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09/04/2024 | FRANCE | N°22/02268

France | France, Cour d'appel de Riom, 1ère chambre, 09 avril 2024, 22/02268


COUR D'APPEL

DE RIOM

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE







Du 09 avril 2024

N° RG 22/02268 - N° Portalis DBVU-V-B7G-F5MZ

-LB- Arrêt n° 178



[M] [S] [W] [T] veuve [D] / [P] [D] veuve [E], [X] [D], [B] [D], [V] [D], S.A. PREDICA PREVOYANCE DIALOGUE DU CREDIT AGRICOLE



Jugement au fond, origine TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de CUSSET, décision attaquée en date du 07 Novembre 2022, enregistrée sous le n° 21/00091





Arrêt rendu le MARDI NEUF AVRIL DEUX MILLE VINGT QUATRE



C

OMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :

M. Philippe VALLEIX, Président

M. Daniel ACQUARONE, Conseiller

Mme Laurence BEDOS, Conseiller



En ...

COUR D'APPEL

DE RIOM

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

Du 09 avril 2024

N° RG 22/02268 - N° Portalis DBVU-V-B7G-F5MZ

-LB- Arrêt n° 178

[M] [S] [W] [T] veuve [D] / [P] [D] veuve [E], [X] [D], [B] [D], [V] [D], S.A. PREDICA PREVOYANCE DIALOGUE DU CREDIT AGRICOLE

Jugement au fond, origine TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de CUSSET, décision attaquée en date du 07 Novembre 2022, enregistrée sous le n° 21/00091

Arrêt rendu le MARDI NEUF AVRIL DEUX MILLE VINGT QUATRE

COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :

M. Philippe VALLEIX, Président

M. Daniel ACQUARONE, Conseiller

Mme Laurence BEDOS, Conseiller

En présence de :

Mme Céline DHOME, greffier lors de l'appel des causes et du prononcé

ENTRE :

Mme [M] [S] [W] [T] veuve [D]

[Adresse 6]

[Localité 1].

Représentée par Maître Sophie FOURNIER-ROUX de la SCP FOURNIER-ROUX - CAUSSE, avocat au barreau de CUSSET/VICHY

Timbre fiscal acquitté

APPELANTE

ET :

Mme [P] [D] veuve [E]

[Adresse 15]

[Localité 14]

et

M. [X] [D]

[Adresse 7]

[Localité 4]

et

M. [B] [D]

[Adresse 8]

[Localité 11]

Tous trois représentés par Maître Sébastien RAHON, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND et par Maître Fabien PURSEIGLE de la SELARL ABSIDE AVOCATS, avocat au barreau de CUSSET/VICHY

Timbre fiscal acquitté

M. [V] [D]

[Adresse 13]

[Localité 12]

Représenté par Maître Anne-Laure GAY, avocat au barreau de CLERMONT- FERRAND et par Maître Myriam COUSIN MARLAUD, de la SELARL AXIUM AVOCATS, avocat au barreau de BRIVE

Timbre fiscal non acquitté

S.A. PREDICA PREVOYANCE DIALOGUE DU CREDIT AGRICOLE

[Adresse 3]

[Localité 17]

Représentée par Maître Sophie LACQUIT, avocat au barreau de CLERMONT- FERRAND et par Maître Stéphanie COUILBAULT-DI TOMMASO de la SELARL MESSAGER COUILBAULT, avocat au barreau de PARIS

Timbre fiscal acquitté

INTIMES

DÉBATS : A l'audience publique du 19 février 2024

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 09 avril 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par M. VALLEIX, président et par Mme DHOME, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DES FAITS, DE LA PROCÉDURE ET DES PRÉTENTIONS DES PARTIES :

[G] [D] est décédé le [Date décès 2] 2019 laissant pour lui succéder :

-[M] [T], son conjoint survivant,

-Quatre enfants issus d'une précédente union :

-[P] [D], née le [Date naissance 9] 1957,

-[B] [D], né le [Date naissance 10] 1959,

-[X] [D], né le [Date naissance 5] 1961,

-[V] [D], né le [Date naissance 16] 1963.

Selon l'attestation de dévolution successorale établie le 18 octobre 2019, Mme [M] [T], qui était donataire en vertu d'un acte reçu par maître [H], notaire, le 6 juillet 1988, de l'usufruit de l'universalité des biens et droits mobiliers et immobiliers dépendant de la succession de [G] [D] ou du quart en pleine propriété et des trois quarts en usufruit ou de la quotité disponible ordinaire des mêmes biens a opté pour la pleine propriété du quart des biens de la succession et des trois quarts en usufruit.

Le 23 novembre 2000, [G] [D] avait souscrit un contrat d'assurance-vie « Prediane V2 » n° 86805037603921 auprès de la SA Predica par l'intermédiaire du Crédit Agricole mutuel centre France, les bénéficiaires en cas de décès étant, selon la clause type, son conjoint, à défaut les enfants de l'assuré, nés, à naître, vivants ou représentés, à défaut les héritiers de l'assuré.

Suite au décès de [G] [D], considérant que les bénéficiaires du contrat d'assurance-vie étaient les enfants de celui-ci, la SA Predica a procédé au règlement du capital décès d'un montant de 34'690,85 euros en versant :

-le 22 janvier 2020, la somme de 8694,48 euros à M. [X] [D],

-le 22 janvier 2020, la somme de 8694,48 euros à M. [B] [D],

-le 23 janvier 2020, la somme de 8694, 62 euros à M. [V] [D],

-le 27 janvier 2020, la somme de 8694,91 euros à Mme [P] [D].

Le 14 février 2020, Mme [M] [T], après avoir appris que la compagnie d'assurances se prévalait d'une modification de la clause bénéficiaire du contrat intervenue le 1er juin 2016 au profit des quatre enfants de [G] [D] et que les fonds avaient été versés à ces derniers, a déposé plainte pour faux et usage de faux. Dans le cadre de l'enquête diligentée par la gendarmerie de [Localité 18], la compagnie Predica a indiqué n'être pas en mesure de communiquer le bordereau de modification de la clause bénéficiaire, ce document n'ayant pu être retrouvé par le service « désarchivage ».

Par acte d'huissier en date du 25 janvier 2021, Mme [M] [T] a fait assigner devant le tribunal judiciaire de Cusset la SA Predica, sur le fondement des articles L. 132-23-1 du code des assurances et 1103 et 1231-1 du code civil, pour obtenir sa condamnation à lui verser le capital du contrat, outre des dommages et intérêts.

La compagnie Predica a appelé en cause les quatre enfants de [G] [D], Mme [P] [D], M. [B] [D], M. [X] [D] et M. [V] [D].

Par jugement en date du 7 novembre 2022, réputé contradictoire en l'absence de M. [V] [D], le tribunal de Cusset a statué en ces termes :

-Déclare Mme [M] [T] recevable ;

-Déboute Mme [M] [T] de sa demande de condamnation de la SA Predica à lui payer la somme de 34'778,48 euros ;

-Déboute Mme [M] [T] de sa demande de condamnation de la SA Predica au titre des dispositions de l'article L. 132-23-1 du code des assurances ;

-Déboute Mme [M] [T] de sa demande de condamnation de la SA Predica au titre du préjudice moral ;

-Dit n'y avoir eu à statuer concernant la demande de Mme [P] [D], de M. [B] [D] et de M. [X] [D] de condamnation de la SA Predica à leur verser les sommes de 8694,91 euros, 8694,48 euros et 8694, 48 en indemnisation de leur préjudice ;

-Dit n'y avoir lieu à statuer concernant la demande subsidiaire de la SA Predica de condamnation de Mme [P] [D], M. [B] [D] et M. [X] [D] de condamnation de la SA Predica à lui verser les sommes de 8694,91 euros, 8694, 48 euros et 8694, 48 euros ; (ndr : sic)

-Condamne Mme [M] [T] aux dépens dont distraction au bénéfice de maître Véronique Metenier, avocat au barreau de Vichy- Cusset ;

-Déboute Mme [M] [T] de sa demande au titre des dépens ;

-Condamne Mme [M] [T] à verser au titre de l'article 700 du code de procédure civile à la SA Predica, à Mme [P] [D], à M. [B] [D] et à M. [X] [D] la somme de 2500 euros chacun ;

-Déboute Mme [M] [T] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

-Rappelle que l'exécution provisoire du présent jugement en toutes ses dispositions est de droit.

Mme [M] [T] a relevé appel de cette décision par déclaration électronique enregistrée le 6 décembre 2022.

La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 14 décembre 2023.

Vu les conclusions en date du 30 octobre 2023 aux termes desquelles Mme [M] [T] demande à la cour de :

« Infirmer le jugement en ce qu'il a :

-Débouté Mme [M] [T] de sa demande de condamnation de la SA Predica à lui payer la somme de 34'778,48 euros ;

-Débouté Mme [M] [T] de sa demande de condamnation de la SA Predica au titre des dispositions de l'article L. 132-23-1 du code des assurances ;

-Débouté Mme [M] [T] de sa demande de condamnation de la SA Predica au titre du préjudice moral ;

-Condamné Mme [M] [T] aux dépens dont distraction au bénéfice de maître Véronique Metenier, avocat au barreau de Vichy-Cusset ;

-Débouté Mme [M] [T] de sa demande au titre des dépens ;

-Condamné Mme [M] [T] à verser au titre de l'article 700 du code de procédure civile à la SA Predica, à Mme [P] [D], à M. [B] [D] et à M. [X] [D] la somme de 2500 euros chacun ;

-Débouté Mme [M] [T] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

-Rappelé que l'exécution provisoire du présent jugement en toutes ses dispositions est de droit.

Statuant à nouveau,

-Condamner la SA Predica à respecter ses obligations contractuelles et à procéder au versement au profit de Mme [T] du montant du capital atteint au jour du décès de son époux, soit la somme de 34'778,48 euros, sauf à parfaire ;

-Condamner la SA Predica à verser de légitimes dommages et intérêts à la requérante sur le fondement de l'article 1231-1 du code civil, à titre de préjudice moral, lesquels seront évalués à 2500 euros ;

- Condamner la SA Predica au paiement des sanctions prévues aux alinéas 2 et 3 de l'article L.132-23-1 du code des assurances en cas de non versement du capital dans les délais légaux ;

-Débouter la SA Predica de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

-Débouter [P], [B], [X] et [V] [D] de leurs demandes formulées à l'encontre de Mme [T] veuve [D] ;

-Débouter les parties de toutes les demandes plus amples ou contraires à l'encontre de Mme [T] veuve [D] ;

-Ordonner le remboursement des sommes qui auront pu être versées en vertu de l'exécution provisoire de la décision entreprise en principal, intérêts, frais et accessoires, avec intérêts au taux légal à compter de leur versement, et ce au besoin à titre de dommages et intérêts ;

-Condamner la SA Predica, [P] [D], [X] [D] et [B] [D] au paiement chacun, de la somme de 2500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile en première instance ;

-Condamner la SA Predica, [P] [D], [X] [D], [B] [D] et [V] [D] au paiement chacun de la somme de 3000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel ;

-Condamner la SA Predica, [P] [D], [X] [D], [B] [D] et [V] [D] aux entiers dépens de la première instance et d'appel.

Vu les conclusions en date du 12 mai 2023 aux termes desquelles Mme [P] [D], M. [B] [D] et M. [X] [D] demandent à la cour de :

À titre principal,

-Confirmer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal judiciaire de Cusset du 7 novembre 2022 ;

Y ajoutant,

-Condamner Mme [T] à payer à Mme [P] [D], à M. [B] [D] et à M. [X] [D] une somme de 3000 euros chacun sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais de procédure devant la cour d'appel ;

-Débouter les parties de toutes leurs demandes plus amples ou contraires à l'encontre de Mme [P] [D], de M. [B] [D] et de M. [X] [D] ;

-Condamner Mme [T] aux entiers dépens et dire que conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, maître Fabien Purseigle pourra recouvrer directement les frais dont il a fait l'avance sans avoir reçu provision ;

À titre subsidiaire,

-Retenir en cas d'obligation de restitution du fonds reçus la faute délictuelle de la société Predica en ce qui concerne la perte de l'original de l'avenant du 1er juin 2016 ;

-Condamner la société Predica à payer à Mme [P] [D] une somme de 8694,91 euros, à M. [B] [D] une somme de 8194,48 euros et à M. [X] [D] une somme de 8694,48 euros en indemnisation de leur préjudice ;

-Condamner la société Predica à payer à Mme [P] [D], à M. [B] [D] et à M. [X] [D] une somme de 3000 euros chacun sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais de procédure exposés devant le tribunal judiciaire ;

-Condamner la société Predica à payer à Mme [P] [D], à M. [B] [D] et à M. [X] [D] une somme de 3000 euros chacun sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais de procédure exposés devant la cour d'appel ;

-Condamner la société Predica aux entiers dépens et dire que conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, maître Fabien Purseigle pourra recouvrer directement les frais dont il a fait l'avance sans avoir reçu provision. »

Vu les conclusions en date du 12 mai 2023 aux termes desquelles la SA Predica demande à la cour de :

« - Rejeter la demande de Mme [T] de paiement du contrat « Prediane », n° 868 05037603 921 de M. [G] [D] souscrit au profit de ses quatre enfants ;

-Subsidiairement, si la cour juge que Mme [T] est bénéficiaire du contrat n° 868 05037603 921 de M. [G] [D], condamner les quatre enfants de l'assuré qui ont perçu le contrat à restituer l'indu à Predica ;

-M. [X] [D] : 8694,48 euros,

-M. [B] [D] : 8694,48 euros,

-M. [V] [D] : 8694,62 euros,

-Mme [P] [D] veuve [E] : 8194,91 euros ;

-Rejeter toute demande complémentaire dirigée à l'encontre de la société Predica, y compris les demandes de dommages et intérêts et d'intérêts de retard ;

-Condamner toute partie perdante à verser à la société Predica la somme de 2800 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

-Condamner toute partie perdante aux dépens, dont distraction au profit de maître Sophie Lacquit, avocat au barreau de Clermont-Ferrand, en application des articles 699 et suivants du code de procédure civile.

En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions susvisées pour l'exposé complet des prétentions respectives des parties et de leurs moyens.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Il sera rappelé en premier lieu qu'en application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions et qu'elle n'a pas à se prononcer sur les demandes de « constater que... » ou de « dire et juger que...» lorsque celles-ci ne correspondent pas à des prétentions au sens des articles 4, 31 et 954 du code de procédure civile, mais en réalité à des moyens ou arguments invoqués au soutien des véritables prétentions.

- Sur la recevabilité de la défense présentée par M. [V] [D] :

L'article 1635 bis P du code général des impôts prévoit qu'il est institué un droit d'un montant de 225 euros dû par les parties à l'instance d'appel lorsque la constitution d'avocat est obligatoire devant la cour d'appel.

L'article 963 du code de procédure civile, dispose :

« Lorsque l'appel entre dans le champ d'application de l'article 1635 bis P du code général des impôts, les parties justifient, à peine d'irrecevabilité de l'appel ou des défenses selon le cas, de l'acquittement du droit prévu à cet article.

Sauf en cas de demande d'aide juridictionnelle, l'auteur de l'appel principal en justifie lors de la remise de sa déclaration d'appel et les autres parties lors de la remise de leur acte de constitution par l'apposition de timbres mobiles ou par la remise d'un justificatif lorsque le droit pour l'indemnisation de la profession d'avoué a été acquitté par voie électronique

[']

L'irrecevabilité est constatée d'office par le magistrat ou la formation compétents. Les parties n'ont pas qualité pour soulever cette irrecevabilité. Elles sont avisées de la décision par le greffe. »

En l'espèce, nonobstant l'avis qui lui a été adressé par le greffe de la cour le 16 janvier 2024, l'invitant à régulariser la situation sous peine d'irrecevabilité de sa défense constatée d'office, M. [V] [D] n'a justifié ni de l'acquittement du droit fiscal, ni du dépôt d'une demande d'aide juridictionnelle.

Il convient en conséquence de constater l'irrecevabilité des conclusions présentées en défense par M. [V] [D], étant rappelé que la partie dont les conclusions sont irrecevables est réputée ne pas avoir conclu et s'être approprié les motifs du jugement

-Sur le bénéficiaire du contrat d'assurance-vie souscrit par [G] [D] :

[G] [D] avait souscrit le 23 novembre 2000 un contrat d'assurance-vie « Prediane V2 » n° 86805037603921 auprès de la SA Predica et avait opté pour la clause bénéficiaire type proposée par la compagnie d'assurances désignant le conjoint de l'assuré, à défaut ses enfants, nés, à naître, vivants ou représentés, à défaut ses héritiers. [M] [T] était ainsi bénéficiaire du contrat au moment de l'adhésion de [G] [D].

Toutefois, suite au décès de [G] [D], les fonds représentant le capital décès d'un montant total de 34'690,85 euros ont été versés par la compagnie Predica aux quatre enfants de ce dernier :

-le 22 janvier 2020, la somme de 8694,48 euros à M. [X] [D],

-le 22 janvier 2020, la somme de 8694,48 euros à M. [B] [D],

-le 23 janvier 2020, la somme de 8694, 62 euros à M. [V] [D],

-le 27 janvier 2020, la somme de 8694,91 euros à Mme [P] [D].

Mme [M] [T] conteste les règlements ainsi effectués, estimant que l'existence d'une modification de la clause bénéficiaire du contrat d'assurance-vie souscrit par [G] [D] n'est pas établie.

L'article L. 132-8 alinéa 6 du code civil dispose :

« En l'absence de désignation d'un bénéficiaire dans la police ou à défaut d'acceptation par le bénéficiaire, le contractant a le droit de désigner un bénéficiaire ou de substituer un bénéficiaire à un autre. Cette désignation ou cette substitution ne peut être opérée, à peine de nullité, qu'avec l'accord de l'assuré, lorsque celui-ci n'est pas le contractant. Cette désignation ou cette substitution peut être réalisée soit par voie d'avenant au contrat, soit en remplissant les formalités édictées par l'article 1690 du code civil, soit par voie testamentaire. »

Il est constant que la modification de la clause bénéficiaire du contrat d'assurance-vie n'est soumise à aucune règle de forme et que l'assuré peut modifier jusqu'à son décès le nom du bénéficiaire dès lors que la volonté du stipulant est exprimée de manière certaine et non équivoque.

Pour démontrer qu'elle a effectué un paiement libératoire entre les mains des quatre enfants de [G] [D], la compagnie Predica produit un document portant le tampon « duplicata », daté du 1er juin 2016, établi selon elle à la demande de [G] [D] (pièce n°4). Elle communique également l'historique informatique du contrat et plus particulièrement une copie d'écran éditée à la date du 25 janvier 2021 mentionnant comme bénéficiaire du contrat [P] [D], [B] [D], [X] [D] et [V] [D] (sic), par parts égales. (Pièce n°5).

Il apparaît toutefois que le duplicata daté du 1er juin 2016 concerne un avenant non signé, étant précisé que la compagnie Predica indique elle-même d'une part qu'il s'agit d'une « réédition » de l'avenant « adressé » à l'assuré à cette date, ce qui ne permet aucunement de vérifier que [G] [D] a bien renvoyé l'avenant proposé à la signature pour confirmer une décision de modification de la clause bénéficiaire du contrat, d'autre part qu'elle n'est en mesure de communiquer ni l'original ni le duplicata d'un avenant qui aurait effectivement été signé par [G] [D].

Il sera observé par ailleurs que le document présenté comporte des erreurs matérielles assez grossières, ce qui permet de douter du fait que l'assuré ait pu apposer sa signature sur l'avenant tel qu'il était proposé : en effet, si [P] [D], [X] [D], et [V] [D] sont désignés comme bénéficiaires, le quatrième bénéficiaire désigné est [G] [D], c'est-à-dire l'assuré lui-même, et non pas [B] [D], son fils. En outre, la date de naissance indiquée pour [X] [D] est le [Date naissance 5] 2016, alors que celui-ci est né le [Date naissance 5] 1961.

Il résulte de ces explications que si la compagnie Predica démontre qu'elle possède dans ses archives un avenant qui a pu être envoyé à [G] [D] dans la perspective d'une éventuelle modification de la clause bénéficiaire, il n'est aucunement prouvé en revanche que l'assuré ait concrétisé une telle décision par la régularisation d'un avenant.

En conséquence, en l'absence de démonstration de la volonté du stipulant certaine et non équivoque de modifier la clause bénéficiaire du contrat d'assurance-vie souscrit, il doit être considéré que [M] [T] est la bénéficiaire du contrat en vertu de la clause initialement souscrite.

La demande de Mme [T] doit ainsi être accueillie. La compagnie Predica sera condamnée à lui payer la somme de 34'778,48 euros au titre du montant du capital atteint à la date de dénouement du contrat. Le jugement sera infirmé sur ce point.

-Sur l'application des dispositions de l'article L. 132-23-1 du code des assurances :

L'article L132-23-1 du code des assurances dispose :

« L'entreprise d'assurance dispose d'un délai de quinze jours, après réception de l'avis de décès et de sa prise de connaissance des coordonnées du bénéficiaire ou au terme prévu pour le contrat, afin de demander au bénéficiaire du contrat d'assurance sur la vie de lui fournir l'ensemble des pièces nécessaires au paiement.

A réception de ces pièces, l'entreprise d'assurance verse, dans un délai qui ne peut excéder un mois, le capital ou la rente garantis au bénéficiaire du contrat d'assurance sur la vie.

Plusieurs demandes de pièces formulées par l'entreprise d'assurance ne peuvent concerner des pièces identiques ou redondantes.

Au delà du délai de quinze jours mentionné au premier alinéa, le capital produit de plein droit intérêt au double du taux légal durant un mois puis, à l'expiration de ce délai d'un mois, au triple du taux légal.

Au-delà du délai prévu au deuxième alinéa, le capital non versé produit de plein droit intérêt au double du taux légal durant deux mois puis, à l'expiration de ce délai de deux mois, au triple du taux légal. La période au cours de laquelle le capital a, le cas échéant, produit intérêt en application de l'avant-dernier alinéa s'impute sur le calcul de ce délai de deux mois. Si, au-delà du délai de quinze jours mentionné au premier alinéa, l'entreprise a omis de demander au bénéficiaire l'une des pièces nécessaires au paiement, cette omission n'est pas suspensive du délai de versement mentionné au présent article. »

Ces dispositions ont pour vocation de sanctionner le retard de paiement par les organismes d'assurance qui retiennent les fonds en raison d'atermoiements injustifiés ou abusifs tels que des demandes successives ou redondantes de justificatifs inutiles et font preuve d'une inertie dilatoire.

En l'espèce, il ne peut être reproché à la compagnie Predica d'avoir retenu les fonds, dont elle s'est effectivement départie après constitution du dossier par les enfants de l'assuré, qu'elle considérait, à tort, comme bénéficiaires du contrat.

Les dispositions rappelées sont ainsi inapplicables au retard de paiement subi par Mme [T] retard qui relève d'une erreur de l'assureur dans la gestion du dossier, et donc d'une faute, situation en revanche susceptible d'engager la responsabilité de ce dernier.

Mme [T] doit dès lors être déboutée de sa demande au titre de l'article L132-23-1 du code des assurances. Le jugement sera confirmé sur ce point, par substitution de motifs cependant, alors que le premier juge a rejeté cette demande en considérant que la réalité de la modification de la clause bénéficiaire en faveur des enfants de [G] [D] était démontrée.

-Sur la demande indemnitaire présentée par Mme [T] pour préjudice moral :

Mme [T] réclame la condamnation de la compagnie Predica au paiement de la somme de 2500 euros en réparation de son préjudice moral.

La faute de la compagnie Predica est caractérisée alors que celle-ci s'est libérée par erreur des fonds en faveur des enfants de [G] [D] sur la base d'un avenant modificatif non signé par ce dernier. Du fait de cette situation, Mme [T] a été confrontée à des tracasseries administratives à l'origine pour elle d'un préjudice moral qui sera justement indemnisé par l'allocation de la somme réclamée. Le jugement sera infirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.

-Sur la demande de restitution des fonds présentée par la compagnie Predica :

Selon l'article 1302 alinéa 1 du code civil, ce qui a été reçu sans être dû est sujet à restitution.

En l'espèce, il ressort des développements précédents que Mme [P] [D], M. [B] [D], M. [X] [D] et M. [V] [D] ont reçu de la société Predica le capital du contrat d'assurance-vie revenant à Mme [T].

Ces derniers, tenus de restituer à la compagnie Predica les fonds reçus par erreur, seront condamnés au paiement des sommes réclamées à ce titre. Il sera ajouté au jugement sur ce point.

-Sur la demande indemnitaire présentée par Mme [P] [D], M. [B] [D] et M. [X] [D] :

Aux termes de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Les intimés, partant du principe que la compagnie Predica a perdu l'original de l'avenant modificatif de la clause bénéficiaire du contrat d'assurance-vie, se prévalent d'un préjudice correspondant à la perte de chance de bénéficier du capital issu du contrat.

Toutefois, les demandes de Mme [T] sont accueillies non pas au motif que l'original d'un avenant modificatif qui aurait été signé par [G] [D] n'est pas communiqué, mais parce qu'il n'est pas démontré que [G] [D] ait signé un tel avenant. Il sera rappelé à cet égard que la compagnie Predica indique elle-même que la pièce produite correspond au duplicata de l'avenant « adressé » à [G] [D] le 1er juin 2016, ce dont elle déduit à tort que la preuve serait rapportée de l'intention claire et précise de ce dernier de modifier la clause bénéficiaire.

Aucune faute de la compagnie Predica ne peut en conséquence être retenue à la charge de cette dernière pour avoir égaré un document original dont l'existence n'est pas démontrée.

Il est établi en revanche que la compagnie Predica a fait preuve de légèreté dans la gestion du dossier du contrat d'assurance-vie souscrit par [G] [D] alors qu'elle s'est libérée des sommes dues à ce titre entre les mains des intimés sur la seule base du duplicata d'un avenant non signé par l'assuré.

Les intimés font valoir qu'ils ont subi un préjudice alors qu'ils ont utilisé les fonds et qu'une restitution risque de les mettre en difficulté. Ils ne produisent cependant devant la cour aucune pièce susceptible de caractériser l'existence d'un tel préjudice. Il sera ajouté au jugement sur ce point.

-Sur la demande présentée par Mme [T] tendant à ce qu'il soit ordonné le remboursement des sommes versées au titre de l'exécution du jugement :

Il est constant qu' un arrêt réformant un jugement de condamnation, qui a été exécuté, constitue un titre exécutoire pour le remboursement des sommes versées en vertu de la décision de première instance. Il n'y a pas lieu en conséquence à ordonner le remboursement des sommes versées en application du jugement.

- Sur les dépens et les frais irrépétibles :

Le jugement sera infirmé sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

La SA Predica, qui succombe en ses prétentions principales et dont l'erreur est à l'origine de la procédure, sera condamnée aux dépens de première instance. Elle sera en outre condamnée à payer, en application de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 2500 euros à Mme [T], la somme de 1500 euros à M. [X] [D], la somme de 1500 euros à M. [B] [D] et la somme de 1500 euros à Mme [P] [D], au titre des frais irrépétibles exposés en première instance.

La SA Predica supportera également les entiers dépens d'appel. Elle sera condamnée à payer, en application de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 3000 euros à Mme [T], la somme de 2000 euros à M. [X] [D], la somme de 2000 euros à M. [B] [D] et la somme de 2000 euros à Mme [P] [D], au titre des frais irrépétibles exposés pour les besoins de la procédure devant la cour.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement,

- Déclare irrecevables les conclusions présentées en défense par M. [V] [D] ;

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a :

-Déclaré Mme [M] [T] recevable ;

-Débouté Mme [M] [T] de sa demande de condamnation de la SA Predica au titre des dispositions de l'article L. 132-23-1 du code des assurances ;

Infirme le jugement pour le surplus et statuant à nouveau,

-Condamne la SA Predica à payer à Mme [S] [T] veuve [D] la somme de 34'778,48 euros en exécution du contrat d'assurance-vie souscrit par [G] [D] le 23 novembre 2000 ;

-Condamne la SA Predica à payer à Mme [S] [T] veuve [D] la somme de 2500 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral ;

-Condamne la SA Predica aux dépens de première instance, cette condamnation étant assortie au profit de maître Fabien Purseigle du droit de recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont il a fait l'avance sans avoir reçu provision, en application de l'article 699 du code de procédure civile ;

-Condamne la SA Predica à payer à Mme [S] [T] veuve [D] la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles exposés en première instance ;

-Condamne la SA Predica à payer la somme de 1500 euros à Mme [P] [D], la somme de 1500 euros à M. [X] [D] et la somme de 1500 euros à M. [B] [D] au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles exposés en première instance ;

Ajoutant au jugement,

-Condamne M. [X] [D] à payer à la SA Predica, en remboursement des sommes indûment perçues au titre du contrat n° 868 05037603 921 souscrit par [G] [D], la somme de 8694,48 euros ;

-Condamne M. [B] [D] à payer à la SA Predica, en remboursement des sommes indûment perçues au titre du contrat n° 868 05037603 921 souscrit par [G] [D], la somme de 8694,48 euros ;

-Condamne M. [V] [D] à payer à la SA Predica, en remboursement des sommes indûment perçues au titre du contrat n° 868 05037603 921 souscrit par [G] [D], la somme 8694,62 euros ;

-Condamne Mme [P] [D] veuve [E] à payer à la SA Predica, en remboursement des sommes indûment perçues au titre du contrat n° 868 05037603 921 souscrit par [G] [D], la somme de 8694,91 euros ;

-Déboute M. [B] [D], Mme [P] [D] veuve [E] et M. [X] [D] de leurs demandes de dommages et intérêts ;

-Dit n'y avoir lieu à ordonner le remboursement des sommes versées par Mme [M] [T] en exécution du jugement entrepris ;

-Condamne la SA Predica aux dépens d'appel cette condamnation étant assortie au profit de maître Fabien Purseigle du droit de recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont il a fait l'avance sans avoir reçu provision, en application de l'article 699 du code de procédure civile ;

-Condamne la SA Predica à payer à Mme [S] [T] veuve [D] la somme de 3000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés pour les besoins de la procédure devant la cour d'appel ;

-Condamne la SA Predica à payer la somme de 2000 euros à Mme [P] [D], la somme de 2000 euros à M. [X] [D] et la somme de 2000 euros à M. [B] [D] en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés pour les besoins de la procédure devant la cour d'appel.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Riom
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22/02268
Date de la décision : 09/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 16/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-09;22.02268 ?
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