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04/07/2023 | FRANCE | N°21/01378

France | France, Cour d'appel de Riom, 1ère chambre, 04 juillet 2023, 21/01378


COUR D'APPEL

DE RIOM

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE







Du 04 juillet 2023

N° RG 21/01378 - N° Portalis DBVU-V-B7F-FT5T

-PV- Arrêt n°



[V] [E] / [Y] [C], [N] [R], [X] [D], S.A.R.L. JORDYL RENOVE, S.A.R.L. IMMOBILIER SYSTEME

Jugement au fond, origine TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de MOULINS, décision attaquée en date du 18 Mai 2021, enregistrée sous le n° 16/00512



Arrêt rendu le MARDI QUATRE JUILLET DEUX MILLE VINGT TROIS



COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

M. Ph

ilippe VALLEIX, Président

M. Daniel ACQUARONE, Conseiller

M. François KHEITMI, Magistrat Honoraire exerçant les fonctions de Conseiller



En présence de ...

COUR D'APPEL

DE RIOM

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

Du 04 juillet 2023

N° RG 21/01378 - N° Portalis DBVU-V-B7F-FT5T

-PV- Arrêt n°

[V] [E] / [Y] [C], [N] [R], [X] [D], S.A.R.L. JORDYL RENOVE, S.A.R.L. IMMOBILIER SYSTEME

Jugement au fond, origine TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de MOULINS, décision attaquée en date du 18 Mai 2021, enregistrée sous le n° 16/00512

Arrêt rendu le MARDI QUATRE JUILLET DEUX MILLE VINGT TROIS

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

M. Philippe VALLEIX, Président

M. Daniel ACQUARONE, Conseiller

M. François KHEITMI, Magistrat Honoraire exerçant les fonctions de Conseiller

En présence de :

Mme Marlène BERTHET, greffier lors de l'appel des causes et de Mme Céline DHOME lors du prononcé

ENTRE :

Mme [V] [E]

[Adresse 7]

[Localité 2]

Représentée par Maître Jean-Michel DE ROCQUIGNY de la SCP COLLET DE ROCQUIGNY CHANTELOT BRODIEZ GOURDOU & ASSOCIES, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

Timbre fiscal acquitté

APPELANTE

ET :

M. [Y] [C]

[Adresse 8]

[Localité 10]

et

Mme [N] [R]

[Adresse 9]

[Localité 10]

Représentés par Maître Laurent GARD de la SCP VGR, avocat au barreau de MOULINS

Timbre fiscal acquitté

M. [X] [D]

[Adresse 3]

[Localité 1]

et

S.A.R.L. JORDYL RENOVE

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentée par Maître Elodie FALCO, avocat au barreau de MOULINS

Timbre fiscal acquitté

S.A.R.L. IMMOBILIER SYSTEME

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par Maître Sébastien RAHON, avocat au barreau de CLERMONT- FERRAND et par Maître Stéphane MESONES, avocat au barreau de MOULINS

Timbre fiscal acquitté

INTIMES

DÉBATS :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 15 mai 2023, en application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. VALLEIX et M. ACQUARONE, rapporteurs.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 04 juillet 2023 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par M. VALLEIX, président et par Mme DHOME, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE :

Par acte authentique du 12 mai 2010, Mme [V] [K] veuve [E] a fait l'acquisition d'un appartement (lot n° 8) ayant pour dépendances une cave (lot n° 11) et un garage (lot n° 16), dépendant d'un immeuble de copropriété cadastré section AW numéro [Cadastre 5] et situé [Adresse 6] à [Localité 1] (Allier). Cette acquisition a été faite moyennant le prix total de 203.000,00 € dont 195.000,00 € pour la partie immobilière et 8.000,00 € pour les meubles et objets mobiliers. Les travaux initiaux de plomberie de cet appartement avaient été effectués par M. [X] [D] et la SARL JOR DYL RENOVE. Mme [V] [K] veuve [E] a ensuite revendu cet appartement et ses dépendances par l'intermédiaire de la SARL IMMOBILIER SYSTÈME à M. [Y] [C] et Mme [N] [R] par acte authentique du 22 décembre 2014 moyennant le prix total de 222.500,00 € dont 212.500,00 € pour la partie immobilière et 10.000,00 € pour les biens mobiliers.

Se plaignant, d'une part d'une très forte odeur d'égouts régnant en permanence dans l'appartement dès son installation dans les lieux en 2015 et accentuée les jours de pluie et d'autre part de la persistance d'infiltrations d'eau dans le grenier, et arguant en conséquence de l'existence de vices cachés, M. [C] et Mme [R] ont, par acte d'huissier de justice signifié le 22 août 2016, assigné Mme [E] devant le tribunal de grande instance de Moulins afin d'obtenir à titre principal la réduction du prix de cette vente immobilière par application des articles 1641 et 1146 du Code civil.

Suivant une ordonnance rendue le 21 février 2017, le Juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Moulins a ordonné une mesure d'expertise judiciaire, subséquemment confiée le 27 mars 2017 à M. [W] [L], architecte-expert près la cour d'appel de Riom. À la demande de Mme [E], cette mesure d'expertise judiciaire a été étendue le 21 novembre 2017 à la société IMMOBILIER SYSTÈME, qui elle-même en a obtenu l'extension le 20 mars 2018 à la société JOR DYL RENOVE et à M. [D]. Après avoir rempli sa mission, l'expert judiciaire commis a établi son rapport définitif le 6 mars 2019, préconisant un certain nombre de travaux qui ont été exécutés en cours de procédure. Arguant que ces travaux n'avaient pas été suffisants, Mme [E] a maintenu ses demandes initiales.

C'est dans ces conditions que, suivant un jugement n° RG-16/00512 rendu le 18 mai 2021, le tribunal judiciaire de Moulins a :

- déclaré recevable et bien fondée l'action en résolution de vente immobilière engagée par M. [C] et Mme [R] ;

- prononcé la nullité de la vente intervenue par acte authentique du 22 décembre 2014 entre Mme [E], venderesse, et M. [C] et Mme [R], acquéreurs, portant sur l'appartement et ses dépendances au sein de l'immeuble de copropriété, deuxième étage bâtiment A, situé [Adresse 6] à [Localité 1] (Allier), moyennant le prix de 222.500,00 € ;

- condamné Mme [E] à restituer à M. [C] et Mme [R] le prix susmentionné de 222.500,00 €, à charge pour ces derniers de restituer cet appartement ;

- ordonné à M. [C] et Mme [R] de faire procéder à la publication de ce jugement au service de la Publicité foncière ;

- condamné Mme [E] à payer au profit de M. [C] et Mme [R] les sommes suivantes :

* 7.395,88 € au titre d'un coût de travaux effectués sur les réseaux d'assainissement [fosse septique] ;

* 168,30 € au titre d'un coût de travaux de toiture ;

* 2.000,00 € à titre de dommages-intérêts en réparation de leur préjudice moral ;

* 2.000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- rejeté des exceptions de nullité soulevées par la société IMMOBILIER SYSTÈME d'une part et par M. [D] et la société JOR DYL RENOVE d'autre part ;

- rejeté des fins de non-recevoir soulevées par la société IMMOBILIER SYSTÈME d'une part et par M. [D] et la société JOR DYL RENOVE d'autre part ;

- condamné la société IMMOBILIER SYSTÈME à garantir Mme [E] de toutes les condamnations prononcées à son encontre en principal, intérêts, frais et accessoires, à l'exception du préjudice résultant de la restitution et des condamnations relatives aux travaux de toiture et aux travaux de suppression de la fosse septique ;

- condamné la société IMMOBILIER SYSTÈME à payer au profit de Mme [E] une indemnité de 1.000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné in solidum M. [D] et la société JOR DYL RENOVE à garantir la société IMMOBILIER SYSTÈME de toutes condamnations prononcées à son encontre en principal, intérêts, frais et accessoires ;

- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la SARL IMMOBILIER SYSTÈME ;

- condamné Mme [E] aux entiers dépens de l'instance, en ce compris les frais de la mesure d'expertise judiciaire susmentionnée ainsi que de trois procès-verbaux de constats d'huissier de justice du 27 avril 2015, du 5 octobre 2015 et du 18 juin 2020 ;

- condamné la société IMMOBILIER SYSTÈME aux dépens relatifs à l'appel en garantie par Mme [V] [K] veuve [E] ;

- condamné in solidum M. [D] et la société JOR DYL RENOVE aux dépens relatifs à l'appel en garantie de la société IMMOBILIER SYSTÈME ;

- dit n'y avoir lieu à prononcer l'exécution provisoire de la décision.

Par déclaration formalisée par le RPVA le 24 juin 2021, le conseil de Mme [E] a interjeté appel de ce jugement, l'appel portant sur l'annulation du contrat de vente immobilière du 22 décembre 2014 et ses conséquences de restitutions de prix et de chose et de publicité foncière, sur l'ensemble des condamnations pécuniaires prononcé à son encontre et sur le rejet de sa demande de défraiement au titre des frais irrépétibles.

' Par dernières conclusions d'appelant notifiées par le RPVA le 17 janvier 2022, Mme [V] [K] veuve [E] a demandé de :

' recevoir son appel et le déclarer fondé ;

' [à titre principal] ;

' « METTRE à néant » le jugement du 18 mai 2021 du tribunal judiciaire de Moulins en ce qui concerne la résolution de cette vente immobilière et les conséquences qui s'y attachent ;

' débouter M. [C] et Mme [R] de l'ensemble de leurs demandes de résolution de vente, de restitution de prix et de dommages-intérêts ;

' lui donner acte qu'elle accepte de verser la somme de 168,30 € au titre des réparations liées à une fuite en toiture ;

' [débouter] M. [C] et Mme [R] de leurs autres demandes ;

' condamner M. [C] et Mme [R] à lui payer une indemnité de 5.000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais d'expertise judiciaire ;

' à titre subsidiaire ;

' confirmer ce même jugement en ce qu'il a retenu la responsabilité de la société IMMOBILIER SYSTÈME ;

' condamner la société IMMOBILIER SYSTÈME à la garantir de toutes condamnations pouvant être prononcées à son encontre du fait de cette instance en principal, intérêts, frais et accessoires, au profit de M. [C] et Mme [R], à l'exclusion de celle concernant la restitution du prix ;

' condamner la société IMMOBILIER SYSTÈME à lui payer une indemnité de 5.000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais d'expertise judiciaire et de constats [d'huissier de justice].

' Par dernières conclusions d'intimé et d'appel incident notifiées par le RPVA le 31 janvier 2022, M. [Y] [C] et Mme [N] [R] ont demandé de :

' au visa des articles 1231-1, 1641 et suivants, 2239, 2241, 2224, 1137 et 1240 du Code civil ;

' débouter Mme [E] de son appel ;

' confirmer le jugement entrepris en ce qui concerne la nullité de la vente du 22 décembre 2014 et les condamnations de Mme [E] à leur restituer le prix de vente de 222.500,00 € en contrepartie de la restitution de l'appartement et à leur payer les sommes précitées de 7.395,88 € au titre des travaux d'assainissement, de 2.000,00 € à titre de dommages-intérêts et de 2.000,00 € au titre des frais irrépétibles, outre condamnations aux entiers dépens de l'instance ;

' infirmer ce même jugement en ce qu'il a condamné Mme [E] au paiement de la somme de 168,30 € au titre des désordres affectant la toiture ;

' statuer de nouveau en déclarant recevable leur appel incident et en condamnant Mme [E] au paiement de la somme de 8.385,74 en réparation des désordres affectant la toiture ;

' à titre de demande nouvelle en cause d'appel, condamner Mme [E] à leur payer la somme de 5.395,76 € en réparation de leur préjudice matériel ;

' en toutes hypothèses, condamner Mme [E] à leur payer une indemnité de 4.000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens de l'instance.

' Par dernières conclusions d'intimé et d'appel incident notifiées par le RPVA le 9 décembre 2021, la SARL IMMOBILIER SYSTÈME a demandé de :

' au visa des articles 1648, 2224, 1231 et 1792 du Code civil et de l'article L.110-4 du code de commerce ;

' à titre liminaire ;

' confirmer le jugement déféré en ce qu'il a retenu le moyen tiré de la prescription de l'action engagée par Mme [E] à son encontre sur le fondement des vices cachés et juger que cette action est prescrite, par application de l'article 1648 du Code civil et de l'article L.110-4 du code de commerce ;

' réformer le jugement déféré en ce qu'il n'a pas fait droit au second moyen de prescription et juger que l'action contractuelle de droit commun engagée par Mme [E] à son encontre est prescrite, et donc irrecevable, sur le fondement de l'article 2224 du Code civil ;

' à titre subsidiaire sur le fond ;

' réformer le jugement entrepris en ce qu'il a reconnu l'existence d'un vice caché rendant le bien impropre à sa destination et en ce qu'il a retenu à son encontre la responsabilité décennale prévue à l'article 1792 du Code civil et débouter en conséquence Mme [E] de l'ensemble de ses demandes dirigé à son encontre ;

' au cas où sa responsabilité serait retenue, confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a retenu la responsabilité contractuelle de M. [D] et de la société JOR DYL RENOVE au titre des articles 1231 et suivants du Code civil ou à défaut la responsabilité prévue à l'article 1792 du Code civil ;

' confirmer ce même jugement en ce qu'il a condamné M. [D] et la société JOR DYL RENOVE à la garantir de toutes condamnations pécuniaires à l'occasion de cette instance ;

' [en tout état de cause], condamner in solidum M. [D] et la société JOR DYL RENOVE à lui payer une indemnité de 5.000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

' Par dernières conclusions d'intimé et d'appel incident notifiées par le RPVA le 13 décembre 2021, M. [X] [D] et la SARL JOR DYL RENOVE ont demandé de :

' réformer le jugement déféré ;

' [à titre liminaire], constater l'intervention volontaire de la société JOR DYL RENOVE, venant aux droits de M. [D], et prononcer la mise hors de cause de ce dernier ;

' à titre principal ;

' dire que l'action contractuelle formée par la société IMMOBILIER SYSTÈME à l'encontre de la société JOR DYL RENOVE est prescrite ;

' débouter la société IMMOBILIER SYSTÈME de ses demandes formées à l'encontre de la société JOR DYL RENOVE et de M. [D] après avoir relevé que les odeurs signalées n'ont jamais fait l'état d'un constat au cours des opérations d'expertise, que les travaux réalisés par M. [D] ne sont pas à l'origine de ces odeurs, que l'origine certaine de ces odeurs proviennent du réseau collectif d'assainissement, que Mme [E] a fait procéder à des travaux de plomberie postérieurement à l'intervention de M. [D] selon facture du 30 octobre 2013, que M. [C] et Mme [R] ont fait procéder à des travaux de plomberie postérieurement à l'intervention de M. [D] selon facture du 10 juillet 2015 et qu'il n'est donc pas possible d'établir que les mauvaises odeurs proviennent de l'intervention de M. [D] et de la société JOR DYL RENOVE ;

' à titre subsidiaire, débouter la société IMMOBILIER SYSTÈME de toutes ses demandes en garantie formées à l'encontre de la société JOR DYL RENOVE sur le fondement de l'article 1792 du Code civil ;

' en tout état de cause, condamner la société IMMOBILIER SYSTÈME à payer au profit de la société JOR DYL RENOVE une indemnité de 4.000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens de l'instance.

Par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, les moyens développés par chacune des parties à l'appui de leurs prétentions respectives sont directement énoncés dans la partie MOTIFS DE LA DÉCISION.

Par ordonnance rendue le 9 mars 2023, le Conseiller de la mise en état a ordonné la clôture de cette procédure. Lors de l'audience civile collégiale du 15 mai 2023 à 14h00, au cours de laquelle cette affaire a été évoquée, chacun des conseils des parties a réitéré ses précédentes écritures. La décision suivante a été mise en délibéré au 4 juillet 2023, par mise à disposition au greffe.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1/ Questions préalables

Il n'est pas contesté que la société JOR DYL RENOVE intervient actuellement sur l'ensemble des droits et obligations de M. [D] à l'occasion de la présente instance. Ce dernier doit en conséquence effectivement être mis hors de cause, ce qui amène à infirmer le jugement de première instance sur l'ensemble des condamnations prononcées à l'encontre de ce dernier.

Aucune des parties au litige ne remet en débat en cause d'appel le rejet en première instance des exceptions de nullité soulevées par la société JOR DYL RENOVE. Ce poste de dispositif du jugement de première instance sera en conséquence purement et simplement confirmé.

2/ Sur l'action en résolution de vente pour vices cachés de M. [C] et Mme [R] à l'encontre de Mme [E]

Il résulte notamment de l'examen du rapport d'expertise judiciaire du 6 mars 2019 de M. [W] [L] que :

- les logements ayant été aménagés dans cet immeuble de copropriété ancien l'ont été en conservant les réseaux d'évacuation existants, cet immeuble étant composé de quatre niveaux : rez-de-chaussée, 1er et 2ème étages à usage d'habitation et combles (non aménagés) ;

- une grande partie des travaux de réhabilitation et d'aménagement en duplex de l'appartement litigieux ont été réalisés par la société JOR DYL RENOVE (plâtrerie, peintures, électricité, plomberie sanitaires) ;

- cet appartement situé au 2ème étage est effectivement affecté de manière anormale d'odeurs nauséabondes provenant des réseaux d'évacuation des eaux vannes (depuis les toilettes) et des eaux usées, le ballon de production d'eau chaude sanitaire étant installé dans les combles au-dessus de la cuisine et de la salle à manger ;

- lors des visites ayant précédé l'achat du 22 décembre 2014 de l'appartement, celui-ci n'était plus habité, seul l'usage régulier des installations d'évacuations pouvant permettre la perception des effets des non-conformités techniques ci-après développés ;

- plusieurs non-conformités constructives ont été ainsi constatées, en l'espèce :

* absence de siphon en limite de l'immeuble au niveau du raccordement au réseau public d'évacuation des eaux vannes et usées ;

* présence dans la cour de l'immeuble d'une fosse septique recueillant les effluents de plusieurs immeubles, dont l'altitude d'évacuation conduit dans des conditions interdites à un stockage permanent de l'ordre de 2 m d'épaisseur, la ventilation naturelle de cette fosse se réalisant par la canalisation d'évacuation des effluents de l'appartement de Mme [E] (« La présence d'une fosse se ventilant au travers de la canalisation de l'appartement et les absences de siphon sur le raccordement public sont autant de sources anormales de gaz en quantité anormalement élevée. ») ;

* évacuation des effluents de la cuisine de Mme [E] par une canalisation d'eaux pluviales ;

* remploi des canalisations collectives existantes et anciennes lors des travaux de rénovation, celles-ci étant inaptes et non adaptées à recevoir de manière mélangée les eaux usées et les eaux vannes, avec en outre réalisation des canalisations d'évacuation de l'appartement de Mme [E] dans les mêmes conditions de mélange des eaux grises et des eaux noires alors que cette conduite unique n'est au demeurant pas adaptée, aucun de ces deux réseaux d'évacuation ne possédant en outre de ventilation primaire en tête de réseau ;

* en tout état de cause, le raccordement en un même réseau des eaux grises (lavabos, lave-vaisselle, baignoires et douches) et des eaux noires (cuvette des wc), n'est pas autorisé ;

* pendant le cours de l'expertise judiciaire, un siphon a été mis en place au niveau du raccordement au réseau public et des travaux ont été effectués visant à supprimer la fonction de ventilation de la fosse de la cour par les canalisations de l'appartement de Mme [E] ;

L'article 1641 du Code civil dispose que « Le vendeur est tenu à la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus. ». tandis que l'article 1642 du Code civil dispose que « Le vendeur n'est pas tenu des vices apparents et dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même. » et que l'article 1643 du Code civil dispose que « [le vendeur] est tenu des vices cachés, quand même il ne les aurait pas connus , à moins que, dans ce cas, il n'ait stipulé qu'il ne sera obligé à aucune garantie. ».

Concernant la sanction de ces obligations, l'article 1644 du Code civil dispose que « Dans le cas des articles 1641 et 1643, l'acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire restituer une partie du prix. ». Par ailleurs, il résulte des dispositions de l'article 1645 du Code civil que « Si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu'il a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l'acheteur. » et de celles de l'article 1646 du Code civil que « Si le vendeur ignorait les vices de la chose, il ne sera tenu qu'à la restitution du prix, et à rembourser à l'acquéreur les frais occasionnés par la vente. ». Enfin, l'article 1648 alinéa 1er du Code civil dispose que « L'action résultant des vices rédhibitoires doit être intentée par l'acquéreur dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice. ».

L'action en résolution de vente de l'appartement litigieux pour vices cachés initiée par M. [C] et Mme [R] à l'encontre de Mme [E] apparaît d'abord normalement recevable, le délai biennal de l'article 1648 alinéa 1er du Code civil ne s'étant pas écoulé entre la date du 22 décembre 2014 de l'acte authentique de vente entre les parties et celle du 22 août 2016 de l'assignation en première instance.

En l'occurrence sur le fond, il ressort des débats que M. [C] et Mme [R] rapportent suffisamment la preuve, qui leur incombe, que l'ensemble de l'appartement litigieux était affecté de manière récurrente, dès leur prise de possession de l'appartement en début d'année 2015, par des odeurs d'égouts perceptibles de manière plus ou moins importante selon les pièces. Ces effluents nauséabonds ont été signalés dans un procès-verbal d'assemblée générale de copropriété du 14 février 2013 (« odeur d'égout ») , ont été consignés dans un constat d'huissier de justice du 27 avril 2015 (« En entrant dans l'appartement, une odeur nauséabonde d'égout est très perceptible. / (') / L'odeur est toujours très perceptible et extrêmement désagréable. ») et ont été amplement déterminés dans leurs causes lors des opérations d'expertise judiciaire confiées à M. [L], celui-ci ayant organisé quatre réunions d'expertise sur le site litigieux le 5 mai 2017, le 25 octobre 2017, le 16 janvier 2018 et le 20 juillet 2018.

En effet, indépendamment de toute perception sensorielle personnelle, l'expert judiciaire objective de manière techniquement très argumentée ces troubles olfactifs en décrivant un mécanisme de reflux incessant de gaz de décompositions de matières organiques depuis le trop-plein de la fosse septique de la cour dénuée de tout dispositif propre de ventilation. Il ajoute que le canal du circuit d'évacuation des eaux usées et des eaux vannes de l'appartement litigieux est techniquement non conforme et vétuste, que l'absence de siphon au point de raccordement du réseau public d'évacuation des eaux usées et vannes contribue à ce mécanisme de reflux de gaz pestilentiels et que l'absence de dissociation entre l'évacuation des eaux usées et celle des eaux vannes dans les circuits privatifs de l'appartement ainsi que l'absence de dispositifs ventilation secondaire sur ces circuits de l'appartement contribue davantage à la survenance de ces effusions nauséabondes. Il apparaît dès lors indéniable que ces phénomènes récurrents et pestilentiels sont bel et bien existants du fait de l'ensemble de ces non-conformités aux règles de l'art, en dépit des attestations contraires produites par Mme [E] alors que cette dernière a sollicité à cet effet des personnes qui n'ont été que des visiteurs occasionnels et ponctuels de son appartement. Cet appartement était donc réellement impropre à sa destination d'habitabilité lors de la vente du 22 décembre 2014.

Il est par ailleurs démontré que ces effluents nauséabonds ne pouvaient être perceptibles que dans le cadre de l'utilisation de l'appartement qui n'était pas habité lors de la vente du 22 décembre 2014, rendant ainsi impossible leur détection lors des visites ayant précédé la négociation et la conclusion de cette vente immobilière. En effet, l'expert judiciaire explique de manière suffisamment claire et explicite que les effets de la chasse d'eau au niveau des wc ne sont pas compensés par les entrées d'air nécessaires, provoquant ainsi un désiphonage permettant aux gaz provenant des canalisations de pénétrer et de se répandre dans l'appartement.

Quels que soient le caractère le cas échéant intermittent ou irrégulier de ces désordres ou le coût relativement peu élevé de sa remédiation, M. [C] et Mme [R] sont dès lors en droit de se prévaloir de leur caractère rédhibitoire et donc de la résolution de cette vente immobilière en raison de vices cachés au titre de l'action résolutoire par application des dispositions précitées des articles 1641 et suivants du Code civil, quelle que soit la teneur des travaux de mise en conformité ayant été ensuite réalisés par la pose d'un siphon au point de raccordement au réseau public et en ce qui concerne la fosse septique située dans la cour de l'immeuble.

Par ailleurs, compte tenu du caractère récurrent de ces remontées d'odeurs pestilentielles à l'intérieur de l'ensemble de l'appartement, Mme [E] ne peut sérieusement contester en avoir méconnu l'existence et toute la mesure de leur incommodité lors de la vente immobilière du 22 décembre 2014. Dans ces conditions, la clause d'exonération de garantie de vices cachés figurant dans contrat de vente immobilière n'apparaît pas opposable tandis qu'il sera fait application à son encontre des dispositions précitées de l'article 1645 du Code civil, étant dès lors considéré que Mme [E] avait parfaitement connaissance de la persistance de ce problème olfactif passé et présent qu'un simple curage SAVAC depuis le raccordement de réseau public n'avait pu de toute évidence suffire à résorber. Elle se devait donc de signaler expressément ce sévère désagrément en 2014 au titre de l'obligation contractuelle d'information et de loyauté du vendeur lorsque M. [C] et Mme [R] visitaient cet appartement dans le cadre de la négociation de cette vente immobilière et lorsque ces derniers en formalisaient l'acquisition par acte sous seing privé puis par acte authentique.

Dans ces conditions, le jugement de première instance sera confirmé en ce qu'il a prononcé la nullité pour vices cachés de la vente immobilière du 22 décembre 2014 au titre de l'option résolutoire exercée par les acquéreurs et condamné en conséquence Mme [E] à en restituer à M. [C] et Mme [R] le prix de 222.500,00 € en contrepartie de la restitution de l'appartement et de ses dépendances, en application des dispositions de l'article 1644 du Code civil, avec pour conséquence l'obligation pour M. [C] et Mme [R] de publication du jugement au service de la Publicité foncière.

Eu égard par ailleurs à l'application des dispositions de l'article 1645 du Code civil, le jugement de première instance sera confirmé en ce qu'il a condamné Mme [E] à payer au profit M. [C] et Mme [R] la somme de 7.395,88 € correspondant au coût des travaux effectués sur le réseau d'assainissement (factures respectives du 30 juin 2015 de 102,87 €, du 10 juillet 2015 de 186,08 €, appels de fonds concernant la fosse d'aisance du 5 octobre 2007 de 954,24 € et du 2 février 2018 de 1.188,10 € et travaux de mise aux normes suite à expertise d'un montant de 4.964,59 €).

Le préjudice moral souffert par M. [C] et Mme [R] du fait de cette atteinte à l'habitabilité des lieux résulte de l'objectivation des phénomènes invasifs d'odeurs pestilentielles et ne peut donc être contesté dans son principe. Le jugement de première instance sera en conséquence confirmé en ce qu'il en a reconnu le principe. En l'occurrence les dommages-intérêts alloués sur ce chef à hauteur de la somme de 2.000,00 € apparaissent avoir été correctement et justement appréciés. Le jugement de première instance sera en conséquence confirmé sur ce chef de décision.

3/ Sur la demande formée par M. [C] et Mme [R] à l'encontre de Mme [E] en ce qui concerne le grief de fuites en toitures

Si le compromis de vente mentionnait que la venderesse s'engageait à assumer le coût d'une réparation de fuite dans les combles, alors que cette clause n'a pas été reprise dans l'acte authentique de vente du 22 décembre 2014, le premier juge a répondu que Mme [E] ne pouvait en tout état de cause s'engager sur un coût de réparation concernant des parties communes de l'immeuble relevant des prérogatives de la copropriété, fixant toutefois ce poste d'indemnisation à la somme limitée à 168,30 €. M. [C] et Mme [R] réclament sur ce poste la somme totale de 8.385,74 € correspondant aux coûts de reprise des désordres ayant affecté la toiture de l'immeuble.

En l'occurrence, la résolution de cette vente immobilière entraîne en tout état de cause de plein droit la remise des parties en l'état où elles se trouvaient antérieurement à sa conclusion. Indépendamment donc de la valeur contractuelle de cet engagement contracté dans le seul compromis de vente, les frais assumés par M. [C] et Mme [R] dans la réfection de cette toiture commune à concurrence de leurs tantièmes de copropriété sont donc en réalité imputables à Mme [E]. Ces frais exceptionnellement réclamés par le syndic de copropriété au titre de la réfection de la toiture commune de l'immeuble correspondent précisément aux tantièmes de copropriété des propriétaires des lots constitutifs de cet appartement et de ses dépendances. Ces frais ont été exposés dans les conditions suivantes : appel de fonds du 12 janvier 2017 à hauteur de 2.617,46 €, appel de fonds du 1er avril 2017 à hauteur de 2.617,46 €, appel de fonds du 11 décembre 2017 à hauteur de 1.556,56 € et appel de fonds du 6 février 2018 à hauteur de 1.556,56 €. Il convient d'y ajouter le prorata de la facture Bonnet d'intervention sur toiture du 3 mars 2014 de 168,20 € à hauteur de la somme de 37,70 €, ce qui justifie en définitive le remboursement de la somme totale précitée de 8.385,74 € par Mme [E] au profit de M. [C] et Mme [R].

Le jugement de première instance sera en conséquence infirmé en ce qu'il a rejeté cette demande de remboursement formée par M. [C] et Mme [R] à hauteur de la somme totale précitée de 8.385,74 €, cette créance de remboursement de charges exceptionnelles de copropriété pour travaux concernant les parties communes de l'immeuble apparaissant au contraire justifiée en ce qu'elle est en réalité imputable à Mme [E] en conséquence de l'effet résolutoire de l'annulation de cette vente immobilière.

La demande Mme [E] tendant à faire constater qu'elle accepte de verser à M. [C] et Mme [R] la somme de 168,30 € au titre de ces travaux de rénovation de toiture devient dès lors sans objet.

4/ Sur la demande formée par M. [C] et Mme [R] à l'encontre de Mme [E] en allégation de préjudice matériel

Pour la première fois en cause d'appel, M. [C] et Mme [R] réclament à Mme [E] la somme totale distincte de 5.395,76 € en allégation de préjudice matériel, notamment pour n'avoir pu vendre l'appartement au cours de la procédure de première instance du fait des problèmes d'odeurs affectant le bien et pour avoir dû assumer des charges consécutives à la prise d'un nouveau logement tout en continuant d'assumer les charges d'emprunt bancaire immobilier, de copropriété et fiscales de l'appartement délaissé.

L'article 564 du code de procédure civile dispose que « À peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait. » tandis que l'article 565 du code de procédure civile dispose que « Les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent. » et que l'article 566 du code de procédure civile dispose que « Les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire. ».

En l'occurrence, l'ensemble de ces postes de frais étant parfaitement prévisible ou déterminable lors de l'introduction de l'instance, cette réclamation pécuniaire en allégation de préjudice matériel distinct constitue une demande nouvelle en cause d'appel sans tendre aux mêmes fins que les autres demandes pécuniaires en restitution de prix de vente, en allocation de dommages-intérêts pour préjudice moral et en remboursement des charges exceptionnelles de copropriété pour travaux de la toiture relevant des parties communes de l'immeuble ni en constituer l'accessoire ou le complément. Ce poste de demande sera en conséquence jugé irrecevable.

5/ Sur l'appel en garantie de la société Immobilier Système par Mme [E]

La SARL IMMOBILIER SYSTÈME ne conteste pas venir aux droits et obligations de la SARL AGENCE DES DUCS, par l'intermédiaire de laquelle Mme [E] avait négocié l'achat de cet appartement acquis par acte authentique du 12 mai 2010. La SARL AGENCE DES DUCS avait préalablement fait effectuer des travaux de rénovation sur l'ensemble de cet appartement, incluant les postes litigieux de plomberie et de sanitaires.

Il résulte des dispositions de l'article 1792 du Code civil que « Tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination. / Une telle responsabilité n'a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère. » et notamment des précisions apportées par les dispositions de l'article 1792-1 du Code civil qu'« Est réputé constructeur de l'ouvrage : / (') / 2° Toute personne qui vend, après achèvement, un ouvrage qu'elle a construit ou fait construire (') ».

Il résulte par ailleurs des dispositions de 1792-2 du Code civil que « La présomption de responsabilité établie par l'article 1792 s'étend également aux dommages qui affectent la solidité des éléments d'équipement d'un ouvrage, mais seulement lorsque ceux-ci font indissociablement corps avec les ouvrages de viabilité de fondation, d'ossature, de clos ou de couvert. / Un élément d'équipement est considéré comme formant indissociablement corps avec l'un des ouvrages de viabilité, de fondation, d'ossature, de clos ou de couvert lorsque sa dépose, son démontage ou son remplacement ne peut s'effectuer sans détérioration ou enlèvement de matière de cet ouvrage. ».

Enfin, l'article 1792-4-1 du Code civil dispose que « Toute personne physique ou morale dont la responsabilité peut être engagée en vertu des articles 1792 à 1792-4 du présent code est déchargée des responsabilités et garanties pesant sur elle, en application des articles 1792 à 1792-2, après dix ans à compter de la réception des travaux ou, en application de l'article 1792-3, à l'expiration du délai visé à cet article. ».

La société IMMOBILIER SYSTÈME venant aux droits et obligations de la société AGENCE DES DUCS s'est comportée à l'occasion des travaux initiaux de réhabilitation de cet appartement, tels que retranscrits dans le rapport d'expertise judiciaire, comme un constructeur par application des dispositions précitées de l'article 1792-1/2° du Code civil. À l'échelle de cet appartement, il s'agit en effet de travaux de réhabilitation de grande ampleur incluant les peintures, le chauffage électrique, les aménagements mobiliers de la cuisine et de la salle de bains, la redistribution générale de l'appartement ainsi que les sanitaires et la plomberie.

Dans ces conditions, les fins de non-recevoir opposées par la société IMMOBILIER SYSTÈME au titre de la prescription biennale en matière de vices cachés résultant des dispositions de l'article 1648 du Code civil ou à défaut de la prescription quinquennale de droit commun résultant des dispositions de l'article 2224 du Code civil seront purement et simplement écartées, la prescription décennale prévue à l'article 1792-4-1 du Code civil étant en tout état de cause applicable dans les rapports entre la société IMMOBILIER SYSTÈME venant aux droits et obligations de la société AGENCE DES DUCS et Mme [E]. Dans ces conditions, le jugement de première instance sera confirmé en ce qu'il a rejeté les fins de non-recevoir soulevées par la société IMMOBILIER SYSTÈME quant à l'action en garantie initiée à son encontre par Mme [E].

Il ressort des débats que les travaux litigieux de rénovation ont été exécutés de janvier 2010 jusqu'au plus tard au 12 mai 2010, date à laquelle Mme [E] a fait l'acquisition de cet appartement, cette dernière date constituant dès lors une réception tacite des travaux faute de formalisation connue de réception des travaux. En conséquence, à la date du 22 août 2016 d'assignation en première instance, la garantie décennale du constructeur n'était pas expirée. De plus, ce délai de garantie décennale a été interrompu par le dépôt du rapport définitif d'expertise judiciaire le 6 mars 2019, rendant toujours en vigueur ce délai d'épreuve.

En l'occurrence, pour les motifs précédemment énoncés et développés en lecture du rapport d'expertise judiciaire concernant l'ensemble des non-conformités constructives sur les dispositifs d'évacuation des eaux usées et des eaux vannes et sur leur raccordement à de mauvais supports provoquant de manière récurrente des reflux nauséabonds, l'appartement s'est avéré impropre à sa destination d'habitation. Le jugement de première instance sera en conséquence confirmé en ce qu'il a validé le principe de la demande de garantie formée par Mme [E] à l'encontre de la société IMMOBILIER SYSTÈME, étant précisé qu'il demeurait loisible à cette dernière d'appeler elle-même en cause le syndicat de copropriété si elle estimait devoir mettre en débat la teneur et l'ampleur des travaux de conformité ayant été réalisés initialement ou en cours de procédure à l'initiative de ce dernier en ce qui concerne les réseaux communs de copropriété et les conditions de leur raccordement en ce qui concerne au réseau public et la fosse d'aisance située dans la cour de l'immeuble.

Sur le quantum de cette garantie, le préjudice indemnisable n'est pas constitué par nature par la restitution du prix de vente mais par les travaux de mise en conformité auxquels Mme [E] a été astreinte par condamnation de remboursement envers M. [C] et Mme [R] à hauteur de la somme totale précitée de 7.395,88 € au titre des travaux de réfection du dispositif d'assainissement de l'appartement et de ses conditions de raccordement au réseau public relevant du délai d'épreuve de la garantie décennale du constructeur et à hauteur de la somme de 2.000,00 € en première instance en dédommagement de leurs frais irrépétibles, l'ensemble de ces condamnations pécuniaires étant en conséquences directes de ces désordres de construction couverts par la garantie décennale.

Le jugement de première instance sera pour autant infirmé en ce qu'il a adopté une formulation générale de condamnation en garantie « en principal, intérêts frais et accessoires ».

En revanche, la condamnation de Mme [E] envers M. [C] et Mme [R] à la somme de 2.000,00 € à titre de dommages-intérêts en réparation de leur préjudice moral consécutif à l'atteinte portée à l'habitabilité des lieux demeure une dette strictement personnelle, celle-ci ayant procédé de manière fautive à la revente de cet appartement en connaissance des effluents nauséabonds qui se répandaient de manière récurrente dans l'appartement.

La garantie recherchée par Mme [E] à l'encontre de la société IMMOBILIER SYSTÈME ne saurait davantage porter sur la condamnation à hauteur de 8.385,74 € concernant les travaux de réfection de la toiture. En effet, il n'est pas établi que cet élément du bâti de l'immeuble litigieux ait été concerné par les travaux litigieux de réhabilitation de l'appartement avant que Mme [E] n'en fasse l'acquisition auprès de la société IMMOBILIER SYSTÈME. En tout état de cause, la rénovation de cette toiture constitue une plus-value bénéficiant en tantièmes de copropriété à Mme [E], redevenue propriétaire de l'appartement litigieux du fait de l'action résolutoire engagée avec succès à son encontre.

6/ Sur l'appel en garantie de la société Jor Dyl Renove par la société Immobilier Système

La motivation précédemment développée à l'égard de la société IMMOBILIER SYSTÈME concernant l'applicabilité des dispositions des articles 1792 et suivants du Code civil s'applique également à la société JOR DYL RENOVE qui ne peut sérieusement contester être constructeur au sens des dispositions législatives précitées, eu égard à la nature et à l'ampleur des travaux ayant porté sur la rénovation de la quasi-totalité de l'appartement litigieux. Pour les mêmes motifs de délai décennal d'épreuve, la fin de non-recevoir qu'elle a développée au titre de la prescription quinquennale au visa de l'article 2224 du Code civil sera en conséquence purement et simplement rejetée.

Le jugement de première instance doit être infirmé en ce qu'il a adopté à l'encontre de la société JOR DYL RENOVE une formulation générale de condamnation en garantie envers la société IMMOBILIER SYSTÈME « de toutes les condamnations prononcées à son encontre en principal, intérêts, frais et accessoires. ».

Pour les motifs précédemment énoncés concernant la garantie décennale du constructeur, la condamnation à garantie prononcée à l'encontre de la société IMMOBILIER SYSTÈME au titre de la condamnation pécuniaire susmentionnée de 7.395,88 €, doit être en définitive garantie par la société JOR DYL RENOVE, locateur d'ouvrage des travaux litigieux. Il en sera dès lors de même concernant la garantie des deux condamnations pécuniaires prononcées à l'encontre de la société IMMOBILIER SYSTÈME au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

7/ Sur les autres demandes

Le premier juge a fait une exacte application de l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en ce qui concerne le dédommagement des frais irrépétibles auquel Mme [E] a été condamnée envers M. [C] et Mme [R] à hauteur de 2.000,00 € et auquel la société IMMOBILIER SYSTÈME a été condamnée envers M. [C] et Mme [R] à hauteur de 1.000,00 €.

Il serait effectivement inéquitable, au sens des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, de laisser à la charge de M. [C] et Mme [R] les frais irrépétibles qu'ils ont été contraints d'engager à l'occasion de cette instance et qu'il convient d'arbitrer à la somme de 4.000,00 €, en tenant compte de leurs frais supplémentaires de constats d'huissier de justice, à la charge de Mme [E] et sous la garantie de la société IMMOBILIER SYSTÈME, elle-même sous la garantie de la société JOR DYL RENOVE.

Le jugement de première instance sera confirmé en ce qu'il a débouté la société IMMOBILIER SYSTÈME de sa demande de défraiement au visa de l'article 700 du code de procédure civile.

Succombant dans ces prétentions à l'encontre de M. [C] et Mme [R], Mme [E] sera purement et simplement déboutée de sa demande de défraiement formée au visa de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans les rapports de garanties, il ne paraît pas inéquitable, au sens des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, de laisser à la charge de Mme [E], de la société IMMOBILIER SYSTÈME et de la société JOR DYL RENOVE les frais irrépétibles qu'elles ont été amenées à engager à l'occasion de cette instance.

Enfin, assumant la garantie définitive de la plupart des condamnations pécuniaires prononcées à l'occasion de cette instance, la société JOR DYL RENOVE en supportera les entiers dépens, tant en première instance, incluant les frais afférents à la mesure d'expertise judiciaire susmentionnée mais excluant les frais de constats d'huissier de justice qui sont pris en compte au titre de l'application de l'article 700 du code de procédure civile, qu'en cause d'appel, ce qui amène à réformer le jugement de première instance sur la question de la formulation de l'imputation des dépens de première instance.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement

CONSTATE que la SARL JOR DYL RENOVE intervient actuellement sur l'ensemble des droits et obligations de M. [X] [D] à l'occasion de la présente instance.

PRONONCE en conséquence la mise hors de cause de M. [X] [D].

INFIRME en conséquence le jugement n° RG-16/00512 rendu le 18 mai par le tribunal judiciaire de Moulins sur l'ensemble des condamnations prononcées à l'encontre de M. [X] [D].

CONFIRME ce même jugement en ce qu'il a :

- DÉCLARÉ recevable et bien fondée l'action en résolution de vente immobilière engagée par M. [Y] [C] et Mme [N] [R] ;

- REJETÉ les exceptions de nullité soulevées par la SARL IMMOBILIER SYSTÈME et par la SARL JOR DYL RENOVE ;

- PRONONCÉ la nullité de la vente intervenue par acte authentique du 22 décembre 2014 entre Mme [V] [K] veuve [E], venderesse, et M. [C] et Mme [R], acquéreurs, portant sur l'appartement et ses dépendances au sein de l'immeuble de copropriété situé [Adresse 6] à [Localité 1] (Allier), moyennant le prix de 222.500,00 € ;

- CONDAMNÉ Mme [V] [K] veuve [E] à restituer à M. [Y] [C] et Mme [N] [R] le prix susmentionné de 222.500,00 €, à charge pour ces derniers de restituer cet appartement ;

- ORDONNÉ à M. [Y] [C] et Mme [N] [R] de faire procéder à la publication de ce jugement au service de la Publicité foncière ;

- CONDAMNÉ Mme [V] [K] veuve [E] à payer au profit de M. [Y] [C] et Mme [N] [R] :

* la somme de 7.395,88 € au titre du coût des travaux effectués sur les réseaux d'assainissement ;

* la somme de 2.000,00 € à titre de dommages-intérêts en réparation de leur préjudice moral ;

* une indemnité de 2.000,00 € en dédommagement de leurs frais irrépétibles prévus à l'article 700 du code de procédure civile ;

- REJETÉ les fins de non-recevoir soulevées par la SARL IMMOBILIER SYSTÈME (prescriptions biennale et quinquennale) et par la SARL JOR DYL RENOVE (prescription quinquennale) ;

- CONDAMNÉ la SARL IMMOBILIER SYSTÈME à payer au profit de M. [Y] [C] et Mme [N] [R] une indemnité de 1.000,00 € en dédommagement de leurs frais irrépétibles prévus à l'article 700 du code de procédure civile ;

- DÉBOUTÉ la SARL IMMOBILIER SYSTÈME de sa demande de défraiement formée au visa de l'article 700 du code de procédure civile.

INFIRME ce même jugement en ce qu'il a :

- CONDAMNÉ Mme [V] [K] veuve [E] à payer au profit de M. [Y] [C] et Mme [N] [R] la somme de 168,30 € au titre du coût des travaux de toiture ;

- CONDAMNÉ la SARL IMMOBILIER SYSTÈME à garantir Mme [E] de toutes les condamnations prononcées à son encontre en principal, intérêts, frais et accessoires, à l'exception du préjudice résultant de la restitution et des condamnations relatives aux travaux de toiture et aux travaux de suppression de la fosse septique ;

- CONDAMNÉ la SARL JOR DYL RENOVE à garantir la SARL IMMOBILIER SYSTÈME de toutes condamnations prononcées à son encontre en principal, intérêts, frais et accessoires ;

- CONDAMNÉ Mme [V] [K] veuve [E] aux entiers dépens de l'instance, en ce compris les frais de la mesure d'expertise judiciaire susmentionnée ainsi que de trois procès-verbaux de constats d'huissier de justice du 27 avril 2015, du 5 octobre 2015 et du 18 juin 2020 ;

- CONDAMNÉ la SARL IMMOBILIER SYSTÈME aux dépens relatifs à l'appel en garantie par Mme [V] [K] veuve [E] ;

- CONDAMNÉ in solidum la SARL JOR DYL RENOVE aux dépens relatifs à l'appel en garantie de la SARL IMMOBILIER SYSTÈME ;

Statuant à nouveau.

CONDAMNE Mme [V] [K] veuve [E] à payer au profit de M. [Y] [C] et Mme [N] [R] :

- la somme de 8.385,74 € à titre de remboursement des facturations et appels de fonds relatifs aux travaux de réfection de la toiture commune de l'immeuble à concurrence des tantièmes de copropriété s'attachant à l'appartement litigieux et ses dépendances ;

- une indemnité de 4.000,00 €, en dédommagement de leurs frais irrépétibles prévus à l'article 700 du code de procédure civile.

JUGE IRRECEVABLE la demande formée par M. [Y] [C] et Mme [N] [R] à l'encontre de Mme [V] [K] veuve [E] en allégation de préjudice matériel.

CONDAMNE la SARL IMMOBILIER SYSTÈME à garantir Mme [V] [K] veuve [E] des condamnations pécuniaires prononcées à son encontre au profit de M. [Y] [C] et Mme [N] [R] à hauteur des sommes précitées de :

* 7.395,88 € au titre du coût des travaux effectués sur les réseaux d'assainissement ;

* 2.000,00 € en dédommagement de leurs frais irrépétibles prévus à l'article 700 du code de procédure civile en première instance ;

* 4.000,00 € en dédommagement de leurs frais irrépétibles prévus à l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

CONDAMNE la SARL JOR DYL RENOVE à garantir la SARL IMMOBILIER SYSTÈME des trois condamnations pécuniaires susmentionnées.

REJETTE le surplus des demandes des parties.

CONDAMNE la SARL JOR DYL RENOVE aux entiers dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais afférents à la mesure d'expertise judiciaire susmentionnée.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Riom
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21/01378
Date de la décision : 04/07/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-07-04;21.01378 ?
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