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22/11/2022 | FRANCE | N°19/00649

France | France, Cour d'appel de Riom, Chambre sociale, 22 novembre 2022, 19/00649


22 NOVEMBRE 2022



Arrêt n°

SN/NB/NS



Dossier N° RG 19/00649 - N° Portalis DBVU-V-B7D-FF4C



Société [R] [N]



/



[G] [L]

Arrêt rendu ce VINGT DEUX NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX par la QUATRIEME CHAMBRE CIVILE (SOCIALE) de la Cour d'Appel de RIOM, composée lors des débats et du délibéré de :



M. Christophe RUIN, Président



Mme Sophie NOIR, Conseiller



Mme Karine VALLEE, Conseiller



En présence de Mme Nadia BELAROUI greffier lors des débats e

t du prononcé



ENTRE :



Société [R] [N]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentant : Me Antoine PORTAL de la SARL TRUNO & ASSOCIES, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND



APPELANT...

22 NOVEMBRE 2022

Arrêt n°

SN/NB/NS

Dossier N° RG 19/00649 - N° Portalis DBVU-V-B7D-FF4C

Société [R] [N]

/

[G] [L]

Arrêt rendu ce VINGT DEUX NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX par la QUATRIEME CHAMBRE CIVILE (SOCIALE) de la Cour d'Appel de RIOM, composée lors des débats et du délibéré de :

M. Christophe RUIN, Président

Mme Sophie NOIR, Conseiller

Mme Karine VALLEE, Conseiller

En présence de Mme Nadia BELAROUI greffier lors des débats et du prononcé

ENTRE :

Société [R] [N]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentant : Me Antoine PORTAL de la SARL TRUNO & ASSOCIES, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

APPELANT

ET :

Mme [G] [L]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentant : Me Anicet LECATRE, avocat au barreau de MOULINS

INTIME

Monsieur RUIN, Président et Mme NOIR, Conseiller après avoir entendu, Mme NOIR, Conseiller en son rapport, à l'audience publique du 19 septembre 2022, tenue par ces deux magistrats, sans qu'ils ne s'y soient opposés, les représentants des parties en leurs explications, en ont rendu compte à la Cour dans son délibéré après avoir informé les parties que l'arrêt serait prononcé, ce jour, par mise à disposition au greffe conformément aux dispositions de l'article 450 du code de procédure civile.

FAITS ET PROCÉDURE

La SEP [R] [O] et [N] était une agence générale d'assurances AXA qui employait moins de 11 salariés.

Elle appliquait la convention collective des agents généraux d'assurance.

Mme [G] [L] a été embauchée par M. [H] [W] à compter du 14 janvier 1991en qualité d'employée toutes branches d'agence générale d'assurances dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée à temps complet, au salaire de 5 550 francs.

Le contrat de travail a été transféré à la SEP [R] [O] et [N] à compter du 1er janvier 2009.

Au dernier état de la relation contractuelle, Mme [G] [L] occupait le poste de collaboratrice en charge de la gestion des sinistres 'entreprises'.

Au mois de novembre 2015, M. [O] [R] a quitté le cabinet d'assurances.

La salarié a été placée en arrêt de travail pour maladie à compter du 18 octobre 2016, renouvelé jusqu'au 18 janvier 2017.

Au terme d'une seconde visite médicale de reprise, le médecin du travail l'a déclarée inapte à son poste le 31 janvier 2017.

Par courrier du 19 avril 2017, M. [N] [R] a proposé à Mme [G] [L] un poste chargée de clientèle particuliers à temps complet situé à l'agence de [Localité 5].

La salariée lui a répondu le 25 avril 2017 en rappelant que le médecin du travail avait exclu un reclassement dans l'agence de [Localité 5], en lui demandant de 'voir avec le médecin du travail' si le poste pouvait être modifié et de rechercher un poste de reclassement au sein du 'groupe Axa'et en rappelant que le médecin du travail avait précisé qu'elle pouvait suivre une formation.

Le 9 mai 2017, M. [N] [R] a convoqué la salariée à un entretien préalable à licenciement fixé au 18 mai 2017.

Le 24 mai 2017, il a licencié Mme [G] [L] pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

La lettre de licenciement est ainsi libellée:

« Vous avez été déclarée inapte par le médecin du travail lors de deux examens de reprise organisés les 19 et 31 janvier 2017.

Les conclusions du médecin du travail sont les suivantes:

« Conclusions: inapte à tous les postes.

Commentaire : référence à l'article R4624-42 : étude de poste réalisée le 27-01-2017.

Condition de travail: fiche d'entreprise actualisée le 27-01-2017.

Observations; dans le cadre de « l'échange » réglementaire « par tous moyens » Médecin ' employeur, réponse de l'employeur: courrier du 30-01-2017

Inapte à tous les postes dans l'entreprise.

Pourrait être reclassée sur un poste extérieur aux agences de [Localité 5], [Localité 4] et [Localité 3] ».

Comme nous vous l'avons expliqué précédemment, nous avons entrepris des démarches actives en vue de procéder à votre reclassement et ce, en collaboration avec le médecin du travail.

Ces recherches ont porté sur tous postes disponibles et compatibles avec votre qualification d'une part, ainsi qu'avec les restrictions médicales émises par le médecin du travail d'autre part, au besoin par la mise en 'uvre de mesures telles que notamment, formations mutations, aménagements de la durée du travail et/ou transformations de postes.

A l'issue de ces recherches, nous avons recensé un poste susceptible de vous être proposé.

Ce poste était le suivant:

- Intitulé de poste: chargée de clientèle « particuliers »,

- Statut: employée,

- Qualification et classification; niveau 3,

- Conditions de rémunération: 1.800 à 2.000 euros bruts,

- Lieu de travail: agence de [Localité 5],

- Durée du travail / répartition horaires: 35 heures réparties sur 5 jours, du mardi au samedi matin,

- Possibilité de formation,

- Convention collective des Agences Générales des Assurances.

Cependant, par courrier en date du 25 avril 2017, vous avez refusé ce poste.

En dépit de la poursuite de nos recherches, nous n'avons malheureusement pu vous proposer aucun autre poste disponible et compatible avec les restrictions médicales émises par le médecin du travail et susceptible de vous être proposé.

C'est dans ces conditions que nous constatons, au terme d'une recherche de reclassement active, l'impossibilité de procéder à votre reclassement.

C'est la raison pour laquelle nous sommes contraints d'envisager la rupture de votre contrat de travail.

Nous vous notifions, par la présente, votre licenciement pour impossibilité de reclassement.

Nous vous indiquons que la date d'envoi de cette lettre marquera la date de fin de votre contrat de travail.

Votre préavis, ne pouvant être effectué, ne donnera lieu à aucune indemnité.

Nous vous informons enfin que vos documents de fin de contrat (attestation Pôle Emploi, certificat de travail et solde de tout compte) vous seront adressés par pli séparé ».

Le 15 décembre 2017, la CPAM a notifié à Mme [G] [L] un avis défavorable à la prise en charge de sa maladie au titre de la législation relative aux risques professionnels.

Madame [L] a saisi le conseil de prud'hommes de MOULINS le 26 octobre 2017 de demandes de dommages et intérêts pour harcèlement moral, de dommages et intérêts pour 'manquement à l'obligation de prévention', de dommages et intérêts pour 'inexécution fautive du contrat de travail', de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de formation ainsi que pour voir juger que le licenciement est nul ou subsidiairement sans cause réelle et sérieuse et obtenir diverses indemnités à ce titre.

Par jugement du 21 mars 2019, le conseil de prud'hommes de MOULINS a :

- condamné la société [R] [N] à porter et payer à Madame [L] les sommes suivantes:

* 30.000 euros nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 4.517,02 euros bruts à titre d'indemnité de préavis,

* 1.000 euros nets au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- dit que les sommes nettes s'entendent - net - de toutes cotisations sociales ;

- fixé à 2.258,51 euros bruts la moyenne des trois derniers mois de salaire de Madame [L] pour application de l'article R. 1454-28 du code du travail et dit qu'il n'y a pas lieu d'ordonner l'exécution provisoire pour les condamnations qui n'en seraient pas assorties de plein droit ;

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

- condamné la société [R] [N] aux dépens de la présente instance.

La 'SEP [R] [N]' a interjeté appel de ce jugement le 28 mars 2019 en indiquant dans la déclaration d'appel, le numéro de Siren le n°481 797 660 qui correspond au numéro de Siren de M. [N] [R].

Le 10 septembre 2021, Mme [G] [L] a assigné M. [N] [R] en intervention forcée.

Suite à leurs cessations d'activité respectives, M. [N] [R] a été radié du répertoire SIREN le 22 octobre 2021 et la SEP [R] [O] et [N] le 23 décembre 2021.

Par jugement du 16 mai 2022 le Pôle social du tribunal judiciaire de Moulins a ordonné à la CPAM de l'Allier de prendre en charge la maladie déclarée le 14 avril 2017 au titre de la législation sur les risques professionnels.

Vu les conclusions notifiées à la cour le 11 août 2022 par la Sep [R] [N] et M. [R] [N],

Vu les conclusions notifiées à la cour le 15 septembre 2022 par Madame [L],

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 19 septembre 2022.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans leurs dernières conclusions, la SEP [R] [N] et M. [N] [R] demandent à la cour de :

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :

* dit et jugé que la relation de travail est exclusive de tout harcèlement moral ;

En conséquence :

* dit et jugé que le licenciement pour impossibilité de reclassement consécutif à inaptitude n'est pas nul ;

* débouté Madame [L] de sa demande indemnitaire ;

En toutes hypothèses :

* dit et jugé que l'inaptitude de Madame [L] n'a aucune origine professionnelle ;

* débouté Madame [L] de sa demande de versement des indemnités spéciales de licenciement ;

* dit et jugé que Madame [L] a évolué tout au long de sa carrière grâce à une formation interne ;

En conséquence :

* débouté Madame [L] de sa demande au titre du manquement à l'obligation de formation et adaptation au poste de travail ;

- infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a considéré que le licenciement de Madame [L] était dépourvu de cause réelle et sérieuse et lui a alloué :

* 30.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 5.517,02 euros au titre de l'indemnité de préavis,

* 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dire et juger que les recherches de reclassement ont été menées conformément aux

préconisations du Médecin du travail ;

- constater que Monsieur [N] [R] est un mandataire AXA ;

- constater qu'il n'y a aucune permutabilité du personnel entre les différentes agences AXA,

En conséquence :

- dire et juger que l'impossibilité de reclassement est caractérisée ;

- dire et juger que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse;

- condamner Madame [L] à lui verser une somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens d'instance ;

- débouter Madame [L] de sa demande de condamnation de la société [R] [N] à lui régler la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens d'instance.

Dans ses dernières conclusions, Madame [L] demande à la cour de :

- déclarer mal fondé l'appel principal de la société [R] [N];

- déclarer recevable et fondé son appel incident ;

- constater le défaut de communication de la fiche entreprise actualisée ;

- constater la recevabilité et le bien fondé de l'intervention forcée à titre principal dirigée contre Monsieur [N] [R] en application des dispositions de l'article 1872-1 du code civil ;

A titre principal :

- infirmer le jugement en ce qu'il a débouté Madame [L] de sa demande relative à la reconnaissance d'une situation de harcèlement moral ainsi que de sa demande d'indemnisation ;

Statuant à nouveau :

- dire et juger qu'elle a été victime d'une situation de harcèlement moral;

- condamner en conséquence la société [R] [N] et M. [N] [R] à lui payer :

* dommages et intérêts harcèlement moral article L 1152-1 du code du travail :15. 000 euros,

* dommages et intérêts prévention des faits de harcèlement moral art L 1152-4 du code du travail :  5.000 euros ;

En conséquence, dire et juger nul le licenciement intervenu au visa des dispositions de l'article L1152-1 et suivants du code du travail et infirmer en conséquence le jugement pour allouer à Mme [L] la somme de 40 000 euros à titre de dommages et intérêts

A titre subsidiaire

- si par impossible le harcèlement n'était pas reconnu, confirmer le jugement en ce qu'il a jugé sans cause réelle et sérieuse le licenciement de Mme [G] [L] pour manquement à l'obligation de reclassement sauf à majorer la somme allouée pour la porter à 40 000 euros à titre de dommages et intérêts

- sur la dégradation des conditions de travail et si par impossible la harcèlement moral n'était pas reconnu, condamner solidairement la société [R] et M. [R] à payer à Mme [G] [L] la somme de 15000 euros à titre de dommages et intérêts pour inexécution fautive du contrat de travail et manquement à l'obligation de loyauté dans l'exécution de celui-ci

En toute hypothèse

- infirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [G] [L] de sa demande tendant à voir reconnaître l'origine professionnelle de son inaptitude

Statuant à nouveau

- dire et juger que son inaptitude est d'origine professionnelle ;

- en conséquence, infirmer le jugement en ce qu'il a débouté Madame [L] de sa demande relative au paiement d'un solde d'indemnité spéciale de l'article L 1226-14 ainsi que sa demande relative au paiement de l'indemnité compensatrice de l'article L 1226-14 du Code du travail ;

Statuant à nouveau :

- condamner solidairement la société [R] [N] et Monsieur [N] [R] à lui payer et porter les sommes suivantes :

* indemnité compensatrice art L 1226-14 :4.517,02 euros,

* solde indemnité spéciale art L 1226-14 : 16.132,03 euros ;

Si par impossible l'origine professionnelle n'était pas reconnue, confirmer le jugement en ce qu'il a condamné solidairement la société [R] et M. [R] à payer et porter à Mme [G] [L] la somme de 4 517,02 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis

- condamner solidairement M. [R] [N] aux mêmes sommes

- infirmer le jugement en ce qu'il a débouté Madame [L] de sa demande de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de formation, d'adaptation et de maintien de l'employabilité ;

Statuant à nouveau :

- condamner solidairement la société [R] [N] et Monsieur [N] [R] à lui payer et porter la somme de 5.000 euros à ce titre;

- dire que ces sommes porteront intérêts de droit au taux légal à compter:

- de la convocation de l'employeur à comparaître devant le bureau de conciliation pour les sommes allouées à caractère salarial

- du jugement dont appel pour les sommes allouées à caractère indemnitaire

- de l'arrêt à intervenir pour les sommes allouées en plus de celles accordées par la juridiction de première instance

- ordonner la capitalisation de ces intérêts échus pour une année entière et rappeler que ces intérêts échus porteront eux-mêmes intérêts au taux légal le cas échéant majoré ;

- s'agissant des frais irrépétibles, confirmer le jugement en ce qu'il a condamné solidairement la société [R] [N] et Monsieur [N] [R] à lui payer la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour ses frais irrépétibles de première instance ;

- y ajoutant, condamner solidairement la société [R] [N] et Monsieur [N] [R] à lui payer la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour ses frais irrépétibles d'appel ;

- dire et juger l'arrêt à intervenir entièrement commun et opposable à M. [N] [R] et le condamner solidairement sur l'intégralité des sommes allouées à Mme [G] [L] en application de l'article 1872-1 du code civil

- condamner solidairement la société [R] et M. [R] en tous les dépens.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la Cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'identité des parties au procès d'appel :

Il ressort des extraits du répertoire SIRENE communiqués par Mme [G] [L] qu'il n'existe pas de SEP [R] [N] mais uniquement :

- M. [R] [N], entrepreneur individuel ayant pour identifiant SIREN le numéro 481 797 660, ayant cessé son activité depuis le 30 novembre 2019

- la société en participation [R] [O] et [N] ayant pour identifiant SIREN le numéro 439 465 022, ayant cessé son activité depuis le 30 novembre 2019.

Il apparaît à la lecture des pièces de la procédure :

- que M. [N] [R] (Siren 481 797 660) s'est constitué devant le conseil des prud'hommes

- que l'appel a été interjeté par la SEP [R] [N] (Siren 481 797 660)

- que les dernières conclusions d'appelant sont établies au nom de 'la société [R] [N], société en participation, inscrite au RCS de [Localité 5] sous le numéro 481 797 660".

Au vu de tous ces éléments, la cour constate que les parties au procès d'appel sont M. [N] [R], entrepreneur individuel ayant cessé son activité le 30 novembre 2019 et M. [N] [R], assigné en intervention forcée le 10 septembre 2021.

Mme [G] [L] a conclu contre 'la SEP [R] [N] siret 439 465 022" et demande dans le dispositif de ses conclusions la condamnation de la SEP [R], dont il est dit plus haut qu'elle n'a jamais existé.

Par conséquent, aucune condamnation ne peut être prononcée contre la SEP [R].

Sur la recevabilité de l'intervention forcée de M. [N] [R] :

Selon l'article 555 du code de procédure civile les personnes qui n'ont été ni parties ni représentées en première instance ou qui y ont figuré en une autre qualité peuvent être appelées devant la cour, même aux fins de condamnation, quand l'évolution du litige implique leur mise en cause.

En l'espèce, la recevabilité de l'intervention forcée de M. [N] [R] n'est pas contestée.

En conséquence, la cour déclare recevable l'intervention forcée en cause d'appel de M. [N] [R].

Sur la demande de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de formation, d'adaptation et de maintien de l'employabilité :

Selon les articles L930-1 et L6321-1 du code du travail dans toutes leurs versions applicables au litige, l'employeur a l'obligation d'assurer l'adaptation des salariés à leur poste de travail et de veiller au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l'évolution des emplois, des technologies et des organisations.

Au soutien de sa demande de dommages et intérêts, Mme [G] [L] fait valoir qu'elle n'a jamais bénéficié de formations destinées à maintenir son employabilité depuis 1996, les formations dispensées par l'employeur ne visant que son adaptation au poste par mise à jour de logiciels nouveaux internes à la société Axa.

Les parties appelantes répondent que Mme [G] [L] a été formée en interne sur les outils et exigences liées à son nouveau poste lorsqu'elle a été nommée au poste de chargée de clientèle entreprises, qu'elle a bénéficié de formations outils au sein de l'agence (outil relation client 'Orchestra'), qu'elle a également suivi une formation téléphonique sur le nouveau produit de souscription 'Oses parc' ainsi qu'une formation sur la protection juridique des professionnels d'une demi-journée.

Elles considèrent que Mme [G] [L] a reçu 'la formation nécessaire tout au long de sa carrière professionnelle'.

Il ressort du curriculum vitae de Mme [G] [L] que cette dernière n'a plus bénéficié de formation depuis l'année 1996 et les parties appelantes ne rapportent pas la preuve des formations dont elles font état.

Ces éléments établissent que l'employeur a manqué à son obligation de formation.

Cependant, ainsi que l'ont justement relevé les premiers juges, Mme [G] [L] ne précise ni ne justifie du préjudice que ce manquement lui a causé.

En conséquence la cour, confirmant le jugement de ce chef, rejette la demande de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de formation.

Sur l'existence d'un harcèlement moral et la demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral :

Aux termes de l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

En vertu de l'article L. 1154-1 du code du travail dans sa version issue de la Loi 2016-1088 du 8 août 2016, lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4 , le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement ; au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Il résulte de ces dispositions que, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral , il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail. Dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Mme [G] [L] soutient qu'elle a été victime d'un harcèlement moral de la part de M. [N] [R] et invoque les éléments de fait suivants :

- un courrier du 4 octobre 2016 de M. [N] [R] lui reprochant injustement de ne pas respecter les horaires initiaux convenus et lui proposant une modification de la répartition ses horaires de travail alors qu'aucun horaire n'était précisément fixé dans l'avenant au contrat de travail du 1er mars 2014, qu'il avait été acté depuis très longtemps, 'plus spécialement avec M. [O] [R]' qu'elle travaillerait jusqu'au vendredi midi et que ce changement d'horaires ne concernait qu'elle alors qu'elle bénéficiait de la plus grande ancienneté :

Il ressort des pièces versées aux débats que, par avenant du 1er mars 2014, employeur et salariée sont convenus qu'à compter du 1er mars 2014, 'les horaires de travail seront de 35 heures de travail du Lundi au Vendredi en fonction des horaires de la société.

Ces horaires seront susceptibles d'évolution en fonction des besoin du service'.

Par courrier du 4 octobre 2016 faisant référence à un entretien précédant les congés d'été, M. [N] [R] a écrit à Mme [G] [L] pour lui 'confirmer' :

- que ses horaires de travail sont fixés par l'avenant du 1er mars 2014 du lundi au vendredi en fonction des horaires de la société et que les horaires d'ouverture de l'agence sont de 9h à 12h et de 14h à 18h du lundi au vendredi

- qu'ils ont constaté ensemble que les horaires de travail de Mme [G] [L] ne correspondent pas à ceux prévus au contrat de travail et aux horaires d'ouverture de l'agence, ceci en raison de contingences privées et que cette situation a fait l'objet d'une tolérance de la part de la direction jusqu'à ce jour

- qu'en conséquence et après 'explications' entre eux, Mme [G] [L] a pris l'engagement de respecter les horaires mentionnés dans l'avenant du 1er mars 2014 et, de ce fait, les horaires d'ouverture de l'agence

- que 'par exception et pour satisfaire à [la demande de la salariée], l'employeur l'autorise à travailler de 13h à 17h le lundi et le vendredi de chaque semaine

- que les 'nouveaux horaires' seront applicables à compter du 7 novembre 2016.

Il ressort de ces éléments que, contrairement à ce que soutient la salariée, la répartition des horaires de travail en fonction des horaires de la société a bien été contractualisée par avenant du 1er mars 2014, tout comme la possibilité de les modifier en fonction des besoin du service.

Cependant, les termes du courrier de l'employeur du 4 octobre 2016 démontrent que les dispositions contractuelles n'ont jamais été appliquées par ce dernier qui a accepté de répartir les horaires de travail de Mme [G] [L] du lundi au vendredi midi et ce jusqu'au mois d'octobre 2016.

Dans ces conditions, le reproche fait à la salariée de ne pas respecter les stipulations du contrat de travail était injustifié.

Par ailleurs, l'employeur n'a pas discuté les termes du courrier de la salariée daté du 14 octobre 2016 par lesquels cette dernière réfute toute violation de ses obligations contractuelles relatives à la répartition de ses horaires de travail et s'interroge que le fait qu'elle soit la seule à être concernée par cet aménagement d'horaires ressenti comme 'une forme de discrimination et de dévalorisation'.

Il est ainsi démontré que le changement de répartition des horaires de travail de la salariée ayant pour effet de la faire travailler le vendredi après-midi à compter du 7 novembre 2016, réitéré à deux reprises - avant et après les congés d'été de l'année 2016 - ne concernait qu'elle seule, la cour relevant en outre que les attestations d'autres salariées produites par les parties appelantes pour démontrer que Mme [G] [L] n'était pas la seule concernée par la modification d'horaires ne font aucunement état d'une modification de leurs horaires mais uniquement d'une modification de leur lieu de travail.

Enfin, il n'est pas discuté que Mme [G] [L] bénéficiait de l'ancienneté la plus importante parmi tous les salariés.

Hormis l'absence de fixation d'horaires de travail précis dans l'avenant du 1er mars 2014, les faits invoqués par Mme [G] [L] sont matériellement établis.

- une réaction violence de M. [N] [R] à la réception de son courrier de réponse du 14 octobre 2016 :

Aucune des pièces versées aux débats ne vient corroborer les déclarations de la salariée consignées dans son courrier du 14 octobre 2016 reprochant à l'employeur les 'propos' tenus devant des tiers le jour même.

- un arrêt de travail à compter du 14 octobre 2016 :

L'avis d'arrêt de travail initial du 18 octobre 2016 est produit par les parties appelantes.

- l'existence des certificats médicaux précisant exactement 'la nature des tourments' qu'elle a supporté :

- une atteinte à sa dignité et à son état de santé relevées par les conclusions de l'avis du Comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de nouvelle aquitaine :

La salariée verse aux débats (pièces 22 et 23) deux certificats médicaux, l'un daté du 1er septembre 2017 du docteur [J], médecin généraliste, indiquant assurer son suivi médical depuis le mois de juin 2016 pour des 'troubles psychologiques réactionnels à un harcèlement moral professionnel' et l'autre en date du 12 septembre 2017 établi par le Docteur [K] [A], praticien au pôle santé mentale du CHU de [Localité 5] Yzeure, attestant que Mme [G] [L] est suivie régulièrement depuis le mois de novembre 2016 et qu'elle bénéficie également d'entretiens avec une infirmière de secteur.

Dans son avis produit en pièce 30 par la salariée, le Comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de Nouvelle Aquitaine, saisi par jugement du Pôle social du tribunal judiciaire de Moulins du 12 mars 2021 mentionne :

- que Mme [G] [L] présente une pathologie caractérisée à type de dépression réactionnelle et trouble thymique secondaire

- qu'il considère que, 'les conditions de travail ont exposé cette salariée à un risque psycho social et qu'il n'est pas mis en évidence dans ce dossier d'antécédent médical psychiatrique antérieur à l'épisode actuel, ni de facteur extra professionnel pouvant expliquer de façon directe la pathologie déclarée'

- qu'il 'considère que le lien de causalité entre la pathologie déclarée et le contexte professionnel est direct et essentiel et reconnaît le caractère professionnel de la pathologie déclarée'.

Ces éléments médicaux établissent l'existence, non pas d'une atteinte à la dignité de la salariée mais une dégradation de sa santé mentale depuis le mois de juin 2016.

A l'issue de cette analyse Mme [G] [L] établit la matérialité des faits suivants :

- M. [N] [R] lui a injustement reproché par courrier du 4 octobre 2016 de ne pas respecter ses horaires de travail stipulés au contrat de travail

- ce dernier lui a proposé une modification de la répartition ses horaires de travail alors qu'il avait été acté depuis très longtemps qu'elle travaillerait jusqu'au vendredi midi et que ce changement d'horaires ne concernait qu'elle alors qu'elle bénéficiait de la plus grande ancienneté :

- elle a été placée en arrêt de travail pour maladie à compter du 18 octobre 2016 :

- la dégradation de sa santé mentale depuis le mois de juin 2016.

Ces faits précis, pris dans leur ensemble, laissent présumer l'existence d'un harcèlement moral.

Les parties appelantes contestent l'existence d'un tel harcèlement mais ne rapportent pas la preuve qui leur incombe de ce que les agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que la décision de l'employeur était justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

En effet, pour justifier de la nécessité de faire désormais travailler la salariée le vendredi après midi à compter du 7 novembre 2016, elles soutiennent que 'la décision de modifier les horaires de Madame [L] s'inscrit dans une politique commerciale et économique plus large, qui était en réalité la réorganisation de l'agence d'assurance, pour répondre aux besoins de la clientèle'.

Elles versent aux débats l'attestation d'une autre salariée, Madame [D], faisant état d'une 'réorganisation de l'agence', ayant consisté, pour ce qui concerne sa situation particulière, à venir travailler plusieurs jours à l'agence de [Localité 5] en raison du départ de M. [O] [R] et pour faire face à un surcroît d'activité.

Cependant, la réorganisation évoquée par Mme [D] n'est manifestement pas la même que celle invoquée par l'employeur pour justifier la modification de la répartition des horaires de travail de Mme [G] [L] dans la mesure où :

- cette salariée ne fait aucune référence aux horaires de travail et mentionne uniquement avoir accepté de travailler à l'agence de [Localité 3]

- M. [O] [R] avait quitté l'entreprise depuis au moins 8 mois au moment où M. [N] [R] a demandé à Mme [G] [L] de travailler le vendredi après-midi.

Les parties appelantes produisent également deux attestations et un courrier de clients destinés à établir l'existence de plaintes au sujet de l'impossibilité de joindre Mme [G] [L] le vendredi après-midi et la nécessité de répondre aux besoins de la clientèle 'professionnels' et 'gestion des sinistres' relevant des attributions de cette dernière.

La cour considère comme dénué de toute force probante le courrier de la société Cognet adressé à M. [N] [R] le 29 juin 2017 dans lequel ce client se plaint de 'différents problèmes sur 2015 et ce premier semestre 2016" qu'il souhaite voir résolus 'très rapidement'.

Les attestations de M. [I] et de M. [U], gérants de sociétés, ne comportent aucune précision de date permettant d'établir le lien entre les réclamations de ces deux clients au sujet de l'impossibilité de joindre les services de l'agence le vendredi après-midi et la décision de l'employeur de modifier la répartition des horaires de Mme [G] [L] au mois d'octobre 2016.

Par ailleurs, les parties appelantes ne justifient pas de ce que Mme [G] [L] était la seule salariée à pouvoir répondre aux besoins de la clientèle professionnelle le vendredi après-midi comme elles le soutiennent.

Enfin, l'existence de raisons objectives au reproche injuste de violation des termes du contrat de travail fait à la salariée n'est pas démontrée.

L'existence d'un harcèlement moral est ainsi établi.

Au vu de la gravité des conséquences de ce harcèlement moral sur l'état de santé de Mme [G] [L] telles qu'elles ressortent des pièces médicales détaillées ci-dessus, la cour évalue à la somme de 5 000 euros le montant des dommages et intérêts pour préjudice moral, assortis d'intérêts légaux à compter du présent arrêt.

Dans la mesure où, ainsi qu'il est dit plus haut, aucune SEP [R] [N] n'a jamais existé, où les faits de harcèlement moral sont imputables à M. [N] [R] et où l'entreprise individuelle [N] [R] a cessé son activité, seul M. [N] [R] sera condamné au paiement de cette indemnité.

Le jugement déféré sera infirmé de ces chefs.

Sur la demande de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de prévention des fait de harcèlement moral :

Mme [G] [L] a formé appel incident du chef de jugement ayant rejeté sa demande de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de prévention des agissements de harcèlement moral sans aucune motivation.

Cependant, elle ne présente aucun moyen au soutien de sa demande.

En conséquence la cour ne peut que confirmer le jugement déféré.

Sur l'origine de l'inaptitude :

Au soutien de sa demande présentée à hauteur de cour tendant à voir juger que son inaptitude est d'origine professionnelle, Mme [G] [L] fait valoir :

- que les agissements de M. [N] [R] ont conduit à son arrêt de travail à l'issue duquel elle a été déclarée inapte

- qu'il se déduit de l'avis d'inaptitude (inaptitude à exercer dans les agences de [Localité 5], [Localité 4] et [Localité 3] dirigées par M. [N] [R] et 'sa société en participation') que l'origine de l'inaptitude est en lien avec la présence physique de ce dernier et son comportement à son égard

- qu'elle ne souffrait d'aucune pathologie autre que la dépression réactionnelle au comportement de l'employeur.

Les parties appelantes répondent que Mme [G] [L] n'a pas été victime de harcèlement moral et qu'elle ne rapporte pas la preuve de ce que son inaptitude est d'origine professionnelle.

Cependant, le lien entre le harcèlement moral dont la salariée a été victime et la déclaration d'inaptitude est établi par la quasi concomitance entre le courrier de M. [N] [R] du 4 octobre 2016 retenu comme un des éléments du harcèlement moral et l'arrêt de travail du 18 octobre 2016 ainsi que par l'absence de toute autre cause susceptible d'avoir altéré la santé mentale de la salariée relevée dans l'avis du CRRMP de la région Nouvelle Aquitaine, déjà évoquée ci-dessus.

En conséquence la cour dit que l'inaptitude de Mme [G] [L] est d'origine professionnelle.

Sur la demande de nullité du licenciement :

Selon l'article L1152-3 du code du travail: 'Toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions des articles L. 1152-1 et L. 1152-2, toute disposition ou tout acte contraire est nul'.

En l'espèce, il est jugé plus haut que l'inaptitude de Mme [G] [L] est consécutive au harcèlement moral dont la salariée a été victime de sorte que son licenciement prononcé en raison d'une inaptitude et impossibilité de reclassement est nul par application des dispositions de l'article L1152-3 du code du travail.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

Les règles protectrices du code du travail applicables aux salariés victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle sont applicables aux salariés victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle.

Selon l'article L1226-14, le salarié le salarié reconnu inapte à reprendre, à l'issue d'une période de suspension provoquée par un accident du travail ou une maladie professionnelle, l'emploi occupé précédemment et dont le contrat de travail a été rompu peu prétendre à une indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis prévue à l'article L1234-5 soit un mois pour une ancienneté de six mois à deux ans et deux mois à partir de deux ans.

En application de l'article L1226-14, le salarié licencié pour impossibilité de reclassement suite à inaptitude d'origine professionnelle a droit, sauf dispositions conventionnelles plus favorables non invoquées en l'espèce, à une indemnité spéciale de licenciement égale au double de l'indemnité de licenciement de l'article L 1234-9.

Cette indemnité est versée sans condition d'ancienneté dans l'entreprise.

En l'espèce, il est jugé ci-dessus que l'inaptitude est d'origine professionnelle et les parties appelantes reconnaissent que l'employeur a été informé de la demande de reconnaissance de maladie professionnelle au cours des recherches de reclassement de sorte que les règles protectrices sont bien applicables.

Les montants réclamés n'étant pas discutés, la cour condamne M. [N] [R], seul employeur responsable du harcèlement moral, à payer à Mme [G] [L] les sommes suivantes :

- 4 517,02 euros à titre d'indemnité compensatrice

- 16 132,03 euros à titre d'indemnité spéciale de licenciement.

Ces sommes seront assorties d'intérêts légaux à compter du 28 octobre 2017, date de convocation de l'employeur devant le bureau de conciliation et d'orientation valant première mise en demeure dont il est justifié.

La salariée peut également prétendre à des dommages et intérêts pour licenciement nul.

En effet, il résulte des articles L. 1152-3 du code du travail et L. 1235-3-1 du même code, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 que le salarié victime d'un licenciement nul qui ne demande pas la poursuite de l'exécution de son contrat de travail ou dont la réintégration est impossible a droit, quelles que soient son ancienneté et la taille de l'entreprise, d'une part, aux indemnités de rupture, d'autre part, à une indemnité réparant l'intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement et au moins égale à six mois de salaire.

En l'espèce, la réintégration de Mme [G] [L] est impossible compte tenu de la cessation d'activité de l'employeur et la salariée ne justifie pas de sa situation professionnelle et financière postérieurement au licenciement.

Aussi et au vu des éléments de l'espèce, il lui sera alloué une indemnité calculée sur la base de la rémunération mensuelle brute perçue en moyenne pendant les 6 derniers mois de la relation de travail (2 278 euros), soit la somme de 14 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul, assortis d'intérêts légaux à compter du présent arrêt.

Sur la capitalisation des intérêts légaux:

La capitalisation des intérêts sera ordonnée, conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil.

Sur les demandes accessoires:

Partie perdante, M. [N] [R] supportera la charge des dépens de première instance et d'appel.

Par ailleurs, Mme [G] [L] a dû pour la présente instance exposer tant en première instance qu'en appel des frais de procédure et honoraires non compris dans les dépens qu'il serait inéquitable de laisser intégralement à sa charge.

Le jugement déféré, qui a condamné la SEP [R] à payer à Mme [G] [L] la somme de 1 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civil sera infirmé de ce chef et M. [N] [R] sera condamné à payer à Mme [G] [L] la somme de 3 000 euros au titre des frais qu'elle a dû exposer en première instance et en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Déclare recevable l'intervention forcée en cause d'appel de M. [N] [R] ;

CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a:

- rejeté la demande de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de formation ;

- rejeté la demande de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de prévention des fait de harcèlement moral ;

INFIRME le jugement en toutes ses autres dispositions et, statuant à nouveau et y ajoutant :

DIT que Mme [G] [L] a été victime d'un harcèlement moral ;

DIT que l'inaptitude de Mme [G] [L] est d'origine professionnelle;

DIT que le licenciement de Mme [G] [L] est nul ;

CONDAMNE M. [N] [R] à payer à Mme [G] [L] les sommes suivantes :

- 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral lié aux faits de harcèlement moral, assortis d'intérêts légaux à compter du présent arrêt ;

- 4 517,02 euros à titre d'indemnité compensatrice, assortis d'intérêts légaux à compter du 28 octobre 2017 ;

- 16 132,03 euros à titre d'indemnité spéciale de licenciement, assortis d'intérêts légaux à compter du 28 octobre 2017 ;

- 14 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul, assortis d'intérêts légaux à compter du présent arrêt ;

DIT que les sommes allouées supporteront, s'il y a lieu, le prélèvement des cotisations et contributions sociales ;

ORDONNE la capitalisation des intérêts dus au moins pour une année entière ;

CONDAMNE M. [N] [R] à payer à Mme [G] [L] la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE M. [N] [R] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Ainsi fait et prononcé lesdits jour, mois et an.

Le greffier, Le Président,

N. BELAROUI C. RUIN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Riom
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19/00649
Date de la décision : 22/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-22;19.00649 ?
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