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25/04/2023 | FRANCE | N°21/00056

France | France, Cour d'appel de Riom, Chambre sociale, 25 avril 2023, 21/00056


25 AVRIL 2023



Arrêt n°

SN/SB/NS



Dossier N° RG 21/00056 - N° Portalis DBVU-V-B7F-FQRV



S.A.R.L. LJM DECOLEC /

[J] [B]





jugement au fond, origine conseil de prud'hommes - formation paritaire de clermont ferrand, décision attaquée en date du 10 décembre 2020, enregistrée sous le n° f 19/00063

Arrêt rendu ce VINGT CINQ AVRIL DEUX MILLE VINGT TROIS par la QUATRIEME CHAMBRE CIVILE (SOCIALE) de la Cour d'Appel de RIOM, composée lors du délibéré de :



M. Christophe RUIN, Président
r>

Mme Sophie NOIR, Conseiller



Mme Karine VALLEE, Conseiller



En présence de Mme Séverine BOUDRY, Greffier lors des débats et du prononcé



ENTRE...

25 AVRIL 2023

Arrêt n°

SN/SB/NS

Dossier N° RG 21/00056 - N° Portalis DBVU-V-B7F-FQRV

S.A.R.L. LJM DECOLEC /

[J] [B]

jugement au fond, origine conseil de prud'hommes - formation paritaire de clermont ferrand, décision attaquée en date du 10 décembre 2020, enregistrée sous le n° f 19/00063

Arrêt rendu ce VINGT CINQ AVRIL DEUX MILLE VINGT TROIS par la QUATRIEME CHAMBRE CIVILE (SOCIALE) de la Cour d'Appel de RIOM, composée lors du délibéré de :

M. Christophe RUIN, Président

Mme Sophie NOIR, Conseiller

Mme Karine VALLEE, Conseiller

En présence de Mme Séverine BOUDRY, Greffier lors des débats et du prononcé

ENTRE :

S.A.R.L. LJM DECOLEC , prise en la personne de son représentant légal en exercice.

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Anne-Claire MALARD suppléant Me Anne LAURENT-FLEURAT de la SELARL AUVERJURIS, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

APPELANTE

ET :

Mme [J] [B]

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Khalida BADJI de la SELARL BADJI-DISSARD, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

INTIMEE

Monsieur RUIN, Président et Mme NOIR, Conseiller après avoir entendu Mme NOIR Conseiller en son rapport à l'audience publique du 27 février 2023, tenue par ces deux magistrats, sans qu'ils ne s'y soient opposés, les représentants des parties en leurs explications, en ont rendu compte à la Cour dans son délibéré aprés avoir informé les parties que l'arrêt serait prononcé, ce jour, par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 du code de procédure civile.

FAITS ET PROCÉDURE

La Sarl Ljm Decolec exploite une société de travaux de plâtrerie.

Mme [B] a été embauchée par la société Ljm Decolec du 27 novembre 2017 au 22 décembre 2017 par CDD, puis en CDI à compter du 8 janvier 2018, en qualité de peintre en bâtiment, niveau 1, position 1, coefficient 150.

La convention collective applicable à la relation de travail est la Convention Collective Nationale des Entreprises du Bâtiment occupant moins de dix salariés.

Mme [J] [B] a été placée en arrêt de travail à compter du 7 janvier 2019.

Par courrier du 28 janvier 2019, la salariée a pris acte de la rupture de son contrat de travail en raison :

- de retards répétés dans le versement de ses salaires

- du refus de l'employeur de prendre en compte son diplôme et du défaut de paiement du salaire minimum conventionnel applicable à sa classification qui en est résulté

- du non-respect des normes d'hygiène et de l'obligation de sécurité.

Le 11 février 2019, Mme [B] a saisi le conseil des prud'hommes de Clermont-Ferrand pour obtenir la requalification de la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Par jugement du 10 décembre 2020, le conseil des prud'hommes de Clermont-Ferrand a :

- dit et jugé les demandes de Mme [B] recevables et fondées ;

- dit et jugé que Mme [B] aurait dû être classifiée au niveau 2 coefficient 185 de la convention collective des ouvriers du bâtiment ;

- dit et jugé que la société Ljm Decolec n'a pas respecté plusieurs de ses obligations contractuelles ;

- dit et jugé que la rupture du contrat de travail de Mme [B] est intervenue aux torts de la société Ljm Decolec et qu'elle produit les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, donc abusif ;

- ordonné en conséquence, à la société Ljm Decolec, prise en la personne de son représentant légal, de régulariser la situation de Mme [B] auprès de la Caisse de congés payés du BTP ;

- condamné la société Ljm Decolec, prise en la personne de son représentant légal, à payer et porter à Mme [B] les sommes de :

- 1.911,45 euros à titre de rappel de salaire, outre 191,14 euros au titre des congés payés afférents ;

- 200 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect du versement mensualisé du salaire ;

- 500 euros pour exécution déloyale du contrat de travail et mise en danger de Mme [B] ;

- 406,41 euros à titre d'indemnité de licenciement ;

- 1.625,95 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 162,59 euros bruts au titre des congés payés afférents ;

- 3.252 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté la société Ljm Decolec de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et la condamnée aux dépens.

La société Ljm Decolec a interjeté appel de ce jugement le 08 janvier 202.

Vu les conclusions notifiées à la cour le 06 avril 2021 par la Sarl Ljm Decolec ;

Vu les conclusions notifiées à la cour le 06 juillet 2021 par Mme [B] ;

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 30 janvier 2023.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses dernières conclusions, la Sarl Ljm Decolec demande à la cour de :

- infirmer le jugement du conseil des prud'hommes de Clermont-Ferrand du 10 décembre 2020 en ce qu'il a :

- dit et jugé que Mme [B] aurait dû être classifiée au niveau II coefficient 185 de la Convention collective des Ouvriers du Bâtiment ;

- dit et jugé que la société Ljm Decolec n'a pas respecté plusieurs de ses obligations contractuelles ;

- dit et jugé que la rupture du contrat de travail de Mme [B] est intervenue aux torts de la société et qu'elle produit les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

- condamné la société Ljm Decolec à payer et porter à Mme [B] les sommes suivantes :

- 1.911,45 euros à titre de rappel de salaire,

- 200 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect du versement mensualisé du salaire ;

- 500 euros pour exécution déloyale du contrat de travail et mise en danger de Mme [B] ;

- 406,41 euros à titre d'indemnité de licenciement ;

- 1.625,95 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre congés payés afférents ;

- 3.252 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

En conséquence,

- constater que Mme [B] a été remplie de l'intégralité de ses droits ;

- la débouter de ses demandes inhérentes à l'exécution de son contrat de travail ;

- débouter Mme [B] de sa demande indemnitaire concernant la prise d'acte de la rupture et considérer que celle-ci produit les effets d'une démission ;

- condamner Mme [B] à lui porter et payer la somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions, Mme [B] demande à la cour de :

- la déclarer recevable et bien fondée en ses demandes ;

- confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a constaté le non-respect de la mensualisation des salaires, constituant un manquement grave ;

- réformer le jugement de première instance sur le quantum des dommages et intérêts et ainsi condamner la Sarl Ljm Decolec à la somme de 1.500 euros à titre de dommages et intérêts en raison du préjudice résultant du non-respect de la mensualisation au titre du paiement des salaires ;

- confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a constaté que Mme [B] relève du coefficient 185 de la Convention collective nationale des ouvriers employés par les entreprises du bâtiment visées par le décret du 1er mars 1962 (c'est-à-dire occupant jusqu'à 10 salariés) du 8 octobre 1990 ;

- confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a condamné la Sarl Ljm Decolec à la somme de 1911,45 euros à titre de rappel de salaire outre 191,15 euros de congés payés afférents ;

- confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a condamné la Sarl Ljm Decolec à la régularisation du jour de congé restant dû auprès de la Caisse de congés payés du BTP ;

- confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a constaté que Mme [B] a été victime d'une mise en danger de sa santé et sécurité ainsi que l'exécution déloyale de la relation de travail ;

- réformer le jugement de première instance sur le quantum des dommages et intérêts alloués de ce chef et condamner l'employeur à 3.500 euros à titre de dommages et intérêts pour mise en danger de la santé et la sécurité ainsi que l'exécution déloyale de la relation de travail ;

- confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a requalifié la rupture du contrat en une prise d'acte aux torts exclusifs de son employeur ;

En conséquence,

- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la Sarl Ljm Decolec à verser à Mme [B] :

- la somme de 1.625,93 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre la somme de 162,29 euros à titre de congés payés y afférents ou a minima la somme de 1.498,50 euros ou 149,85 euros de congés payés afférents ;

- la somme de 406,41 euros à titre d'indemnité de licenciement.

- réformer le jugement de première instance sur le quantum des dommages et intérêts fixés à 3.252 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et ainsi condamner la société à la somme de 5.000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a condamné la société à la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et y ajoutant, condamner la société à la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

- condamner en tout état de cause le défendeur aux entiers dépens de l'instance.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la Cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire la cour rappelle :

- qu'en application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des dernières conclusions recevables des parties et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion contenue dans ces écritures

- les demandes de 'constater' et de 'dire et juger' ne saisissent la cour d'aucune prétention, la cour ne pouvant alors que confirmer le jugement.

Sur la demande de reclassification au niveau 2, coefficient 185 et la demande de rappel de salaires au titre de la reclassification conventionnelle :

Il appartient au salarié qui se prévaut d'une classification conventionnelle différente de celle dont il bénéficie au titre de son contrat de travail, de démontrer qu'il assure de façon permanente, dans le cadre de ses fonctions, des tâches et responsabilités relevant de la classification qu'il revendique, ce qui ne peut résulter des simples mentions de la fiche du poste occupé.

En l'espèce, Mme [B] a été embauchée et est restée positionnée au niveau 1, position 1, coefficient 150 de la Convention collective nationale des ouvriers employés par les entreprises du bâtiment visées par le décret du 1er mars 1962 (c'est-à-dire occupant jusqu'à 10 salariés), 'ouvriers d'exécution'.

Mme [J] [B] revendique un classement au niveau II 'ouvriers professionnels', coefficient 185.

Selon l'article 12.2 de la convention collective, relèvent de cette classification, qui ne comporte qu'un seul coefficient, les salariés qui 'exécutent les travaux courants de leur spécialité, à partir de directives générales et sous contrôle ponctuel. Ils ont une certaine initiative dans le choix des moyens leur permettant d'accomplir ces travaux.

Ils possèdent les connaissances techniques de base de leur métier et une qualification qui leur permettent de respecter les règles professionnelles. Ils mettent en oeuvre des connaissances acquises par formation professionnelle, initiale ou continue, ou une expérience équivalente.

Ils peuvent être amenés dans ce cadre à assurer, de façon ponctuelle et sur instructions précises du chef d'entreprise, des fonctions de représentation simple ayant trait à l'exécution de leur travail quotidien'.

Selon l'article 12.41 : 'Les ouvriers titulaires d'un certificat d'aptitude professionnelle, d'un brevet d'études professionnelles, d'un certificat de formation professionnelle des adultes délivré par l'AFPA ou d'un diplôme équivalent (niveau V de l'éducation nationale) seront classés en niveau II, coefficient 185.

A l'issue d'une période maximale de 9 mois après leur classement, les intéressés seront reconnus dans leur position ou classés à un niveau supérieur en fonction de leurs aptitudes et capacités professionnelles. Ce délai est réduit à 6 mois pour les ouvriers ayant une expérience antérieure d'entreprise, acquise notamment par l'apprentissage ou par la formation en alternance'.

Il se déduit de la durée de la période de rappel de salaires de 15 mois présentée par la salariée que cette dernière sollicite une reclassification conventionnelle à la fois au titre du CDD et du CDI.

Il résulte de l'article L. 1234-20 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n 2008-596 du 25 juin 2008, d'une part, que l'employeur a l'obligation de faire l'inventaire des sommes versées au salarié lors de la rupture du contrat de travail, d'autre part, que le reçu pour solde de tout compte n'a d'effet libératoire que pour les seules sommes qui y sont mentionnées.

S'agissant du CDD, la société LJM Decolec verse aux débats un reçu pour solde de tout compte - dont il est constant qu'il n'a pas été dénoncé dans le délai de six mois prévu à l'article L1234-20 précité - qui mentionne une somme de 1097,59 euros se décomposant en un salaire de base, une prime de panier et une prime de précarité.

La société LJM Decolec fait valoir que ce solde de tout compte a un effet libératoire pour les rappels de salaires sur reclassification conventionnelle réclamés par la salariée au titre du CDD.

Cependant, la cour n'est saisie d'aucune fin de non recevoir par le dispositif de ses conclusions de l'employeur.

S'agissant du CDI, le reçu pour solde de tout compte signé par Mme [J] [B] n'est pas versé aux débats.

De ce fait, l'employeur ne démontre pas l'effet libératoire qu'il invoque également au titre de ce second contrat de travail.

Sur le fond, Mme [J] [B] justifie être titulaire d'un diplôme de niveau V dans le domaine 'peintre en bâtiment' depuis le 24 novembre 2017.

Ce diplôme était nécessairement connu de la société LJM Decolec dans la mesure où :

- il n'est pas contesté que Mme [J] [B] a effectué un stage de peinture en bâtiment au sein de cette société du 3 au 13 juillet 2017, c'est-à-dire précisément l'année de l'obtention de son diplôme

- son curriculum vitae fait bien état d'une formation qualifiante de peintre en bâtiment suivie à l'AFPA La Sarre en 2017

- il est peu crédible au vu de ces éléments, que l'employeur n'ait pas interrogé la salariée au moment de l'embauche sur son niveau de qualification professionnelle.

Mme [J] [B] démontre au moyen de trois échanges de SMS qu'elle était en contact direct avec les clients en ce qui concerne l'exécution des travaux et que l'employeur lui déléguait le soin de remettre ses factures aux clients.

En revanche, il ne peut se déduire des deux courriers de clients mécontents, qui ne visent en outre pas précisément le travail réalisé par Mme [J] [B], que la salariée ne disposait d'aucune connaissance technique de base du métier ni la qualification professionnelle lui permettant de respecter les règles professionnelles et que l'employeur a dû la former pendant une année.

Il résulte de ces éléments que Mme [J] [B] justifie remplir les conditions d'une classification conventionnelle de niveau II, coefficient 185 et le jugement sera confirmé de ce chef.

S'agissant du montant du rappel de salaires, il apparaît que le salaire minimum conventionnel pour les ouvriers du département du Puy-de-Dôme s'élevait à 1598,75 euros entre le 1er juin 2017 et le 31 mars 2018 et à 1625,93 euros à compter du 1er avril 2018.

Les parties s'accordent sur le fait que Mme [J] [B] a été payée 1498,50 euros par mois.

En conséquence, le montant du rappel de salaires sur la période du 8 janvier 2018 au 28 janvier 2019 s'élève à la somme de 1675,30 euros, outre 167,53 euros de congés payés afférents.

Cette condamnation sera assortie d'intérêts au taux légal à compter du 18 février 2019, date de convocation de l'employeur devant le bureau de jugement valant première mise en demeure dont il est justifié.

Le jugement déféré sera infirmé de ce chef.

Sur la demande de dommages et intérêts pour non-respect de la mensualisation des salaires :

Selon l'article L3242-1 alinéa 3 du code du travail, le paiement de la rémunération est effectué une fois par mois.

Il résulte des relevés du compte bancaire de la salariée que l'employeur lui a payé :

- le 3 juillet 2018, son salaire du mois de juin 2018

- le 7 août 2018, son salaire du mois de juillet 2018,

- le 5 septembre 2018, son salaire du mois d'août 2018

- le 9 octobre 2018, son salaire du mois de septembre 2018,

- le 10 décembre 2018, son salaire du mois de novembre 2018.

- le 14 janvier 2019, son salaire du mois de décembre 2018.

Contrairement à ce que soutient la société LJM Decolec, le salaire du mois de juillet 2018 a été payé avec un retard de plus d'un mois, tout comme le salaire du mois de septembre 2018 et le salaire du mois de décembre 2018.

Par SMS du mois de janvier 2019, la salariée a questionné l'employeur sur les raisons pour lesquelles elle n'avait pas de réponse au sujet du paiement de son salaire en lui précisant que tous ses prélèvements allaient être rejetés dans la mesure où le délai de paiement était dépassé.

Le tracas généré par les manquements de l'employeur à son obligation de paiement régulier du salaire, démontré par ce SMS, a été justement évalué à la somme de 200 euros par les premiers juges et le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur la demande de paiement du solde de congés payés :

La société LJM Decolec soutient que Mme [J] [B] était en congés payés le 2 janvier 2019, ce que conteste cette dernière.

L'employeur produit le récapitulatif des droits à congés payés de Mme [J] [B] sur la période du 31 décembre 2018 au 2 janvier 2019 rempli par ses soins mais pas la demande de congés payés de Mme [J] [B] pour la journée du 2 janvier 2023.

En revanche, la salariée justifie avoir reçu un SMS de l'employeur le 1er janvier 2019 lui demandant de passer directement chez [T] [V] le lendemain 'pour le Kangoo'.

Ainsi, l'employeur ne rapporte pas la preuve de ce que Mme [J] [B] était en congés payés le 2 janvier 2019.

En conséquence la cour, confirmant le jugement de ce chef, condamne la société LJM Decolec à régulariser la journée du 2 janvier 2019 en congés payés auprès de la Caisse des congés payés du BTP.

Sur la demande de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité et exécution déloyale du contrat de travail

Tout contrat de travail comporte une obligation de loyauté qui impose à l'employeur d'exécuter le contrat de bonne foi.

Aux termes de l'article L. 4121-1 du code du travail, pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, l'employeur est tenu, de prendre les mesures nécessaires qui comprennent des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail, des actions d'information et de formation et la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés. L'employeur doit veiller à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes.

La réparation d'un préjudice résultant d'un manquement de l'employeur suppose que le salarié qui s'en prétend victime produise en justice les éléments de nature à établir, d'une part, la réalité du manquement, d'autre part, l'existence et l'étendue du préjudice en résultant.

Selon l'article R4323-1 du code du travail : 'L'employeur met à la disposition des travailleurs les équipements de travail nécessaires, appropriés au travail à réaliser ou convenablement adaptés à cet effet, en vue de préserver leur santé et leur sécurité.'

Selon l'article R4321-4 du code du travail : L'employeur met à la disposition des travailleurs, en tant que de besoin, les équipements de protection individuelle appropriés et, lorsque le caractère particulièrement insalubre ou salissant des travaux l'exige, les vêtements de travail appropriés. Il veille à leur utilisation effective.

Selon l'article R4323-91 du code du travail : 'Les équipements de protection individuelle sont appropriés aux risques à prévenir et aux conditions dans lesquelles le travail est accompli. Ils ne sont pas eux-mêmes à l'origine de risques supplémentaires.

Ils doivent pouvoir être portés, le cas échéant, après ajustement, dans des conditions compatibles avec le travail à accomplir et avec les principes de l'ergonomie.'

Selon l'article R4323-95 du même code : 'Les équipements de protection individuelle et les vêtements de travail mentionnés à l'article R. 4321-4 sont fournis gratuitement par l'employeur qui assure leur bon fonctionnement et leur maintien dans un état hygiénique satisfaisant par les entretiens, réparations et remplacements nécessaires.'

Les témoignages versés aux débats par Mme [J] [B] ne sont pas suffisamment précis pour démontrer que cette dernière a été victime de propos humiliants et désobligeants de la part de son employeur.

En revanche, la société LJM Decolec ne justifie pas de la mise à disposition effective de masques de protection contre les poussières, de lunettes de protection, de chaussures de sécurité et de bouchons d'oreilles dont il n'est pas contesté qu'ils étaient nécessaires pour protéger la santé et assurer la sécurité de la salariée.

Elle ne rapporte pas non plus la preuve de ce que Mme [J] [B] a refusé d'utiliser les chaussures de sécurité mises à sa disposition.

Le manquement de l'employeur à son obligation de sécurité et à son obligation d'exécution loyale du contrat de travail est ainsi établi.

Le manquement de l'employeur à ses obligations de sécurité et d'exécution loyale du contrat de travail est ainsi établi et les premiers juges ont justement évalué la réparation du préjudice moral subi par Mme [J] [B] à la somme de 500 euros.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur la demande tendant à voir produire à la prise d'acte les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse :

La prise d'acte de rupture du contrat de travail entraîne la cessation immédiate de la relation contractuelle qui ne peut plus ensuite être rétractée.

Il appartient dans ce cadre au salarié d'établir les faits qu'il allègue à l'encontre de l'employeur.

Ces faits sont ceux dont le salarié a eu connaissance avant de prendre acte de la rupture de son contrat de travail, ils doivent donc être antérieurs ou contemporains à la démission.

L'écrit par lequel le salarié prend acte de la rupture du contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur ne fixe pas les limites du litige ; le juge est tenu d'examiner tous les manquements de l'employeur invoqués devant lui par le salarié, même si celui-ci ne les a pas mentionnés dans cet écrit.

Il résulte de la combinaison des articles L.1231-1, L.1237-2 et L.1235-1 du code du travail que la prise d'acte ne permet au salarié de rompre le contrat de travail qu'en cas de manquement de l'employeur à ses obligations revêtant une gravité suffisante pour rendre impossible la poursuite du contrat de travail.

La rupture par prise d'acte produit, soit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ou d'un licenciement nul, si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, les effets d'une démission.

En l'espèce, Mme [J] [B] a pris acte de la rupture du contrat de travail en raison des faits suivants :

- des retards répétés dans le versement de ses salaires

- le refus de l'employeur de prendre en compte son diplôme entraînant un défaut de paiement du salaire minimum conventionnel applicable à sa classification

- le non-respect des normes d'hygiène et obligations de sécurité.

Il résulte des motifs ci-dessus que ces manquements sont matériellement établis.

Cependant, dans la mesure où la salariée n'a jamais présenté de réclamation avant la prise d'acte, il apparaît que les trois retards de paiement de quelques jours des salaires des mois de juillet, septembre et décembre 2018 ne revêtent pas une gravité suffisante pour rendre impossible la poursuite du contrat de travail.

Il en va de même, pour le même motif, de la classification à un niveau conventionnel moindre et de l'absence de mise à disposition de la salariée de masques de protection contre les poussières, de lunettes de protection, de chaussures de sécurité et de bouchons d'oreilles.

En conséquence la cour, infirmant le jugement de ces chefs, dit que la prise d'acte produit les effets d'une démission et rejette les demandes d'indemnité de licenciement, d'indemnité compensatrice de préavis, et de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur les demandes accessoires :

Partie perdante, la société LJM Decolec supportera la charge des dépens de première instance et d'appel.

Par ailleurs, Mme [J] [B] a dû pour la présente instance exposer tant en première instance qu'en appel des frais de procédure et honoraires non compris dans les dépens qu'il serait inéquitable de laisser intégralement à sa charge.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné la société LJM Decolec à lui payer la somme de 1 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile, et de condamner cet employeur à lui payer sur le même fondement une indemnité de 1000 euros au titre des frais qu'elle a dû exposer en appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,

CONFIRME le jugement déféré SAUF en ce qu'il a :

- condamné la société LJM Decolec à payer à Mme [J] [B] la somme de 1 911,45 euros à titre de rappel de salaires et 191,14 euros au titre des congés payés afférents ;

- dit et jugé que la rupture du contrat de travail de Mme [B] est intervenue aux torts de la société Ljm Decolec et qu'elle produit les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, donc abusif ;

- condamné la société Ljm Decolec, prise en la personne de son représentant légal, à payer et porter à Mme [B] les sommes de :

- 406,41 euros à titre d'indemnité de licenciement ;

- 1.625,95 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 162,59 euros bruts au titre des congés payés afférents ;

- 3.252 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

INFIRME le jugement de ces chefs et, statuant à nouveau et y ajoutant :

CONDAMNE la société LJM Decolec à payer à Mme [J] [B] la somme de 1 675,30 euros à titre de rappel de salaires et 167,53 euros de congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter du 18 février 2019 ;

DIT que la prise d'acte de rupture produit les effets d'une démission ;

REJETTE les demandes d'indemnité de licenciement, d'indemnité compensatrice de préavis, et de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

CONDAMNE la société LJM Decolec à payer à Mme [J] [B] la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société LJM Decolec aux entiers dépens de première d'appel ;

DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Ainsi fait et prononcé lesdits jour, mois et an.

Le Greffier, Le Président,

S. BOUDRY C. RUIN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Riom
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21/00056
Date de la décision : 25/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-25;21.00056 ?
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