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18/06/2024 | FRANCE | N°22/01214

France | France, Cour d'appel de Riom, 1ère chambre, 18 juin 2024, 22/01214


COUR D'APPEL

DE RIOM

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE







Du 18 juin 2024

N° RG 22/01214 - N° Portalis DBVU-V-B7G-F2OI

-DA- Arrêt n° 279



[O] [M], S.A.R.L. SODEFIH, S.C.I. LES GRANDS CHAMPS / S.A. FINAMUR, S.A. CREDIT MUTUEL REAL ESTATE LEASE



Jugement au fond, origine TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de MONTLUÇON, décision attaquée en date du 06 Mai 2022, enregistrée sous le n° 20/00458



Arrêt rendu le MARDI DIX HUIT JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE



COMPOSITION DE LA COUR lors du

délibéré :

M. Philippe VALLEIX, Président

M. Daniel ACQUARONE, Conseiller

Mme Laurence BEDOS, Conseiller



En présence de :

Mme Céline DHOME, greffie...

COUR D'APPEL

DE RIOM

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

Du 18 juin 2024

N° RG 22/01214 - N° Portalis DBVU-V-B7G-F2OI

-DA- Arrêt n° 279

[O] [M], S.A.R.L. SODEFIH, S.C.I. LES GRANDS CHAMPS / S.A. FINAMUR, S.A. CREDIT MUTUEL REAL ESTATE LEASE

Jugement au fond, origine TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de MONTLUÇON, décision attaquée en date du 06 Mai 2022, enregistrée sous le n° 20/00458

Arrêt rendu le MARDI DIX HUIT JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

M. Philippe VALLEIX, Président

M. Daniel ACQUARONE, Conseiller

Mme Laurence BEDOS, Conseiller

En présence de :

Mme Céline DHOME, greffier lors de l'appel des causes et du prononcé

ENTRE :

M. [O] [M]

[Adresse 6]

[Localité 1]

et

S.C.I. LES GRANDS CHAMPS

[Adresse 6]

[Localité 1]

et

S.A.R.L. SODEFIH, intervenante volontaire par conclusions du 14 septembre 2022

[Adresse 6]

[Localité 1]

Toutes trois représentées par Maître Barbara GUTTON PERRIN de la SELARL LX RIOM-CLERMONT, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

Timbre fiscal acquitté

APPELANTS

ET :

S.A. FINAMUR

[Adresse 2]

[Localité 5]

et

S.A. CREDIT MUTUEL REAL ESTATE LEASE anciennement dénomée CM-CIC LEASE

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentées par Maître Sébastien RAHON, avocat au barreau de CLERMONT- FERRAND et par Maître Jacques TORIEL de la SCP TORIEL & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS

Timbre fiscal acquitté

INTIMEES

DÉBATS :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 29 avril 2024, en application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. VALLEIX et M. ACQUARONE, rapporteurs.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 18 juin 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par M. VALLEIX, président et par Mme DHOME, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE :

Par acte authentique du 30 mars 2015 la SCI Les Grands Champs a souscrit auprès de la SA FINAMUR et de la société SMCIC LEASE, qui deviendra plus tard la SA CRÉDIT MUTUEL Real Estate Lease, un contrat de crédit-bail pour le financement de la construction d'un hôtel à Montmarault (Allier), à hauteur de la somme de 3 067 891 EUR hors-taxes.

Un second acte authentique sera passé le 12 juin 2017 pour un financement complémentaire.

Dans ces deux actes M. [O] [M] était caution solidaire de la SCI Les Grands Champs.

Le 7 juillet 2020 la SA FINAMUR la SA CRÉDIT MUTUEL ont fait délivrer au crédit-preneur un commandement de payer visant la clause résolutoire insérée au bail.

Par exploits des 4 et 5 août 2020 la SCI Les Grands Champs et M. [M] ont fait assigner la SA FINAMUR et la SA CRÉDIT MUTUEL devant le tribunal judiciaire de Montluçon, afin d'obtenir la désignation d'un médiateur, et à défaut la nullité des clauses fixant les modalités de calcul des intérêts, moyennant quoi les demandeurs considéraient que la créance n'était ni certaine ni liquide ni exigible ; que le commandement de payer visant la clause résolutoire était nul et de nul effet ; que les sociétés bailleresses avaient manqué à leur obligation de conseil et commis des fautes dans l'exécution du contrat ; que l'acte de cautionnement était disproportionné. En conséquence, M. [M] et la SCI Les Grands Champs demandaient au tribunal judiciaire de condamner les défenderesses à payer à la SCI Les Grands Champs la somme de 212 726 EUR à titre de dommages-intérêts au titre d'une perte de chance, outre article 700 du code de procédure civile.

La SA FINAMUR de la SA CRÉDIT MUTUEL s'opposaient à toutes les réclamations présentées contre elles.

À l'issue des débats, par jugement du 6 mai 2022, le tribunal judiciaire de Montluçon a rendu la décision suivante :

« Statuant publiquement, contradictoirement, en premier ressort ;

DÉBOUTE la SCI DES GRANDS CHAMPS et Monsieur [J] [I] [M] de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions ;

CONSTATE que le crédit-bail immobilier du 30 mars 2015, modifié et complété par avenant du 12 juin 2017, se trouve résilié de plein droit depuis le 10 août 2020 ;

ORDONNE l'expulsion de la SCI DES GRANDS CHAMPS et de tous occupants de son chef des locaux donnés à crédit-bail et ordonne le transport et la séquestration aux frais du preneur, des meubles et objets mobiliers garnissant les lieux dans tel endroit sécurisé qu'il plaira aux crédit-bailleurs ;

CONDAMNE la SCI DES GRANDS CHAMPS à payer à la société FINAMUR et à la société CRÉDIT MUTUEL REAL ESTATE LEASE, prises ensemble, la somme de 830 882,02 € arrêtée au 9 août 2020 outre les intérêts au taux de retard contractuel à compter de la date d'exigibilité de chacune des factures demeurées impayées et ce jusqu'à parfait paiement ;

CONDAMNE la SCI DES GRANDS CHAMPS à payer à la société FINAMUR et à la société CRÉDIT MUTUEL REAL ESTATE LEASE, prises ensemble, une indemnité d'occupation de 39 758,56 € TTC du 10 août 2020 au 30 septembre 2020 et de 23 255,04 € TTC par mois à compter du 1er octobre 2020 outre les charges et outre intérêts de retard au taux contractuel à compter de la date d'exigibilité de chacune de ces sommes et jusqu'à parfaite restitution des lieux ;

CONDAMNE la SCI DES GRANDS CHAMPS à payer à la société FINAMUR et à la société CRÉDIT MUTUEL REAL ESTATE LEASE, prises ensemble, une indemnité de résiliation d'un montant global de 1 335 201,02 € outre les intérêts de retard au taux contractuel à compter de la date de résiliation, soit le 10 août 2020 et ce jusqu'à parfait paiement ;

CONDAMNE Monsieur [O] [M], en sa qualité de caution, à payer à la société FINAMUR et à la société CRÉDIT MUTUEL REAL ESTATÉ LEASE, prises ensemble, la somme de 792 294 € outre les intérêts au taux légal à compter du 7 juillet 2020 ;

ORDONNE la capitalisation des intérêts échus depuis plus d'un an conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil ;

DÉBOUTE la SCI DES GRANDS CHAMPS et Monsieur [J] [I] [M] de leurs demandes de délais ;

DIT n'y avoir lieu à déroger par une disposition spéciale aux règles générales gouvernant l'exécution provisoire des décisions de justice ;

CONDAMNE in solidum la SCI DES GRANDS CHAMPS et Monsieur [J] [I] [M] à payer à la société FINAMUR et à la société CRÉDIT MUTUEL REAL ESTATE LEASE, prises ensemble, une somme de 3 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE in solidum la SCI DES GRANDS CHAMPS et Monsieur [J] [I] [M] aux entiers dépens. »

***

M. [O] [M] et la SCI Les Grands Champs ont fait appel de cette décision le 14 juin 2022, précisant :

« Objet/Portée de l'appel : APPEL LIMITÉ : L'appel tend à obtenir la nullité ou, à tout le moins la réformation de la décision susvisée en ce qu'elle a : - débouté la SCI DES GRANDS CHAMPS et Monsieur [J] [I] [M] de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions - constaté que le crédit-bail immobilier du 30 mars 2015, modifié et complété par avenant du 12 juin 2017, se trouve résilié de plein droit depuis le 10 août 2020 - ordonné l'expulsion de la SCI DES GRANDS CHAMPS et de tous occupants de son chef des locaux donnés à crédit-bail et ordonne le transport et la séquestration aux frais du preneur, des meubles et objets mobiliers garnissant les lieux dans tel endroit sécurisé qu'il plaira aux crédit-bailleurs - condamné la SCI DES GRANDS CHAMPS à payer à la société FINAMUR et à la société CRÉDIT MUTUEL REAL ESTATE LEASE, prises ensemble, la somme de 830 882,02 € arrêtée au 9 août 2020 outre les intérêts au taux de retard contractuel à compter de la date d'exigibilité de chacune des factures demeurées impayées et ce jusqu'à parfait paiement - condamné la SCI DES GRANDS CHAMPS à payer à la société FINAMUR et à la société CRÉDIT MUTUEL REAL ESTATE LEASE, prises ensemble, une indemnité d'occupation de 39 758,56 € TTC du 10 août 2020 au 30 septembre 2020 et de 23 255,04 € TTC par mois à compter du 1 er octobre 2020 outre les charges et outre intérêts de retard au taux contractuel à compter de la date d'exigibilité de chacune de ces sommes et jusqu'à parfaite restitution des lieux - condamné la SCI DES GRANDS CHAMPS à payer à la société FINAMUR et à la société CRÉDIT MUTUEL REAL ESTATE LEASE, prises ensemble, une indemnité de résiliation d'un montant global de 1 335 201,02 € outre les intérêts de retard au taux contractuel à compter de la date de résiliation, soit le 10 août 2020 et ce jusqu'à parfait paiement -condamné Monsieur [O] [M], en sa qualité de caution, à payer à la société FINAMUR et à la société CRÉDIT MUTUEL REAL ESTATE LEASE, prises ensemble, la somme de 792 294 € outre les intérêts au taux légal à compter du 7 juillet 2020 - ordonné la capitalisation des intérêts échus depuis plus d'un an conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil - débouté la SCI DES GRANDS CHAMPS et Monsieur [J] [I] [M] de leurs demandes de délais - dit n'y avoir lieu à déroger par une disposition spéciale aux règles générales gouvernant l'exécution provisoire des décisions de justice - condamné in solidum la SCI DES GRANDS CHAMPS et Monsieur [J] [I] [M] à payer à la société FINAMUR et à la société CRÉDIT MUTUEL REAL ESTATE LEASE, prises ensemble, une somme de 3 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile - condamné in solidum la SCI DES GRANDS CHAMPS et Monsieur [J] [I] [M] aux entiers dépens. Cet appel est fondé sur les pièces dont il a été fait état en première instance ou toute autre à produire devant la Cour. »

Dans leurs conclusions nº 3 ensuite du 2 avril 2024 M. [O] [M] et la SCI Les Grands Champs, ainsi que la SARL SODEFIH intervenante volontaire, demandent ensemble à la cour de :

« Dire l'appel interjeté recevable et bien fondé

Déclaré recevable l'intervention volontaire de la SARL SODEFIH

Dès lors

Vu l'ordonnance nº 2020-306 du 25 mars 2020,

À titre liminaire

Réformer le jugement en ce qu'il a écarté les demandes de la SCI DES GRANDS CHAMPS et de Monsieur [M]

Ecarter les fins de non-recevoir tirées du caractère nouveau de la prétention tendant à la nullité du contrat de crédit-bail et de la confirmation des actes postérieurement par la SCI DES GRANDS CHAMPS et Monsieur [M]

Ce faisant

Déclarer recevables les demandes formées par la SCI DES GRANDS CHAMPS et Monsieur [M]

Réformer le jugement en ce qu'il a :

- débouté la SCI DES GRANDS CHAMPS et Monsieur [J] [I] [M] de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions

- constaté que le crédit-bail immobilier du 30 mars 2015, modifié et complété par avenant du 12 juin 2017, se trouve résilié de plein droit depuis le 10 août 2020

- ordonné l'expulsion de la SCI DES GRANDS CHAMPS et de tous occupants de son chef des locaux donnés à crédit-bail et ordonne le transport et la séquestration aux frais du preneur, des meubles et objets mobiliers garnissant les lieux dans tel endroit sécurisé qu'il plaira aux crédit-bailleurs

- condamné la SCI DES GRANDS CHAMPS à payer à la société FINAMUR et à la société CRÉDIT MUTUEL REAL ESTATE LEASE, prises ensemble, la somme de 830 882,02 € arrêtée au 9 août 2020 outre les intérêts au taux de retard contractuel à compter de la date d'exigibilité de chacune des factures demeurées impayées et ce jusqu'à parfait paiement

- condamné la SCI DES GRANDS CHAMPS à payer à la société FINAMUR et à la société CRÉDIT MUTUEL REAL ESTATE LEASE, prises ensemble, une indemnité d'occupation de 39 758,56 € TTC du 10 août 2020 au 30 septembre 2020 et de 23 255,04 € TTC par mois à compter du 1 er octobre 2020 outre les charges et outre intérêts de retard au taux contractuel à compter de la date d'exigibilité de chacune de ces sommes et jusqu'à parfaite restitution des lieux

- condamné la SCI DES GRANDS CHAMPS à payer à la société FINAMUR et à la société CRÉDIT MUTUEL REAL ESTATE LEASE, prises ensemble, une indemnité de résiliation d'un montant global de 1 335 201,02 € outre les intérêts de retard au taux contractuel à compter de la date de résiliation, soit le 10 août 2020 et ce jusqu'à parfait paiement

- condamné Monsieur [O] [M], en sa qualité de caution, à payer à la société FINAMUR et à la société CRÉDIT MUTUEL REAL ESTATE LEASE, prises ensemble, la somme de 792 294 € outre les intérêts au taux légal à compter du 7 juillet 2020

- ordonné la capitalisation des intérêts échus depuis plus d'un an conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil

- débouté la SCI DES GRANDS CHAMPS et Monsieur [J] [I] [M] de leurs demandes de délais

- condamné in solidum la SCI DES GRANDS CHAMPS et Monsieur [J] [I] [M] à payer à la société FINAMUR et à la société CRÉDIT MUTUEL REAL ESTATE LEASE, prises ensemble, une somme de 3 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

-condamné in solidum la SCI DES GRANDS CHAMPS et Monsieur [J] [I] [M] aux entiers dépens

En conséquence.

En tout état de cause

Déclarer les demandes formées par Monsieur [M] et la SCI LES GRANDS CHAMPS recevables.

À titre principal

Vu l'article 1129 du code civil

Prononcer la nullité du contrat de crédit-bail et de son avenant

En conséquence remettre les parties dans l'état dans lequel elles se trouvaient au jour de la conclusion du contrat de crédit-bail

Dire et juger que Monsieur [M] et la SCI LES GRANDS CHAMPS devront restituer les fonds financés sur les fonds propres des sociétés FINAMUR et CREDIT MUTUEL REAL ESTATE LEASE dans le cadre du contrat de crédit-bail soit 2 546 672.21 €

Dire et juger que la SARL SODEFIH se verra restituer la propriété du terrain et, par accession, des constructions qui y sont édifiées

Prononcer la résiliation de tous les contrats conclus par les sociétés FINAMUR et CREDIT MUTUEL REAL ESTATE LEASE en application du contrat de crédit-bail.

Prononcer la nullité du commandement portant clause résolutoire

y ajoutant

Condamner solidairement les sociétés FINAMUR et CREDIT MUTUEL REAL ESTATE LEASE à porter et payer à la SCI LES GRANDS CHAMPS la somme de 824 000 € à titre de dommages et intérêts pour non-respect de leur devoir de conseil

À titre subsidiaire

Vu l'article 1907 du code civil

Dire nulles et de nul effet les clauses déterminant l'intérêt applicable à l'opération de crédit-bail, tant dans le contrat initial que dans l'avant

En conséquence, dire que l'intérêt applicable sera l'intérêt au taux légal.

Condamner solidairement les sociétés FINAMUR et CREDIT MUTUEL REAL ESTATE LEASE à refaire le calcul des loyers

Y ajoutant

Condamner solidairement les sociétés FINAMUR et CREDIT MUTUEL REAL ESTATE LEASE à porter et payer à la SCI LES GRANDS CHAMPS la somme de 824 000 € à titre de dommages et intérêts pour non-respect de leur devoir de conseil

Prononcer la nullité du commandement portant clause résolutoire

À titre infiniment subsidiaire

Vu les articles 1134 et 1147 anciens du code civil

Prononcer la nullité des factures de loyers émises par les sociétés FINAMUR et CREDIT MUTUEL REAL ESTATE LEASE

En conséquence dire nul et de nul effet le commandement visant la clause résolutoire délivré le 7 juillet 2020, dire la clause résolutoire visée non acquise

D'ordonner la production par les sociétés FINAMUR et CREDIT MUTUEL REAL ESTATE LEASE d'un nouveau décompte des loyers effectivement dus

Condamner solidairement les sociétés FINAMUR et CREDIT MUTUEL REAL ESTATE LEASE à porter et payer à la SCI LES GRANDS CHAMPS la somme de 1 000 000 € à titre de dommages et intérêts

A titre plus infiniment subsidiaire

Réformer le jugement en ce qu'il a condamné la SCI DES GRANDS CHAMPS à payer à la société FINAMUR et à la société CRÉDIT MUTUEL REAL ESTATE LEASE, prises ensemble, une indemnité de résiliation d'un montant global de 1 335 201,02 € outre les intérêts de retard au taux contractuel à compter de la date de résiliation, soit le 10 août 2020 et ce jusqu'à parfait paiement

Dire et juger que l'indemnité de résiliation est requalifiée en clause pénale et prononcer sa réduction à la somme de 1 €.

Vu le caractère manifestement disproportionné des engagements de la caution tant au titre du contrat principal qu'au titre de l'avenant,

Réformer le jugement en ce qu'il a condamné Monsieur [O] [M], en sa qualité de caution, à payer à la société FINAMUR et à la société CRÉDIT MUTUEL REAL ESTATE LEASE, prises ensemble, la somme de 792 294 € outre les intérêts au taux légal à compter du 7 juillet 2020

En conséquence,

Débouter les sociétés FINAMUR et CREDIT MUTUEL REAL ESTATE LEASE de leurs demandes formées contre Monsieur [J] [I] [M]

Et à titre encore plus infiniment subsidiaire.

Réformer le jugement en ce qu'il a débouté la SCI DES GRANDS CHAMPS et Monsieur [J] [I] [M] de leurs demandes de délais.

En conséquence leur accorder les plus larges délais pour s'acquitter des sommes dues.

Dire n'y avoir lieu à capitalisation des intérêts En tout état de cause.

Débouter les sociétés FINAMUR et CREDIT MUTUEL REAL ESTATE LEASE de toutes leurs demandes plus amples et contraires

Condamner solidairement les sociétés FINAMUR et CREDIT MUTUEL REAL ESTATE LEASE à la somme de 40 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

Ainsi qu'aux entiers dépens, tant de première instance que d'appel, et faire application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de la SELARL LEXAVOUÉ RIOM CLERMONT prise en la personne de Me [K]. »

***

La SA FINAMUR de la SA CRÉDIT MUTUEL Real Estate Lease (anciennement SMCIC LEASE) ont pris ensemble des conclusions d'intimées nº 2 le 7 mars 2024 afin de demander à la cour de :

« Vu l'article 564 du Code de procédure civile,

Vu l'article 122 du Code de procédure civile,

Vu l'article 2224 du Code civil,

Vu l'article 1338 ancien du Code civil,

Vu l'article L. 313-7 du Code monétaire et financier,

Vu les articles 1134 et s. anciens (art. 1103 et 1104 nouveaux) du Code civil,

Vu l'article 1907 du Code civil,

Vu l'article 1319 ancien et 1371 nouveau du Code civil,

Vu l'article L. 341.4 ancien et L. 332-1 nouveau du Code de la consommation,

Vu l'article 1343-2 (ancien article 1154) du Code civil,

Vu les articles 514 et s. du Code de procédure civile,

Vu l'article 462 du Code de procédure civile,

Vu les articles 1224-1 ancien et 1343-5 du Code civil,

Vu les articles 1152 al. 1er ancien et 1231-5 du Code civil,

Vu le principe selon lequel Nul ne plaide par procureur et les articles 122, 31 et 125 al. 2 du Code de procédure civile,

Vu la clause résolutoire de plein droit contenue dans le contrat de crédit-bail immobilier du 30 mars 2015 tel que modifié et complété par avenant en date du 12 juin 2017,

Vu le commandement de payer visant la clause résolutoire du 7 juillet 2020,

Vu les pièces communiquées,

Il est demandé à la Cour d'appel de :

- À titre liminaire, JUGER irrecevables les prétentions nouvelles en cause d'appel de la SCI LES GRANDS CHAMPS, de la société SODEFIH et de M. [O] [M], à savoir les prétentions formées par les appelants « À titre principal » par lesquelles il est sollicité de la Cour d'appel de céans de :

À titre principal

Vu l'article 1129 du code civil

Prononcer la nullité du contrat de crédit-bail et de son avenant

En conséquence remettre les parties dans l'état dans lequel elles se trouvaient au jour de la conclusion du contrat de crédit-bail

Dire et juger que Monsieur [M] et la SCI LES GRANDS CHAMPS devront restituer les fonds financés sur les fonds propres des sociétés FINAMUR et CREDIT MUTUEL REAL ESTATE LEASE dans le cadre du contrat de crédit-bail soit 2 546 672,21 €

Dire et juger que la SARL SODEFIH se verra restituer la propriété du terrain et, par accession, des constructions qui y sont édifiées

Prononcer la résiliation de tous les contrats conclus par les sociétés FINAMUR et CREDIT MUTUEL REAL ESTATE LEASE en application du contrat de crédit-bail.

Prononcer la nullité du commandement portant clause résolutoire

Y ajoutant

Condamner solidairement les sociétés FINAMUR et CREDIT MUTUEL REAL ESTATE LEASE à porter et payer à la SCI LES GRANDS CHAMPS la somme de 824 000 € à titre de dommages et intérêts pour non-respect de leur devoir de conseil

(Extrait du PAR CES MOTIFS des conclusions des appelants)

À titre principal.

- JUGER la SCI LES GRANDS CHAMPS, la société SODEFIH et M. [O] [M] mal fondés en leur appel ;

- DÉBOUTER la SCI LES GRANDS CHAMPS, la société SODEFIH et M. [O] [M] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;

En conséquence,

- CONFIRMER le jugement rendu le 6 mai 2022 par le Tribunal judiciaire de Montluçon, sauf à rectifier l'erreur matérielle affectant le quantum visé au titre des sommes dues au 9 août 2020 aux sociétés FINAMUR et CREDIT MUTUEL REAL ESTATE LEASE {anciennement dénommée CMCIC LEASE) ;

- RECTIFIER l'erreur matérielle commise dans le jugement en date du 6 mai 2022 en ce que son dispositif indique à tort :

- CONDAMNE la SCI DES GRANDS CHAMPS à payer à la société FINAMUR et à la société CREDIT MUTUEL REAL ESTATE LEASE, prises ensemble, la somme de 830.882,02 € arrêtée au 9 août 2020 outre les intérêts au taux de retard contractuel à compter de la date d'exigibilité de chacune des factures demeurées impayées et ce jusqu'à parfait paiement ;

Et REMPLACER le paragraphe erroné par le texte qui suit :

- CONDAMNE la SCI DES GRANDS CHAMPS à payer à la société FINAMUR et à la société CREDIT MUTUEL REAL ESTATE LEASE, prises ensemble, la somme de 838.882,02 € arrêtée au 9 août 2020 outre les intérêts au taux de retard contractuel à compter de la date d'exigibilité de chacune des factures demeurées impayées et ce jusqu'à parfait paiement ;

A titre subsidiaire, dans l'hypothèse où, sur le fondement de l'article 1224-1 ancien et 1343-5 du Code civil, des délais seraient octroyés à la SCI LES GRANDS CHAMPS et/ou à M. [O] [M] :

- JUGER que les délais susceptibles d'être accordés seront de plein droit caducs à défaut pour la société LES GRANDS CHAMPS et/ou M. [M] de respecter l'une quelconque des échéances du moratoire susceptible de leur être accordé, l'intégralité des sommes restant dues devenant alors immédiatement et irrévocablement exigible ;

EN TOUTE HYPOTHÈSE,

- DÉBOUTER la SCI LES GRANDS CHAMPS, la société SODEFIH et M. [O] [M] de toutes leurs demandes plus amples et contraires ;

- CONDAMNER la SCI LES GRANDS CHAMPS et M. [O] [M] à payer aux sociétés FINAMUR et CREDIT MUTUEL REAL ESTATE LEASE (anciennement dénommée CMCIC LEASE) la somme de 40.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

- CONDAMNER les mêmes aux entiers dépens de la présente instance dont distraction au profit de Maître RAHON. »

***

La cour, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des demandes et moyens des parties, fait ici expressément référence au jugement entrepris ainsi qu'aux dernières conclusions déposées, étant précisé que le litige se présente céans de la même manière qu'en première instance.

Une ordonnance du 4 avril 2024 clôture la procédure.

MOTIFS :

1. Sur la demande nouvelle en appel

Devant le tribunal judiciaire de Montluçon, M. [M] et la SCI Les Grands Champs demandaient à cette juridiction, en premier lieu, de juger « que les clauses fixant les modalités de calcul des intérêts sont nulles et de nul effet » (cf. jugement page 2).

Devant la cour, les appelants maintiennent leur demande en nullité de la clause d'intérêts, mais seulement à titre subsidiaire ; ils sollicitent désormais, à titre principal, la nullité du contrat de crédit-bail dans son ensemble, incluant l'avenant du 12 juin 2017.

La SA FINAMUR et la SA CRÉDIT MUTUEL plaident qu'il s'agit d'une demande nouvelle irrecevable en appel selon l'article 564 du code de procédure civile. Les appelantes objectent que cette demande n'est pas nouvelle au regard des articles 563 et 566 du code de procédure civile.

L'article 563 du code de procédure civile dispose que pour justifier en appel les prétentions qu'elles avaient soumises au premier juge, les parties peuvent invoquer des moyens nouveaux. Or d'évidence, la demande d'annulation de la totalité du contrat du 30 mars 2015, outre l'avenant du 12 juin 2017, qui n'avait pas été portée devant le premier juge, ne peut pas être considérée comme un moyen de défense alors que d'évidence il s'agit bien d'une demande formellement présentée pour la première fois à la cour d'appel.

L'article 566 du code de procédure civile dispose que les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire. Ici encore l'argumentation des appelants ne saurait être suivie. En effet, la demande d'annulation du contrat de crédit-bail dans son ensemble ne peut pas sérieusement être considérée comme un « accessoire » ou un « complément nécessaire » de la demande initiale annulation de la seule clause d'intérêts qui avaient été présentée au tribunal judiciaire.

En réalité, l'action en annulation du contrat tend à mettre celui-ci à néant, tandis que l'action en annulation de la seule clause d'intérêts n'a pour conséquence, tout en laissant subsister le contrat, que de substituer à l'intérêt conventionnel le taux d'intérêt légal.

En conséquence, la demande d'annulation du contrat de crédit-bail présenté pour la première fois en appel par M. [M] et la SCI Les Grands Champs doit être considérée comme nouvelle et dès lors irrecevable devant la cour.

Dès lors, la demande subsidiaire présentée à la cour par les appelants, sollicitant de « Dire nulles et de nul effet les clauses déterminant l'intérêt applicable à l'opération de crédit-bail », devient céans la demande principale.

2. Sur la prescription

Le contrat de crédit-bail est en date du 30 mars 2015. Un avenant a été conclu ensuite le 12 juin 2017. Les deux conventions ont été passées par acte authentique.

L'assignation a été délivrée à la diligence de M. [M] et de la SCI Les Grands Champs suivant exploits des 4 et 5 août 2020.

L'article 2224 du code civil dispose que « Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. »

Dans les motifs de sa décision le premier juge, qui n'était saisi que d'une demande d'annulation de la clause d'intérêts, a jugé qu'elle était prescrite. Le tribunal a en effet considéré que l'avenant du 12 juin 2017 formait « un tout indivisible » avec le contrat initial du 30 mars 2015, moyennant quoi c'est cette date qui devait être retenue comme point de départ de la prescription, qui était donc acquise le 30 mars 2020, soit plusieurs mois avant les assignations du mois d'août 2020.

Devant la cour les termes du débat ont quelque peu changé dans la mesure où les appelants soulèvent maintenant les dispositions particulières qui avaient cours au printemps 2020 en raison de la crise sanitaire du COVID. Ce moyen n'était pas évoqué devant le tribunal.

En réponse, la SA FINAMUR et la SA CRÉDIT MUTUEL modifient également leurs moyens en disant désormais que ce n'est pas la date du 30 mars 2015 qu'il faut retenir concernant la demande d'annulation des intérêts, mais celle du 6 juin 2014, s'agissant de l'offre de crédit qui avait été acceptée par M. [M] la SCI Les Grands Champs. Les intimées précisent que cette offre comportait tous les éléments essentiels concernant les intérêts du prêt, qui seront repris à l'identique dans le contrat du 30 mars 2015.

Ceci étant précisé, pour l'application de l'article 2224 du code civil, il convient de déterminer la date « du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ». Une jurisprudence constante au regard de l'objet du litige dispose que le point de départ du délai de prescription de l'action en déchéance du droit aux intérêts se situe au jour où l'emprunteur a connu ou aurait dû connaître l'erreur affectant le taux effectif global ; moyennant quoi lorsque la simple lecture de l'offre de prêt permet à l'emprunteur de déceler son irrégularité, le point de départ du délai de prescription de l'action en déchéance du droit aux intérêts se situe au jour de l'acceptation de l'offre, sans report possible tiré de la révélation postérieure d'autres irrégularité (1re Civ., 7 octobre 2020, nº 18-23.576 ; 1re Civ., 25 novembre 2020, nº 19-20.437 ; 1re Civ., 9 décembre 2020, nº 19-11.146 ; 1re Civ., 9 décembre 2020, nº 18-25.895 ; 1re Civ., 24 mars 2021, nº 19-21.944 ; 1re Civ., 5 janvier 2022, nº 20-16.350 ; 1re Civ., 7 décembre 2022, nº 21-14.395).

Or en l'espèce, la comparaison entre l'offre de prêt du 6 juin 2014 et le contrat du 30 mars 2015 permet aisément de comprendre que tous les éléments concernant le calcul du taux d'intérêt du contrat de crédit-bail étaient déjà présents de manière détaillée dans l'offre du 6 juin 2014, et ont été repris à l'identique dans le contrat définitif du 30 mars 2015, ce qui au demeurant est parfaitement logique.

En effet, aussi bien dans l'offre du 6 juin 2014 que dans le contrat du 30 mars 2015, il est indiqué de manière identique que concernant la quote-part du prêt fourni par la SA FINAMUR, soit 1 533 945,50 EUR, les loyers trimestriels sont calculés sur la base du taux du « TNC CASA 10 ans » ; tandis que concernant la quote-part du prêt fourni par la SA CRÉDIT MUTUEL, soit également 1 533 945,50 EUR, l'intérêt est calculé « sur la base d'un taux fixe référencé sur le taux du swap à 15 ans ». Quelques différences minimes de formulation ou de présentation entre les deux documents ne permettent pas de les considérer comme fondamentalement différents concernant le mode de calcul des intérêts.

Par conséquent, dans la mesure où dès l'offres du 6 juin 2014, qui a été validée et signée par M. [O] [M], celui-ci était parfaitement capable de connaître le mode de calcul des intérêts, qui sera repris de manière identique dans l'acte de prêt, cela signifie que cette date fixe à son égard le « jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer » au sens de l'article 2224 du code civil.

À partir du 6 juin 2014 M. [M] était donc en mesure de comprendre les modes de calcul des intérêts proposés par les crédit-bailleurs, de solliciter des explications complémentaires si nécessaire, et de renoncer à l'emprunt si les conditions financières du contrat ne lui paraissaient pas satisfaisantes.

Dès lors, le délai quinquennal de l'article 2224 arrivait à échéance le 6 juin 2019, moyennant quoi les demandes de M. [M] et de la SCI Les Grands Champs concernant les intérêts contractuels étaient prescrites, lorsqu'ils ont assigné la SA FINAMUR et la SA CRÉDIT MUTUEL devant le tribunal judiciaire de Montluçon les 4 et 5 août 2020.

3. Concernant le devoir de conseil du bailleur

M. [M] et la SCI Les Grands Champs reprochent ici à la SA FINAMUR et à la SA CRÉDIT MUTUEL ne pas les avoirs suffisamment informés sur un taux d'intérêt « CASA 10 ans » selon eux « introuvable pour un preneur normalement diligent », et d'avoir ainsi manqué à leur devoir de conseil.

Cependant, l'examen des extraits Kbis des nombreuses entreprises et sociétés dans lesquelles M. [O] [M] apparaît comme gestionnaire, permet de constater que celui-ci est profondément impliqué dans le monde des affaires concernant en particulier la restauration et l'hôtellerie. En aucun cas par conséquent il ne peut être considéré comme un emprunteur novice.

Or la référence au taux « CASA 10 ans » était clairement indiquée dans l'offre du 6 juin 2014, qui mentionnait également un exemple de calcul des intérêts à partir de ce taux, et le contrat de crédit-bail n'a été souscrit, avec la mention de ce même taux, que le 30 mars 2015. En conséquence, le candidat à l'emprunt disposait entre juin 2014 et mars 2015 d'une période de temps suffisamment grande pour examiner dans le détail les modalités du prêt qui lui était proposé, et solliciter, auprès du prêteur ou de tout autre conseil qualifié, les explications complémentaires qu'il jugeait le cas échéant nécessaire et utiles à la compréhension de la portée de son engagement.

Dans ces conditions, il n'est nullement démontré que la SA FINAMUR et la SA CRÉDIT MUTUEL ont manqué à leur devoir de conseil, alors que les modalités de financement du prêt, notamment les taux des intérêts, étaient clairement énoncées tant dans l'offre du 6 juin 2014 que dans le contrat du 30 mars 2015. Sans doute, comme dans tous les contrats de même nature, le calcul de la rémunération du prêteur fait intervenir des notions financières complexes, mais encore une fois M. [M] était parfaitement capable, eu égard à ses compétences dans les investissements et la gestion des entreprises, de s'en rendre compte et en tout cas de se faire conseiller utilement avant l'engagement définitif du 30 mars 2015, et même le cas échéant de renoncer à celui-ci.

Au demeurant, contrairement à ce que plaident les appelants, le taux « TCN CASA 10 » n'était pas impossible à trouver puisque dans une lettre du 4 décembre 2018, répondant à un courrier du conseil de la SCI Les Grands Champs, l'organisme prêteur lui communique l'information qui manifestement a été recueillie sur internet. Le taux « TCN CASA » est produit également par les intimées dans un tableau sur lequel il est indiqué : « Source : page Reuters TCNCASA » (pièce nº 20). Ce document à l'en-tête de la banque Crédit Agricole n'était donc pas « introuvable ». En outre le contrat du 30 mars 2015 contenait en annexe 14 un échéancier des loyers dus à la société FINAMUR par référence au taux « TCN CASA 10 ANS » (pièce intimées nº 19).

Il doit être enfin rappelé que la détermination du taux d'intérêt du contrat par référence à des valeurs financières, n'a rien d'extraordinaire, anormal ou surprenant eu égard à la nature de la convention dont il s'agit.

4. Sur le non-respect des dispositions contractuelles

M. [M] et la SCI Les Grands Champs soutiennent ici que les dispositions contractuelles n'ont pas été respectée par la SA FINAMUR et la SA CRÉDIT MUTUEL, moyennant quoi ils sollicitent la condamnation des intimées à leur payer un million d'euros à titre de dommages-intérêts, pour « manque à gagner » et « perte de chance », outre l'annulation des factures de loyers émises.

Aucune justification pertinente de la demande d'un million d'euros à titre de dommages-intérêts n'est rapportée. La démonstration à ce titre des appelants manque en effet sérieusement de clarté et de pertinence. Elle procède essentiellement de multiples affirmations impossibles à vérifier, faisant intervenir assez largement les conditions de la construction de l'hôtel financé par le crédit-bail, l'achat du terrain, les honoraires du notaire' en conséquence de quoi une telle demande, fondée sur des éléments aussi incertains, ne peut être satisfaite.

5. Sur la nullité des factures et du commandement de payer

Au vu des éléments ci-dessus développés, il apparaît que les factures de loyers ont été émises sur la base d'éléments contractuels désormais incontestables et dont le caractère irrégulier n'est de toute manière pas démontré ; elles n'encourent par conséquent aucune nullité. Il en va de même pour le commandement de payer qui n'est que la conséquence d'une créance elle aussi incontestable.

6. Sur l'engagement de caution de M. [O] [M]

Il n'est pas discuté que dans le cadre de cette opération de crédit-bail M. [O] [M] s'est personnellement porté caution à hauteur de 792 294 EUR (cf. contrat du 30 mars 2015 page 32).

Il plaide céans, au visa de l'article L. 332-1 du code de la consommation, dans sa version applicable aux faits de la cause, que son engagement « était disproportionné à ses biens et revenus et que le bailleur n'a pas respecté son devoir de mise en garde ». Ce texte dispose qu'un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu avec une personne physique dont l'engagement était lors de sa conclusion manifestement disproportionnée à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution au moment où elle a été appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.

M. [M], qui considère avoir agi en qualité de « cautions non avertie » reproche aux intimées de ne pas l'avoir suffisamment mis en garde « eu égard à ses capacités financières et au risque d'endettement né de l'octroi des prêts ».

Or en l'espèce, comme déjà souligné ci-dessus, M. [M] ne peut pas sérieusement soutenir qu'il n'était pas une caution « avertie » lors de la conclusion du contrat de crédit-bail. L'extrait Kbis des nombreuses entreprises qu'il a créées et qu'il dirige dans le domaine de l'hôtellerie et de la restauration, témoigne suffisamment de son implication profonde et à titre professionnel dans le monde des affaires commerciales, moyennant quoi il n'est pas recevable à vouloir se présenter comme novice en cette matière.

Par ailleurs, la finalité de l'opération financée par le crédit-bail, c'est-à-dire la construction d'un ensemble hôtelier dans un emplacement de choix, consistait à créer un patrimoine commercial de valeur et source de revenus. Au demeurant, lors de son engagement, M. [M] a fourni au crédit bailleur une fiche de renseignements où il mentionne un patrimoine mobilier et immobilier non négligeable, d'une valeur de plusieurs centaines de milliers d'euros (cf. pièces intimées nº 31 et 32).

En conséquence de ces éléments, la demande de M. [M] au titre de son cautionnement ne peut prospérer.

7. Sur l'indemnité de résiliation

Une indemnité de résiliation est prévue à l'article B 12.3 du contrat du 30 mars 2015, pages 77 et 78. Il n'est pas discuté que le montant de cette indemnité, qui procède d'un calcul complexe, s'élève à 1 335 201,02 EUR.

Les appelants plaident qu'il s'agit d'une clause pénale manifestement excessive, dont ils sollicitent la réduction à un euro. Le tribunal judiciaire de Montluçon a rejeté leur demande. Les crédit-bailleurs sollicitent la confirmation de la décision, faisant valoir que l'opération revêtait pour eux « un caractère essentiellement financier et non patrimonial ».

Or l'indemnité de résiliation représente quasiment le montant de l'engagement individuel des sociétés de crédit-bail, la SA FINAMUR et la SA CRÉDIT MUTUEL, qui chacune ont prêté dans le cadre du crédit-bail la somme de 1 533 945,50 EUR (acte du 30 mars 2015 page 20). En ce sens, elle est manifestement excessive et sera ramenée à la somme plus raisonnable de 250 000 EUR.

8. Sur la demande de délais de règlement

Sans fournir à la cour la moindre information concernant les modalités de règlement échelonné qu'ils seraient susceptibles de mettre en 'uvre et de respecter, les appelants sollicitent des délais de règlement « les plus larges », qu'il n'est évidemment pas possible de leur accorder dans des conditions aussi imprécises et incertaines.

9. Sur la capitalisation des intérêts

Aucune raison de droit ne permet de s'opposer à cette mesure lorsqu'elle est demandée.

10. Sur la résiliation de plein droit du contrat de crédit-bail et ses conséquences

Dans le dispositif de leurs écritures M. [O] [M] et la SCI Les Grands Champs sollicitent l'annulation du commandement visant la clause résolutoire, comme conséquence de l'annulation du contrat de crédit-bail, de l'annulation des clauses d'intérêts et de l'annulation des factures de loyers ; toutes demandes que la cour rejette.

La cour fait droit uniquement à la demande des appelants concernant la réduction du montant de l'indemnité de résiliation. En conséquence, la résiliation du contrat de crédit-bail elle-même n'est pas affectée par cette décision, moyennant quoi le jugement doit être confirmé en ce que le tribunal constate la résiliation de plein droit de ce contrat, ordonne l'expulsion de la SCI Les Grands Champs et se prononce sur les sommes dues en conséquence à la SA FINAMUR et à la SA CRÉDIT MUTUEL.

11. Sur l'erreur matérielle

Dans les motifs de sa décision (page 6) le premier juge a établi la créance des crédit-bailleurs à 838 882,02 EUR. Mais dans le dispositif il est indiqué 830 882,02 EUR.

Les appelants ne contestent pas la somme de 838 882,02 EUR, qui résulte de l'addition des factures demeurées impayées, moyennant quoi il apparaît que le dispositif du jugement appelé est entaché d'une erreur matérielle que la cour réparera en application de l'article 462 du code de procédure civile, comme précisé ci-après dans le dispositif.

12. Sur l'article 700 du code de procédure civile en appel

5000 EUR sont justes au titre de l'article 700 du code de procédure civile, à charge des appelants.

13. Sur les dépens d'appel

M. [O] [M] et la SCI Les Grands Champs supporteront in solidum les dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et par arrêt contradictoire,

Vu l'article 462 du code de procédure civile, répare l'erreur matérielle contenue dans le jugement, en ce qu'au quatrième paragraphe du dispositif il faut lire « 838 882,02 € » au lieu de 830 882,02 € ;

Juge irrecevable comme étant nouvelle en appel la demande de nullité du contrat de crédit-bail ;

Confirme le jugement, sauf en ce que le tribunal judiciaire de Montluçon fixe le montant de l'indemnité de résiliation à 1 335 201,02 EUR, et statuant à nouveau de ce seul chef, fixe l'indemnité de résiliation à la somme de 250 000 EUR ;

Condamne in solidum M. [M] et la SCI Les Grands Champs à payer à la SA FINAMUR et à la SA CRÉDIT MUTUEL REAL ESTATE LEASE ensemble la somme unique de 5000 EUR en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum M. [M] et la SCI Les Grands Champs aux dépens d'appel ;

Déboute les parties de leurs autres demandes.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Riom
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22/01214
Date de la décision : 18/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 24/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-18;22.01214 ?
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