COUR D'APPEL
DE RIOM
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
Du 04 avril 2023
N° RG 21/00894 - N° Portalis DBVU-V-B7F-FSTW
-PV- Arrêt n° 163
[I] [S] / CAISSE D'ALLOCATIONS FAMILIALES DE L'ALLIER
Jugement au fond, origine Juge de l'exécution du tribunal judiciaire de MONTLUCON, décision attaquée en date du 29 Janvier 2021, enregistrée sous le n° 20/00387
Arrêt rendu le MARDI QUATRE AVRIL DEUX MILLE VINGT TROIS
COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :
M. Philippe VALLEIX, Président
M. Daniel ACQUARONE, Conseiller
Mme Laurence BEDOS, Conseiller
En présence de :
Mme Marlène BERTHET, greffier lors de l'appel des causes et du prononcé
ENTRE :
M. [I] [S]
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle 55% numéro 2021/004754 du 18/06/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de CLERMONT- FERRAND)
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représenté par Maître Thibault CLERET, avocat au barreau de MONTLUCON
Timbre fiscal acquitté
APPELANT
ET :
CAISSE D'ALLOCATIONS FAMILIALES DE L'ALLIER
[Adresse 5]
[Localité 1]
Représentée par Maître Valérie BARDIN-FOURNAIRON de la SAS HDV AVOCATS, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
Timbre fiscal acquitté
INTIMEE
DÉBATS :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 09 février 2023, en application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. VALLEIX, rapporteur.
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 04 avril 2023 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par M. VALLEIX, président et par Mme BERTHET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE :
Saisi par une requête du 30 octobre 2019 déposée auprès du tribunal d'instance de Montluçon et désigné comme juridiction compétente par cette dernière juridiction, le Juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Montluçon a, suivant un jugement un jugement n° RG-2000387 rendu le 29 janvier 2021 :
- débouté M. [I] [S] de l'ensemble de ses demandes ;
- ordonné la saisie des rémunérations de M. [I] [S] au profit de la CAISSE D'ALLOCATIONS FAMILIALES (CAF) DE L'ALLIER au titre de deux contraintes du 13 novembre 2018 et du 21 février 2019 portant respectivement sur une pénalité administrative et sur des indus et des frais de justice, en application d'un acte de saisie établi le 15 octobre 2019 en recouvrement de la somme totale de 3.553,59 € ;
- ordonné l'exécution provisoire de la décision ;
- rappelé que le jugement doit être signifié par acte d'huissier de justice à l'initiative de la partie intéressée qui devra adresser ensuite au greffe une copie de l'acte de signification de la décision ;
- condamné M. [I] [S] aux dépens de l'instance.
Par déclaration formalisée par le RPVA le 16 avril 2021 le conseil de M. [I] [S] a interjeté appel du jugement susmentionné, l'appel portant sur l'intégralité de la décision.
' Par dernières conclusions d'appelant notifiées par le RPVA le 15 juillet 2021, M. [I] [S] a demandé de :
' au visa des dispositions des articles 122, 123, 502 et 656 du code de procédure civile, des articles 102 et 1353 du Code civil, des articles L.3252-1 et suivants du code du travail, des articles L.244-9 et L.553-1 du code de la sécurité sociale, de l'article L.211-1 du code des procédures civiles d'exécution et de l'article L.213-6 du code de l'organisation judiciaire ;
' infirmer en toutes ses dispositions le jugement du 29 janvier 2021 du Juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Montluçon et statuer à nouveau ;
' déclarer la CAF DE L'ALLIER irrecevable et en tout cas mal fondée et la débouter de l'ensemble de ses demandes ;
' condamner la CAF DE L'ALLIER à lui payer une indemnité de 2.000,00 € sur le fondement de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
' condamner la CAF DE L'ALLIER aux entiers dépens de l'instance.
' Par dernières conclusions d'intimé notifiées par le RPVA le 8 novembre 2021, la CAISSE D'ALLOCATIONS FAMILIALES (CAF) DE L'ALLIER a demandé de :
' confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré, la déclarer en conséquence bien fondée en son recours à réclamer le remboursement des trop-perçus correspondant à cette saisie et ordonner la mise en place de cette mesure de saisie des rémunérations en vue du recouvrement de la somme précitée de 3.553,59 € ;
' débouter M. [S] de l'ensemble de ses demandes ;
' condamner M. [S] à lui payer une indemnité de 1.000,00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
' condamner M. [S] aux entiers dépens de l'instance.
Par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, les moyens développés par chacune des parties à l'appui de leurs prétentions respectives sont directement énoncés dans la partie MOTIFS DE LA DÉCISION.
Par ordonnance rendue le 15 décembre 2022, le Conseiller de la mise en état a ordonné la clôture de cette procédure. Lors de l'audience civile en conseiller-rapporteur du 9 février 2023 à 14h00 au cours de laquelle cette affaire a été évoquée, chacun des conseils des parties a réitéré ses précédentes écritures. La décision suivante a été mise en délibéré au 4 avril 2023, par mise à disposition au greffe.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Par acte d'huissier de justice du 5 avril 2019, la CAF DE L'ALLIER a fait signifier à M. [S] une contrainte du 21 février 2019 afin d'obtenir le recouvrement à titre principal d'une créance de 3.166,03 €, outre remboursement du coût de l'acte à hauteur de 73,08 €, soit la somme totale de 3.239,11 €.
Par acte d'huissier de justice du 13 décembre 2018, la CAF DE L'ALLIER avait fait signifier à M. [S] une précédente contrainte du 13 novembre 2018 afin d'obtenir le recouvrement à titre principal d'une créance de 244,53 €, outre remboursement du coût de l'acte à hauteur de 41,99 €, soit la somme totale de 286,52 €.
Ces deux actes du 5 avril 2019 et du 13 décembre 2018 ont été remis par clerc assermenté sans que la signification à la personne même du destinataire ne soit possible, personne n'ayant répondu à ses appels. Un avis de passage a donc été laissé dans la boîte aux lettres du destinataire en application de l'article 656 du code de procédure civile, dont le nom figurait bien dessus suivant les constatations du clerc instrumentaire, avec envoi au destinataire d'une lettre contenant copie de l'acte de signification conformément à l'article 658 du code de procédure civile.
Chacune de ces significations des 5 avril 2019 et 13 décembre 2018 a été effectuée au nom de M. [I] [S] à l'adresse suivante : [Adresse 4].
Le Greffe du pôle social du tribunal judiciaire de Moulins a délivré un certificat de non-opposition pour chacune de ces deux contraintes :
- le 23 janvier 2019 concernant la contrainte du 13 novembre 2018, signifiée le 13 décembre 2018, en recouvrement de la somme principale de 244,53 € par la CAF DE L'ALLIER à l'encontre de M. [S] ;
- le 21 mai 2019 concernant la contrainte du 21 février 2019, signifiée le 5 avril 2019, en recouvrement de la somme principale de 3.166,03 € par la CAF DE L'ALLIER à l'encontre de M. [S].
Les causes de cette mesure de saisie des rémunérations basée sur les deux contraintes précitées des 13 novembre 2018 et 21 février 2019 relèvent du solde d'une créance d'un montant total initial de 6.745,90 correspondant à une réclamation d'indu d'Allocation logement social (ALS) pour la période de mars 2011 à février 2014, ayant fait l'objet d'une décision de mise en recouvrement par une décision du 17 avril 2015 de la COMMISSION DE RECOURS AMIABLE DE LA CAF DE L'ALLIER. M. [S] ayant contesté cette décision, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Moulins a, suivant un jugement n° 21500294 rendu le 4 mai 2018, réformé cette décision du 17 avril 2015 en ce qu'elle se fondait sur une situation de concubinage entre ce dernier et la propriétaire du logement qu'il occupait pendant la période précitée de mars 2011 à février 2014 et notamment dit que la situation de M. [S] devait au contraire s'analyser comme une situation de colocation avec existence d'un indu d'ALS sur ce fondement, dans la limite de la prescription triennale prévue à l'article L.835-34 du code de la sécurité sociale.
Cette même décision a en conséquence ordonné à la CAF DE L'ALLIER de régulariser en ce sens la situation de M. [S].
Eu égard à l'antériorité de ce jugement du 4 mai 2018, aujourd'hui définitif, par rapport à chacune des contraintes précitées des 13 novembre 2018 et 21 février 2019, il incombe à la CAF DE L'ALLIER de rapporter la preuve qu'elle a bien appliqué ce jugement du 4 mai 2018 à l'occasion de l'établissement de ces deux contraintes des 13 novembre 2018 et 21 février 2019. Le nouveau mode de calcul des indus litigieux pour la période de mars 2011 à février 2014 doit ainsi tenir compte du fait que M. [S] était non pas en situation de concubinage avec sa propriétaire mais dans une situation de colocation dans ce même logement avec une part de loyer à sa charge d'un montant de 245,00 €.
M. [S] objecte que la CAF DE L'ALLIER n'a jamais exécuté ce jugement et que celui-ci aurait donc autorité de chose jugée par rapport aux deux contraintes litigieuses. En l'occurrence, il ressort au contraire d'un courrier adressé le 28 mai 2018 par la CAF DE L'ALLIER à M. [S] que la révision de situation ordonnée par le jugement précité du 4 mai 2018 du tribunal des affaires de sécurité sociale de Moulins a bien été réalisée, ayant eu pour effet d'annuler une partie de la dette de ce dernier pour un montant de 3.621,86 € au titre de la période litigieuse du 1er mars 2011 au 28 février 2014.
La demande d'irrecevabilité soulevée à titre principal par M. [S] au titre de l'autorité de chose jugée s'attachant au jugement susmentionné du 4 mai 2018 sera en conséquence rejetée.
À la date du 30 octobre 2019 d'introduction de la requête en première instance, les deux contraintes des 13 novembre 2018 et 21 février 2019 étaient devenues définitives à l'expiration d'un délai de 15 jours à compter de leur signification respective, soit à compter du 13 décembre 2018 concernant la contrainte du 13 novembre 2018 et à compter du 5 avril 2019 concernant la contrainte du 21 février 2019. M. [S] ne peut donc plus mettre en débat la nullité de ces contraintes en alléguant de motifs internes tels l'absence de justification de réception des lettres recommandées avec avis de réception constituant les mises en demeure préalables, la délégation spéciale du représentant de la CAF DE L'ALLIER ayant signé ces contraintes, la remise en cause du caractère certain, liquide et exigible des créances alléguées ou la prescription de l'action en remboursement de ces mêmes créances.
Seule peut utilement être débattue à l'occasion de cette instance la question de la signification des contraintes litigieuses. En l'occurrence, aucune irrégularité n'apparaît devoir être relevée concernant le mode de signification au visa des articles 656 et 658 du code de procédure civile. En effet, M. [S] ne conteste pas que son nom figurait sur la boîte aux lettres du logement situé [Adresse 4]. De plus, il ne conteste pas davantage avoir occupé ce logement ni ne justifie avoir procédé à sa déclaration d'adresse auprès de la CAF DE L'ALLIER après avoir quitté ce logement selon ses dires. Par ailleurs, la CAF DE L'ALLIER objecte à juste titre qu'une consultation du Registre national commun de la protection sociale (RNCPS) en septembre 2021 a permis de constater que cette adresse était bien celle de M. [S], leur dernière mise à jour datant du 15 novembre 2019. Enfin, le premier juge a exactement relevé et M. [S] a élevé sa contestation le 30 octobre 2019 après avoir reçu du greffe le 16 octobre 2019 l'avis de l'acte de saisie à cette même adresse de [Localité 6].
M. [S] n'apporte donc pas la preuve de l'irrégularité de la signification des deux contraintes susmentionnées.
Le jugement de première instance sera en conséquence confirmé en toutes ses dispositions.
Il serait effectivement inéquitable, au sens des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, de laisser à la charge de la CAF DE L'ALLIER les frais irrépétibles qu'elle a été contrainte d'engager à l'occasion de cette instance et qu'il convient d'arbitrer à la somme de 1.000,00 €.
Enfin, succombant à l'instance, M. [S] sera purement et simplement débouté de sa demande de défraiement formée au visa de l'article 37 de la loi précitée du 10 juillet 1991 et en supportera les entiers dépens.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement et contradictoirement,
REJETTE la demande d'irrecevabilité soulevée par M. [I] [S] au titre de l'autorité de chose jugée s'attachant au jugement n° 21500294 du 4 mai 2018 du tribunal des affaires de sécurité sociale de Moulins.
CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement n° RG-2000387 rendu le 29 janvier 2021 par le Juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Montluçon.
Y ajoutant.
CONDAMNE M. [I] [S] à payer au profit de la CAISSE D'ALLOCATIONS FAMILIALES (CAF) DE L'ALLIER une indemnité de 1.000,00 €, en dédommagement de ses frais irrépétibles prévus à l'article 700 du code de procédure civile.
REJETTE le surplus des demandes des parties.
CONDAMNE M. [I] [S] aux entiers dépens de l'instance.
Le greffier Le président