COUR D'APPEL
DE RIOM
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
Du 19 mars 2024
N° RG 22/01079 - N° Portalis DBVU-V-B7G-F2DC
-DA- Arrêt n° 133
[W] [B] / Compagnie d'assurance ALLIANZ IARD
Jugement au fond, origine TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de CLERMONT-FERRAND, décision attaquée en date du 13 Mai 2022, enregistrée sous le n° 22/00086
Arrêt rendu le MARDI DIX NEUF MARS DEUX MILLE VINGT QUATRE
COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :
M. Philippe VALLEIX, Président
M. Daniel ACQUARONE, Conseiller
Mme Laurence BEDOS, Conseiller
En présence de :
Mme Céline DHOME, greffier lors de l'appel des causes Mme Marlène BERTHET, greffier lors du prononcé
ENTRE :
M. [W] [B]
[Adresse 5]
[Localité 1]
Représenté par Maître Juliette POGLIANI de la SCP LAFOND- POGLIANI- BORDAS, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/004592 du 03/06/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de CLERMONT-FERRAND)
APPELANT
ET :
Compagnie d'assurance ALLIANZ IARD
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentée par Maître Jean-Michel DE ROCQUIGNY de la SCP COLLET DE ROCQUIGNY CHANTELOT BRODIEZ GOURDOU & ASSOCIES, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
Timbre fiscal acquitté
INTIMEE
DÉBATS :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 01 février 2024, en application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. ACQUARONE, rapporteur.
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 19 mars 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par M. VALLEIX, président et par Mme BERTHET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
I. Procédure
M. [W] [B] et son assureur la compagnie ALLIANZ IARD sont en litige à propos du vol d'un véhicule automobile de marque Peugeot, type 205 GTI 1,9 l.
Devant le refus de l'assureur de prendre en charge ce sinistre, M. [B] l'a attrait devant le tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand suivant assignation du 5 janvier 2022.
La compagnie ALLIANZ IARD n'ayant pas constitué avocat devant le tribunal judiciaire, celui-ci a rendu la décision suivante le 13 mai 2022 :
« Le tribunal statuant publiquement par jugement réputé contradictoire et en premier ressort,
DÉBOUTE Monsieur [W] [B] de l'intégralité de ses demandes, CONDAMNE Monsieur [W] [B] aux dépens. »
Dans les motifs de sa décision le tribunal judiciaire a écrit :
En l'espèce, Monsieur [B] se prévaut d'un contrat d'assurance conclu avec ALLIANZ IARD ; force est cependant de relever que ce contrat n'est pas produit aux débats.
Dès lors, il convient de débouter Monsieur [B] de sa demande.
***
M. [W] [B] a fait appel de cette décision le 23 mai 2022, précisant :
« Objet/Portée de l'appel : Il est fait appel du jugement du 13 mai 2022 en ce qu'il a débouté Monsieur [B] de l'intégralité de ses demandes et condamné Monsieur [B] aux dépens. »
Dans ses conclusions ensuite du 15 novembre 2022 M. [W] [B] demande à la cour de :
« Vu les articles 1193 et suivants du Code Civil
Vu les pièces versées aux débats
INFIRMER le jugement déféré en ce qu'il a débouté Monsieur [B] de ses demandes.
EN CONSÉQUENCE :
JUGER Monsieur [B] recevable en sa demande.
CONDAMNER la société ALLIANZ IARD à lui payer la somme de 12.000 € au titre de son indemnisation.
CONDAMNER la société ALLIANZ IARD à lui payer la somme de 1.000 € en réparation de son préjudice moral pour résistance abusive.
DÉBOUTER la société ALLIANZ IARD de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.
CONDAMNER la société ALLIANZ IARD à lui payer la somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du CPC.
CONDAMNER la société ALLIANZ IARD aux entiers dépens. »
***
Pour sa défense, dans des conclusions du 7 octobre 2022 la compagnie ALLIANZ IARD demande à la cour de :
« CONFIRMER le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
CONDAMNER Monsieur [B] à porter et payer à la compagnie ALLIANZ la somme de 2 500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu'aux entiers dépens. »
***
Une ordonnance du 14 décembre 2023 clôture la procédure.
II. Motifs
Le premier juge avait débouté M. [W] [B] au motif qu'il ne produisait pas le contrat d'assurance dont il se disait titulaire auprès de la compagnie ALLIANZ. Devant la cour, M. [B] verse ce document, d'où il résulte que le véhicule automobile de marque Peugeot, modèle 205 GTI, immatriculé [Immatriculation 3], était assuré par lui auprès de la compagnie ALLIANZ depuis le 1er juillet 2020. Les dispositions particulières montrent que M. [B] est le souscripteur et l'unique conducteur déclaré. Le contrat comporte notamment une garantie pour le risque vol avec une franchise de 249 EUR.
Soupçonnant cependant une malversation dont elle ne définit pas très clairement les contours, la compagnie ALLIANZ refuse toute indemnisation à M. [B], au motif qu'il ne justifie pas être propriétaire du véhicule pour lequel il a déclaré un vol, étant considéré que le certificat d'immatriculation n'est pas un titre de propriété. Elle lui reproche aussi de ne pas fournir un justificatif de paiement, alors que la voiture aurait été réglée au moyen de 12 000 EUR en espèces, ni aucun élément concernant l'état du véhicule.
Il convient de rappeler les textes qui régissent la matière. Selon l'article L. 121-1 alinéa premier du code des assurances, l'assurance relative aux biens est un contrat d'indemnité et l'indemnité due par l'assureur à l'assuré ne peut pas dépasser le montant de la valeur de la chose assurée au moment du sinistre. L'article L. 121-6 précise que toute personne ayant intérêt à la conservation d'une chose peut la faire assurer, et tout intérêt direct ou indirect à la non-réalisation d'un risque peut faire l'objet d'une assurance. Enfin selon l'article 1134, devenu 1103, du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.
À juste titre M. [B] fait enfin observer qu'à aucun moment lors de la souscription de son contrat d'assurance la compagnie ALLIANZ ne s'est préoccupée de savoir de quelle manière le véhicule avait été acquis. Il produit en tout cas à son dossier le certificat d'immatriculation du véhicule, dont on voit qu'il a été établi à son nom le 7 juillet 2020, ainsi que le certificat de contrôle technique effectué le même jour, ne mentionnant aucun défaut. Au jour de ce contrôle il est noté que le véhicule a parcouru 227 592 km. M. [B] verse également le procès-verbal de la déclaration de vol, établi au commissariat de police de Riom le 3 août 2020 (PV nº 2020/1577).
En l'état de ces éléments, l'argumentation de l'assureur méconnaît la jurisprudence pourtant ancienne et constante de la Cour de cassation suivant laquelle les qualités de la possession sur le véhicule litigieux sont indifférentes, dès lors que l'assuré, ayant intérêt à sa conservation, avait fait assurer à son propre bénéfice ce véhicule qui n'était revendiqué par quiconque à son encontre (1re Civ., 25 avril 1990, nº 88-17.699, Bulletin 1990 I nº 82 ; 2e Civ., 15 janvier 2015, nº 13-27.109 ; 2e Civ., 31 août 2022, nº 20-16.701).
En conséquence, la compagnie ALLIANZ doit sa garantie à M. [B] au titre du vol de son véhicule Peugeot 205 GTI.
Concernant le montant de l'indemnisation, M. [B] produit un document tiré d'une source Internet d'où il ressort que la voiture Peugeot 205 GTI 1,9 l bénéficie d'une cote soutenue auprès des amateurs de véhicules sportifs ayant marqué l'histoire de l'automobile, moyennant quoi un véhicule en bon état se négocie au minimum à 10 000 EUR, et en moyenne à 15 000 EUR. En l'espèce, le certificat de contrôle technique ne mentionne aucun défaut, moyennant quoi la demande de l'assuré à hauteur de 12 000 EUR apparaît raisonnable. Étant donné la franchise contractuelle de 249 EUR pour le risque vol, l'assureur devra donc payer à M. [B] la somme de : 12 000 ' 249 = 11 751 EUR.
Pour avoir refusé sa garantie, au prétexte de motifs assez peu clairs qui témoignent plutôt d'une méfiance non justifiée, l'assureur a abusivement résisté à la mise en 'uvre de ses propres obligations, moyennant quoi il devra payer en outre à M. [B] la somme de 1000 EUR à titre de dommages-intérêts.
1500 EUR sont justes en application de l'article 700 du code de procédure civile.
La compagnie ALLIANZ supportera les dépens de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement et par arrêt contradictoire,
Infirme le jugement ;
Statuant à nouveau, condamne la compagnie ALLIANZ à payer à M. [W] [B] :
' La somme principale de 11 751 EUR en exécution du contrat d'assurance ;
' La somme de 1000 EUR à titre de dommages-intérêts ;
Condamne la compagnie ALLIANZ à payer à M. [W] [B] la somme de 1500 EUR en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la compagnie ALLIANZ aux dépens de première instance et d'appel ;
Déboute les parties de leurs autres demandes.
Le greffier Le président