14 FEVRIER 2023
Arrêt n°
FD/NB/NS
Dossier N° RG 20/01326 - N° Portalis DBVU-V-B7E-FOY5
[N] [E]
/
S.A.S. MEDICA FRANCE ENSEIGNE
jugement au fond, origine conseil de prud'hommes - formation paritaire de clermont ferrand, décision attaquée en date du 14 septembre 2020, enregistrée sous le n°
Arrêt rendu ce QUATORZE FEVRIER DEUX MILLE VINGT TROIS par la QUATRIEME CHAMBRE CIVILE (SOCIALE) de la Cour d'Appel de RIOM, composée lors des débats et du délibéré de :
M. Christophe RUIN, Président
Mme Frédérique DALLE, Conseiller
Mme Sophie NOIR, Conseiller
En présence de Mme Nadia BELAROUI greffier lors des débats et du prononcé
ENTRE :
M. [N] [E]
[Adresse 9]
[Localité 2]
Représenté par Me Frédérik DUPLESSIS, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
APPELANT
ET :
S.A.S. MEDICA FRANCE ENSEIGNE KORIAN [7]
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représenté par Me Sébastien RAHON, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND, avocat constitué, substitué par Me Myriam ROZIER de la SELARL ROZIER AVOCATS, avocat au barreau de LYON, avocat plaidant
INTIMEE
Après avoir entendu Mme DALLE, Conseiller en son rapport, les représentants des parties à l'audience publique du 28 Novembre 2022, la Cour a mis l'affaire en délibéré, Monsieur le Président ayant indiqué aux parties que l'arrêt serait prononcé, ce jour, par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 du code de procédure civile.
FAITS ET PROCÉDURE
Monsieur [N] [E], né le 21 décembre 1987, a été embauché par la SA MEDICA FRANCE le 2 septembre 2014 suivant un contrat à durée indéterminée à temps complet en qualité d'aide-soignant.
Le 29 mars 2016, le médecin traitant du salarié a établi un certificat médical à raison d'une douleur au genou gauche ressentie en descendant les escaliers de l'établissement le 25 mars 2016. Il a par suite été placé en arrêt de travail à compter de cette date, renouvelé jusqu'au 16 avril 2018.
Aux termes d'un examen de reprise organisé le 17 avril 2018, le médecin du travail a conclut à l'inaptitude du salarié au poste d'aide-soignant, tout en précisant qu'il demeurait apte à un poste assis.
Par courrier recommandé avec avis de réception en date du 15 mai 2018, l'employeur a proposé à Monsieur [E] deux postes de reclassement en qualité d'agent administratif. Le salarié a décliné ces offres par courrier réponse daté du 22 mai suivant.
Monsieur [E] a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 8 juin 2018.
Par courrier recommandé avec avis de réception en date du 12 juin 2018, Monsieur [E] s'est vu notifier son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement.
Par requête reçue au greffe le 17 mai 2019, Monsieur [E] a saisi le conseil de prud'hommes de Clermont-Ferrand aux fins notamment de voir juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse, dire que son inaptitude résulte des manquements de l'employeur et recouvre donc une origine professionnelle, outre obtenir l'indemnisation afférente.
L'audience devant le bureau de conciliation et d'orientation s'est tenue en date du 24 juin 2019 et, comme suite au constat de l'absence de conciliation, l'affaire a été renvoyée devant le bureau de jugement.
Par jugement rendu contradictoirement le 14 septembre 2020 (audience du 8 juin 2020), le conseil de prud'hommes de Clermont-Ferrand a :
- jugé que le licenciement de Monsieur [E] repose sur une cause réelle et sérieuse ;
- débouté en conséquence Monsieur [E] de l'ensemble de ses demandes ;
- débouté la SAS MEDICA FRANCE de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire du jugement ;
- condamné Monsieur [E] aux dépens.
Le 14 octobre 2020, Monsieur [E] a interjeté appel de ce jugement qui lui a été notifié à sa personne le 16 septembre 2020.
Vu les conclusions notifiées à la cour le 15 décembre 2020 par Monsieur [E],
Vu les conclusions notifiées à la cour le 12 mars 2021 par la SA MEDICA FRANCE.
Vu l'ordonnance de clôture rendue le 31 octobre 2022.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Dans ses dernières écritures, Monsieur [E] conclut à l'infirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions et demande à la cour, statuant à nouveau de :
- juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse dès lors que :
* son inaptitude réside dans la faute de l'employeur dans la protection de sa santé et sa sécurité, lequel n'a pas fourni le matériel conforme et adapté à la charge de travail ;
* subsidiairement, en ce que l'offre de reclassement n'est pas suffisamment précise, personnalisée et ferme ;
* très subsidiairement, l'employeur ne justifiant pas d'une recherche loyale de reclassement en l'absence de communication de l'ensemble des offres/ aucun effort de formation ;
- condamner en conséquence l'employeur à lui payer les sommes de :
* 3.130,54 euros au titre de l'indemnité spéciale de licenciement ;
* 3.143,52 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre 314,35 euros au titre des congés payés afférents ;
* 20.000 euros à titre de dommages et intérêts ;
* 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens ;
- dire que les sommes porteront intérêts au taux légal avec capitalisation à compter de la demande pour les sommes à caractère de salaire et à compter de la décision pour celles indemnitaires.
Monsieur [E] fait valoir que l'employeur n'a pas mis à sa disposition de matériel conforme et fonctionnel pour assurer les soins aux malades et notamment la contention, en sorte qu'il considère que son inaptitude trouve sa cause dans la faute de l'employeur, lequel n'a pas pris toutes les mesures utiles à préserver sa santé et sa sécurité au travail. Il conclut ainsi à l'absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement et sollicite l'indemnisation afférente, notamment l'indemnité spéciale de licenciement.
A titre subsidiaire, il argue de l'absence de cause réelle et sérieuse de cette mesure dès lors que l'employeur n'a pas poursuivi loyalement et sérieusement son reclassement et considère que l'offre de reclassement qui lui a été adressée n'était pas suffisamment ferme et précise. Il ajoute que l'avis d'inaptitude est en tout état de cause irrégulier en l'absence d'étude de poste et des conditions de travail préalables.
Dans ses dernières écritures, la SA MEDICA FRANCE conclut à la confirmation du jugement en toutes ses dispositions et demande à la cour, y ajoutant, de condamner le salarié à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
La SA MEDICA FRANCE réfute avoir commis une quelconque faute à l'origine de l'inaptitude du salarié à son poste de travail. Elle fait valoir que les soignants de l'établissement ont toujours disposé du matériel nécessaire à l'exercice de leurs fonctions, et notamment d'un lève-malade, qu'ils ont en outre été dûment formés à son utilisation et qu'ils n'ont jamais été en sous-effectif à une époque contemporaine de l'accident du travail de Monsieur [E]. Elle ajoute qu'antérieurement au 25 mars 2016, le salarié ne s'est jamais plaint d'une quelconque douleur au genou, ni de l'absence de matériel utile à l'exercice de ses fonctions, pas plus qu'il n'a dénoncé une surcharge de travail. Elle précise que la CPAM a refusé de prendre en charge les deux gonalgies déclarées ultérieurement par le salarié, de même qu'elle n'a pas reconnu le caractère professionnel de l'accident déclaré le 25 mars 2016. Elle considère de la sorte avoir satisfait à son obligation de sécurité et conteste ainsi l'origine professionnelle de l'inaptitude du salarié.
Elle conclut ensuite à la régularité de l'avis d'inaptitude émis par le médecin du travail et relève l'absence de toute contestation dans le délai légal de 15 jours suivant sa notification par le salarié. Elle rappelle par ailleurs l'incompétence matérielle du juge judiciaire pour se prononcer sur le respect par le médecin du travail de son obligation de procéder à une étude de poste et des conditions de travail dans l'entreprise.
Elle considère enfin avoir cherché loyalement et sérieusement à reclasser le salarié en considération de l'avis du médecin du travail. Elle indique avoir proposé deux postes de reclassement conformes aux capacités résiduelles et compétences du salarié, que celui-ci a de manière injustifiée refusés.
Elle conclut ainsi au bien fondé du licenciement pour inaptitude notifié à l'appelant.
Pour plus ample relation des faits, de la procédure, des prétentions, moyens et arguments des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il y a lieu de se référer à la décision attaquée et aux dernières conclusions régulièrement notifiées et visées.
MOTIFS
- Sur la rupture du contrat de travail -
En vertu des articles L.1226-2 (inaptitude d'origine non professionnelle) et L.1226-10 (inaptitude d'origine professionnelle) du code du travail, dans leur rédaction applicable aux faits de l'espèce, soit antérieurement à la loi n° 2016-1088 du 08 août 2016, entrée en vigueur le 1er janvier 2017, le salarié déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment bénéficie d'un droit au reclassement.
Il appartient à l'employeur, qui peut tenir compte de la position prise par le salarié déclaré inapte, de justifier qu'il n'a pu, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de poste de travail ou aménagement du temps de travail, le reclasser dans un emploi approprié à ses capacités au terme d'une recherche sérieuse, effectuée au sein de l'entreprise et des entreprises dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation permettent, en raison des relations qui existent entre elles, d'y effectuer la permutation de tout ou partie du personnel.
La preuve du respect de l'obligation de reclassement du salarié inapte pèse sur l'employeur et le manquement de ce dernier à cette obligation prive de cause réelle et sérieuse le licenciement fondé sur l'inaptitude du salarié et sur l'impossibilité de le reclasser.
Le contrat de travail est rompu à la date de notification du licenciement pour inaptitude et non à celle d'achèvement du préavis que le salarié, par définition inapte, ne peut pas exécuter, y compris lorsque l'employeur lui verse ou doit lui verser une indemnité compensatrice de préavis ou une indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis.
Le licenciement pour cause d'inaptitude du salarié est abusif lorsqu'il est démontré que l'inaptitude physique du salarié est consécutive à un manquement préalable de l'employeur qui l'a provoquée (rupture emportant les conséquences d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, voire d'un licenciement nul lorsque l'inaptitude du salarié est consécutive à des faits de harcèlement ou de discrimination imputables à l'employeur).
Le licenciement pour cause d'inaptitude du salarié est également abusif si l'employeur a manqué à son obligation de reclassement (défaut de consultation des représentants du personnel ou consultation irrégulière ; absence de preuve de l'impossibilité de reclassement ou d'un refus du salarié des postes de reclassement...), ou si la rupture du contrat de travail a été notifiée en réalité par l'employeur pour un autre motif que l'inaptitude physique et l'impossibilité de reclassement mentionnées dans la lettre de licenciement.
L'obligation de reclassement s'impose même si le médecin du travail conclut à une inaptitude à tout emploi dans l'entreprise, ou à l'impossibilité de reclasser le salarié, ou ne fait aucune proposition en matière de reclassement, car seule la mention expresse dans l'avis du médecin du travail que 'tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi' (article L. 1226-2-1 du code du travail) peut dispenser l'employeur de son obligation de reclassement.
L'employeur est tenu vis-à-vis de ses salariés d'une obligation de sécurité dans le cadre ou à l'occasion du travail. Cette obligation spécifique a été consacrée par la jurisprudence de la Cour de cassation qui a désormais abandonné le fondement contractuel de l'obligation de sécurité de l'employeur pour ne retenir que le fondement légal, tiré notamment des articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail, interprété à la lumière de la réglementation européenne concernant la mise en oeuvre de mesures visant à promouvoir l'amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs. Cette obligation de sécurité dont doit répondre l'employeur s'applique à toute situation de risque en matière de sécurité et de protection de la santé physique et mentale des travailleurs.
Tenu d'une obligation de sécurité, il appartient donc à l'employeur de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, notamment en justifiant, d'une part, avoir pris toutes les mesures de prévention prévues notamment par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail et, d'autre part, dès qu'il est informé de l'existence de faits susceptibles de constituer un atteinte à la sécurité ou la santé, physique et mentale d'un salarié, avoir pris les mesures immédiates propres à les faire cesser.
L'employeur doit exécuter son obligation de sécurité (conditions cumulatives) : - de façon générale vis-à-vis de tous ses salariés par les actions en matière d'évaluation, de prévention, de formation, d'information, d'adaptation (prévention du risque) ; - de façon particulière dès qu'il est informé de l'existence de faits susceptibles de constituer un atteinte à la sécurité ou la santé, physique et mentale d'un salarié, en prenant les mesures immédiates propres à les faire cesser (cessation du risque).
La responsabilité de l'employeur est engagée vis-à-vis des salariés (ou du salarié) dès lors qu'un risque pour la santé ou la sécurité des travailleurs (du travailleur) est avéré. Il n'est pas nécessaire que soit constaté une atteinte à la santé, le risque suffit.
L'obligation de sécurité de l'employeur, ou obligation pour celui-ci de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, couvre également les problèmes de stress ou mal-être au travail, plus généralement la question des risques pyscho-sociaux liées aux conditions de travail, aux relations de travail ou à l'ambiance de travail. Dans ce cadre, il appartient à l'employeur de mettre en place des modes d'organisation du travail qui ne nuisent pas à la santé physique et mentale des salariés et de réagir de façon adaptée en cas de risque avéré.
La jurisprudence qualifie l'obligation de sécurité de l'employeur d'obligation de résultat. Selon la Cour de cassation, cette obligation de sécurité est désormais de résultat non au regard du risque effectivement encouru par le salarié, ou de l'atteinte à sa santé subi par le salarié, mais de son objet (prévention et cessation du risque). Le résultat attendu de l'employeur est de prévenir, par des moyens adaptés, tout risque lié non seulement à l'exécution de la prestation de travail mais également à l'environnement professionnel dans lequel elle est délivrée. Il s'agit pour l'employeur de prévenir, de former, d'informer et de mettre en place une organisation et des moyens adaptés. Le résultat dont il est question dans la notion d'obligation de résultat n'est pas l'absence d'atteinte à la santé physique et mentale, mais l'ensemble des mesures prises de façon effective par l'employeur dont la rationalité, la pertinence et l'adéquation sont analysées et appréciées par le juge. L'employeur peut s'exonérer de sa responsabilité en démontrant avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L. 4121-1 et L.4121-2 du code du travail. Ainsi, en cas de risque avéré ou réalisé pour la santé ou la sécurité du travailleur, l'employeur engage sa responsabilité, sauf s'il démontre qu'il a pris les mesures générales de prévention nécessaires et suffisantes pour l'éviter, ce qu'il appartient aux juges du fond d'apprécier souverainement.
Monsieur [E] fait valoir que l'employeur n'a pas mis à sa disposition de matériel conforme et fonctionnel pour assurer les soins aux malades et notamment la contention, en sorte qu'il considère que son inaptitude trouve sa cause dans la faute de l'employeur, lequel n'a pas pris toutes les mesures utiles à préserver sa santé et sa sécurité au travail. Il conclut ainsi à l'absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement et sollicite l'indemnisation afférente, notamment l'indemnité spéciale de licenciement.
A titre subsidiaire, il argue de l'absence de cause réelle et sérieuse de cette mesure dès lors que l'employeur n'a pas poursuivi loyalement et sérieusement son reclassement et considère que l'offre de reclassement qui lui a été adressée n'était pas suffisamment ferme et précise. Il ajoute que l'avis d'inaptitude est en tout état de cause irrégulier en l'absence d'étude de poste et des conditions de travail préalables.
La SA MEDICA FRANCE réfute avoir commis une quelconque faute à l'origine de l'inaptitude du salarié à son poste de travail. Elle fait valoir que les soignants de l'établissement ont toujours disposé du matériel nécessaire à l'exercice de leurs fonctions, et notamment d'un lève-malade, qu'ils ont en outre été dûment formés à son utilisation et qu'ils n'ont jamais été en sous-effectif à une époque contemporaine de l'accident du travail de Monsieur [E]. Elle ajoute qu'antérieurement au 25 mars 2016, le salarié ne s'est jamais plaint d'une quelconque douleur au genou, ni de l'absence de matériel utile à l'exercice de ses fonctions, pas plus qu'il n'a dénoncé une surcharge de travail. Elle précise que la CPAM a refusé de prendre en charge les deux gonalgies déclarées ultérieurement par le salarié, de même qu'elle n'a pas reconnu le caractère professionnel de l'accident déclaré le 25 mars 2016. Elle considère de la sorte avoir satisfait à son obligation de sécurité et conteste ainsi l'origine professionnelle de l'inaptitude du salarié.
Elle conclut ensuite à la régularité de l'avis d'inaptitude émis par le médecin du travail et relève l'absence de toute contestation dans le délai légal de 15 jours suivant sa notification par le salarié. Elle rappelle par ailleurs l'incompétence matérielle du juge judiciaire pour se prononcer sur le respect par le médecin du travail de son obligation de procéder à une étude de poste et des conditions de travail dans l'entreprise.
Elle considère enfin avoir cherché loyalement et sérieusement à reclasser le salarié en considération de l'avis du médecin du travail. Elle indique avoir proposé deux postes de reclassement conformes aux capacités résiduelles et compétences du salarié, que celui-ci a de manière injustifiée refusés.
Elle conclut ainsi au bien fondé du licenciement pour inaptitude notifié à l'appelant.
En l'espèce, Monsieur [N] [E], né le 21 décembre 1987, a été embauché par la SA MEDICA FRANCE le 2 septembre 2014 suivant un contrat à durée indéterminée à temps complet en qualité d'aide-soignant.
Le 29 mars 2016, le médecin traitant du salarié a établi un certificat médical à raison d'une douleur au genou gauche ressentie en descendant les escaliers de l'établissement le 25 mars 2016. Il a par suite été placé en arrêt de travail à compter de cette date, renouvelé jusqu'au 16 avril 2018.
Aux termes d'un examen de reprise organisé le 17 avril 2018, le médecin du travail a conclu à l'inaptitude du salarié au poste d'aide-soignant, tout en précisant qu'il demeurait apte à un poste assis.
Par courrier recommandé avec avis de réception en date du 15 mai 2018, l'employeur a proposé à Monsieur [E] deux postes de reclassement en qualité d'agent administratif. Le salarié a décliné ces offres par courrier réponse daté du 22 mai suivant.
Monsieur [E] a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 8 juin 2018.
Par courrier recommandé avec avis de réception en date du 12 juin 2018, Monsieur [E] s'est vu notifier son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement.
Le courrier de notification est ainsi libellé:
'Monsieur,
Nous faisons suite à votre entretien préalable du 08 juin 2018 et vous notifions aux termes de la procédure votre licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement, pour les motifs suivants.
Vous avez été engagé le 25/09/2014 an qualité d'Aide-Soignant.
A l'issue de votre visite médicale en date du 17/04/2018, faisant suite à une étude de poste et nos différents échanges, le médecin du travail vous a déclaré inapte à votre poste dans les termes suivants: 'Inapte à son poste avec manutention, port de charges, station debout prolongée, marche et montée d'escalier. Apte à un poste assis avec possibilité de se lever à sa guise. Apte à une formation.'
Dès lors, nous avons entreprise des recherches de reclassement au sein de l'établissement et des entreprises du Groupe sur des postes qui pourraient vous convenir, tout en tenant compte des restrictions émises par le médecin du travail, des caractéristiques de notre activité, de votre profil et des desiderata que vous avez émis lors de notre entretien le 30/04/2018.
Les délégués du personnel ont été consultés et ont rendu un avis favorable sur les possibilités concernant votre reclassement.
Par courrier recommandé avec AR en date du 15/05/2018, nous vous avons donc proposé les postes d'Agent administratif au sein de l'établissement Korian [5] (47 [Localité 8]) et Korian [6] (95 [Localité 4]), établissement appartenant au Groupe Korian.
Par courrier en date du 22/05/2018, vous nous avez indiqué ne pas être d'accord sur l'ensemble de ces propositions de reclassement.
N'ayant pas d'autre poste vacant susceptible de correspondre à votre profil et de répondre aux préconisations du médecin du travail, nous avons été amenés à vous recevoir le 08 juin 2018 à un entretien préalable à une éventuelle rupture de votre contrat.
Au cours de cet entretien, vous avez confirmé refuser ces postes.
Etant dans l'impossibilité de maintenir nos relations contractuelles, nous avons le regret d vous notifier votre licenciement en raison de l'avis d'inaptitude physique définitive à votre poste prononcé par la médecine du travail et de l'impossibilité de pourvoir à votre reclassement au sein de l'entreprise et du Groupe.
Votre contrat de travail prendra fin à compter du jour de l'envoi du présent courrier.
Dès leur établissement dans les délais d'usage, votre certificat de travail, votre attestation Pôle Emploi ainsi que votre solde de tout compte comprenant l'ensemble des sommes qui vous sont dues, seront tenus à votre disposition.
Par ailleurs, nous vous demandons de bien vouloir convenir d'un rendez-vous avec votre responsable, afin de vider votre vestiaire et de restituer l'ensemble des objets, badges, clefs ou tout docuement mis à votre disposition dans l'exercice de vos fonctions et qui seraient encore en votre possession.
Veuillez agréer, Monsieur, l'expression de nos salutations distinguées.
[W] [U]
Directrice'
L'employeur démontre, notamment par la production des attestations de Madame [G] et de Madame [H], que le premier étage de l'établissement, où travaillait Monsieur [E], bénéficiait d'un lève malade sur l'étage ainsi que d'un lève malade de soutien.
La SA MEDICA FRANCE établit également que les soignants de l'établissement ont été formés à l'utilisation des lèves malades, tant dans le cadre de leur formation initiale que dans le cadre de la formation interne, et que l'établissement n'était pas en sous-effectif de soignants au moment de l'accident du travail de Monsieur [E].
Par ailleurs, il ressort des éléments versés à la procédure que Monsieur [E] ne s'est jamais plaint auprès de son employeur de ses conditions de travail avant l'accident du travail, ce qui n'est au demeurant pas contesté par le salarié.
Il apparaît ainsi que la SA MEDICA FRANCE a rempli ses obligations en matière de sécurité à l'égard du salarié dans la mesure où ce dernier a pu bénéficier d'un équipement, d'une formation et de conditions de travail satisfaisants.
S'agissant de l'obligation de reclassement, il est constant que Monsieur [E] n'a pas contesté le contenu de l'avis d'inaptitude du médecin de travail dans le délai de 15 jours légalement prévu.
L'employeur verse en outre aux débats ses échanges avec le médecin du travail en vue du reclassement du salarié.
Il démontre avoir sollicité en ce sens les 395 établissements de soins spécialisés du groupe KORIAN, la cellule de reclassement du groupe ayant tenu compte des préconisations du médecin du travail et des qualifications professionnelles du salarié pour orienter ses recherches sur des postes d'agent administratif.
C'est ainsi que la SA MEDICA FRANCE a proposé deux postes d'agent administratif disponibles et compatibles avec les qualifications de Monsieur [E]:
- un poste d'agent administratif en CDI à temps plein situé à [Localité 8] (47) ;
- un poste d'agent administratif en CDI à temps plein situé à [Localité 4] (95).
De surcroît, les offres de reclassement ainsi effectuées étaient suffisamment précises, celles-ci détaillant le nom des EPHAD concernés, le lieu de travail, le type de poste, la nature du poste, la durée de travail ainsi que la date de début des contrats.
Enfin, le 14 mai 2018, les délégués du personnel ont été régulièrement consultés sur le reclassement de Monsieur [E].
Au vu de l'ensemble de ces éléments et des principes de droit sus-visés, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit que le licenciement pour inaptitude médicale de Monsieur [N] [E] repose sur une cause réelle et sérieuse et en ce qu'il a débouté Monsieur [N] [E] de l'ensemble de ses demandes indemnitaires subséquentes, l'employeur ayant rempli son obligation de sécurité vis-à-vis du salarié, la procédure de licenciement pour inaptitude ayant été respectée et la recherche de reclassement du salarié ayant été loyale et sérieuse.
- Sur les frais irrépétibles et les dépens -
Le jugement entrepris sera confirmé en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens de première instance.
En équite, il n'y a pas lieu à condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Monsieur [N] [E], qui succombe en son recours, sera condamné au paiement des dépens en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi,
- Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions soumises à la cour ;
Y ajoutant,
- Dit qu'il n'y a pas lieu à condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamne Monsieur [N] [E] au paiement des dépens en cause d'appel ;
- Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
Ainsi fait et prononcé lesdits jour, mois et an.
Le Greffier Le Président
N. BELAROUI C. RUIN