La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/12/2022 | FRANCE | N°18/00089

France | France, Cour d'appel de Riom, 1ère chambre, 06 décembre 2022, 18/00089


COUR D'APPEL

DE RIOM

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE







Du 6 décembre 2022

N° RG 18/00089 - N° Portalis DBVU-V-B7C-E5H2

-PV- Arrêt n°



S.A.R.L. ETABLISSEMENTS PERFEZOU / S.A.R.L. ADEC



Jugement Au fond, origine Tribunal de Commerce de CUSSET, décision attaquée en date du 17 Octobre 2017, enregistrée sous le n° 2017000041



Arrêt rendu le MARDI SIX DECEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX



COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :

M. Philippe VALLEIX, Président >
M. Daniel ACQUARONE, Conseiller

Mme Laurence BEDOS, Conseiller



En présence de :

Mme Marlène BERTHET, greffier lors de l'appel des causes et du prononcé



ENTRE ...

COUR D'APPEL

DE RIOM

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

Du 6 décembre 2022

N° RG 18/00089 - N° Portalis DBVU-V-B7C-E5H2

-PV- Arrêt n°

S.A.R.L. ETABLISSEMENTS PERFEZOU / S.A.R.L. ADEC

Jugement Au fond, origine Tribunal de Commerce de CUSSET, décision attaquée en date du 17 Octobre 2017, enregistrée sous le n° 2017000041

Arrêt rendu le MARDI SIX DECEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX

COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :

M. Philippe VALLEIX, Président

M. Daniel ACQUARONE, Conseiller

Mme Laurence BEDOS, Conseiller

En présence de :

Mme Marlène BERTHET, greffier lors de l'appel des causes et du prononcé

ENTRE :

S.A.R.L. ETABLISSEMENTS PERFEZOU

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Sophie LACQUIT, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

et par Me Dikmen YOZGAT de la SELARL SAINT-AVIT YOZGAT, avocat au barreau de LYON

Timbre fiscal acquitté

APPELANTE

ET :

S.A.R.L. ADEC

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me François GRANGE de la SELARL JURIDOME, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

Timbre fiscal acquitté

INTIMEE

DÉBATS : A l'audience publique du 17 octobre 2022

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 6 décembre 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par M. VALLEIX, président et par Mme BERTHET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

1/ Faits constants

En application d'un permis de construire délivré le 26 juillet 2010 et de deux contrats concomitamment conclus le 18 mai 2011, en l'espèce un contrat d'architecte avec la SARL ARCHI 3A et un contrat de maîtrise d''uvre de réalisation de travaux avec la SAS 3A RÉALISATION, la SARL ÉTABLISSEMENTS PERFEZOU a commandé la construction d'un bâtiment industriel à usage d'ateliers et de bureaux d'une superficie de 1.777 m² sur une parcelle lui appartenant, cadastrée section [Cadastre 4], d'une superficie de 8.811 m² et située [Adresse 3].

Ce projet immobilier avait pour objet de permettre l'installation dans ces locaux de la société AMG à titre locatif afin d'y exercer une activité industrielle de mécanique générale de précision.

Ce chantier a démarré le 25 mai 2011 avec une livraison prévue pour le 11 août 2011 mais a subi plusieurs interruptions. Les différents lots de construction ont notamment été ainsi répartis (seuls étant cités les lots faisant litige) :

* maîtrise d''uvre de conception des travaux : SARL ARCHI 3A ;

* maîtrise d''uvre de réalisation des travaux : SAS 3A RÉALISATION, venant aux droits de la SAS G5 CONSTRUCTION et à laquelle est substituée la SAS SILICIUM;

* lot Terrassements - VRD : société EIFFAGE TRAVAUX PUBLIQUE RHÔNE-ALPES-AUVERGNE, à laquelle est substituée la société EIFFAGE ROUTE CENTRE-EST ;

* lot Gros-'uvre : SARL ADEC ;

* lot Dallage : SAS SOREDAL ;

* lot Charpentes métalliques : SARL CMF STRUCTURES ;

* bureau d'études géotechniques : SAS ALPHA BTP SUD, à laquelle a été substituée la SAS IGC ;

* bureau de contrôle technique : société SOCOTEC ;

* économie de l'opération de construction : M. [M] [C] ;

* bureau d'études techniques sur les structures : société ALTAIS INGÉNIERIE, à laquelle est substituée la SARL SECOBA.

2/ Éléments de contexte

Arguant de la survenance de nombreuses malfaçons au cours de ce chantier, la société PERFEZOU a été notamment déboutée d'une demande d'expertise judiciaire et condamnée à verser des provisions à certains locateurs d'ouvrage par ordonnance du 5 septembre 2012 du Juge des référés du tribunal de grande instance du Cusset. Cette décision a été partiellement infirmée par la cour d'appel de Riom qui, par un arrêt du 7 octobre 2013, a ordonné sur les travaux litigieux une mesure d'expertise judiciaire confiée à M. [Y] [U], architecte-expert près la cour d'appel de Riom. Après avoir rempli sa mission, l'expert judiciaire commis a établi son rapport le 28 mars 2015.

En lecture de ce rapport d'expertise judiciaire, la SARL ARCHI 3A et la SAS 3 RÉALISATION ont assigné le 15 octobre 2012 la SARL ÉTABLISSEMENTS PERFEZOU devant le tribunal de grande instance de Cusset qui, suivant un jugement n° RG-12/01399 rendu le 26 juin 2017, a :

- rejeté les demandes formées par la société PERFEZOU aux fins d'annulation de l'expertise judiciaire de M. [Y] [U] et d'organisation d'une mesure de contre-expertise judiciaire [et en conséquence de la demande de sursis à statuer formée par la société PERFEZOU sur les demandes adverses] ;

- après avoir constaté l'absence de faute de la maîtrise d''uvre d'exécution, condamné la société PERFEZOU à payer au profit de la société 3A RÉALISATION la somme principale de 46.644,00 € TTC correspondant à ses honoraires contractuels, avec intérêts de retard au taux légal et capitalisation des intérêts moratoires par année entière à compter de l'ordonnance de référé du 5 décembre 2012 ;

- autorisé, à titre de garantie de la condamnation pécuniaire qui précède, la conversion en inscription définitive d'une hypothèque judiciaire provisoire qui avait été autorisée sur la parcelle d'emprise de la construction litigieuse par décision du 25 juillet 2012 du Président du tribunal de grande instance de Cusset ;

- dit que la société ARCHI 3A a commis une faute dans sa mission de maîtrise d''uvre de conception concernant ce projet en raison d'un défaut de prise en compte de la déclivité du terrain, de nature donc à engager sa responsabilité ;

- ordonné en conséquence un complément d'expertise sur dossier, confié à nouveau à M. [Y] [U], sans nouvelle consignation, afin de remplir la mission ci-après libellée : « synthétiser les éléments chiffrés permettant à la juridiction ultérieurement saisie de se prononcer sur le préjudice subi par la SARL ETABLISSEMENT PERFEZOU » ;

- réservé en conséquence la demande principale ayant été formée par la société ARCHI 3A, cette dernière ayant réclamé à la société PERFEZOU le paiement de la somme principale de 31.096,00 € TTC correspondant à ses honoraires contractuels, avec intérêts de retard au taux légal et capitalisation des intérêts moratoires par année entière à compter de l'ordonnance de référé du 5 décembre 2012 ;

- débouté la société ARCHI 3A de sa demande de conversion en inscription définitive de la prise d'hypothèque provisoire autorisée à l'encontre de la société PERFEZOU sur la parcelle d'emprise de la construction litigieuse par décision du 25 juillet 2012 du Président du tribunal de grande instance de Cusset ;

- rejeté les demandes de dommages-intérêts complémentaires formées par les parties ainsi que toutes autres demandes plus amples ou contraires ;

- ordonné en conséquence la réouverture des débats en invitant les sociétés PERFEZOU et ARCHI 3A à conclure sur le montant du préjudice consécutif à l'engagement de la responsabilité de cette dernière ;

- dit n'y avoir lieu à condamnations des parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société PERFEZOU à payer les entiers dépens de la prise hypothèque provisoire au profit de la société 3A RÉALISATION et sa conversion, avec distraction au profit de la SCP Presle et associés, Avocat au barreau de Cusset-Vichy;

- condamné la société ARCHI 3A aux frais de prise inscription d'hypothèque judiciaire provisoire à son profit ;

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire de la décision ;

- réservé les autres dépens de l'instance.

Par déclaration n° 17/01811 formalisée par le RPVA le 8 août 2017, le conseil de la SARL ÉTABLISSEMENTS PERFEZOU a interjeté appel partiel du jugement susmentionné, l'appel portant sur le rejet de ses demandes d'annulation d'expertise judiciaire et d'organisation d'une mesure de contre-expertise judiciaire, sur la condamnation pécuniaire de 46.644,00 € au profit de la société 3A RÉALISATION, sur la conversion de l'hypothèque judiciaire provisoire en inscription définitive et sur la décision de recours seulement à un complément d'expertise judiciaire. Cette déclaration d'appel a donné lieu à l'instance n° RG-17/01959.

Suivant un arrêt rendu avant dire droit le 18 juillet 2018, la cour d'appel de Riom a sursis à statuer sur les demandes, invitant la société PERFEZOU à fournir tous éléments utiles d'information sur d'autres procédures civiles, commerciales et pénales éventuellement en cours devant d'autres juridictions à propos de cette même opération litigieuse de construction.

Par acte d'huissier de justice signifié le 13 septembre 2018, la SARL ÉTABLISSEMENTS PERFEZOU a appelé la SARL ADEC en intervention forcée à cette procédure d'appel, cet acte ayant donné lieu à l'ouverture de l'instance n° RG-18/01846.

Par acte d'huissier de justice signifié le 13 septembre 2018, la SARL ÉTABLISSEMENTS PERFEZOU a appelé la SAS SOREDAL en intervention forcée à cette procédure d'appel, cet acte ayant donné lieu à l'ouverture de l'instance n° RG-18/01847.

Par acte d'huissier de justice signifié le 13 septembre 2018, la SARL ÉTABLISSEMENTS PERFEZOU a appelé la SARL CMF STRUCTURES en intervention forcée à cette procédure d'appel, cet acte ayant donné lieu à l'ouverture de l'instance n° RG-18/01848.

Par acte d'huissier de justice signifié le 14 septembre 2018, la SARL ÉTABLISSEMENTS PERFEZOU a appelé la société EIFFAGE ROUTE CENTRE-EST (anciennement EIFFAGE TRAVAUX PUBLICS RHÔNE-ALPES-AUVERGNE) en intervention forcée à cette procédure d'appel, cet acte ayant donné lieu à l'ouverture de l'instance n° RG-18/01849.

Par ordonnances rendues le 4 octobre 2018, le Conseiller de la mise en état a ordonné la jonction des instances n° RG-18/01846, n° RG-18/01847, n° RG-18/01848 et n° RG-18/01849 à l'instance n° RG-17/01959.

Par actes d'huissier de justice signifiés le 3 avril 2020, la SARL ÉTABLISSEMENTS PERFEZOU a appelé la SAS IGC (anciennement SAS ALPHA BTP SUD), la société SOCOTEC, M. [M] [C] et la SARL SECOBA (anciennement société ALTAIS INGÉNIERIE) ainsi que la SARL AMG en interventions forcées à cette procédure d'appel, ces actes ayant donné lieu à l'ouverture de l'instance n° RG-20/00568.

Suivant un arrêt rendu avant dire droit au fond le 24 septembre 2019, la cour d'appel de Riom a :

- rejeté les demandes de mise hors de cause des sociétés ADEC, SOREDAL, CMF STRUCTURES et EIFFAGE ROUTE CENTRE EST ;

- débouté la société PERFEZOU de sa demande d'annulation de l'expertise judiciaire susmentionnée ;

- ordonné avant dire droit au fond, de manière opposable à l'ensemble des parties en cause, une seconde mesure d'expertise judiciaire confiée à M. [G] [B], architecte-expert près la cour d'appel de Lyon.

Par ordonnance rendue le 17 septembre 2020, le Conseiller de la mise en état a notamment ordonné la jonction de l'instance n° RG-20/00568 à l'instance n° RG-17/01959. Par ordonnance de même date, le Conseiller de la mise en état a déclaré cette seconde mesure d'expertise judiciaire commune et opposable à M. [M] [C] et aux sociétés IGC, SOCOTEC et SECOBA ainsi qu'à la société AMG.

Après avoir rempli sa mission, l'expert judiciaire commis M. [H] [B] a établi son rapport le 20 janvier 2022. C'est en lecture de ce second rapport d'expertise judiciaire que les parties ont été de nouveau amenées à conclure.

3/ Éléments de l'instance

Suivant un jugement n° RG-17/000041 rendu le 17 octobre 2017, le tribunal de commerce de Cusset a :

- rejeté une demande de sursis à statuer formée par la société PERFEZOU ;

- condamné la société PERFEZOU à payer au profit de la société ADEC la somme principale de 57.208,00 € correspondant au solde impayé de ses prestations de travaux de gros-'uvre, outre intérêts de retard au taux légal à compter de la date de l'assignation ;

- condamné la société PERFEZOU à payer au profit de la société ADEC la somme additionnelle de 4.000,00 € à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive ;

- condamné la société PERFEZOU à payer au profit de la société ADEC une indemnité de 1.500,00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;

- rejeté le surplus des demandes des parties ;

- ordonné l'exécution provisoire de la décision ;

- condamné la société PERFEZOU aux entiers dépens de l'instance en liquidant ceux-ci à la somme de 77,08 €, TVA comprise.

Par déclaration n° 18/000089 formalisée par le RPVA le 10 janvier 2018, le conseil de la SARL ÉTABLISSEMENTS PERFEZOU a interjeté appel partiel du jugement susmentionné, l'appel portant sur le rejet de ses demandes d'annulation d'expertise judiciaire et d'organisation d'une mesure de contre-expertise judiciaire et sur l'ensemble des condamnations pécuniaires dont elle a fait l'objet. Cette déclaration d'appel a donné lieu à l'instance n° RG-18/000089.

' Par dernières conclusions de fond en qualité d'appelant notifiées par le RPVA le 10 mai 2022, la SARL ÉTABLISSEMENTS PERFEZOU a demandé de :

' réformer le jugement du 17 octobre 2017 du tribunal de commerce de Cusset et statuer à nouveau ;

' débouter la société ADEC de l'ensemble de ses demandes ;

' condamner la société ADEC à lui rembourser la somme de 60.000,00 € à titre de remboursement de l'acompte précédent versé ;

' condamner la société ADEC à lui payer la somme de 5.000,00 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

' condamner la société ADEC aux entiers dépens de l'instance.

' Par dernières conclusions de fond en qualité d'intimé notifiées par le RPVA le 2 juillet 2018, la SARL ADEC a demandé de :

' au visa des articles 1134, 1147 et 1152 du Code civil [ancien] ;

' débouter la société PERFEZOU de l'ensemble de ses demandes ;

' confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

' condamner la société PERFEZOU à lui payer une indemnité de 4.000,00 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

' condamner la société PERFEZOU aux entiers dépens de l'instance comprenant les dépens de première instance et ceux générés aux fins d'exécution de la décision de première instance assortie de l'exécution provisoire.

Par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, les moyens développés par chacune des parties à l'appui de leurs prétentions respectives sont directement énoncés dans la partie MOTIFS DE LA DÉCISION.

Par ordonnance rendue le 08 septembre 2022, le Conseiller de la mise en état a ordonné la clôture de cette procédure.

Lors de l'audience civile collégiale du 17 octobre 2022 à 14h00, au cours de laquelle cette affaire a été évoquée, chacun des conseils des parties a réitéré et développé ses moyens et prétentions précédemment énoncés. La décision suivante a été mise en délibéré au 6 décembre 2022, par mise à disposition au greffe.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1/ Résumé des travaux expertaux

L'examen du rapport d'expertise judiciaire du 28 mars 2015 de M. [Y] [U] amène notamment à retenir que :

' les travaux litigieux ont débuté fin mai 2011 avec un premier compte rendu de chantier daté du 23 mai 2011, la livraison de l'ouvrage étant alors prévue pour le 10 août 2011, l'atelier étant lors d'une visite expertale du 10 janvier 2014 entièrement équipé de machines de précision en fonctionnement depuis janvier 2013 et les locaux à usage de bureaux et vestiaires étant alors achevés mais non encore en service du fait de l'inachèvement des revêtements de sol ;

' le délai contractuel d'achèvement des travaux ayant été fixé au 10 août 2011, aucune réception des travaux n'a été réalisée alors que ce délai a été de toute façon prorogé, l'ouvrage apparaissant toutefois livrable en fin d'année 2011 alors qu'un constat d'huissier de justice du 13 janvier 2012 montre des locaux paraissant achevés à l'identique du stade de l'expertise

' le réglage du plafond à la hauteur de 2,50 m, alors que les plans prévoyaient une hauteur sous plafond de 2,60 m, n'apparaît pas avoir d'incidences sur la fonctionnalité des locaux du rez-de-chaussée à usage de bureaux, une machine ayant pu y être installée avec un défoncé de plafond de hauteur de 51 cm ;

' il en est de même en ce qui concerne la hauteur du local à usage de bureaux des méthodes, qui était de 2,70 m au lieu de 2,60 m, alors que la hauteur de 3,20 m depuis le sol de l'atelier est conforme au plan ;

' il n'est pas démontré que le changement d'emplacement du ballon de production d'eau chaude du local à usage de vestiaire soit de nature à compromettre l'usage de ce local ;

' concernant l'extérieur, la rampe d'accès depuis la voie située à l'arrière de l'usine ne fait toujours l'objet d'aucun aménagement ni d'aucun revêtement, l'excès d'inclinaison de cette pente qui serait par endroits de 15 % et qui ne permettrait pas la livraison et le déchargement des machines équipant l'usine étant compensée par l'aménagement d'une autre solution de desserte à l'avant du site moyennant un marché complémentaire d'aménagement de la plate-forme située de ce côté de l'ouvrage ;

' le relevé topographique de cette rampe d'accès depuis [Adresse 2] révèle une pente maximale de 13 % au départ avec un amortissement progressif jusqu'à sa mi-longueur pour atteindre ensuite une pente régulière de l'ordre de 3 % à l'abord du bâtiment, la différence d'altimétrie entre le niveau du dallage de l'atelier et [Adresse 2] étant de 2,95 m alors que le plan de masse du dossier de permis de construire présentait un bâtiment à créer à seulement 0,30 m par rapport au chemin de Bouzol et que la forte pente du terrain naturel ne pouvait échapper à l'architecte, même en l'absence de moyens topographiques

' l'inversion du sens d'ouverture de la porte vestiaire-atelier n'a pas d'incidence sur son usage et n'apparaît donc pas préjudiciable au maître d'ouvrage ou à l'exploitant industriel ;

' il est nécessaire de procéder au remplacement d'une dalle de plafond en raison d'une réservation de climatisation non utilisée et insuffisamment étanche aux eaux de pluie, cette sortie devant par ailleurs être provisoirement obturée ;

' les sols en béton du rez-de-chaussée (bureaux et ateliers), comportant une finition avec métallisation destinée à endurcir la surface, sont affectés de plusieurs réseaux de fissurations et de microfissurations ainsi que de traces d'usure en différents endroits (provenant du roulage des fenwicks) et d'incrustations de copeaux et paillettes métalliques provenant des machines de fraisage, alors que les revêtements prévus en PVC collé ne sont pas posés, sans que ces altérations n'entraînent de nuisances pour l'usage des lieux ;

' ce dallage constitué d'un béton de qualité moyenne ne comporte pas pour autant de défauts majeurs après analyse visuelle de carottages, y compris à proximité des fissurations, et apparaît conforme en termes notamment de treillis soudé et situé en fond de dalle sur polyane, de résistance à la compression, de masses volumiques le composant et de valeurs de porosité, sans par ailleurs révéler des désordres structurels ou des risques pour la solidité de l'ouvrage du fait par exemple de pressions hydrostatiques ou de défaillances provenant du remblai de terre-plein, ces défauts restant néanmoins dans les tolérances admises et n'étant pas de nature à nuire à l'usage des lieux ;

' concernant la planimétrie au niveau des microfissures du dallage, les écarts sont tous inférieurs à 7 mm sur 2 m (hors joints de fractionnement) ;

' concernant les griefs de vibrations excessives des machines, qui provoqueraient selon la société AMG des dérèglements constants, des contretemps, et des refus de pièces par les clients, celles-ci ne sont pas fixées dans le dallage mais posées sur des patins métalliques réglables, sans interposition d'aucun dispositif antivibratoire ;

' le sol du local d'accueil, non aménagé, est affecté d'un phénomène de fissuration de retrait formant une croix centrée dans la pièce avec un creux maximal de 7 mm, le maître d'ouvrage disant craindre en cet endroit pour la stabilité du dallage, les tolérances de planéité pour la pose d'un carrelage collé avec ragréage préalable étant par ailleurs de 10 mm ;

' il existe également des lignes de microfissures du dallage au niveau du local réfectoire (dans la diagonale de la pièce) et au niveau du local côté atelier sur les deux poutres porteuses des bacs métalliques supports du dallage, alors que cela ne révèle pas de faiblesses structurelles et que le plancher de l'étage a été dimensionné pour une surcharge d'exploitation de 250 kg/m²

L'examen du rapport d'expertise judiciaire du 20 janvier 2022 de M. [G] [B], assisté d'un sapiteur en la personne de M. [N] [Z], ingénieur en mécanique industrielle et structures du bâtiment, amène notamment à retenir que :

' aucune des machines-outils d'usinage de précision situées dans le hall industriel du rez-de-chaussée n'est équipée au niveau de ses appuis ponctuels ou au droit de ses piètements de dispositifs antivibratiles ;

' des constatations identiques de microfissurations sont faites concernant les surfaces des dallages des locaux tertiaires et sanitaires du rez-de-chaussée, des locaux tertiaires de l'étage et du hall de production industrielle, avec ponctuellement de très léger désaffleurs trahissant des fissurations en pleine épaisseur de la chape de compression du plancher du rez porteur ;

' l'ensemble de la structure porteuse ponctuelle ne semble pas ou semble peu affectée par des désordres dus à des mouvements, notamment celle du plancher de l'étage à usage tertiaire, ces désordres restant dans les caractéristiques de microfissures, les désordres n'étant pas évolutifs et aucun d'entre eux ne portant atteinte à la stabilité ou à la destination du bâtiment, « Les désordres relevés [n'étant] objectivement pas très important et leur caractère peu évolutif, voire très peu évolutif ou stabilisé suivant les zones. » ;

' le principal grief exprimé par l'exploitant industriel est le déréglage récurrent de ses machines-outils ou presses pouvant être mises en lien avec la non-conformité de planéité du dallage du hall de production ;

' d'une manière générale, les phénomènes vibratoires résultant des usinages industriels constituent un enjeu majeur et un des facteurs les plus limitants du process, pouvant entraîner des pertes de productivité, des contretemps du fait des mises au point et des reprises ainsi que des usures susceptibles d'entraîner la mise au rebut de pièces de machines, alors qu'il persiste toujours un manque de méthodes prédictives robustes et de logique d'ensemble pour remédier concrètement à ce problème (théorie des lobes de stabilité permettant en pratique d'estimer les vitesses de rotation afin de jouer sur l'ampleur des vibrations, systèmes d'amortisseurs par ajout de manière à maximiser la dissipation d'énergie, systèmes ajoutés aux systèmes usinants afin d'étouffer les vibrations, dispositifs de bandes de caoutchoucs butyle, connaissance théorique des différents paramètres et conditions de coupe, dispositifs antivibratoires directement intégrés dans les machines par les fabricants, qualités de la surface de support pouvant conduire à des surépaississements généraux ou ponctuels) ;

' il n'apparaît pas que la mise en 'uvre des remblais de plateforme et des structures des dallage des planchers ait été défaillante ou rende les locaux litigieux inexploitables au regard de leur finalité ni que la construction ait été faite en méconnaissance du terrain en tréfonds, seul étant en cause le niveau d'épaisseur de la dalle du rez-de-chaussée sur remblais ;

' une campagne de mesurages millimétriques en 3D de l'ensemble des surfaces à usage industriel et tertiaire du rez-de-chaussée du bâtiment a été effectuée les 11 et 12 octobres 2021 par un sapiteur géomètre expert, contrôlant ainsi la planéité générale des dallages sur un bâtiment de 61,02 m de long par 24,38 m de large, alors que ce contrôle technique n'accuse en définitive qu'un léger fléchissement de 9 mm, « Ces constats [révélant] que la planéité générale du dallage est parfaite et qu'elle n'a pas pu varier dans le temps, (10 ans) vues les valeurs de mesurage relevées. », étant noté par ailleurs qu'un contrôle technique de résistance de la plateforme remblayée sous dallage s'est avéré positif ;

' concernant l'exploitation industrielle du hall, les remblais de plateforme et la plate-forme du bâtiment ainsi que ses dallages ne présentent aucune distorsion de planéité anormale dans le premier tiers du hall côté est alors que le deuxième tiers central subit des fractionnements de dallage pouvant impacter l'exploitation industrielle et que le troisième tiers côté ouest comporte des parties de dallage qui sont également déstabilisés, l'ensemble du bâti étant implanté dans des conditions périphériques très défavorables sur le plan hydrique, au demeurant sur une pente naturelle de l'ordre de 5 % ;

' un certain nombre de travaux correctifs et complémentaires doivent être envisagés : achèvement du réseau VRD des abords des bureaux avec mise en terre et végétalisation, récupération des eaux de ruissellement périphériques à la partie du bâtiment à usage de bureaux, constitution d'une barrière hydrofuge notamment au pied des façades des bureaux et du hall, barrages par drainage et collecte étanche des eaux d'infiltrations périphériques, traitement par membrane du bassin de rétention avec réinjection plus en aval, vérification de la bonne étanchéité des réseaux d'évacuation des eaux pluviales ainsi que des eaux usées, afin de tenir compte des contraintes de gonflement depuis 10 ans d'un terrain géologiquement considéré comme étant « moyennement gonflant » ;

' l'échelle du bâtiment révèle des épaisseurs de dallages de 15 à 18/19 cm qui s'avèrent insuffisantes en termes de prévention de propagation dans un contexte vibratoire, alors que les prescriptions d'épaisseurs de béton des socles sont prévues entre 25 et 30 centimètres par les fabricants des différentes machines-outils ayant été disposées dans ce hall industriel et que « La conceptions prescrite, de socles de 30 cm d'épaisseur sur 4 m de long, présente un rapport 10 fois plus important et durs à mettre en vibration (') » ;

' la densité massique de ces socles, associée à celle des machines, permet de s'opposer efficacement à leur mise en vibration, outre dispositifs de fixation au sol constituant de véritables lests, la mise en 'uvre de socles indépendants constituant dès lors la seule issue pour contrer efficacement les sources de vibrations et permettre une bonne exploitation des lieux, outre nécessité d'isoler systématiquement chaque machine constituant une source potentiellement vibratoire.

La société ADEC ne précise ni ne développe dans ses écritures les critiques qu'elle exprime à l'égard du travail expertal de M. [B] en se référant à un consultant privé qu'elle a elle-même missionné (M. [T]). La crédibilité de ce rapport d'expertise judiciaire n'apparaît dès lors pas devoir être affectée par ce rapport de consultant privé.

2/ Sur les obligations contractuelles des parties

Invoquant au visa de l'article 1147 du Code civil [ancien] l'obligation de résultat pesant sur le locateur d'ouvrage quant à la prestation à réaliser ainsi que son obligation de conseil à l'égard du maître de l'ouvrage, la société PERFEZOU fait valoir l'exception d'inexécution prévue à l'article 1184 du Code civil [ancien], refusant en conséquence de procéder au règlement du marché de travaux de gros-'uvre du 26 avril 2011 la liant à la société ADEC moyennant la somme totale de 117.208,00 € TTC. C'est dans ces conditions qu'elle refuse de payer ce solde de facturation à hauteur de 57.208,00 €, demandant dès lors l'infirmation du jugement de première instance sur ce chef de condamnation pécuniaire, et qu'elle réclame le remboursement de l'acompte précédemment versé à hauteur de la somme de 60.000,00 €.

Après avoir critiqué les deux rapports d'expertise que M. [U] et de M. [B], elle reproche à la société ADEC en pages 10 et 11 de ses conclusions de ne pas avoir édifié un ouvrage conforme à l'usage auquel il était destiné, en l'espèce un bâtiment industriel destiné à recevoir des machines de mécanique de précision tel qu'indiqué sur les plans qui lui étaient fournis, faisant valoir que ce bâtiment aurait dû avoir une dalle suffisamment solide pour supporter le poids des machines et leurs mouvements pendant leur mise en service sans distinction entre les zones et qu'il ne pouvait en aucun cas être affecté par les mouvements du sol. Elle ajoute que ce locateur d'ouvrage ne peut en aucun cas s'exonérer de sa responsabilité vis-à-vis du maître de l'ouvrage en arguant avoir effectué les travaux en fonction des études de la maîtrise d''uvre. Elle estime enfin que des fautes ont été commises du fait que les plots de fondation ont été posés sans respect de l'alignement prévu par les plans.

En l'occurrence l'exception d'inexécution invoquée par la société PERFEZOU n'apparaît pas fondée, ce qui conduit à confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a condamné cette dernière à payer au profit de la société ADEC la forme de 57.208,00 € au titre du solde impayé de sa facturation de l'ensemble de ses travaux de gros-'uvre, outre intérêts de retard au taux légal à compter de la date de l'assignation, et à la débouter de sa demande de condamnation de la société ADEC à lui rembourser l'acompte précité de 60.000,00 €. Les motifs de ce chef de décision sont ci-après énoncés.

A - Concernant le grief de vibrations excessives et d'inappropriation de la dalle

Il convient préalablement de déterminer si la partie rez-de-chaussée du bâtiment industriel a été conçue et construite en vue d'une utilisation ordinaire ou standard ou au contraire en vue d'une utilisation spécifique comprenant l'installation de machines lourdes à fortes charges dynamiques d'usinage et à émissions vibratoires importantes.

Dans l'optique d'une construction à usage ordinaire, indépendamment donc de toute finalité d'exercice par le futur exploitant industriel des activités litigieuses de production générale de pièces mécaniques de précision, force est de constater que cette partie rez-de-chaussée du bâtiment construit ne comporte aucunes non-conformités ni faiblesses structurelles ou désordres particuliers, en dépit de la qualité moyenne du béton employé, dans la mesure où un contrôle technique de résistance de la plateforme remblayée sous dallage s'est avéré positif, où le fléchissement, et donc le déficit de planéité, de la dalle litigieuse n'excède pas la norme communément admise (pas plus de 9 mm de différences mesurées sur l'ensemble du bâtiment (de 61,02 m de long et de 24,38 m de large), où l'épaisseur de la dalle n'est dès lors pas en cause, où le procédé constructif de cette dalle reste tout à fait conforme aux règles de l'art et aux normes techniques en vigueur (treillage soudé placé en fond de dalle, masses volumiques, valeurs de porosité, résistance à la compression) où les sols et leur finalisation par un durcissement métallique sont en parfait état d'usage et de fonctionnalité.

Au regard des documents contractuels initiaux de maîtrise d''uvre du 18 mai 2011, ni le contrat d'architecte conclu avec la société ARCHI 3A ni le contrat de maîtrise d''uvre de réalisation de travaux conclu avec la société 3A RÉALISATION (actuellement SILICIUM) ne spécifie que la construction projetée a pour finalité une activité spécifique de production industrielle de mécanique générale de précision, seule étant indiqué que « (') les prestations [concourent] à la construction d'un bâtiment à usage d'atelier et de bureaux pour AMG ». Aucune clause de ces contrats ne précise ce qu'est AMG ni en quoi consistent ses futures activités et donc les futures conditions d'utilisation du bâtiment, laissant simplement deviner il s'agit là du futur exploitant industriel du bâtiment à construire.

En définitive, en lecture de ces documents contractuels de maîtrise d''uvre ayant encadré le marché de travaux du 26 avril 2011 avec la société ADEC, il n'apparaît pas anormal que le choix d'épaisseur de la dalle du rez-de-chaussée ait été conçu en vue d'une utilisation standard et ordinaire moyennant une épaisseur de dallage de l'ordre de 15 à 18/19 cm au lieu d'une épaisseur de dallage de l'ordre de 25 à 30 cm telle que spécifiquement prévue et recommandée pour la réception de machines lourdes à effets dynamiques. Il était pourtant aisément loisible à la société PERFEZOU, qui se réservait en qualité de maître d'ouvrage la définition du programme de construction dans le contrat d'architecte conclu avec la société ARCHI 3A, d'inclure précisément dans la définition de ce programme les contraintes constructives spécifiques à l'activité industrielle devant être exercée par la société AMG et notamment celle relative à la surépaisseur de la dalle porteuse sur l'ensemble de sa surface de manière à pouvoir changer les machines de place au fil du temps.

La société PERFEZOU ne rapporte donc pas la preuve, qui lui incombe, que la société ADEC ait été dûment informée dans les documents contractuels la missionnant de l'exacte finalité d'utilisation du bâtiment à construire. L'inappropriation des caractéristiques mécaniques du dallage par rapport à l'activité industrielle particulière qu'y exerce actuellement l'exploitant industriel ne lui est donc pas imputable. Dans ces conditions, c'est à la société PERFEZOU qu'il importe de rechercher directement et exclusivement avec son locataire exploitant industriel, en termes d'imputation des frais et des contraintes s'y rapportant, les correctifs nécessaires pour permettre à ce dernier d'exercer convenablement son activité.

Le second expert judiciaire rappelle de manière tout à fait documentée à ce sujet qu'il existe plusieurs solutions techniques sur ce problème identifié dans l'industrie depuis plus d'un siècle, dont celle consistant notamment à construire ponctuellement sous chaque machine un socle en béton afin d'obtenir ou de rattraper cette épaisseur techniquement requise entre 25 à 30 cm (sur 4 m de long afin d'obtenir un amortissement vibratoire 10 fois plus important). Ces socle indépendants ont en effet pour finalité, outre solutions d'arrimage ou dispositifs d'amortissement au niveau directement des bases et piètements des machines, de mieux amortir les inévitables émissions vibratoires des machines d'usinage. Ces dispositifs d'arrimage et d'amortissement n'ont même pas été constatés par les deux experts judiciaires sur cette dalle ordinaire. Le second expert judiciaire rappelle de manière suffisamment documentée que les fabricants de ces machines préconisent eux-mêmes dans les cahiers des charges leur pose sur des socles dédiés pour optimiser en surépaisseur ponctuelle l'amortissement des vibrations. Or, toutes les machines sont simplement posées sur des patins métalliques réglables sans aucune interposition de dispositifs périphériques et jointifs à effet de barrières vibratiles. Le second expert conclut et confirme très clairement que, compte tenu de l'état actuel de construction du bâtiment litigieux, la mise en 'uvre de socles indépendants, outre joints périphériques souples et étanches assurant une réelle indépendance massique, sous chaque machine constitue désormais la seule solution pour contrer efficacement les sources de vibrations de ces machines rotatives et permettre la bonne exploitation des lieux.

B - En ce qui concerne les mouvements naturels du sol

À cela s'ajoutent des mouvements hydriques provenant du sol naturel, ayant pour effet d'occasionner ou en tout cas de laisser poindre des distorsions de planéité et des fractionnements ainsi que des instabilités au niveau du tiers central de la dalle du hall industriel et plus encore de son tiers ouest. Le second expert indique à ce sujet que les conditions périphériques de ce bâtiment sont très défavorables sur le plan hydrique. Pour autant, il n'apparaît pas d'une manière générale que la mise en 'uvre des remblais de plateforme et la construction des structures des dallages ait été défaillante ou rendent les locaux inexploitables, pour les motifs précédemment énoncés. Par ailleurs, la teneur du tréfonds du terrain d'emprise du bâti était initialement connue, s'agissant d'un sous-sol naturel qualifié de « moyennement gonflant » au gré des variations hydriques saisonnières.

À ce sujet, sur ce terrain qui n'en est pas moins normalement constructible, le second expert identifie précisément à l'ouest du bâtiment un phénomène de « migration hydrique » avec un effet de cuvette sans aucune protection périphérique des eaux en terre-plein. Il préconise en conséquence un ensemble de travaux qui sont entièrement à la charge du propriétaire : achèvement du réseau VRD des abords des bureaux avec mise en terre et végétalisation, récupération des eaux de ruissellement périphériques au niveau de la partie du bâtiment à usage de bureaux, constitution d'une barrière hydrofuge notamment au pied des façades des bureaux et du hall, barrages par drainages et collectes étanches des eaux d'infiltrations périphériques, traitement par membrane du bassin de rétention avec réinjection plus en aval, vérification de la bonne étanchéité des réseaux d'évacuation des eaux pluviales ainsi que des eaux usées, afin précisément de tenir compte des contraintes de gonflement depuis dix ans de ce terrain géologiquement considéré comme étant « moyennement gonflant ».

Ces désordres apparaissent donc uniquement imputables à la société PERFEZOU qui a visiblement négligé ses obligations d'entretien des abords et équipements périphériques extérieurs du bâtiment litigieux, en sa qualité de propriétaire.

C - En ce qui concerne les alignements des plots

Quelle que soit l'état de conformité par rapport aux plans initiaux, aucun des deux rapports d'expertise judiciaire ne fait état du fait que les conditions d'alignement des plots de fondation réalisés par la société ADEC afin de permettre la pose des portiques métalliques sur ces mêmes plots de fondation par la société CMF seraient génératrices de désordres ou d'atteintes à l'usage ou à la pérennité du bâtiment.

Ce moyen soutenu par la société PERFEZOU sera donc écarté.

3/ Sur les autres demandes

La société PERFEZOU ne remet pas en débat dans ses conclusions en cause d'appel le rejet en première instance de sa demande de sursis à statuer. Ce chef du jugement de première instance sera en conséquence purement et simplement confirmé.

Il convient de rappeler que la bonne foi procédurale des parties est toujours présumée et qu'il appartient en conséquence à la partie alléguant un abus de procédure ou une résistance abusive de la part de la partie adverse d'apporter la preuve de cette mauvaise foi. En effet, l'exercice d'une action en justice, de même que la défense à une telle action, constitue par principe un droit ne pouvant le cas échéant dégénérer en abus, et ne devant dans cette situation donner lieu à réparation par l'allocation de dommages-intérêts, que dans les cas de malice ou de mauvaise foi s'objectivant en premier lieu par une erreur grossière équipollente au dol.

En l'occurrence, en l'absence d'erreurs grossières de fait ou de droit, il y a lieu de considérer au terme des débats que la société ADEC n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, que la société PERFEZOU ait tenté de faire valoir cette exception d'inexécution en préférant en définitive un arbitrage judiciaire à ce différend en étant animée d'une intention relevant de la mauvaise foi ou de la malice.

Le jugement de première instance sera en conséquence infirmé en ce qu'il a condamné la société PERFEZOU à payer au profit de la société ADEC une allocation de dommages-intérêts de 4.000,00 € à titre de résistance abusive.

Le jugement de première instance sera confirmé en ce qui concerne l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et l'imputation des dépens de première instance. En ce qui concerne ce dernier point, la demande tendant à y inclure les frais d'exécution sera rejetée, ce point particulier de demandes n'étant accompagné d'aucun justificatif particulier de frais.

Il serait effectivement inéquitable, au sens des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, de laisser à la charge de la société ADEC les frais irrépétibles qu'elle a été contrainte d'engager à l'occasion de cette instance et qu'il convient d'arbitrer à la somme de 3.000,00 €.

Enfin, succombant à l'instance en cause d'appel, la société PERFEZOU sera purement et simplement déboutée de sa demande de défraiement formée au visa de l'article 700 du code de procédure civile et en supportera les entiers dépens.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

STATUANT PUBLIQUEMENT

ET CONTRADICTOIREMENT

INFIRME le jugement n° RG-17/000041 rendu le 17 octobre 2017 par le tribunal de commerce de Cusset en ce qu'il a condamné la SARL ÉTABLISSEMENTS PERFEZOU à payer au profit de la SARL ADEC la somme de 4.000,00 € à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive.

CONFIRME ce même jugement en toutes ses autres dispositions.

CONDAMNE la SARL ÉTABLISSEMENTS PERFEZOU à payer au profit de la SARL ADEC une indemnité de 3.000,00 € en dédommagement de ses frais irrépétibles prévus à l'article 700 du code de procédure civile.

REJETTE le surplus des demandes des parties.

CONDAMNE la SARL ÉTABLISSEMENTS PERFEZOU aux entiers dépens de l'instance.

Le greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Riom
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18/00089
Date de la décision : 06/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-06;18.00089 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award