 6] à [Localité 11] dans lequel ils ont résidé pendant la vie commune.

Chacune d'entre elles produit diverses factures. Cependant, il n'est pas démontré qu'elles sont relatives à des dépenses d'amélioration ou de conservation donnant lieu à indemnisation y compris les factures relatives à l'achat d'une baie vitrée et du carrelage pour Madame [T], faute de précision sur l'état antérieur de l'immeuble et notamment des huisseries et du sol.

Compte-tenu de ces éléments, il convient de débouter les parties de leurs demandes à ce titre. Le jugement déféré sera modifié en ce sens.

-sur l'indemnité d'occupation

Le jugement déféré a dit que Monsieur [C] devait payer à Madame [T] une somme de 3015€ à titre de l'indemnité d'occupation de l'immeuble indivis.

Monsieur [C] soutient qu'il n'a pas occupé l'immeuble indivis après la séparation. Il sollicite l'infirmation du jugement déféré. Madame [T] soutient qu'au contraire, il a continué de vivre et de se domicilier à cette adresse. Elle réclame la confirmation du jugement à ce titre.

En application de l'article 815-9 alinéa 3 du code civil, l'indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité.

Encore faut-il démontrer une jouissance privative et exclusive du bien par cet indivisaire.

Cette preuve n'est pas rapportée au regard des pièces versées aux débats et, notamment, du dépôt de plainte de Madame [T] en septembre 2021 pour vol et dégradation du carrelage dont il résulte qu'elle avait accès aux lieux indivis. Par ailleurs, le témoignage de la voisine qui indique que Monsieur [C] a continué à résider dans les lieux après la séparation manque totalement de précision sur la durée de cette occupation et est contredite par l'attestation de Monsieur [S] qui affirme avoir hébergé Monsieur [C] de mai 2021 à janvier 2022.

En conséquence, le jugement déféré sera infirmé de ce chef également et les parties déboutées de leurs demandes.

-sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Chaque partie, succombant, conservera les dépens de 1er instance et d'appel.

Il n'est pas inéquitable de laisser aux parties la charge de leur frais exposés tant en 1ère instance qu'en appel et non compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement par arrêt contradictoire, et après en avoir délibéré conformément à la loi :

-rabat l'ordonnance de clôture ;

- Fixe la clôture de la procédure à la date du 4 juin 2024 ;

-infirme le jugement déféré ;

-statuant à nouveau,

-dit que Monsieur [C] et Madame [T] sont propriétaires en indivision par moitié des chiens Rose et Roméo ;

-dit que dans le cadre des opérations de liquidation et partage de l'indivision relative à ces animaux, sera attribué à chaque partie le chien en sa possession, sauf meilleur accord entre elles ;

-déboute Monsieur [C] et Madame [T] de leurs demandes de condamnation sous astreinte et de dommages intérêts ;

-les déboute de leurs demandes de créance sur l'indivision relative à l'immeuble sis [Adresse 6] à [Localité 11] ;

-les déboute de leur demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure tant en 1ère instance qu'en appel ;

-dit que chaque partie conserve la charge de ses dépens tant en 1ère instance qu'en appel.

Le greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Riom
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23/01204
Date de la décision : 02/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 08/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-02;23.01204 ?
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