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11/10/2022 | FRANCE | N°20/00377

France | France, Cour d'appel de Riom, Chambre sociale, 11 octobre 2022, 20/00377


11 OCTOBRE 2022



Arrêt n°

FD/NB/NS



Dossier N° RG 20/00377 - N° Portalis DBVU-V-B7E-FL6Y



[M] [R]



/



SAS LE RESERVOIR

Arrêt rendu ce ONZE OCTOBRE DEUX MILLE VINGT DEUX par la QUATRIEME CHAMBRE CIVILE (SOCIALE) de la Cour d'Appel de RIOM, composée lors des débats et du délibéré de :



M. Christophe RUIN, Président



Mme Karine VALLEE, Conseiller



Mme Frédérique DALLE, Conseiller



En présence de Mme Séverine BOUDRY greffier lors des débats

et Mme Nadia BELAROUI greffier lors du prononcé



ENTRE :



Mme [M] [R]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Marie-laure BONNEAU-VIGIER, avocat au barreau de MONTLUCON



...

11 OCTOBRE 2022

Arrêt n°

FD/NB/NS

Dossier N° RG 20/00377 - N° Portalis DBVU-V-B7E-FL6Y

[M] [R]

/

SAS LE RESERVOIR

Arrêt rendu ce ONZE OCTOBRE DEUX MILLE VINGT DEUX par la QUATRIEME CHAMBRE CIVILE (SOCIALE) de la Cour d'Appel de RIOM, composée lors des débats et du délibéré de :

M. Christophe RUIN, Président

Mme Karine VALLEE, Conseiller

Mme Frédérique DALLE, Conseiller

En présence de Mme Séverine BOUDRY greffier lors des débats et Mme Nadia BELAROUI greffier lors du prononcé

ENTRE :

Mme [M] [R]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Marie-laure BONNEAU-VIGIER, avocat au barreau de MONTLUCON

APPELANTE

ET :

SAS LE RESERVOIR inscirte au RCS de MONTLUCON sous le n° 915 450 274 au capital de 800 000 €

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis

[Adresse 5]

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par Me Anne AMET-DUSSAP de la SCP SOUTHON BERNARD ET AMET-DUSSAP ANNE, avocat au barreau de MONTLUCON

INTIMEE

Après avoir entendu Mme DALLE, conseiller en son rapport, les représentants des parties à l'audience publique du 04 Juillet 2022, la Cour a mis l'affaire en délibéré, Monsieur le Président ayant indiqué aux parties que l'arrêt serait prononcé, ce jour, par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 du code de procédure civile.

FAITS ET PROCÉDURE

Madame [M] [R] a été recrutée par la SAS LE RÉSERVOIR, par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er mars 2011, en qualité d'assistante commerciale - niveau III - 3ème échelon - coefficient 240, avec une rémunération mensuelle brute de l.668.37 euros, pour une durée de travail mensuelle base de 151.67 heures.

Le contrat prévoyait le versement d'un 13ème mois et d'une prime de vacances.

Le contrat était régi par les dispositions de la convention collective de la métallurgie de l'ALLIER.

Par courrier remis en main propre contre décharge en date du 14 avril 2015, la société LE RÉSERVOIR a informé Madame [R] qu'elle pouvait être concernée par une procédure de licenciement économique.

Par courrier remis en main propre contre décharge en date du 6 mai 2015, la société LE RÉSERVOIR a informé Madame [R] qu'une suppression de son poste était envisagée.

Dans le cadre du reclassement recherché par l'entreprise il a été proposée à Madame [R] deux postes au sein du groupe FAYAT:

- secrétaire chantier - assistante du directeur d'exploitation ;

- adjointe au manager pièces de rechanges.

Par courrier remis en main propre contre décharge en date du 22 mai 2015, la société LE RÉSERVOIR a relevé que Madame [R] n'avait pas donné de réponse sur les propositions de reclassement qui lui ont été faites et lui a indiqué qu'elle n'avait pas de solution de reclassement.

Par courrier remis en main propre contre décharge en date du 28 mai 2015, la société LE RÉSERVOIR a convoqué Madame [R] à un entretien préalable à un éventuel licenciement pour motif économique en date du 8 juin 2015.

Par courrier recommandé avec accusé de réception du 17 juin 2015, la société LE RÉSERVOIR a notifié à Madame [R] son licenciement pour motif économique.

Par courrier en date du 2 juillet 2015, la société LE RÉSERVOIR a pris acte de l'acceptation par Madame [R] de la proposition de congé de reclassement.

Par courrier en date du 30 septembre 2015, la société LE RÉSERVOIR a transmis à Madame [R] son bulletin de paie de septembre 2015 ainsi que des informations sur les modalités de rémunération et d'allocation au cours du congé de reclassement.

Par courrier recommandé avec accusé de réception du 17 novembre 2015, la société LE RÉSERVOIR a remis à Madame [R] ses documents de fin de contrat de travail.

Le 13 juin 2016, par requête expédiée en recommandé, Madame [R] a saisi le conseil de prud'hommes de MONTLUÇON aux fins notamment de voir juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse outre obtenir diverses sommes à titre indemnitaire.

L'audience devant le bureau de conciliation et d'orientation s'est tenue en date du 5 septembre 2016 et, comme suite au constat de l'absence de conciliation (convocation notifiée au défendeur le 28 juin 2016), l'affaire a été renvoyée devant le bureau de jugement.

Le 20 mars 2017, le bureau de jugement du conseil de prud'hommes de MONTLUÇON a ordonné la radiation de l'instance du rang des affaires en cours. Cette affaire a ensuite été réinscrite le 20 mars 2019 sur demande de Madame [R].

Le 17 juin 2019, le bureau de jugement du conseil de prud'hommes de MONTLUÇON a rendu une ordonnance de caducité. L'ordonnance de relevé de caducité a été rendue le 15 juillet 2019.

Par jugement contradictoire en date du 27 janvier 2020 (audience du 14 octobre 2019), le conseil de prud'hommes de MONTLUÇON a :

- dit que l'ensemble des motifs invoqués ne permettent pas de faire droit aux demandes de requalification du licenciement économique en licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- dit qu'il y a lieu d'en tirer les conséquences ;

Et ainsi :

- débouté Madame [R] de l'intégralité de ses demandes formulées à l'encontre de la société LE RÉSERVOIR ;

- débouté la société LE RÉSERVOIR de l'intégralité de ses demandes formulées à l'encontre de Madame [R] ;

- laissé à chaque partie la charge de ses propres dépens.

Le 25 février 2020, Madame [R] a interjeté appel de ce jugement qui lui a été notifié à sa personne le 5 février 2020.

Vu les conclusions notifiées à la cour le 7 mars 2022 par Madame [R],

Vu les conclusions notifiées à la cour le 24 août 2020 par la société LE RÉSERVOIR,

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 14 mars 2022.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses dernières écritures, Madame [R] demande à la cour de :

- dire son appel recevable et bien fondé ;

- débouter la société LE RÉSERVOIR de toutes ses demandes fins et conclusions ;

- dire son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

- infirmer les chefs de jugement critiqués ;

- condamner la société LE RÉSERVOIR à lui payer et porter la somme de 22.511,04 euros à titre de dommages et intérêts ;

- condamner la société LE RÉSERVOIR à payer et porter à la requérante la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société LE RÉSERVOIR aux dépens.

Madame [R] soutient, sur son licenciement, que l'employeur ne démontre pas que le secteur d'activité de son groupe a connu des difficultés économiques, ou qu'il a dû impérativement sauvegarder de la compétitivité. Elle indique que les difficultés économiques doivent être appréciées au niveau du groupe FAYAT et que la lettre de licenciement ne fait état que des prétendues difficultés de la société LE RÉSERVOIR, sans aucune référence au secteur d'activité du groupe auquel elle appartient. Elle explique que le secteur d'activité était en réalité prospère. Elle expose que les seules difficultés économiques de la société LE RÉSERVOIR ne doivent pas être prises en compte, sans prendre en considération l'activité économique du groupe FAYAT. Elle conclut ainsi à l'infirmation du jugement entrepris, car la société LE RÉSERVOIR n'établit pas les difficultés économiques du secteur d'activité du groupe FAYAT auquel elle appartient. Dès lors, elle soutient que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Elle ajoute que l'employeur n'a pas respecté son obligation de reclassement. Elle indique que l'employeur n'a pas proposé un reclassement au sein même de la société alors que plusieurs embauches en CDI ont eu lieu. Elle affirme que l'employeur ne justifie aucunement ces recrutements, ni son impossibilité de proposer ces postes. Elle conclut à l'infirmation du jugement entrepris sur ce point.

Dans ses dernières écritures, la société LE RÉSERVOIR conclut à la confirmation du jugement en toutes ses dispositions et demande à la cour, y ajoutant, de :

- Débouter Madame [R] de ses demandes .

- condamner Madame [R] aux entiers dépens de l'instance.

La société LE RÉSERVOIR indique tout d'abord que le conseil de prud'hommes s'est prononcé sur la demande de requalification du licenciement économique de Madame [R] en licenciement sans cause réelle et sérieuse, demande qui n'était pas clairement formulée dans le dispositif des écritures de première instance de la salariée. Elle précise ensuite que dans les motifs de ses écritures en cause d'appel, Madame [R] mentionne en « prétention 1 », la demande de requalification du licenciement économique en licenciement sans cause réelle et sérieuse. Or, elle explique que le salariée ne reprend pas cette prétention dans le dispositif de ses écritures. Elle ajoute qu'il n'est pas possible de la condamner à payer des dommages et intérêts à Madame [R] sans avoir préalablement répondu à la demande principale tendant à infirmer le jugement sur le point de la requalification du licenciement. Cette prétention n'étant pas énoncée au dispositif, elle n'est pas soumise à la cour. Elle soutient que la demande en dommages et intérêts de Madame [R] est sans fondement.

Subsidiairement, elle soutient que le licenciement pour motif économique est fondé. En effet, elle explique que les difficultés économiques doivent être appréciées au regard de la situation des secteurs d'activité du groupe. Elle fait valoir que les difficultés économiques ne peuvent être appréhendées, pour apprécier la nécessité du licenciement économique de Madame [R], au niveau du secteur chaudronnerie, qui représente un secteur d'activité du groupe, mais au niveau de la société LE RÉSERVOIR en elle-même qui représente un secteur d'activité à elle seule compte tenu de ses spécificités et du fait qu'elle est seule à fabriquer et commercialiser certains produits dont elle est seule à détenir le savoir-faire. Elle explique que les activités de la société LE RÉSERVOIR en elle-même sont en grande partie responsables de ses difficultés économiques, activités qui n'existent pas dans les autres entités du secteur chaudronnerie du groupe. Elle estime démontrer la réalité de ses difficultés économiques.

Elle considère que la salariée ne démontre pas que son licenciement était sans cause réelle et sérieuse. Elle conclut ainsi à la confirmation du jugement entrepris.

Sur l'obligation de reclassement, elle indique qu'elle a proposé deux postes à Madame [R], postes déclinés par cette dernière. Elle ajoute que les recrutements allégués par la salariée l'ont été dans des secteurs totalement différents de ceux dans lesquels évoluait Madame [R], qui n'avait pas les qualifications pour occuper les postes de directeur commercial ou de responsable qualité. Elle considère ainsi qu'elle a bien respecté son obligation de reclassement.

Pour plus ample relation des faits, de la procédure, des prétentions, moyens et arguments des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il y a lieu de se référer à la décision attaquée et aux dernières conclusions régulièrement notifiées et visées.

MOTIFS

- Sur la recevabilité des prétentions de l'appelante -

Aux termes de l'article 954 du code de procédure civile:

'Les conclusions d'appel contiennent, en en-tête, les indications prévues à l'article 961. Elles doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation. Un bordereau récapitulatif des pièces est annexé.

Les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l'énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu'un dispositif récapitulant les prétentions. Si, dans la discussion, des moyens nouveaux par rapport aux précédentes écritures sont invoqués au soutien des prétentions, ils sont présentés de manière formellement distincte.

La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

Les parties doivent reprendre, dans leurs dernières écritures, les prétentions et moyens précédemment présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures. A défaut, elles sont réputées les avoir abandonnés et la cour ne statue que sur les dernières conclusions déposées.

La partie qui conclut à l'infirmation du jugement doit expressément énoncer les moyens qu'elle invoque sans pouvoir procéder par voie de référence à ses conclusions de première instance.

La partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.'

La société LE RÉSERVOIR indique que le conseil de prud'hommes s'est prononcé sur la demande de requalification du licenciement économique de Madame [R] en licenciement sans cause réelle et sérieuse, demande qui n'était pas clairement formulée dans le dispositif des écritures de première instance de la salariée. Elle précise que dans les motifs de ses écritures en cause d'appel, Madame [R] mentionne en « prétention 1 », la demande de requalification du licenciement économique en licenciement sans cause réelle et sérieuse. Or, elle explique que le salariée ne reprend pas cette prétention dans le dispositif de ses écritures. Elle ajoute qu'il n'est pas possible de la condamner à payer des dommages et intérêts à Madame [R] sans avoir préalablement répondu à la demande principale tendant à infirmer le jugement sur le point de la requalification du licenciement. Cette prétention n'étant pas énoncée au dispositif, elle n'est pas soumise à la cour. Elle soutient que la demande en dommages et intérêts de Madame [R] est sans fondement.

En réponse, Madame [R] fait valoir que la lecture des conclusions initiales signifiées le 25 mai 2020 permet d'établir qu'elle a bien formulé des prétentions et demandes au soutien de son appel.

En l'espèce, par jugement contradictoire en date du 27 janvier 2020, le conseil de prud'hommes de MONTLUÇON a :

- dit que l'ensemble des motifs invoqués ne permettent pas de faire droit aux demandes de requalification du licenciement économique en licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- dit qu'il y a lieu d'en tirer les conséquences ;

Et ainsi :

- débouté Madame [R] de l'intégralité de ses demandes formulées à l'encontre de la société LE RÉSERVOIR ;

- débouté la société LE RÉSERVOIR de l'intégralité de ses demandes formulées à l'encontre de Madame [R] ;

- laissé à chaque partie la charge de ses propres dépens.

Le 25 février 2020, Madame [R] a interjeté appel de ce jugement qui lui a été notifié à sa personne le 5 février 2020.

Il ressort de la lecture des conclusions initiales d'appel signifiées le 25 mai 2020 que Madame [R] a explicitement sollicité l'infirmation du jugement entrepris et a demandé à la cour de reconnaître l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement.

En outre, dans le dispositif desdites conclusions, Madame [R] demande expressément l'infirmation du jugement entrepris, jugement qui n'a pas fait droit aux demandes de requalification du licenciement économique en licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Ainsi, les conclusions initiales de l'appelante contiennent bien la prétention de voir requalifier son licenciement économique en licenciement sans cause réelle et sérieuse. La cour dit qu'il y a lieu d'écarter le moyen tiré de l'irrecevabilité des prétentions de l'appelante et dit que les prétentions de l'appelante sont recevables.

- Sur la rupture du contrat de travail -

Selon l'article L. 1233-2 du code du travail, tout licenciement pour motif économique doit être motivé et justifié par une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Aux termes de l'article L. 1233-3 du code du travail, dans sa version en vigueur au moment du licenciement:

'Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques.

Les dispositions du présent chapitre sont applicables à toute rupture du contrat de travail à l'exclusion de la rupture conventionnelle visée aux articles L.1237-11 et suivants, résultant de l'une des causes énoncées au premier alinéa.'

Le motif économique, qui est nécessairement non inhérent ou lié à la personne du salarié, est celui qui résulte d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques ou à une réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité ou à la cessation totale et définitive d'activité de l'entreprise.

Le motif économique du licenciement comprend un élément causal (difficultés économiques; mutations technologiques ; réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité ; cessation totale et définitive de l'activité ; et autres car l'adverbe 'notamment' implique que la liste de l'article L.1233-3 du code du travail n'est pas exhaustive) et un élément matériel (suppression ou transformation d'emploi ; modification du contrat de travail).

A l'époque considérée en l'espèce, si l'entreprise appartient à un groupe, les difficultés économiques, les mutations technologiques ou la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise s'apprécient au niveau du secteur d'activité commun à cette entreprise ou aux entreprises du groupe auquel elle appartient. C'est seulement pour les licenciements intervenus à compter du 24 septembre 2017 que l'article L.1233-3 du code du travail prévoit que les difficultés économiques, les mutations technologiques ou la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise s'apprécient au niveau du secteur d'activité commun à l'employeur et à celui des entreprises du groupe auquel elle appartient, établies sur le territoire national. La notion de groupe est la même pour la cause économique du licenciement ou l'obligation de reclassement, ce qui change c'est le périmètre d'appréciation.

Le licenciement pour motif économique n'est légitime que si le contexte économique (élément causal) a conduit à une suppression ou transformation d'emploi, ou à une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail (élément matériel). La matérialité de cette suppression ou transformation d'emploi ou modification du contrat de travail s'apprécie au niveau de l'entreprise ayant la qualité d'employeur.

En cas de contestation, le juge doit vérifier que le motif économique existe et qu'il donne au licenciement une cause réelle et sérieuse. Si le motif économique n'existe pas, ou s'il n'est pas suffisamment caractérisé, le licenciement est sans cause réelle et sérieuse. En la matière, le juge forge sa conviction en vérifiant la réalité et le sérieux, tant des raisons économiques (difficultés économiques, mutations technologiques, réorganisation de l'entreprise etc.) Que de leur incidence sur l'emploi et le contrat de travail (suppression ou transformation d'emploi ; modification du contrat de travail).

Le souci de rentabilité de l'entreprise ne constitue pas en soi un motif économique de licenciement. Il en est de même de la seule perte du marché.

En cas de motif économique établi, le juge n'a pas à contrôler le choix effectué par l'employeur entre les différentes solutions possibles, notamment en relevant que celui-ci aurait pu choisir une solution impliquant moins de licenciements, puisque cela relève du pouvoir de direction de l'employeur.

La validité du licenciement pour motif économique est subordonnée à l'impossibilité de reclasser le salarié.

Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l'entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.

Ainsi, sauf cessation, totale et définitive, d'activité d'une entreprise ne faisant pas partie d'un groupe, l'employeur doit rechercher à reclasser individuellement les salariés, quel que soit leur nombre, et même si l'entreprise fait l'objet d'une procédure collective.

La recherche de reclassement doit être effective et sérieuse.

Le reclassement doit être recherché à partir du moment où le licenciement est envisagé par l'employeur et jusqu'à sa notification.

La recherche et la proposition de reclassement au cours de l'exécution du préavis sont tardives.

La notification du licenciement met fin à l'obligation de reclassement.

La tentative de reclassement doit porter sur tous les postes salariés disponibles relevant de la même catégorie que celui de l'intéressé ou sur des emplois équivalents assortis d'une rémunération équivalente. À défaut, le reclassement peut s'effectuer sur des postes de catégorie inférieure avec l'accord exprès du salarié.

Les offres de reclassement doivent être écrites et précises.

L'employeur ne peut pas limiter ses offres en fonction de la volonté présumée du salarié.

Si le salarié refuse le poste proposé, comme il en a le droit, l'employeur ne peut poursuivre la procédure de licenciement qu'après avoir recherché toutes les autres possibilités de reclassement, en tenant compte des exigences formulées par le salarié lors de ce refus.

La méconnaissance par l'employeur de son obligation de reclassement, y compris des stipulations conventionnelles prévoyant un reclassement à l'extérieur de l'entreprise ou au sein de la branche, prive le licenciement de cause réelle et sérieuse.

C'est à l'employeur de justifier qu'il a recherché toutes les possibilités de reclassement et qu'il est impossible de reclasser le salarié dont le poste a été supprimé ou transformé pour cause économique, ou qui a refusé une modification d'un élément essentiel du contrat de travail justifiée par le contexte économique.

Le juge apprécie souverainement les éléments de preuve produits en fonction des moyens de l'entreprise ou du groupe.

Si l'entreprise appartient à un groupe, les difficultés économiques, les mutations technologiques ou la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprises s'apprécient au niveau du secteur d'activité commun à cette entreprise et aux entreprises du groupe auquel elle appartient, mais seulement celles établies en France, sauf fraude.

En cas de contentieux, il appartient à l'employeur de communiquer au juge les éléments nécessaires à la délimitation du groupe ou du secteur d'activité.

La recherche d'une possibilité de reclassement doit être effectuée dans l'entreprise, ce qui inclut l'ensemble des établissements la composant et le cas échéant, à l'intérieur du groupe auquel appartient l'employeur parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation lui permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel.

La notion de groupe en droit du travail, qui détermine le périmètre de l'obligation de reclassement, se distingue de celle du groupe au sens du droit commercial, puisque le critère déterminant y est la permutabilité du personnel.

Madame [R] soutient que l'employeur ne démontre pas que le secteur d'activité de son groupe a connu des difficultés économiques, ou qu'il a dû impérativement sauvegarder de la compétitivité. Elle indique que les difficultés économiques doivent être appréciées au niveau du groupe FAYAT et que la lettre de licenciement ne fait état que des prétendues difficultés de la société LE RÉSERVOIR, sans aucune référence au secteur d'activité du groupe auquel elle appartient. Elle explique que le secteur d'activité était en réalité prospère. Elle expose que les seules difficultés économiques de la société LE RÉSERVOIR ne doivent pas être prises en compte, sans prendre en considération l'activité économique du groupe FAYAT. Elle conclut ainsi à l'infirmation du jugement entrepris, car la société LE RÉSERVOIR n'établit pas les difficultés économiques du secteur d'activité du groupe FAYAT auquel elle appartient. Dès lors, elle soutient que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Elle ajoute que l'employeur n'a pas respecté son obligation de reclassement. Elle indique que l'employeur n'a pas proposé un reclassement au sein même de la société alors que plusieurs embauches en CDI ont eu lieu. Elle affirme que l'employeur ne justifie aucunement ces recrutements, ni son impossibilité de proposer ces postes. Elle conclut à l'infirmation du jugement entrepris sur ce point.

La société LE RÉSERVOIR répond que le licenciement pour motif économique est fondé. En effet, elle explique que les difficultés économiques doivent être appréciées au regard de la situation des secteurs d'activité du groupe. Elle fait valoir que les difficultés économiques ne peuvent être appréhendées, pour apprécier la nécessité du licenciement économique de Madame [R], au niveau du secteur chaudronnerie, qui représente un secteur d'activité du groupe, mais au niveau de la société LE RÉSERVOIR en elle-même, qui représente un secteur d'activité à elle seule compte tenu de ses spécificités et du fait qu'elle est seule à fabriquer et commercialiser certains produits dont elle est seule à détenir le savoir-faire. Elle explique que les activités de la société LE RÉSERVOIR sont en grande partie responsables de ses difficultés économiques, activités qui n'existent pas dans les autres entités du secteur chaudronnerie du groupe. Elle estime démontrer la réalité de ses difficultés économiques.

Elle considère que la salariée ne démontre pas que son licenciement était sans cause réelle et sérieuse. Elle conclut ainsi à la confirmation du jugement entrepris.

Sur l'obligation de reclassement, elle indique qu'elle a proposé deux postes à Madame [R], postes déclinés par cette dernière. Elle ajoute que les recrutements allégués par la salariée l'ont été dans des secteurs totalement différents de ceux dans lesquels évoluait Madame [R], qui n'avait pas les qualifications pour occuper les postes de directeur commercial ou de responsable qualité. Elle considère ainsi qu'elle a bien respecté son obligation de reclassement.

En l'espèce, Madame [M] [R] a été recrutée par la SAS LE RÉSERVOIR, par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er mars 2011, en qualité d'assistante commerciale - niveau III - 3ème échelon - coefficient 240, avec une rémunération mensuelle brute de l.668.37 euros, pour une durée de travail mensuelle base de 151.67 heures.

Le contrat prévoyait le versement d'un 13eme mois et d'une prime de vacances.

Par courrier remis en main propre contre décharge en date du 14 avril 2015, la société LE RÉSERVOIR a informé Madame [R] qu'elle pouvait être concernée par une procédure de licenciement économique.

Par courrier remis en main propre contre décharge en date du 6 mai 2015, la société LE RÉSERVOIR a informé Madame [R] qu'une suppression de son poste était envisagée.

Dans le cadre du reclassement recherché par l'entreprise il a été proposée à Madame [R] deux postes au sein du groupe FAYAT :

- secrétaire chantier - assistante du directeur d'exploitation ;

- adjointe au manager pièces de rechanges.

Par courrier remis en main propre contre décharge en date du 22 mai 2015, la société LE RÉSERVOIR a relevé que Madame [R] n'avait pas donné de réponse sur les propositions de reclassement qui lui ont été faites et lui a indiqué qu'elle n'avait pas de solution de reclassement.

Par courrier remis en main propre contre décharge en date du 28 mai 2015, la société LE RÉSERVOIR a convoqué Madame [R] à un entretien préalable à un éventuel licenciement pour motif économique en date du 8 juin 2015.

Par courrier recommandé avec accusé de réception du 17 juin 2015, la société LE RÉSERVOIR a notifié à Madame [R] son licenciement pour motif économique.

Le courrier de notification est ainsi libellé :

' Madame,

Comme nous vous l'indiquions au cours de notre entretien du 8 juin 2015, nous sommes contraints de vous notifier votre licenciement pour motif économique.

Les motifs invoqués à l'appui de cette décision tels qu'ils vous ont été exposés à cette occasion sont, nous vous le rappelons, les suivants:

La société Le Réservoir, filiale du groupe FAYAT, spécialisée dans la fabrication de réservoirs sous pression, exerce une activité principalement répartie dans le domaine ferroviaire et industriel. Son marché est national pour 90% de ses fabrications.

La société Le Réservoir, dépendante du Pôle Chaudronnerie de FAYAT, évolue dans un secteur d'activité spécifique et distinct des autres sociétés de ce Pôle. En effet, cette société fabrique principalement des réservoirs destinés à contenir du gaz comprimé, nécessitant un savoir-faire, et des process de fabrication répondant à des normes strictes, propres à chaque marché. Quant aux autres sociétés de la division chaudronnerie de FAYAT, elles évoluent sur des marchés concernant soit la gestion de l'eau (contenants, et protection des réseaux) soit des contenants de stockage sous pression importants incluant, pour certaines, des process de Galvanisation.

La société Le Réservoir est la seule du groupe FAYAT capable de répondre, sur des réservoirs de petites capacités, à la demande des marchés spécifiques du ferroviaire et du poids lourds (réservoirs embarqués), compte tenu de ses équipements et outillages de fabrication.

Historiquement, cette société avait une forte implication dans le domaine poids lourds, mais malheureusement à cause de la crise économique, dont les effets se sont fait particulièrement ressentir depuis 2009 et les évolutions du marché, la part de l'activité poids lourds a nettement décru.

L'année 2013-2014 a été très fortement pénalisée par :

* La poursuite de la baisse d'activité du marché poids lourds, de 33% sur les cinq dernières années dans un contexte d'internalisation des sources d'approvisionnement des constructeurs automobiles, en quête de fabrication à coût moindres.

* La chute de 27% du chiffre d'affaires ferroviaires sur un an (moins 40% sur les 5 dernières années), entraînant une baisse des marges, liées à la pression de plus en plus importante de la concurrence, amenant à la renégociation des prix,

* ce qui amène à une baisse globale de l'activité de près de 22% au cours du dernier exercice.

* En quatre ans notre société a perdu 25% de son chiffre d'affaire, et 32% de sa valeur ajoutée .

En plus de cette dégradation du chiffre d'affaire, la société a dû faire face en 2012 à une désorganisation de la production, accentuée par la non-opérativité des nouveaux investissements, qui a générée des coûts importants de non-qualité, et en 2014 la perte de certification des Organismes Notifiés a entraîné des retards de production, et la remise en cause des process de fabrication très générateurs de coûts directs et indirects.

Ces difficultés, ont eu des conséquences très négatives sur nos marges :

* Augmentation de la consommation matière

* Réduction de la valeur ajoutée par l'entreprise

*Forte dégradation de notre résultat d'exploitation qui ressort en négatif à 939 K€, contre un bénéfice de 44 K€ en 2013 (avec la part des frais de personnel qui passe de 31 % en 2009 à 48.90% en 2014.

* Le résultat net 2017 s'effondre, et ressort en perte de 907 K€, contre un bénéfice de 117K€ en 2013.

Face à ces difficultés économiques, la société a donc pris diverses mesures afin d'endiguer cette très forte dégradation de ses résultats, à savoir :

1. Renforcement du management de l'atelier et plan d'investissement industriel, avec pour objectif, l'amélioration des process de fabrication afin d'augmenter notre productivité.

2. Assistance renforcée au service qualité, afin de fiabiliser les procédures et le respect des normes (qui ont, par le passé, été très génératrices de coûts de non-conformité)

3. Plan d'action commercial, sur nos prix de vente et par le recrutement de commerciaux, pour reconquérir les parts de marché perdus dans le ferroviaire, diversifier notre activité notamment dans l'industrie, et internationaliser notre activité. L'activité Poids lourds devrait continuer à décroître fortement (secteur où le volume de facture/CA reste le plus important).

Toutefois, toutes ces actions interviennent dans un contexte économique très difficile et ne permettront pas d'assurer seules un retour à l'équilibre de nos résultats, ni la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise.

La baisse de chiffre d'affaire de ces dernières années est le reflet de la perte de nos parts de marché dans les secteurs du Poids lourds et du ferroviaire.

Dans le même temps l'effectif permanent de la société, est passé de 74 personnes en 2013 à 65 personnes en 2014.

La conséquence de la perte de ces chiffres d'affaire se traduit également par une baisse significative du nombre de commandes à traiter par le service de l'ADV. La structure du service ADV, calibrée pour gérer 7000 lignes de commandes par an, est déséquilibrée maintenant avec seulement 3500 lignes de commandes par an.

La forte diminution du volume de commandes traitées, qui devrait perdurer à cause de la baisse continue de l'activité Poids Lourds, ne sera pas ou peu compensée par le développement des autres secteurs d'activité.

En 2010/2011 la gestion de commandes par personne ADV était de 2362/an.

En 2015, elle est de 1167/an.

La réduction d'une personne à l'ADV ramènerait le potentiel par personne à 1750/an avec une capacité d'augmentation de 35% pour revenir sur les niveaux de 2011. Soit un niveau suffisant pour absorber le nouveau chiffre d'affaire.

Ces motifs nous conduisent à supprimer votre poste.

Afin d'éviter votre licenciement, nous avons activement recherché toutes les possibilités de reclassement dans la société et au sein du groupe FAYAT. Nous vous avons proposé plusieurs postes de reclassement (Secrétaire chantier - Assistante du directeur d'exploitation et adjointe au Manager pièces de rechanges) mais vous n'avez pas accepté ces propositions de reclassement qui vous ont été faites le 6 mai 2015.

Nous n'avons donc pas d'autre solution que de prononcer votre licenciement pour motif économique.

Nous vous confirmons que vous pouvez bénéficier du congé de reclassement qui vous a été présenté le 8 juin 2015, au cours de votre entretien préalable. Vous disposez d'un délai de 8 jours calendaires à compter de la première présentation de cette lettre pour accepter le bénéfice du dispositif.

En cas d'acceptation, ce congé débutera à l'expiration de ce délai et se déroulera tout au long de votre préavis de deux mois dont vous serez dispensée et il pourra le cas échéant se prolonger au-delà dans les conditions qui vous ont été exposées le 8 juin 2015 et ce pendant une durée à déterminer à l'issue de l'entretien d'évaluation.

Si vous refusez cette proposition, nous vous rappelons que votre préavis a une durée de deux mois.

Votre préavis débutera à la date de la première présentation de cette lettre. Nous vous rappelons que vous restez tenue, pendant la durée de ce préavis, par 1'ensemb1e de vos obligations, notamment au strict respect de la discipline et des horaires.

Vous pourrez vous absenter 50 heures par mois pour rechercher un nouvel emploi.

Ces heures seront prises selon les modalités suivantes prévues par la Convention Collective des Industries Métallurgiques & Connexes de 1'Allier: « A défaut d 'accord entre l'intéressé et son employeur, les heures pour recherche d 'emploi se répartissent sur les journées de travail à raison de deux heures par jours fixées alternativement un jour au gré de l'intéressé, un jour au gré de l' employeur ''

Par conséquent, vous voudrez bien vous rapprocher du responsable de votre service pour convenir des modalités d'utilisation de ces heures.

Nous vous rappelons que vous bénéficierez d°une priorité de réembauchage durant un délai d'un an à compter de la date de rupture de votre contrat, à condition que vous nous informiez par courrier de votre souhait d'en user. Cette priorité concerne les emplois compatibles avec votre qualification actuelle ou avec celles que vous viendrez à acquérir, sous réserve que vous nous ayez informés de celles-ci.

Nous vous prions d'agréer, Madame, l'expression de nos sincères salutations. '

Il résulte de la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, que la rupture du contrat de travail est fondée:

- sur une baisse d'activité et donc de chiffre d'affaires ;

- sur les conséquences négatives sur les marges du fait de l'augmentation de la consommation matière, de la réduction de la valeur ajoutée, de la forte dégradation du résultat d'exploitation et de l'effondrement du résultat net 2014.

Ainsi, s'agissant des dispositions de l'article L. 1233-3 du code du travail, dans sa version en vigueur au moment du litige, le licenciement est fondé sur une suppression d'emploi consécutive principalement à des difficultés économiques.

- Sur la réalité du motif économique -

L'employeur verse aux débats une note économique sur la marche générale de l'entreprise dont il ressort que:

'L'année 2013-2014 a été très fortement pénalisée par :

- La poursuite de la baisse d'activité du marché poids lourds, de 33% sur les cinq dernières années dans un contexte d'internalisation des sources d'approvisionnement des constructeurs automobiles, en quête de fabrication à coût moindres ;

- La chute de 27% du chiffre d'affaires ferroviaires sur un an (moins 40% sur les 5 dernières années), entraînant une baisse des marges, liées à la pression de plus en plus importante de la concurrence, amenant à la renégociation des prix,

- Ce qui amène à une baisse globale de l'activité de près de 22% au cours du dernier exercice ;

- En quatre ans notre société a perdu 25% de son chiffre d'affaire, et 32% de sa valeur ajoutée.

Ces difficultés rencontrées sur nos marchés ont eu des conséquences très négatives sur nos marges:

- Augmentation de la consommation matière

- Réduction de la valeur ajoutée par l'entreprise

- Forte dégradation de notre résultat d'exploitation qui ressort en négatif à 939 K€, contre un bénéfice de 44 K€ en 2013 (avec la part des frais de personnel qui passe de 31 % en 2009 à 48.90% en 2014)

- Le résultat net 2017 s'effondre, et ressort en perte de 907 K€, contre un bénéfice de 117K€ en 2013.'

Par ailleurs, l'employeur produit les bilans actifs et passifs de la société ainsi que les comptes de résultats.

En réponse, Madame [R] fait principalement valoir que la réalité du motif économique doit s'analyser au niveau du groupe FAYAT.

La notion de groupe en droit du travail, qui détermine le périmètre de l'obligation de reclassement, se distingue de celle du groupe, au sens du droit commercial.

La société LE RÉSERVOIR fait valoir que si elle appartenait bien au groupe FAYAT au sens du droit commercial, au moment du licenciement de la salariée, il ne s'agissait pas d'un groupe au sens du droit social.

Il est constant que l'activité de la société LE RÉSERVOIR porte sur la fabrication de réservoirs sous pression destinés à contenir du gaz comprimé, cette activité étant particulièrement technique et spécifique.

En outre, il ressort des éléments versés aux débats que l'activité des sociétés CHARLATTE RÉSERVOIRS, RÉSERVOIRS X.PAUTARD et LE RÉSERVOIR MASSAL, autres sociétés rattachées à l'activité chaudonnerie, portait sur la construction de réservoirs galvanisés et non sur de réservoirs sous pression.

Il résulte encore des éléments produits aux débats que la société LE RÉSERVOIR a été reprise le 28 août 2018 par la société FMPH et n'a actuellement plus aucune relation avec le groupe FAYET.

La plaquette du groupe FAYAT démontre que le groupe, au sens commercial du terme, était composé d'activités diverses et variées parmi lesquelles:

- la construction métallique ;

- l'électricité, l'électronique et l'informatique ;

- le bâtiment ;

- le matériel routier ;

- le matériel de manutention et de levage ;

- les travaux publics, les fondations spéciales ;

- la chaudonnerie, activité de la société LE RÉSERVOIR, étant précisé que cette activité bénéficiait de seulement 1% des effectifs en personnel du groupe, pris dans son ensemble.

Au vu de l'activité particulièrement spécifique et technique de la société LE RÉSERVOIR, qui portait sur la seule production des réservoirs galvanisés, contrairement aux autres sociétés de l'activité chaudonnerie du groupe FAYAT, lesquelles portaient exclusivement sur la production de réservoirs sous pression, et de la très grande diversité et variété des activités exercées au sein du groupe FAYAT par ailleurs, il convient de dire que la société LE RÉSERVOIR n'appartenait pas au groupe FAYAT au sens du droit social dans le cadre de l'activité plus spécifique de chaudonnerie.

Ainsi, la société LE RÉSERVOIR établit que le licenciement de Madame [R] est consécutif à des difficultés économiques avérées ainsi que la réalité du motif économique du licenciement intervenu.

- Sur l'obligation de reclassement -

L'employeur justifie avoir effectué les démarches suivantes en vue du reclassement de la salariée.

Par courrier en date du 14 avril 2015, la société LE RÉSERVOIR a informé la salariée qu'elle pouvait être concernée par une procédure de licenciement économique et sur la procédure de reclassement.

Etaient joints à ce courrier un questionnaire préalable à la recherche de reclassement hors territoire national ainsi qu'un curriculum vitae à remplir en vue de la recherche de reclassement.

La salariée a répondu à cette demande en fournissant un curriculum vitae d'assistante commerciale trilingue allemand / anglais ainsi que le questionnaire renseigné.

Par courrier en date du 6 mai 2015, la société a proposé à Madame [R] deux postes au sein du groupe FAYAT, les deux postes étant géographiquement situés à [Localité 3]:

- un poste de secrétaire chantier - assistante du directeur d'exploitation ;

- un poste d'adjointe au manager pièces de rechanges.

Par courrier du 22 mai 2015, la société LE RÉSERVOIR relève que la salariée n'a pas donné de réponse aux propositions de reclassement faites et lui indique qu'elle ne dispose pas d'autre solution de reclassement.

Si la salariée fait état de recrutements intervenus suite à son licenciement pour motif économique au sein de la société LE RÉSERVOIR, il convient de relever que ces recrutements sont intervenus dans des secteurs différents sur des postes de directeur commercial ou de responsable qualité, alors qu'il résulte de la lecture de son curriculum vitae qu'elle ne disposait pas des qualifications requises.

Au vu de ces éléments et des principes de droit sus-visés, il convient de considérer que l'employeur a loyalement et sérieusement rempli son obligation de reclassement de la salariée.

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a dit que l'ensemble des motifs invoqués ne permettent pas de faire droit aux demandes de requalification du licenciement économique en licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le jugement déféré sera également confirmé en ce qu'il a débouté Madame [M] [R] de l'intégralité de ses demandes formulées à l'encontre de la société LE RÉSERVOIR.

- Sur les frais irrépétibles et les dépens -

Les dispositions du jugement déféré relatives aux frais irrépétibles et aux dépens de première instance seront confirmées.

En équité, il n'y a pas lieu de statuer sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

Madame [M] [R], qui succombe en son recours, sera condamnée au paiement des dépens en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi,

- Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions soumises à la cour ;

Y ajoutant,

- Dit qu'il y a lieu d'écarter le moyen tiré de l'irrecevabilité des prétentions de l'appelante et dit que les prétentions de l'appelante sont recevables ;

- Condamne Madame [M] [R] au paiement des dépens en cause d'appel ;

- Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Ainsi fait et prononcé lesdits jour, mois et an.

Le greffier, Le Président,

N. BELAROUI C. RUIN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Riom
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20/00377
Date de la décision : 11/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-11;20.00377 ?
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