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06/12/2022 | FRANCE | N°20/00691

France | France, Cour d'appel de Riom, Chambre sociale, 06 décembre 2022, 20/00691


06 DECEMBRE 2022



Arrêt n°

FD/NB/NS



Dossier N° RG 20/00691 - N° Portalis DBVU-V-B7E-FM3Z



UNEDIC, délégation AGS CGEA [Localité 6]



/



[U] [S] épouse [W], S.E.L.A.R.L. [P] représentée par Me [X] [P] en qualité de liquidateur judiciaire de l' Association AIDE AU CONFORT ET AU MAINTIEN A DOMICILE

Arrêt rendu ce SIX DECEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX par la QUATRIEME CHAMBRE CIVILE (SOCIALE) de la Cour d'Appel de RIOM, composée lors des débats et du délibéré de :



M. Christophe RUIN,

Président



Mme Frédérique DALLE, Conseiller



Mme Sophie NOIR, Conseiller



En présence de Mme Nadia BELAROUI greffier lors des débats et du pro...

06 DECEMBRE 2022

Arrêt n°

FD/NB/NS

Dossier N° RG 20/00691 - N° Portalis DBVU-V-B7E-FM3Z

UNEDIC, délégation AGS CGEA [Localité 6]

/

[U] [S] épouse [W], S.E.L.A.R.L. [P] représentée par Me [X] [P] en qualité de liquidateur judiciaire de l' Association AIDE AU CONFORT ET AU MAINTIEN A DOMICILE

Arrêt rendu ce SIX DECEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX par la QUATRIEME CHAMBRE CIVILE (SOCIALE) de la Cour d'Appel de RIOM, composée lors des débats et du délibéré de :

M. Christophe RUIN, Président

Mme Frédérique DALLE, Conseiller

Mme Sophie NOIR, Conseiller

En présence de Mme Nadia BELAROUI greffier lors des débats et du prononcé

ENTRE :

L'UNEDIC, délégation AGS, CGEA d'[Localité 6], association déclarée, représentée par sa directrice nationale, Madame [V] [G], domiciliée en cette qualité au siège

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 6]

Représentée par Me Emilie PANEFIEU, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

APPELANTE

ET :

Mme [U] [S] épouse [W]

[Adresse 5]

[Localité 3]

Représenté par Eric NURY de la SCP GIRAUD-NURY, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

S.E.L.A.R.L. [P] représenté par Me [X] [P] en qualité de liquidateur judiciaire de l' Association AIDE AU CONFORT ET AU MAINTIEN A DOMICILE

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Eric KOTARSKI de la SELARL KOTARSKI, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

INTIMES

Après avoir entendu Mme DALLE, Conseiller en son rapport, les représentants des parties à l'audience publique du 03 Octobre 2022, la Cour a mis l'affaire en délibéré, Monsieur le Président ayant indiqué aux parties que l'arrêt serait prononcé, ce jour, par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 du code de procédure civile.

FAITS ET PROCÉDURE

Madame [U] [W] a été embauchée le 29 octobre 2014 par l'association AIDE AU CONFORT ET AU MAINTIEN A DOMICILE, suivant contrat de travail à durée déterminée, pour un remplacement, à temps partiel, en qualité d'aide à domicile. L'horaire mensuel était de 25 heures. Après prorogations, le contrat de travail a évolué en contrat de travail à durée indéterminée, le 31 décembre 2015, sans modification de la durée de travail mensuelle.

Par courrier recommandé avec accusé de réception, en date du 21 décembre 2016, Madame [W] a informé son employeur de sa prise d'acte de rupture de son contrat de travail, aux torts de ce dernier.

Le 10 mai 2017, par requête expédiée en recommandé, Madame [W] a saisi le conseil de prud'hommes de RIOM aux fins notamment de voir requalifier le contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel en contrat de travail à durée indéterminée à temps complet, de juger recevable et bien fondée la prise d'acte du contrat de travail avec les conséquences d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, outre obtenir diverses sommes à titre indemnitaire.

L'association AIDE AU CONFORT ET AU MAINTIEN A DOMICILE a été placée en redressement judiciaire, décision prononcée par la tribunal de grande instance de CLERMONT-FERRAND le 29 mai 2017. La SELARL [P], ès qualités de liquidateur judiciaire de l'association, ainsi que l'association UNEDIC, délégation AGS, CGEA d'[Localité 6] ont été dûment convoqués.

Par jugement contradictoire en date du 2 février 2018 (audience du 10 novembre 2017), le conseil de prud'hommes de RIOM a :

- requalifié le contrat de travail de Madame [W] à temps partiel en contrat de

travail à temps complet à compter du 30 octobre 2014 ;

- requalifié la prise d'acte de rupture du contrat de travail de Madame [W] en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- fixé la créance de Madame [W] au passif de l'Association AIDE AU CONFORT ET AU MAINTIEN A DOMICILE aux sommes suivantes :

* 10.576,70 euros au titre de rappel de salaire du 30 octobre 2014 au 30 septembre 2016,

* 3.959,92 euros au titre de rappel de salaires du 1er octobre 2016 au 21 décembre 2016,

* 800 euros à titre de dommages et intérêts pour non respect des règles relatives au temps de travail à temps partiel,

* 1.453,66 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés due sur les rappels de salaires,

* 586,65 euros au titre de l'indemnité de licenciement,

* 2.933,28 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis , outre 293,32 euros au titre de congés payés sur préavis,

* 3.500 euros au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- condamné l'Association AIDE AU CONFORT ET AU MAINTIEN A DOMICILE à payer et porter à Madame [W] la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la même aux entiers dépens ;

- ordonné l'exécution provisoire.

Le 1er mars 2018, l'association UNEDIC, délégation AGS, CGEA d'[Localité 6] a interjeté appel de ce jugement qui lui a été notifié à sa personne le 2 décembre 2018.

Le 4 septembre 2018, la chambre sociale de la cour d'appel de RIOM a ordonné la radiation de l'instance du rang des affaires en cours. Cette affaire a ensuite été réinscrite le 12 juin 2020 sur demande de l'association UNEDIC, délégation AGS, CGEA d'[Localité 6].

Vu les conclusions notifiées à la cour le 12 juin 2020 par l'association UNEDIC, délégation AGS, CGEA d'[Localité 6],

Vu les conclusions notifiées à la cour le 31 août 2022 par Madame [W],

Vu les conclusions notifiées à la cour le 26 juillet 2018 par la SELARL [P],

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 5 septembre 2022.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses dernières écritures, l'association UNEDIC, délégation AGS, CGEA d'[Localité 6] demande à la cour de :

A titre principal :

- voir réformer le jugement du 2 février 2018 rendu par le Conseil de Prud'hommes de RIOM ;

Se faisant :

- constater que Madame [W] travaillait pour deux employeurs sur la même période et connaissait son rythme de travail ;

- constater que Madame [W] n'était plus à la disposition de son employeur à compter du 1er décembre 2016 ;

- dire et juger que la prise d'acte en date du 21 décembre 2016 s'analyse en une démission ;

- en tant que de besoin, voir condamner Madame [W] à lui payer et porter à titre de remboursement les sommes avancées ensuite de l'exécution provisoire de droit du jugement susvisé, simplement rappeler le cas échéant et en tant que de besoin que l'arrêt infirmatif à intervenir tiendra lieu de titre afin d'obtenir le remboursement des sommes versées en vertu de la décision de première instance assortie de l'exécution provisoire ;

- voir débouter Madame [W] du surplus de ses fins, demandes et conclusions ;

A titre subsidiaire :

- voir déclarer l'arrêt à intervenir opposable à l'AGS et au CGEA d'[Localité 6] en qualité de gestionnaire de l'AGS, dans les limites prévues aux articles L.3253-1 et suivants (Article L.3253-8), D.3253-5 du Code du travail et du Décret n° 2003-684 du 24 juillet 2003 ;

- voir constater que la garantie de l'AGS est plafonnée, toutes créances avancées pour le compte du salarié, au plafond 6 défini à l'article D.3253-5 du Code du Travail ;

- voir constater les limites de leur garantie ;

- voir dire et juger que l'arrêt à intervenir ne saurait prononcer une quelconque condamnation à leur encontre ;

- voir dire et juger que l'AGS ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L.3253-1 et suivants du Code du Travail (article L.3253-8 du Code du Travail) que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L.3253-1 et suivants du Code du

Travail (article L.3253-8 du Code du Travail) ;

- voir dire et juger que l'obligation du CGEA de faire l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafonds applicables, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire ;

- voir dire et juger que le jugement d'ouverture arrête le cours des intérêts légaux (article L.622-28 et suivants du Code de Commerce).

L'association UNEDIC, délégation AGS, CGEA d'[Localité 6] soutient que Madame [W] a a travaillé 151,67 heures au mois de décembre 2016 pour l'EHPAD Docteur [Y] [I]. Dès lors, elle estime que Madame [W] est de mauvaise foi lorsqu'elle prétend que l'association ne lui fournissait plus de travail puisqu'il est manifeste qu'elle n'était pas à la disposition de l'association au mois de décembre 2016. Elle ajoute que la salariée a travaillé pour la société CAOUTCHOUTIERE DE MONTAIGUT selon contrat à durée indéterminée du 11 octobre 2010 au 2 mars 2015. Dès lors, elle affirme que Madame [W] ne peut valablement prétendre comme elle le faisait en première instance qu'elle était dans l'impossibilité de prévoir son rythme de travail ni la répartition hebdomadaire de ses horaires.

Elle conclut à l'infirmation du jugement entrepris.

Elle soutient ensuite que Madame [W] n'étaye aucunement par des éléments précis sa demande en heures supplémentaires.

Elle soutient ensuite que lors de son courrier de prise d'acte, Madame [W] n'était plus à disposition de son employeur depuis déjà 21 jours. Elle fait valoir que les prétendus manquements évoqués par Madame [W] n'avaient pour objectif que de lui éviter une démission, qu'elle aurait dû donner avant le 1er décembre 2016 du fait de son nouvel emploi, et de bénéficier des indemnités de rupture. Dès lors, elle estime que la prise d'acte produit les effets d'une démission.

A titre subsidiaire, elle demande à la cour de déclarer l'arrêt opposable à l'AGS et au CGEA d'[Localité 6]. Elle explique que la garantie de l'AGS est plafonnée par les plafonds définis à l'article D.3253-5 du code du travail.

Dans ses dernières écritures, Madame [W] demande à la cour de :

- débouter l'Association UNEDIC, Délégation AGS, CGEA d'[Localité 6] et la SELARL [P] et de toutes demandes fins et conclusions contraires aux présentes ;

- confirmer le jugement querellé en toutes ses dispositions sauf à fixer le rappel de salaires du à compter du 1er Octobre 2016 à la somme de 2933,28 euros plus les congés payés afférents 293,32 euros et à fixer les congés payés afférents au rappel de salaires du pour la période commençant du 30 Octobre 2014 au 30 Septembre 2016 à la somme de 1057,67 euros ;

- condamner l'Association UNEDIC, Délégation AGS, CGEA d'[Localité 6] à lui verser la somme de 1200 euros au titre de l' article 700 du code de procédure civile ;

- condamner l'Association UNEDIC, Délégation AGS, CGEA d'[Localité 6] aux dépens.

Madame [W] soutient que le nombres d'heures effectuées dépassait très largement les heures contractuellement prévues. Dès lors, elle sollicite la requalification de son contrat en contrat de travail à durée indéterminée à temps complet à compter du 30 octobre 2014 et conclut à la confirmation du jugement entrepris.

Sur le rappel des salaires d'octobre 2014 à septembre 2016, elle sollicite la confirmation du jugement entrepris sur ce point.

Elle demande une somme de 2.933,28 euros outre la somme de 293,32 euros étant donné qu'elle est restée sans travail d'octobre 2016 à décembre 2016.

Elle sollicite la confirmation du jugement entrepris concernant la somme de 800 euros à titre de dommages et intérêts pour non respect des règles relatives au temps de travail à temps partiel.

Elle soutient ensuite que la prise d'acte de rupture du contrat de travail est justifiée par la variation de sa durée de travail, par l'absence de fourniture de travail notamment en septembre 2016 et par l'étude des plannings d'octobre à décembre 2016.

Elle sollicite enfin la condamnation de l'employeur au paiement d'une somme de 1.200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières écritures, la SELARL [P] conclut à la confirmation du jugement en toutes ses dispositions et demande à la cour, y ajoutant, de :

- dire mal jugé et bien appelé ;

- dire et juger que la prise d'acte de Madame [W] constitue une démission ;

- constater l'absence de tout élément justificatif de la réalité des heures supplémentaires

invoquées ;

- en conséquence débouter Madame [W] de l'intégralité de ses prétentions ;

- condamner Madame [W] à lui payer et porter la somme de 1.200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner Madame [W] aux entiers dépens ;

A titre subsidiaire :

- fixer les créances salariales qui seraient éventuellement dues à la salariée, sous réserve

de stricts justificatifs ;

- diminuer les dommages et intérêts dans de très notables proportions ;

A titre très subsidiaire ;

- confirmer le jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes de RIOM du 2 février 2018 ;

- dire n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- statuer ce que de droit sur les dépens.

La SELARL [P] soutient que Madame [W] s'est autogérée comme il lui plaisait, faisant fi du pouvoir de direction de son employeur, lequel agissait notamment dans le cadre du règlement intérieur, en vertu des accords d'entreprise applicables. Elle indique que la salariée ne travaillait plus pour le compte de l'employeur depuis 21 jours.

Elle sollicite le débouté des demandes de Madame [W] et notamment des sommes demandées et fixées aux vues de la requalification de la prise d'acte de rupture en licenciement.

Elle ajoute que Madame [W] ne démontre jamais la réalité de ses heures supplémentaires.

A titre très subsidiaire, elle sollicite le fait que les sommes sollicitées au titre de ses prétendues créances salariales, ne soient accueillies favorablement que sur strict justificatif, et pour le surplus, que les dommages et intérêts soient réduits dans de très notables proportions.

Pour plus ample relation des faits, de la procédure, des prétentions, moyens et arguments des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il y a lieu de se référer à la décision attaquée et aux dernières conclusions régulièrement notifiées et visées.

MOTIFS

- Sur la demande de requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet -

Est considéré comme salarié à temps partiel le salarié dont la durée du travail est inférieure :

1° A la durée légale du travail ou, lorsque cette durée est inférieure à la durée légale, à la durée du travail fixée conventionnellement pour la branche ou l'entreprise ou à la durée du travail applicable dans l'établissement ;

2° A la durée mensuelle résultant de l'application, durant cette période, de la durée légale du travail ou, si elle est inférieure, de la durée du travail fixée conventionnellement pour la branche ou l'entreprise ou de la durée du travail applicable dans l'établissement ;

3° A la durée de travail annuelle résultant de l'application durant cette période de la durée légale du travail, soit 1607 heures, ou, si elle est inférieure, de la durée du travail fixée conventionnellement pour la branche ou l'entreprise ou de la durée du travail applicable dans l'établissement.

Le contrat de travail à temps partiel doit être écrit et comporter les mentions obligatoires suivantes :

- la qualification du salarié ;

- les éléments de rémunération ;

- la durée du travail ;

- la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois (sauf pour les salariés des associations et entreprises d'aide à domicile et les salariés relevant d'un accord collectif qui en dispense l'employeur) ;

- les conditions de la modification de la répartition de la durée du travail ;

- les modalités selon lesquelles les horaires de travail pour chaque journée travaillée sont communiqués par écrit au salarié (dans les associations et entreprises d'aide à domicile, les horaires de travail sont communiqués par écrit chaque mois au salarié), mais pas les horaires de travail eux-mêmes ;

- les limites d'accomplissement des heures complémentaires au-delà de la durée de travail fixée par le contrat (volume contractuel d'heures complémentaires).

Le contrat de travail à temps partiel doit mentionner la durée hebdomadaire ou mensuelle du travail prévue ainsi que la répartition de cette durée entre les jours de la semaine ou les semaines du mois (L. 3123-6). À défaut, le contrat de travail est présumé conclu à temps complet et l'employeur est passible d'une amende pénale. Il s'agit toutefois d'une présomption simple que l'employeur peut combattre en apportant la preuve contraire.

La durée hebdomadaire ou mensuelle du travail fixée par le contrat de travail doit respecter une durée minimale et être inférieure au temps plein.

L'employeur est tenu de fournir au salarié le volume de travail prévu et, à défaut, le salarié resté à la disposition de son employeur a droit à la rémunération contractuelle.

En cas de temps partiel dans un cadre mensuel, il est possible de prévoir une répartition inégale de la durée du travail entre les différentes semaines du mois, y compris une organisation comportant des semaines à temps complet et des semaines non travaillées, à condition que la répartition se répète d'un mois sur l'autre.

Les salariés à temps partiel ne sont pas soumis à l'horaire collectif de l'entreprise ou de l'établissement. Ils doivent être informés par écrit (remise de plannings, par exemple) de leurs horaires de travail pour chaque journée travaillée. Le contrat de travail n'a pas à mentionner les horaires de travail journaliers mais doit préciser les modalités d'information du salarié sur ce point.

La requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet est encourue si le salarié démontre qu'il doit travailler selon des horaires journaliers dont il n'a pas eu préalablement connaissance, ce qui lui impose de rester en permanence à la disposition de l'employeur.

Le contrat de travail à temps partiel peut être à durée indéterminée ou à durée déterminée. Dans le second cas, le contrat de travail doit en outre respecter les règles propres aux contrats à durée déterminée.

À défaut d'écrit ou de mention de la durée du travail de référence (durée hebdomadaire ou mensuelle / ou en cas de mention d'une durée de travail variable), de la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois (sauf cas où cette mention n'est pas obligatoire), de non-respect des mentions contractuelles sur la durée et la répartition du temps de travail, le contrat de travail est présumé conclu à temps complet. Il s'agit toutefois d'une présomption simple que l'employeur peut combattre en apportant la preuve contraire.

Pour renverser la présomption de travail à temps complet, l'employeur doit, d'une part, apporter la preuve de la durée exacte, hebdomadaire ou mensuelle, de travail convenue avec le salarié et, d'autre part, établir que le salarié peut prévoir son rythme de travail et qu'il n'a pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur. Cette double preuve doit être rapportée par l'employeur même si le salarié peut refuser des missions ou exerce une autre activité professionnelle lui imposant des contraintes horaires.

La requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet se fait sur la base de la durée légale du travail, ou de la durée conventionnelle si elle est inférieure. L'employeur est alors tenu au paiement d'un rappel de salaire et de congés payés sur la base d'un temps complet même si le salarié a exercé d'autres activités professionnelles, et/ou pris un congé sans solde.

L'association UNEDIC, délégation AGS, CGEA d'[Localité 6] soutient que Madame [W] a travaillé 151,67 heures au mois de décembre 2016 pour l'EHPAD Docteur [Y] [I]. Dès lors, elle estime que Madame [W] est de mauvaise foi lorsqu'elle prétend que l'association ne lui fournissait plus de travail puisqu'il est manifeste qu'elle n'était pas à la disposition de l'association au mois de décembre 2016. Elle ajoute que la salariée a travaillé pour la société CAOUTCHOUTIERE DE MONTAIGUT selon contrat à durée indéterminée du 11 octobre 2010 au 2 mars 2015. Dès lors, elle affirme que Madame [W] ne peut valablement prétendre comme elle le faisait en première instance qu'elle était dans l'impossibilité de prévoir son rythme de travail ni la répartition hebdomadaire de ses horaires.

Madame [W] répond que le nombres d'heures effectuées dépassait très largement les heures contractuellement prévues. Dès lors, elle sollicite la requalification de son contrat en contrat de travail à durée indéterminée à temps complet à compter du 30 octobre 2014 et conclut à la confirmation du jugement entrepris.

En l'espèce, Madame [U] [W] a été embauchée le 29 octobre 2014 par l'association AIDE AU CONFORT ET AU MAINTIEN A DOMICILE, suivant contrat de travail à durée déterminée, pour un remplacement, à temps partiel, en qualité d'aide à domicile. L'horaire mensuel était de 25 heures. Après prorogations, le contrat de travail a évolué en contrat de travail à durée indéterminée, le 31 décembre 2015, sans modification de la durée de travail mensuelle.

En effet, il résulte de la lecture de l'article 5 du contrat de travail les éléments suivants:

'MADAME [W] [U] née [S] est engagée pour un horaire mensuel de 25. Les horaires de travail seront précisés à [W] [U] née [S] lors de la notification du planning d'interventions, dans le délai de prévenance conventionnel, sauf urgence liée au décès, l'hospitalisation, toute absence ou carence fortuite du bénéficiaire de la prestation. MADAME [W] [U] née [S] pourra être amenée à exécuter, si nécessaire, des heures complémentaires, actuellement dans la limité conventionnelle de 10% de son temps de travail non majoré.'

Il ressort cependant des bulletins de paie versés par la salariée, lesquels ne sont pas contestés dans leur contenu par les parties adverses, qu'elle a en réalité très largement dépassé les 25 heures de travail contractuellement prévues dans les conditions et sur la période suivante:

- novembre 2014: 74,25 heures ;

- décembre 2014: 70,50 heures ;

- janvier 2015: 84,16 heures ;

- février 2015: 122,25 heures ;

- mars 2015: 99 heures ;

- avril 2015: 95 heures ;

- mai 2015: 110,58 heures ;

- juin 2015: 104 heures ;

- juillet 2015: 59,75 heures ;

- août 2015: 135,25 heures ;

- septembre 2015: 122,75 heures ;

- octobre 2015: 113 heures ;

- novembre 2015: 86,50 heures ;

- décembre 2015: 109,75 heures ;

- janvier 2016: 77,75 heures ;

- février 2016: 108,50 heures ;

- mars 2016: 119,50 heures ;

- avril 2016: 132,75 heures ;

- mai 2016: 71,25 heures ;

- juin 2016:101,75 heures ;

- juillet 2016: 62,25 heures ;

- août 2016: 107,75 heures ;

- septembre 2016: 43 heures.

À défaut du respect des mentions contractuelles sur la durée et la répartition du temps de travail, le contrat de travail est présumé conclu à temps complet. Il s'agit toutefois d'une présomption simple que l'employeur peut combattre en apportant la preuve contraire.

Pour renverser la présomption de travail à temps complet dont bénéficie la salariée, aux termes de ces éléments, l'association UNEDIC, délégation AGS, CGEA d'[Localité 6] verse des attestations d'employeur destinés à Pôle Emploi établissant que Madame [W] a a travaillé 151,67 heures au mois de décembre 2016 pour l'EHPAD Docteur [Y] [I] et pour la société CAOUTCHOUTIERE DE MONTAIGUT, selon contrat à durée indéterminée, du 11 octobre 2010 au 2 mars 2015.

Ces seuls éléments ne suffisent cependant pas à renverser la présomption de l'existence d'un contrat de travail à temps complet, dès lors que la salariée démontre qu'elle a largement dépassé le seuil des 25 heures de travail contractuellement prévu sur une période de novembre 2014 à septembre 2016.

En outre, il convient de relever que l'association UNEDIC, délégation AGS, CGEA d'[Localité 6] ne verse strictement aucun élément concernant la manière dont la salariée était destinataire des informations concernant la durée et la répartition de son temps de travail, alors que ceux-ci variaient considérablement d'un mois à l'autre, et n'avait pas, de ce fait, à se tenir à la disposition constante de son employeur.

Au vu de ces éléments et des principes de droit susvisés, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a requalifié le contrat de travail à temps partiel de Madame [U] [W] en contrat de travail à temps complet à compter du 30 octobre 2014.

Au vu des éléments d'appréciation dont la cour dispose, les premiers juges ont justement évalué les circonstances de la cause ainsi que les droits et obligations des parties en fixant la créance de Madame [U] [W] née [S] au passif de l'association AIDE AU CONFORT ET AU MAINTIEN A DOMICILE - AMCD aux sommes de 10.576,70 euros au titre de rappel de salaire du 30 octobre 2014 au 30 septembre 2016, de 3.959,92 euros au titre de rappel de salaire du 1er octobre 2016 au 21 décembre 2016, de 800 euros à titre de dommages et intérêts pour non respect des règles relatives au temps de travail à temps partiel et de 1.453,66 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés due sur les rappels de salaires.

Le jugement entrepris sera ainsi confirmé sur l'intégralité de ces dispositions.

- Sur la rupture du contrat de travail -

La démission est l'acte par lequel le salarié fait connaître à l'employeur sa décision de rompre le contrat de travail. Elle peut être notifiée à tout moment, même en cours d'arrêt de travail pour cause de maladie, et doit répondre à certaines conditions de fond et de forme.

La démission doit avoir été librement consentie, c'est-à-dire que le salarié doit avoir la capacité de démissionner et son consentement ne doit pas avoir été vicié. À défaut, la démission est nulle et la rupture du contrat de travail s'analyse en un licenciement abusif. Il appartient au salarié d'apporter la preuve que son consentement a été vicié.

La démission n'est pas librement consentie lorsqu'elle est donnée dans un état psychologique anormal, sous le coup de la colère ou de l'émotion, ou lorsque le salarié n'a pas les capacités intellectuelles pour mesure la protée de son acte. La démission n'est pas librement consentie lorsqu'elle intervient sous la contrainte ou la pression de l'employeur, notamment en cas de menace d'une plainte pénale ou d'un licenciement, lorsque le salarié s'est trouvé dans une situation d'infériorité ou d'intimidation. Il en va toutefois différemment lorsque le salarié menacé a pris l'initiative de la rupture en toute connaissance de cause pour éviter une situation plus désavantageuse.

N'a pas été considéré comme démissionnaire le salarié qui demande ou signe des documents relatifs à la rupture du contrat de travail, s'absente même longuement, ne reprend pas le travail après des congés ou autres cas de suspension du contrat de travail, quitte brutalement l'entreprise à la suite de reproches de son employeur et envoie un arrêt de travail pour maladie, recherche un emploi en attendant son licenciement.

Le salarié qui reproche à son employeur des manquements à ses obligations peut prendre acte de la rupture de son contrat de travail. La prise d'acte est un mode de rupture du contrat de travail par lequel le salarié met un terme à son contrat en se fondant sur des griefs qu'il impute à son employeur. La prise d'acte est une modalité de rupture du contrat de travail réservée au seul salarié.

La prise d'acte de la rupture entraîne immédiatement la cessation du contrat de travail, de sorte que le salarié n'est pas tenu d'exécuter un préavis.

C'est au jour de la prise d'acte de la rupture que la relation contractuelle prend fin. Dans la mesure où la prise d'acte de la rupture n'est soumise à aucun formalisme, sous réserve d'être directement notifiée à l'employeur, c'est à la date où le salarié exprime ou signifie à celui-ci sa volonté de rompre que la relation contractuelle prend fin. En cas de notification écrite postale, la date de prise d'effet de la rupture du contrat de travail est donc la date d'envoi du courrier de prise d'acte à l'employeur.

La rupture du contrat de travail qu'entraîne immédiatement la prise d'acte libère non seulement le salarié de l'obligation de fournir une prestation de travail, mais également l'employeur de toutes les obligations liées à l'exécution de la relation contractuelle. L'employeur n'est donc plus tenu, dès la date à laquelle intervient la prise d'acte, au versement d'une rémunération ou à une quelconque forme d'indemnisation, y compris l'indemnité complémentaire pour maladie. Si l'employeur, à tort, parce qu'il estimait équivoque la volonté du salarié de rompre le contrat de travail, a maintenu celui-ci dans ses effectifs en continuant à procéder au versement du complément de salaire pour maladie, la somme indûment perçue par le salarié devra être restituée.

La rupture du contrat de travail par prise d'acte du salarié n'est justifiée qu'en cas de manquements suffisamment graves de l'employeur pour empêcher la poursuite du contrat de travail, ce qui relève de l'appréciation souveraine des juges du fond. Les juges du fond doivent examiner l'ensemble des manquements de l'employeur invoqués par le salarié, sans se limiter aux seuls griefs mentionnés dans la lettre de rupture. Toutefois, le salarié ne peut pas invoquer un fait qu'il ignorait au moment de la rupture.

C'est en principe au salarié de rapporter la preuve des manquements qu'il invoque et le doute sur la réalité des faits allégués profite à l'employeur. La Cour de cassation juge qu'il appartient cependant à l'employeur qui considère injustifiée la prise d'acte de la rupture par un salarié qui, étant victime d'un accident du travail, invoque une inobservation des règles de prévention et de sécurité, de démontrer que la survenance de cet accident est étrangère à tout manquement à son obligation de sécurité de résultat.

En l'espèce, par courrier en date du 21 décembre 2016, Madame [U] [W] a pris acte de la rupture de son contrat de travail selon les termes suivants:

'Monsieur,

Je travaille pour votre compte en qualité d'aide à domicile depuis le 31 octobre 2014 pour un horaire mensuel de 25 heures si ce n'est que cet horaire a été très largement dépassé dès le mois de Février 2015...

Rien que pour l'année 2016, j'ai ainsi travaillé en Février 108,50 heures, en Mars 119,50 heures, en Avril 2016 132,75 heures, en Juin 2016 101,75 heures, en Août 2016 107,75 heures, si ce n'est que depuis le 1er Septembre 2016, sans recevoir le moindre courrier de votre part, aucun travail ne m'a été fourni ni demandé alors que je restais à votre disposition.

Aussi, devant un tel manquement de votre part (car aux termes du contrat vous aviez l'obligation de me fournir a minima 25 heures de travail par mois, étant relevé que je suis fondé à demander la requalification du contrat de travail en contrat de travail à temps plaine) je prends actes de la rupture de mon contrat de travail et vous demande de me faire parvenir tous les documents administratifs relatifs à une telle rupture. (...)'

La cour a déjà retenu qu'il convenait de requalifier le contrat de travail à temps partiel de Madame [U] [W] en contrat de travail à temps complet à compter du 30 octobre 2014 et a fixé une créance au passif de son ancien employeur au titre, notamment, des rappels de salaires ainsi dûs.

Par ailleurs, il est constant que la salariée est restée à disposition de son ancien employeur à compter du 1er septembre 2016 alors qu'aucun travail ne lui a été fourni ou demandé dans les conditions contractuellement prévues, à savoir une durée de travail mensuelle de 25 heures.

Ces manquements sont suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail.

Ainsi, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a requalifié la prise d'acte de rupture du contrat de travail de Madame [U] [W] née [S] en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Au moment de la rupture du contrat de travail, Madame [W], âgée de 43 ans, bénéficiait d'une ancienneté de 24 mois.

Au vu des éléments d'appréciation dont la cour dispose et de la requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet, les premiers juges ont justement évalué les circonstances de la cause ainsi que les droits et obligations des parties en fixant la créance de Madame [U] [W] née [S] au passif de l'association AIDE AU CONFORT ET AU MAINTIEN A DOMICILE - AMCD aux sommes de 586,65 euros au titre de l'indemnité de licenciement, de 2.933,28 euros au titre des congés payés sur préavis et de 3.500 euros au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement déféré sera également confirmé sur l'ensemble de ces dispositions.

- Sur la garantie de l'association UNEDIC, délégation AGS, CGEA d'[Localité 6] -

Le CGEA d'[Localité 6], en qualité de gestionnaire de l'AGS, demande à ce qu'il soit fait application des dispositions légales et réglementaires applicables tant au plan de la mise en oeuvre du régime d'assurances des créances des salaires que de ses conditions et étendues de garantie, plus précisément des articles L.3253-1, L.3253-8 et D.3253-5 du code du travail. Cette demande ne constituant pas une prétention au sens du code de procédure civile, la cour se limitera à lui donner acte de ce qu'il revendique le bénéfice de l'application de ces dispositions.

En outre, il n'y a pas lieu de déclarer le présent jugement opposable à l'AGS-CGEA d'[Localité 6] dès lors que cette opposabilité s'opère de plein droit, par application des règles de procédure civile, cette partie ayant été appelée à la cause.

Il sera enfin rappelé que le jugement d'ouverture a arrêté le cours des intérêts légaux, conformément aux dispositions de l'article L.622-28 du code de commerce.

- Sur les frais irrépétibles et les dépens -

Les dispositions du jugement déféré relatives aux frais irrépétibles et aux dépens de première instance seront confirmées.

En équité, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

Il convient également de dire que les parties conserveront, chacune à leur charge, le paiement des dépens en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi,

- Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

- Donne acte au CGEA d'[Localité 6], en qualité de gestionnaire de l'AGS, de sa demande tendant à ce qu'il soit fait application des dispositions légales et réglementaires applicables tant au plan de la mise en oeuvre du régime d'assurances des créances des salaires que de ses conditions et étendues de garantie, plus précisément des articles L.3253-1, L.3253-8 et D.3253-5 du code du travail ;

- Rappelle qu'en application des articles L.622-28 et L.641-3 du code de commerce, le jugement d'ouverture de la procédure collective arrête définitivement à sa date le cours des intérêts au taux légal des créances salariales nées antérieurement ;

- Dit que chacune des parties conservera à sa charge le paiement des dépens en cause d'appel ;

- Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Ainsi fait et prononcé lesdits jour, mois et an.

Le greffier, Le Président,

N. BELAROUI C. RUIN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Riom
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20/00691
Date de la décision : 06/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-06;20.00691 ?
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