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27/09/2022 | FRANCE | N°19/01437

France | France, Cour d'appel de Riom, Chambre sociale, 27 septembre 2022, 19/01437


27 SEPTEMBRE 2022



Arrêt n°

FD/NB/NS



Dossier N° RG 19/01437 - N° Portalis DBVU-V-B7D-FIAV



SASU SOFIDIS





/



[E] [O]

Arrêt rendu ce VINGT SEPT SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX par la QUATRIEME CHAMBRE CIVILE (SOCIALE) de la Cour d'Appel de RIOM, composée du délibéré de :



M. Christophe RUIN, Président



Mme Karine VALLEE, Conseiller



Mme Frédérique DALLE, Conseiller



En présence de Mme Séverine BOUDRY greffier lors des débats et de

Mme Nadia BELAROUI, greffier lors du prononcé



ENTRE :



SASU SOFIDIS Agissant en la personne de son Président en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité...

27 SEPTEMBRE 2022

Arrêt n°

FD/NB/NS

Dossier N° RG 19/01437 - N° Portalis DBVU-V-B7D-FIAV

SASU SOFIDIS

/

[E] [O]

Arrêt rendu ce VINGT SEPT SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX par la QUATRIEME CHAMBRE CIVILE (SOCIALE) de la Cour d'Appel de RIOM, composée du délibéré de :

M. Christophe RUIN, Président

Mme Karine VALLEE, Conseiller

Mme Frédérique DALLE, Conseiller

En présence de Mme Séverine BOUDRY greffier lors des débats et de Mme Nadia BELAROUI, greffier lors du prononcé

ENTRE :

SASU SOFIDIS Agissant en la personne de son Président en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Sophie LACQUIT, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND, avocat constitué, substitué à l'audience par Me Véronique POUQUET, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE, avocat plaidant

APPELANTE

ET :

M. [E] [O]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Khalida BADJI de la SELARL BADJI-DISSARD, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

INTIME

Mr RUIN, Président et Mme DALLE, Conseiller, après avoir entendu Mme DALLE, Conseiller en son rapport, à l'audience publique du 20 juin 2022, tenue par ces deux magistrats, sans qu'ils ne s'y soient opposés, les représentants des parties en leurs explications, en ont rendu compte à la Cour dans son délibéré, aprés avoir informé les parties que l'arrêt serait prononcé, ce jour, par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 du code de procédure civile

FAITS ET PROCÉDURE

Monsieur [E] [O] a tout d'abord été embauché, le 14 décembre 1998, suivant contrat de qualification, par la SARL DISTRILEADER ALLIER qui exploite des supermarchés à l'enseigne LEADER PRICE.

A l'issue de son contrat de qualification, le 14 décembre 1999, il a été promu responsable de rayon, coefficient 170, en poste au magasin de [Localité 8].

Le 1er juillet 2000, il a été promu adjoint de magasin, coefficient 200, au sein du même magasin.

Le 1er avril 2002, il a été promu adjoint directeur de magasin, niveau 5, statut agent de maîtrise, par la SARL DISTRILEADER RHONE, au magasin de [Localité 7].

Le 1er juillet 2003, il a été promu directeur de magasin, niveau 7, statut cadre, par la société DISTRILEADER NORD CENTRE II, en poste au magasin d'[Localité 6].

Le 1er mars 2009, toujours directeur de magasin, niveau 7, statut cadre, employé par la SNC LEADER BRASSAC, il était en poste au magasin de [Localité 5].

Le 10 mars 2014, Monsieur [O] a été promu aux fonctions d'inspecteur, niveau 7, statut cadre, au sein de la SAS SOFIDIS.

Depuis le 1er juillet 2003 et sa promotion comme directeur de magasin, Monsieur [O] exerçait ses fonctions dans le cadre d'un forfait jour.

Le 2 septembre 2016, Monsieur [S], salarié de la société SOFIDIS en qualité de directeur régional et, à ce titre, supérieur hiérarchique de Monsieur [O], a visité un des magasins relevant du secteur géographique de ce dernier.

Selon Monsieur [O], cette visite s'est déroulée dans des conditions vexatoires à son endroit.

Le 6 septembre 2016, Monsieur [O] a été placé en arrêt de travail, arrêt prolongé jusqu'à une visite médicale de pré-reprise le 30 mai 2017.

Le 23 janvier 2017, par requête expédiée en recommandé, Monsieur [O] a saisi le conseil de prud'hommes du PUY-EN-VELAY aux fins notamment de voir prononcer l'annulation de la convention forfait jours en vigueur entre les parties et constater que la durée du travail est établie sur la durée légale soit 35 heures hebdomadaires augmentées des temps de pause conventionnels, prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail, outre obtenir diverses sommes à titre indemnitaire.

L'audience devant le bureau de conciliation et d'orientation s'est tenue en date du 17 mars 2017 et, comme suite au constat de l'absence de conciliation (convocation notifiée au défendeur le 30 janvier 2017), l'affaire a été renvoyée devant le bureau de jugement.

Le 1er juin 201 7, l'inaptitude de Monsieur [O] a été prononcée par le médecin du travail : «Inapte à tous postes, en une seule visite (L. 4624-3). Tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé (article R. 4624-42 du Cade du travail ; décret 11° 2016-1908 du 27 décembre 2016 relatif à la modernisation de la médecine du travail)''.

Par lettre recommandée avec avis de réception du 24 avril 2018, la société SOFIDIS a notifié à Monsieur [O] son licenciement pour inaptitude d'origine non professionnelle et impossibilité de procéder à son reclassement.

Au terme de son contrat de travail, le salaire mensuel brut, hors primes, de Monsieur [O], était de 3 792,91 euros.

Le courrier de notification est ainsi libellé :

' Monsieur,

Nous faisons suite à votre entretien préalable du 20 avril 2018 auquel vous vous êtes présenté assisté de Monsieur [K] [G], Directeur Régional. Lors de cet entretien, nous avons évoqué votre impossibilité de reprendre votre emploi antérieur en raison de votre inaptitude physique reconnue par le médecin de santé au travail.

Nous vous rappelons que, lors de votre visite médicale en date du 1er juin 2017, le médecin de santé au travail a déclaré, dans son avis : « inapte à tous postes. En une seule visite (article L.4624-3). Tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé (Article R4624-42 du Code du travail; Décret n°2016-1908 du 27 décembre 2016 relatif à la modernisation de la médecine du travail ''.

Suite aux différents échanges intervenus entre la société et le médecin du travail, ce dernier a confirmé votre inaptitude « à tous postes '' au sein de l'entreprise et du Groupe, sans qu'aucun reclassement ne puisse être envisagé.

Par conséquent et dans ces conditions, nous sommes malheureusement dans l'impossibilité de procéder à votre reclassement, ce qui nous oblige à mettre un terme à votre contrat de travail.

Étant donné que votre état de santé ne vous permet pas d'effectuer votre préavis, vous cesserez de faire partie de l'effectif à compter de la date de la première présentation de la lettre recommandée notifiant la rupture.

Comme votre contrat de travail nous v autorise, nous entendons expressément vous dispenser de l'application de la clause de non-concurrence qui nous lie.

Étant ainsi délié de cette obligation de non-concurrence, il vous est permis de travailler pour toute entreprise ou d'exercer toute activité de votre choix.

Bien entendu, aucune indemnité spéciale de non-concurrence ne vous est due.

Nous vous rappelons que vous demeurez tenu de respecter une obligation de discrétion s'agissant des éléments confidentiels dont vous auriez pu avoir connaissance à l'occasion de l'exercice de vos missions.

En application des dispositions légales en vigueur, nous vous informons que vous pouvez bénéficier du maintien des garanties de prévoyance et de santé pendant une période maximum de 12 mois, sous réserve de remplir les conditions d'application.

En tant que de besoin, nous vous rappelons les dispositions contenues à l'article R. 1232-13 du code du travail, selon lequel 'dans les quinze jours suivant la notification du licenciement, le salarié peut, par lettre recommandée avec avis de réception ou remise contre récépissé, demander à l'employeur des précisions sur les motifs énoncés dans la lettre de licenciement. L'employeur dispose d'un délai de quinze jours après la réception de la demande du salarié pour apporter des précisions s'il le souhaite. Il communique ces précisions au salarié par lettre recommandée avec avis de réception ou remise contre récépissé'.

Vos certificats de travail, attestation Pôle Emploi et solde de tout compte, en double exemplaires dont un à nous retourner signés, vous seront adressés par courrier séparé à votre domicile.

Souhaitant sincèrement que votre santé s'améliore, nous vous prions d'agréer, Monsieur, nos salutations distinguées.'

Par jugement contradictoire en date du 21 juin 2019 (audience du 8 mars 2019), le conseil de prud'hommes du PUY-EN-VELAY a :

- dit et jugé que la convention de forfait annuel en jours entre la société SOFIDIS et Monsieur [O] est frappée de nullité, et que la durée du travail est établie sur la durée légale, soit 35 heures hebdomadaires augmentées des temps de pause conventionnels ;

- dit que Monsieur [O] a effectué des heures supplémentaires ;

- prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de Monsieur [O] qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse à la date du 24 avril 2018 ;

En conséquence,

- condamné la société SOFIDIS à payer et porter à Monsieur [O] les sommes suivantes :

* 119.555 euros brut à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires, outre 11.955,50 euros brut à titre d'indemnité de congés payés afférents,

* 10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour défaut d' information du repos compensateur,

* 30.000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

* 25.000 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect des dispositions légales sur les astreintes,

* 11.378,73 euros brut à titre d`indemnité compensatrice de préavis, outre 1.137,87 euros brut à titre des congés payés afférents au préavis,

* 55.000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dit que les créances salariales sont productrices d'intérêts au taux légal à compter de la réception par le défendeur de la convocation à comparaître à l'audience de conciliation et d'orientation et à défaut de demande initiale, à compter de la date à laquelle ces sommes ont été réclamées et les créances indemnitaires à compter du prononcé du présent jugement ;

- rappelé que l'exécution provisoire est de droit sur les sommes dues au titre des rémunérations et indemnités mentionnées au 2° de l'article R. 1454-14 du code du travail, dans la limite de neuf mois de salaire;

- dit que le salaire moyen des trois derniers mois est de 3.792,91 euros brut ;

- ordonné l'exécution provisoire concernant les sommes accordées à titre de dommages et intérêts sur leur ensemble ;

- condamné la société SOFIDIS à rembourser à Pôle Emploi les indemnités de chômage payées au salarié licencié du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé par le conseil, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage ;

- dit que le présent jugement sera transmis au Pôle Emploi ;

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

- condamné la société SOFIDIS aux entiers dépens de l'instance et d'exécution.

Le 11 juillet 2019, la société SOFIDIS a interjeté appel de ce jugement qui lui a été notifié à sa personne le 26 juillet 2019.

Vu les conclusions notifiées à la cour le 20 juin 2022 par la société SOFIDIS,

Vu les conclusions notifiées à la cour le 17 juin 2022 par Monsieur [O],

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 17 juin 2022.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses dernières écritures, la société SOFIDIS demande à la cour de :

Sur la durée du travail :

Infirmant le jugement entrepris ;

A titre principal :

- constater que la convention de forfait conclue par Monsieur [O] n'encourt nullement la nullité et lui est parfaitement opposable ;

- en conséquence, dire qu'elle doit produire ses pleins et entiers effets à l'égard de Monsieur [O] ;

A titre subsidiaire :

- constater que Monsieur [O] ne produit pas d'éléments suffisants de nature à justifier de l'accomplissement d'heures supplémentaires ;

- en conséquence, débouter Monsieur [O] de ses demandes de rappels de salaire de ce chef et des congés payés y afférents ;

- constater que Monsieur [O] ne démontre pas avoir accompli des heures supplémentaires au-delà du contingent ;

- en conséquence, débouter Monsieur [O] de ses demandes d'indemnisation au titre d'un prétendu repos compensateur ;

Confirmant le jugement entrepris :

A titre infiniment subsidiaire :

- constater que l'intention frauduleuse de la société SOFIDIS, indispensable à caractériser le travail dissimulé, ne saurait résulter ni de la seule annulation de la convention de forfait ni de l'absence de mention des heures supplémentaires sur les bulletins de paie ;

- constater que Monsieur [O] ne démontre pas l'intention dissimulatrice de la société ;

- en conséquence, débouter Monsieur [O] de sa demande d'indemnité forfaitaire au titre du travail dissimulé ;

Sur les astreintes de 2014 à la fin du contrat :

Infirmant le jugement entrepris :

- constater que Monsieur [O] ne démontre pas avoir réalisé des astreintes à compter de sa nomination aux fonctions d'inspecteur;

- en conséquence, débouter Monsieur [O] de sa demande de dommages et intérêts de ce chef ;

Sur la rupture du contrat :

A titre principal :

Infirmant le jugement entrepris :

- constater que Monsieur [O] ne rapporte pas la preuve de l'existence de manquements suffisamment graves de la société justifiant la rupture immédiate de son contrat de travail ;

- en conséquence, débouter Monsieur [O] de sa demande de dommages et intérêts de ce chef ;

A titre subsidiaire :

Statuant de nouveau :

- constater qu'elle a bien consulté les délégués du personnel quant à l'inaptitude de Monsieur [O]

- constater que les délégués du personnel ont rendu un avis favorable ;

- en conséquence, débouter Monsieur [O] de sa demande de dommages et intérêts à hauteur de 12 mois de salaires de ce chef ;

En tout état de cause :

Accueillant la demande reconventionnelle de la société :

- condamner Monsieur [O] à lui payer la somme de 3000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Sur la demande de résiliation judiciaire, la société SOFIDIS explique que, en près de 20 ans de relations contractuelles, Monsieur [O] n'a jamais formulé le moindre reproche aux dirigeants successifs de l'entreprise. Elle indique que Monsieur [O] a formulé sa demande de résiliation judiciaire alors qu'il était absent de 1'entreprise en raison d'un arrêt de travail pour maladie depuis plusieurs mois et qu'il a invoqué des manquements remontant donc à plusieurs mois, voire même années. Elle affirme en outre qu'aucun des reproches formulés par Monsieur [O], ne constitue un manquement grave suffisant pour justifier la résiliation judiciaire du contrat.

Sur la validité et l'opposabilité de la convention de forfait en jours, elle explique que Monsieur [O] n'a jamais remis en cause la validité de sa convention de forfait annuel en jours pendant toute l'exécution de son contrat de travail. Elle estime démontrer qu'elle a effectué un suivi du contrôle des jours de travail de Monsieur [O], répondant ainsi aux dispositions de la convention collective. Elle affirme que le salarié bénéficiait d'une grande autonomie qui lui permettait d'organiser librement son temps de travail et qu'elle usait d'outils de contrôle des temps de travail, dès lors, tout était mis en 'uvre pour que Monsieur [O] ne souffre pas d'une surcharge de travail. Elle soutient ainsi que la convention est pleinement opposable au salarié et conclut au débouté de Monsieur [O] de l'ensemble de ses demandes.

A titre subsidiaire, sur les heures supplémentaires, elle affirme que le salarié revendique l'accomplissement d'un nombre exorbitant d'heures supplémentaires, mais qu'il n'a jamais formulé ni la moindre contestation, ni la moindre réserve, en cours d'exécution de son contrat de travail. En outre, elle soutient que Monsieur [O] ne remplit pas la charge de la preuve qui lui incombe, les pièces produites par le salarié n'étant pas probantes et confirmant même le fait qu'il était en mesure d'accomplir la prestation de travail confiée au cours d`une journée normale de travail.

Sur la demande au titre du travail dissimulé, elle soutient que le salarié ne démontre pas qu'elle ait intentionnellement entendu se soustraire à ses obligations en ne déclarant pas ses heures supplémentaires. Elle ajoute qu'il ne produit aucune pièce pour étayer ses allégations et ne démontre pas avoir accompli d'heures supplémentaires lors de ce déplacement.

Elle conclut, au regard de l'ensemble de ces éléments, qu'elle a légitimement conclu une convention de forfait jours au regard de l'autonomie dont disposait Monsieur [O] dans l'exercice de ses fonctions de cadre, et que Monsieur [O] ne justifie pas de l'accomplissement d`heures supplémentaires, non plus que de l'intention frauduleuse de son employeur. Dès lors, elle soutient que Monsieur [O] sera débouté de sa demande qui ne saurait fonder la résiliation judiciaire de son contrat de travail.

Sur la prétendue exécution déloyale du contrat, elle affirme que Monsieur [O] ne démontre jamais qu'elle n'aurait pas exécuté le contrat de bonne foi. En effet, l'ensemble des éléments avancés par Monsieur [O] ne démontre pas une exécution déloyale du contrat, tandis que la résiliation judiciaire ne saurait être fondée sur des faits isolés, anciens de plusieurs mois, voire années avant la rupture et surtout au titre desquels Monsieur [O] n'a rien contesté lors de leur survenance. Dès lors, Monsieur [O] sera donc débouté de sa demande de dommages et intérêts car elle est aussi exorbitante que forfaitaire.

Sur les astreintes, elle affirme que les éléments produits par Monsieur [O] ne prouvent pas la réalisation d'astreinte, à fortiori leur nombre. Aussi, elle conclut au débouté de Monsieur [O] de sa demande de résiliation judiciaire et de chacune des demandes distinctes qu'il a formulé au titre de chacun des prétendus manquements.

A titre subsidiaire, sur le licenciement pour inaptitude d'origine non professionnelle et l'impossibilité de procéder au reclassement, elle indique que contrairement à ce qu'affirme Monsieur [O], elle a consulté les délégués du personnel lors d'une réunion qui s'est tenue le 16 mars 2018 et que ceux-ci ont rendu un avis favorable à son licenciement pour inaptitude d'origine non professionnelle et impossibilité de procéder à son reclassement.

Dans ses dernières écritures, Monsieur [O] demande à la cour de :

- le dire recevable et bien fondé en ses demandes ;

A titre principal :

- retenir la somme de 4 843,29 euros bruts mensuels pour le salaire de Monsieur [O] ;

- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes du PUY-EN-VELAY en date du 21 juin 2019 en ce qu'il a :

- prononcé l'annulation de la convention de forfait jours en vigueur entre les parties et constaté que la durée du travail est établie sur la durée légale soit 35 heures hebdomadaires augmentées des temps de pause conventionnels ;

- condamné la société SOFIDIS à :

* la somme de 119 555,00 euros bruts à titre de rappel de salaire, outre la somme 11 955,50 euros bruts de congés payés afférents,

* la somme de 10 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour défaut d'information du repos compensateur ;

- constaté que la société SOFIDIS a été déloyale dans l'exécution de la relation de travail ;

- condamné la société SOFIDIS à la somme de 30 000,00 euros de dommages et intérêts ;

- constaté qu'il effectuait des astreintes ;

- condamné la société SOFIDIS à la somme de 25 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect des dispositions légales sur les astreintes ;

- constaté que la société SOFIDIS a commis des actes graves dans l'exécution de la relation de travail, empêchant ainsi sa poursuite ;

- prononcé la réalisation judiciaire de la relation de travail ;

- condamné la société SOFIDIS à lui verser :

* la somme de 11 378,73 euros bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis outre la somme de 1 137,87 euros bruts au titre des congés payés y afférents,

* des dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

- condamné la société SOFIDIS à rembourser à Pôle Emploi les indemnités de chômage payées au salarié licencié du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé par la Conseil, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage ;

- dit que les créances salariales sont productrices d'intérêts aux taux légal à compter de la réception par le défendeur de la convocation à comparaître à l'audience de conciliation et d'orientation et à défaut de demande initiale, à compter de la date à laquelle ces sommes ont été réclamées et les créances indemnitaires à compter du présent jugement ;

- condamné la société SOFIDIS à 3 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- infirmer le jugement du conseil de prud'hommes du PUY-EN-VELAY en date du 21 juin 2019 pour le surplus et ainsi :

- réévaluer le quantum des dommages et intérêts alloué au titre du licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

- condamner la société SOFIDIS à la somme de 100 000,00 euros nets de charges, CSG-CRDS à titre de dommages et intérêts ou à minima la somme de 75 070,99 euros nets de charges sociales et CSG-CRDS, correspondant à 15,5 mois de salaire ;

- condamner la société SOFIDIS à 31 000,00 euros à titre d'indemnité de travail dissimulé ;

A titre subsidiaire :

- constater que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse ;

- en conséquence, condamner la société SOFIDIS à la somme de 100 000,00 euros à titre d'indemnité pour absence de consultation préalable des délégués du personnel ;

En tout état de cause :

- infirmer le jugement de première instance et ainsi condamner la société SOFIDIS à la somme de 5 000 euros au titre de dommages et intérêts pour absence l'absence de mention de mise à jour de la fiche d'entreprise ;

- en sus, condamner la société SOFIDIS à la somme de 5 000,00 euros en cause d'appel sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner en tout état de cause la société SOFIDIS aux entiers dépens de l'instance.

Monsieur [O] soutient que, sur la convention de forfait jours sur l'année, la société SOFIDIS n'a pas mis en oeuvre le suivi du temps de travail, garantie conventionnelle obligatoire en cas de forfait-jours. En outre, sur le défaut d'entretien annuel, il indique que jamais l'employeur n'a organisé un tel entretien, ce qui prive d'effet la convention annuelle de forfait en jours.

Sur les heures supplémentaires, à l'appui de ses dires, il verse aux débats un état détaillé de ses heures supplémentaires de travail pour les années 2014, 2015 et 2016, et courriels reçus en dehors des heures de travail, de sollicitations de son employeur, reçus à toute heure de la journée, ainsi que les dimanches et jours fériés, notamment de la part de son supérieur hiérarchique Monsieur [S], directeur régional au sein de la société SOFIDIS. Il ajoute qu'il avait, systématiquement, en plus de la charge des 12 magasins de son secteur géographique, à gérer 12 magasins implantés sur un autre secteur, notamment pendant les périodes de congés pour en assurer le suivi. Il fait en outre valoir qu'en plus du paiement de ses heures supplémentaires, il doit percevoir une indemnité compensatrice pour non prise des repos compensateurs liés au dépassement du contingent d'heures supplémentaires.

Sur l'indemnité pour travail dissimulé, il soutient que la société SOFIDIS a intentionnellement entendu se soustraire à ses obligations en ne déclarant pas les heures supplémentaires qu'il a effectuées, qui découlaient d'une convention de forfait en jours illicite.

Monsieur [O] soutient ensuite que l'employeur s'est rendu coupable d'une exécution déloyale du contrat de travail, notamment en raison d'un management par la peur, d'un non-respect de l'obligation de protection de la santé et de la sécurité des salariés dans l'entreprise, par le détournement de la vidéo-surveillance sans en avoir averti les salariés, mais aussi en raison du fait qu'il a dû prendre en charge 24 magasins au lieu de 12 et a assuré les missions de formateur sans aucun dédommagement ni une quelconque modification contractuelle.

Il soutient ensuite qu'il a réalisé des astreintes sans le moindre délai de prévenance, ni la moindre contrepartie financière.

Monsieur [O] soutient, au regard de l'ensemble des éléments précités, que les manquements de l'employeur étaient suffisamment graves pour justifier la rupture de la relation de travail et conclut à la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a prononcé la résiliation judiciaire aux torts exclusifs de la société SOFIDIS. Il sollicite les conséquences indemnitaires et financières de la résiliation judiciaire aux torts de l'employeur.

A titre subsidiaire, sur le licenciement, il fait valoir qu'il a été déclaré inapte par le médecin du travail, et que la société SOFIDIS aurait dû consulter les délégués du personnel préalablement à son licenciement, même en cas d'impossibilité à être reclassé, ce qui n'a pas été le cas, dès lors ledit licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Sur l'absence de mention de mise à jour de la fiche d'entreprise, il indique que cette non mise à jour justifie sa demande de dommage et intérêts spécifique.

Pour plus ample relation des faits, de la procédure, des prétentions, moyens et arguments des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il y a lieu de se référer à la décision attaquée et aux dernières conclusions régulièrement notifiées et visées.

MOTIFS

- Sur la clôture de l'instruction -

Selon les dispositions de l'article 784 du code de procédure civile, l'ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue. L'ordonnance de clôture peut être révoquée, d'office ou à la demande des parties, soit par ordonnance motivée du conseiller de la mise en état, soit, après l'ouverture des débats, par décision de la cour.

En l'espèce, l'ordonnance de clôture a été rendue le 17 juin 2022 par le président de chambre chargé de la mise en état pour une affaire fixée à l'audience du 20 juin 2022.

Le 20 juin 2022, la société SOFIDIS a sollicité le rabat de l'ordonnance de clôture en date du même jour en raison de la signification tardive des conclusions adverses en date du 17 juin 2022.

Vu l'accord des parties sur ce point avant l'ouverture des débats et leur demande conjointe pour permettre l'admission de leurs dernières écritures et pièces, la cour a ordonné, à l'audience du 20 juin 2022 et à l'ouverture des débats, en tout cas avant la clôture des débats, la révocation de l'ordonnance de clôture de l'instruction rendue le 17 juin 2022. La clôture de l'instruction a été fixée au jour de l'audience. Les conclusions et pièces notifiées contradictoirement avant ou jusqu'à cette date sont donc recevables.

- Sur la recevabilité de la demande de la société SOFIDIS au titre de l'enrichissement injustifié -

Aux termes des articles 564 à 566 du code de procédure civile, les parties peuvent invoquer des moyens nouveaux mais ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions. Il est toutefois dérogé à cette irrecevabilité des demandes nouvelles notamment lorsque les prétentions tendent aux mêmes fins ou lorsqu'elles étaient virtuellement comprises dans les demandes et défenses soumises au premier juge. De même, les parties peuvent ajouter en cause d'appel des demandes qui sont l'accessoire, la conséquence ou le complément des prétentions de première instance.

Monsieur [O] soutient que la demande adverse au titre de l'enrichissement injustifié, reposant sur le fait que le salarié aurait utilisé le véhicule de la société pendant 3 ans et 4 mois, constitue une demande nouvelle et est irrecevable.

La société SOFIDIS répond que cette demande est un accessoire aux prétentions de l'intimé qui a fait état dans des conclusions précédentes du véhicule de société dont il a bénéficié.

En l'espèce, il ressort des pièces produites par les parties qu'un mail ainsi qu'un procès-verbal de restitution du véhicule figurent aux débats.

Dès lors, il y a lieu d'écarter le moyen tenant à l'irrecevabilité de la demande formulée au titre de l'enrichissement injustifié, les conditions de restitution du véhicule dont bénéficiait Monsieur [O], en sa qualité de salarié de la société SOFIDIS, s'inscrivant dans la continuité du litige de première instance, dont est saisi la cour d'appel par effet dévolutif.

- Sur la convention de forfait jours -

Selon les dispositions de l'article L. 3121-39 du code du travail applicables à l'époque considérée (loi 2008-789 du 20 août 2008) : La conclusion de conventions individuelles de forfait, en heures ou en jours, sur l'année est prévue par un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, par une convention ou un accord de branche. Cet accord collectif préalable détermine les catégories de salariés susceptibles de conclure une convention individuelle de forfait, ainsi que la durée annuelle du travail à partir de laquelle le forfait est établi, et fixe les caractéristiques principales de ces conventions.

Selon les dispositions de l'article L. 3121-40 du code du travail applicables à l'époque considérée (loi 2008-789 du 20 août 2008) : La conclusion d'une convention individuelle de forfait requiert l'accord du salarié. La convention est établie par écrit.

Selon les dispositions de l'article L. 3121-42 du code du travail applicables à l'époque considérée (loi 2008-789 du 20 août 2008 : Les salariés ayant conclu une convention de forfait en jours ne sont pas soumis aux dispositions relatives à la durée quotidienne maximale de travail effectif (10 heures), aux durées hebdomadaires maximales de travail (48 et 44 heures), à la durée légale hebdomadaire prévue à l'article L. 3121-27 (35 heures).

Selon les dispositions de l'article L. 3121-43 du code du travail applicables à l'époque considérée (loi 2008-789 du 20 août 2008) : Peuvent conclure une convention individuelle de forfait en jours sur l'année, dans la limite du nombre de jours fixé en application du 3° du I de l'article L. 3121-39 : 1° Les cadres qui disposent d'une autonomie dans l'organisation de leur emploi du temps et dont la nature des fonctions ne les conduit pas à suivre l'horaire collectif applicable au sein de l'atelier, du service ou de l'équipe auquel ils sont intégrés ; 2° Les salariés dont la durée du temps de travail ne peut être prédéterminée et qui disposent d'une réelle autonomie dans l'organisation de leur emploi du temps pour l'exercice des responsabilités qui leur sont confiées.

Selon les dispositions de l'article L. 3121-44 du code du travail applicables à l'époque considérée (loi 2008-789 du 20 août 2008) : Le nombre de jours travaillés dans l'année fixé par l'accord collectif prévu à l'article L. 3121-39 ne peut excéder deux cent dix-huit jours.

Selon les dispositions de l'article L. 3121-46 du code du travail applicables à l'époque considérée (loi 2008-789 du 20 août 2008) : Un entretien annuel individuel est organisé par l'employeur, avec chaque salarié ayant conclu une convention de forfait en jours sur l'année. Il porte sur la charge de travail du salarié, l'organisation du travail dans l'entreprise, l'articulation entre l'activité professionnelle et la vie personnelle et familiale, ainsi que sur la rémunération du salarié.

Aux termes de l'article 5-7.2 de la convention collective du commerce de gros et de détail à prédominance alimentaire relatif au forfait défini en jours:

'Le forfait en jours s'accompagne d'un suivi du nombre de jours ou demi-journées travaillés et du respect du repos quotidien et hebdomadaire prévu par le présent accord, ainsi que de la charge de travail. Ce suivi peut s'effectuer à l'aide d'un document tenu par le salarié sous la responsabilité de l'employeur. Ce document fait apparaître la qualification de chacune des journées ou demi-journées du mois, répartie en quatre catégories au minimum : travail, repos, congé payé, autre absence ; afin d'identifier les éventuelles difficultés en matière d'amplitude des journées de travail, le document indique également, lorsqu'un repos quotidien a été inférieur à 12 heures consécutives, quelle en a été la durée. Il doit également comporter la possibilité pour le salarié d'ajouter toute information complémentaire qu'il jugerait utile d'apporter. Signé par le salarié, le document de décompte est remis mensuellement à sa hiérarchie, responsable de son analyse et des suites à donner, ainsi que de sa conservation. Un récapitulatif annuel est remis au salarié, dans les 3 mois suivant la fin de la période.

Au moins une fois par an, le salarié en forfait jours bénéficie à l'initiative de sa hiérarchie d'un entretien portant sur sa charge et son amplitude de travail, sur l'organisation du travail dans l'entreprise ou l'établissement, sur l'articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle et familiale, ainsi que sur sa rémunération.

Un entretien doit également être proposé par la hiérarchie du salarié lorsque le document mensuel de décompte visé ci-dessus fait apparaître des anomalies répétées mettant en évidence des difficultés en matière de temps de travail. Cet entretien a pour objet d'examiner les mesures correctives à mettre en 'uvre.

Un entretien supplémentaire peut en outre avoir lieu à tout moment de l'année à l'initiative du salarié si celui-ci rencontre des difficultés d'organisation de sa charge de travail l'amenant à des durées de travail trop importantes. Cette alerte doit aboutir à des décisions concrètes.

Lorsqu'un entretien a été rendu nécessaire en raison de difficultés en matière de temps de travail, un bilan est effectué 3 mois plus tard afin de vérifier que la charge de travail présente bien un caractère raisonnable.

L'entreprise peut mettre en place d'autres modalités de suivi que le document ci-dessus, à condition de présenter les mêmes garanties.'

Sur la validité et l'opposabilité de la convention de forfait en jours, la société SOFIDIS explique que Monsieur [O] n'a jamais remis en cause la validité de sa convention de forfait annuel en jours pendant toute l'exécution de son contrat de travail. Elle estime démontrer qu'elle a effectué un suivi du contrôle des jours de travail de Monsieur [O], répondant ainsi aux dispositions de la convention collective. Elle affirme que le salarié bénéficiait d'une grande autonomie qui lui permettait d'organiser librement son temps de travail et qu'elle usait d'outils de contrôle des temps de travail, dès lors, tout était mis en 'uvre pour que Monsieur [O] ne souffre pas d'une surcharge de travail. Elle soutient ainsi que la convention est pleinement opposable au salarié et conclut au débouté de Monsieur [O] de l'ensemble de ses demandes.

Monsieur [O] soutient que, sur la convention de forfait jours sur l'année, la société SOFIDIS n'a pas mis en oeuvre le suivi du temps de travail, garantie conventionnelle obligatoire en cas de forfait-jours. En outre, sur le défaut d'entretien annuel, il indique que jamais l'employeur n'a organisé un tel entretien, ce qui prive d'effet la convention annuelle de forfait en jours.

En l'espèce, depuis le 1er juillet 2003 et sa promotion comme directeur de magasin, Monsieur [O] a exercé ses fonctions dans le cadre d'un forfait jour.

La loi n° 2008-789 du 20 août 2008 (JORF du 21 août 2008 art. 19 III) prévoit que les accords conclus en application des articles L. 3121-40 à L. 3121-51 du code du travail dans leur rédaction antérieure à la publication de cette loi restent en vigueur. L'ancien article L. 212-15-3 I du code du travail stipulait que la conclusion de conventions individuelles de forfait, en heures ou en jours, sur l'année doit être prévue par une convention ou un accord collectif étendu ou par une convention ou un accord collectif d'entreprise ou d'établissement qui détermine les catégories de salariés susceptibles de conclure une convention individuelle de forfait, ainsi que les modalités et les caractéristiques principales de ces conventions. L'ancien article L. 212-15-3 III du code du travail stipulait que la convention ou l'accord collectif prévoyant la conclusion de conventions de forfait en jours doit fixer le nombre de jours travaillés sur l'année, qui ne peut dépasser le plafond de 218 jours, doit définir, au regard de leur autonomie dans l'organisation et de leur emploi du temps, les catégories de cadres concernée, doit préciser les modalités de décompte de journées et demi-journées travaillées et de prise des journées ou demi-journées de repos, doit déterminer les conditions de contrôle de son application et doit prévoir les modalités de suivi de l'organisation du travail des salariés concernés, de l'amplitude de leurs journées d'activité et de la charge de travail qui en résulte.

Afin d'assurer la protection de la santé et de la sécurité des salariés soumis au régime du forfait annuel en jours, une jurisprudence constante exige que l'accord collectif fondant le recours à ce forfait garantisse le respect de durées raisonnables de travail et des repos journaliers et hebdomadaires, ainsi que le caractère raisonnable de l'amplitude et de la charge de travail et une bonne répartition du travail dans le temps. Remplit ces conditions l'accord collectif imposant à l'employeur de veiller à anticiper la surcharge de travail du salarié et d'y remédier, mais pas celui faisant peser sur le seul salarié le suivi de l'exécution du forfait.

Selon une jurisprudence constante, le forfait annuel en jours doit comporter, ces conditions étant cumulatives:

- un contrôle du nombre de jours travaillés par le biais d'un document rempli par le salarié ou l'employeur ou établi conjointement ;

- un suivi régulier par l'employeur (ou supérieur hiérarchique) de l'organisation du travail et de la charge du travail du salarié ;

- un entretien annuel sur la charge et la répartition du travail du salarié.

La Cour de cassation contrôle ainsi le respect de durées raisonnables de travail et des repos journaliers et hebdomadaires, le caractère raisonnable de l'amplitude et de la charge de travail, la bonne répartition du travail dans le temps et le fait que l'employeur ou l'accord collectif mette en place un système de contrôle effectif et régulier permettant de réagir assez rapidement en cas de difficulté, sans que tout repose uniquement sur une éventuelle action ou réaction du salarié.

Le juge doit contrôler que la charge de travail du salarié au forfait annuel en jours est évaluée à intervalles réguliers de telle sorte que non seulement le forfait ne soit pas impossible à respecter, mais également que soient respectés les repos quotidien et hebdomadaire et une durée du travail raisonnable (durée de travail hebdomadaire, bonne répartition dans le temps etc.). L'évaluation de la charge de travail du salarié est une condition essentielle, mais non suffisante, de la licéité du forfait annuel en jours ; il faut également que l'employeur réagisse rapidement en cas d'anomalies ou d'imprévus. De même, l'entretien annuel est indispensable mais pas suffisant.

En l'espèce, l'employeur se contente de produire les bulletins de salaire de Monsieur [O], lesquels retraceraient les jours de repos et leur motif, et d'affirmer que le salarié bénéficiait de contacts réguliers avec la direction des ressources humaines.

Ainsi, la société SOFIDIS ne justifie d'aucun suivi régulier de l'organisation du travail et de la charge du travail de Monsieur [O] pendant la période où celui-ci a été soumis à un forfait annuel en jours, pas même d'un entretien annuel pour faire le point dans ce cadre, ni d'une information individuelle donnée sur le nombre de journées ou demi-journées de travail effectuées par le salarié pendant l'année.

Il apparaît ainsi clairement que la société SOFIDIS, en matière de suivi et de contrôle de l'organisation du travail (temps de travail et charge de travail) de Monsieur [O] dans le cadre d'un forfait annuel en jours, s'est contentée des informations communiquées, ou censées l'être, par le salarié, se bornant à attendre une éventuelle action ou réaction de celui-ci.

L'employeur a manqué à toutes ses obligations, tant légales que conventionnelles, s'agissant du suivi du forfait annuel en jours de Monsieur [O] pendant la période du 1er juillet 2003 au 24 avril 2018. La société SOFIDIS ne saurait s'exonérer en relevant que Monsieur [O] ne l'avait saisie d'aucune difficulté.

Au regard des manquements de la société SOFIDIS en matière de suivi du forfait annuel en jours, la cour juge que la convention de forfait annuel en jours est inopposable à Monsieur [O].

Le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a dit et jugé nulle et de nul effet la convention de forfait jours signée par Monsieur [E] [O] et, statuant à nouveau, la cour dit que la convention de forfait jours signée par Monsieur [E] [O] lui est inopposable en raison de l'absence de tout suivi de l'organisation et de la charge du travail du salarié.

- Sur les conséquences de l'inopposabilité de la convention du forfait jours -

En cas de nullité ou d'inopposabilité du forfait, le salarié peut revendiquer l'application des règles de droit commun de décompte et de rémunération des heures de travail.

La durée légale du travail effectif des salariés est fixée à trente-cinq heures par semaine civile. Constituent des heures supplémentaires toutes les heures de travail effectuées au-delà de la durée légale hebdomadaire ou de la durée considérée comme équivalente. Toute heure accomplie au-delà de la durée légale hebdomadaire ou de la durée considérée comme équivalente est une heure supplémentaire qui ouvre droit à une majoration salariale ou, le cas échéant, à un repos compensateur équivalent. Les heures supplémentaires se décomptent par semaine. Une convention collective ou un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, de branche peut fixer une période de sept jours consécutifs constituant la semaine. À défaut d'accord, la semaine débute le lundi à 0 heure et se termine le dimanche à 24 heures.

Une convention collective ou un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, de branche peut fixer le ou les taux de majoration des heures supplémentaires, qui ne peut pas être inférieur à 10%. À défaut d'accord, les heures supplémentaires accomplies au-delà de la durée légale hebdomadaire ou la durée considérée comme équivalente donnent lieu à une majoration de salaire de 25 % pour chacune des huit premières heures supplémentaires (de la 36ème heure à la 43ème heure incluse). Les heures suivantes donnent lieu à une majoration de 50 % (à partir de la 44ème heure). La majoration des heures supplémentaires s'applique au taux horaire des heures normales de travail, ce taux ne pouvant pas être inférieur au quotient résultant de la division du salaire mensuel brut par l'horaire mensuel. Il doit être tenu compte des primes et indemnités versées en contrepartie directe du travail ou inhérentes à la nature du travail fourni et du montant des avantages en nature.

Aux termes de l'article L. 3171-4 du code du travail : 'En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.'.

Il résulte de ce texte que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties. Le salarié doit étayer sa demande de paiement d'heures supplémentaires par la production d'éléments suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments quant aux horaires effectivement réalisés par le requérant.

Dans un arrêt du 29 juin 2011, la Cour de cassation a décidé que 'dès lors que les stipulations d'un accord collectif dont le respect est de nature à assurer la protection de la sécurité et de la santé du salarié soumis au régime du forfait en jours n'avaient pas été observées par l'employeur, la convention de forfait en jours était privée d'effet et le salarié pouvait prétendre au paiement d'heures supplémentaires, dont la cour d'appel devait vérifier l'existence et le nombre'.

Ainsi, la sanction du défaut d'exécution par l'employeur des dispositions de l'accord collectif prévoyant la possibilité de conclure des conventions de forfait en jours, notamment l'absence de suivi de la charge de travail du salarié, est la privation d'effet de la convention de forfait en jours.

La Cour de cassation affirme ainsi que la défaillance de l'employeur dans l'exécution de la convention de forfaits en jours n'entraîne pas la nullité de celle-ci. La privation d'effet est la sanction qui s'impose logiquement : le forfait jours mettant à la charge de l'employeur un certain nombre d'obligations, ce dernier ne peut pas se prévaloir de ce dispositif vis-à-vis du salarié s'il ne les exécute pas, ou les exécute mal.

La convention individuelle de forfait devenant inefficace, c'est le droit commun du temps de travail qui s'applique. Le salarié peut donc prétendre au paiement d'heures supplémentaires dans les conditions de preuve particulières de l'article L. 3171-4 du code du travail. Si, à cet égard, la privation d'effet conduit au même résultat que la nullité, ces deux sanctions se séparent sur deux points : la nullité sanctionnant un défaut de formation de l'acte opère ab initio, alors que la privation d'effet ne vaut qu'à compter du moment où l'employeur manque à ses obligations.

En outre, la convention de forfait recouvre ses effets dès l'instant où l'employeur recommence à exécuter ses obligations, alors que la nullité empêche, en principe, toute régularisation postérieure.

Lorsque la convention de forfait jours est privée d'effet, les journées de RTT étant la contrepartie de la forfaitisation, elles forment un tout avec le régime de forfait et un avantage indissociable de l'application du forfait. Les journées de RTT perdent dès lors tout objet en cas de suppression du forfait. Il s'en déduit que la privation d'effet de la convention de forfait doit priver le salarié du droit au paiement des jours de RTT.

La société SOFIDIS affirme que le salarié revendique l'accomplissement d'un nombre exorbitant d'heures supplémentaires, mais qu'il n'a jamais formulé ni la moindre contestation, ni la moindre réserve, en cours d'exécution de son contrat de travail. En outre, elle soutient que Monsieur [O] ne remplit pas la charge de la preuve qui lui incombe, les pièces produites par le salarié n'étant pas probantes et confirmant même le fait qu'il était en mesure d'accomplir la prestation de travail confiée au cours d`une journée normale de travail. Enfin, la société indique que l'inopposabilité de la convention de forfait annuel en jours autorise l'employeur à réclamer le remboursement des jours de réduction du temps de travail (RTT) accordés au salarié en exécution de la convention de forfait et sollicite à ce titre le remboursement de la somme de 5.915,52 euros.

Sur les heures supplémentaires, Monsieur [O] verse aux débats un état détaillé de ses heures supplémentaires de travail pour les années 2014, 2015 et 2016, et courriels reçus en dehors des heures de travail, de sollicitations de son employeur, reçus à toute heure de la journée, ainsi que les dimanches et jours fériés, notamment de la part de son supérieur hiérarchique Monsieur [S], directeur régional au sein de la société SOFIDIS. Il ajoute qu'il avait, systématiquement, en plus de la charge des 12 magasins de son secteur géographique, à gérer 12 magasins implantés sur un autre secteur, notamment pendant les périodes de congés pour en assurer le suivi.

Monsieur [O] revendique l'accomplissement de 2.571,53 heures supplémentaires sur une période de juin 2014 au 4 septembre 2016. A cet effet, il produit:

- des tableaux informatisés, semaine par semaine et pour les années 2014, 2015 et 2016, qui présentent, d'une façon détaillée, les heures supplémentaires réalisées ;

- plusieurs courriels reçus en dehors des heures de travail, de sollicitations de son employeur, reçus à toute heure de la journée, ainsi que les dimanches et jours fériés.

Ces éléments sont suffisamment précis quant aux horaires réalisés par Monsieur [O] pour étayer sa demande d'heures supplémentaires.

En réponse, il convient de relever, à l'instar des premiers juges, que l'employeur n'apporte aucun élément permettant de justifier des horaires effectivement réalisés par le salarié, se contenant de minorer et de tenter de réfuter les éléments de preuve versés par celui-ci.

Cependant, contrairement à l'appréciation des premiers juges, il y a lieu de relever que l'employeur apparaît bien fondé dans sa demande de remboursement de la somme de 5.915,52 euros, correspondant aux jours de réduction du temps de travail (RTT) accordés au salarié en exécution de la convention de forfait.

Au vu de ces éléments et des principes de droit susvisés, le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a condamné la société SOFIDIS à payer à Monsieur [E] [O] la somme de 119.555 euros à titre de rappel de salaire, outre la somme de 11.955,50 euros au titre des congés payés afférents et, statuant à nouveau, la cour condamne la société SOFIDIS à payer à Monsieur [E] [O] la somme de 113.639,48 euros à titre de rappel de salaire, outre la somme de 11.363,94 euros au titre des congés payés afférents.

- Sur la demande de dommages et intérêts au titre de l'absence d'information sur les repos compensateurs -

Monsieur [O] soutient qu'un document de suivi doit être tenu mensuellement pour chaque salarié occupé à un horaire collectif de travail et immuable aux termes de l'article 5.8 de la convention collective du commerce de gros et de détail à prédominance alimentaire. Il réclame sur ce fondement le paiement de dommages et intérêts au titre de l'absence d'information sur les repos compensateurs.

Il convient cependant de relever que le salarié ne justifie d'aucun préjudice spécifique à ce titre, alors que la Cour de cassation a abandonné la notion de préjudice nécessaire en 2016, et ne verse aucun élément de preuve permettant de caractériser un préjudice différent de celui déjà indemnisé au titre des heures supplémentaires.

Le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a condamné la société SOFIDIS à payer à Monsieur [O] la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour défaut d'information du repos compensateur et, statuant à nouveau, déboute Monsieur [E] [O] de sa demande à titre de dommages et intérêts pour défaut d'information du repos compensateur.

- Sur la demande de dommages et intérêts au titre des astreintes -

Une période d'astreinte s'entend comme une période pendant laquelle le salarié, sans être à la disposition permanente et immédiate de l'employeur, a l'obligation de demeurer à son domicile ou a proximité afin d'être en mesure d'intervenir pour accomplir un travail au service de l'entreprise. La durée de cette intervention est considérée comme un temps de travail effectif.

Sur les astreintes, la société SOFIDIS affirme que les éléments produits par Monsieur [O] ne prouvent pas la réalisation d'astreinte, à fortiori leur nombre.

Monsieur [O] soutient qu'il a réalisé des astreintes sans le moindre délai de prévenance, ni la moindre contrepartie financière.

En l'espèce, le salarié verse aux débats un livret intitulé 'process alarme magasins LEADER PRICE' dont il ressort qu'en cas de déclenchement d'alarme en dehors des phases de présence, le poste de commande du prestataire appellera les responsables suivants: le directeur, l'adjoint du directeur, l'inspecteur, le directeur régional et le responsable technique régional.

Il résulte également de la lecture du livret que le responsable du magasin LEADER PRICE contacté doit se déplacer au magasin dans les meilleurs délais en cas d'alarme de type atteinte au bâtiment ou en cas d'alarme froid négatif, froid positif.

Le salarié produit en outre des courriels et des compte-rendus d'événements établissant que Monsieur [O] a régulièrement effectué des déplacements dans des magasins LEADER PRICE à l'occasion du déclenchement des alarmes.

Les attestations de Monsieur [W], directeur du magasin de LEADER PRICE de MOULINS, et de Monsieur [D], adjoint de direction du magasin LEADER PRICE [Localité 5], démontrent enfin que les responsables de magasin étaient fréquemment sollicités en cas de déclenchement des alarmes alors qu'il est constant qu'ils ne bénéficiaient d'aucune rémunération supplémentaire pour ce qui s'apparente, en effet, à une astreinte.

Au vu des éléments d'appréciation dont la cour dispose, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a condamné la société SOFIDIS à payer à Monsieur [O] la somme de 25.000 euros de dommages et intérêts pour non-respect des dispositions légales sur les astreintes.

- Sur le travail dissimulé -

Aux termes de l'article L. 8221-5 du code du travail : 'Est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur : 1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ; 2° Soit de se soustraire intentionnellement à la délivrance d'un bulletin de paie ou d'un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ; 3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.'.

Est donc réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait notamment pour tout employeur de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la déclaration préalable à l'embauche, ou de se soustraire intentionnellement à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner intentionnellement sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, ou

de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.

Le travail dissimulé suppose un élément intentionnel de la part de l'employeur en ce qu'il a voulu dissimuler, en tout ou partie, un emploi salarié dans le cadre des omissions précitées. L'existence de l'élément intentionnel est apprécié souverainement par le juge du fond.

En cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours en violation de l'interdiction de travail dissimulé, que ce soit par dissimulation d'activité ou d'emploi salarié, a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire, même si la durée de la relation de travail a été moindre, à moins que l'application d'autres règles légales ou de stipulations conventionnelles ne conduise à une situation plus favorable pour le salarié. L'indemnité forfaitaire est due quels que soient la qualification ou le mode de la rupture du contrat de travail (licenciement, démission, fin de contrat à durée déterminée, rupture amiable...) et sans nécessité d'une condamnation pénale préalable de l'employeur. L'élément intentionnel est toutefois requis pour une condamnation à l'indemnité forfaitaire dont l'allocation relève de la compétence exclusive du juge prud'homal.

Cette indemnité est cumulable, depuis un arrêt de la chambre sociale de la cour de cassation du 6 février 2013, avec les indemnités de toute nature auxquelles le salarié a droit en cas de rupture de la relation de travail (indemnité de préavis, de congés payés, de licenciement sans cause réelle et sérieuse, de requalification d'un CDD en CDI, de non-respect de la procédure de licenciement'), ainsi qu'avec l'indemnité légale ou conventionnelle de licenciement.

Sur la demande au titre du travail dissimulé, la société SOFIDIS soutient que le salarié ne démontre pas qu'elle ait intentionnellement entendu se soustraire à ses obligations en ne déclarant pas ses heures supplémentaires. Elle ajoute qu'il ne produit aucune pièce pour étayer ses allégations et ne démontre pas avoir accompli d'heures supplémentaires lors de ce déplacement.

Sur l'indemnité pour travail dissimulé, Monsieur [O] soutient que la société SOFIDIS a intentionnellement entendu se soustraire à ses obligations en ne déclarant pas les heures supplémentaires qu'il a effectuées, qui découlaient d'une convention de forfait en jours illicite.

Si la cour a déjà retenu que la demande de rappel d'heures supplémentaires du salarié était fondée, il convient de relever que la société justifie de l'existence d'un contrat de travail, de bulletins de salaire et de la déclaration d'embauche du salarié.

Ainsi, la preuve de l'intention de l'employeur de détourner les règles sociales et fiscales en dissimulant le travail du salarié n'étant pas rapportée, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté Monsieur [O] de sa demande d'indemnisation au titre d'un prétendu travail dissimulé.

- Sur la rupture du contrat de travail -

Il ressort de la chronologie du contentieux opposant la société SOFIDIS et Monsieur [O] que le conseil de prud'hommes a d'abord été saisi d'une demande de résiliation du contrat de travail avant que ne soit notifiée la mesure de licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement prononcée par l'employeur.

Dans cette hypothèse, les juges doivent d'abord se prononcer sur les mérites de la demande de résiliation avant de statuer, le cas échéant, sur le licenciement notifié par l'employeur.

- Sur la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail -

Le salarié peut demander au juge prud'homal la résiliation judiciaire de son contrat de travail s'il estime que l'employeur manque à ses obligations.

L'action en résiliation judiciaire du contrat de travail, qui ne constitue pas une prise d'acte de la rupture, ne met pas fin au contrat de travail et implique la poursuite des relations contractuelles dans l'attente de la décision du juge du fond.

Si les manquements de l'employeur invoqués par le salarié sont suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail, le juge prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail, et donc la rupture de celui-ci aux torts de l'employeur, au jour de sa décision, sauf si le contrat de travail a déjà été interrompu et que le salarié n'est plus au service de son employeur.

En matière de résiliation judiciaire du contrat de travail, la prise d'effet ne peut être fixée qu'à la date de la décision judiciaire le prononçant, dès lors qu'à cette date le contrat de travail n'a pas été rompu et que le salarié est toujours au service de son employeur.

Cette rupture du contrat de travail produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, ou nul en cas de harcèlement ou de discrimination ou si le salarié est protégé ou si le salarié était victime d'un accident du travail ou en cas de caractérisation d'un autre cas de nullité de la rupture.

La réalité et la gravité des manquements de l'employeur invoqués par le salarié sont souverainement appréciés par les juges du fond.

C'est au salarié de rapporter la preuve des manquements de l'employeur qu'il invoque. Les juges du fond doivent examiner l'ensemble des manquement de l'employeur invoqués par la salarié, en tenant compte de toutes les circonstances intervenues jusqu'au jour du jugement. En cas de doute sur la réalité des faits allégués, il profite à l'employeur.

Aux termes des dispositions alors applicables de l'article L. 4121-1 du code du travail : 'L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent : 1° Des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail ; 2° Des actions d'information et de formation ; 3° La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés. L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes.'.

Aux termes des dispositions alors applicables de l'article L. 4121-2 du code du travail : 'L'employeur met en oeuvre les mesures prévues à l'article L. 4121-1 sur le fondement des principes généraux de prévention suivants : 1° Eviter les risques ; 2° Evaluer les risques qui ne peuvent pas être évités ; 3° Combattre les risques à la source ; 4° Adapter le travail à l'homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail et de production, en vue notamment de limiter le travail monotone et le travail cadencé et de réduire les effets de ceux-ci sur la santé ; 5° Tenir compte de l'état d'évolution de la technique ; 6° Remplacer ce qui est dangereux par ce qui n'est pas dangereux ou par ce qui est moins dangereux ; 7° Planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l'organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l'influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral et au harcèlement sexuel, tels qu'ils sont définis aux articles L. 1152-2 et L. 1152-3 ; Prendre des mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle ; 9° Donner les instructions appropriées aux travailleurs.'.

L'employeur est tenu vis-à-vis de ses salariés d'une obligation de sécurité dans le cadre ou à l'occasion du travail. Cette obligation spécifique a été consacrée par la jurisprudence de la Cour de cassation qui a désormais abandonné le fondement contractuel de l'obligation de sécurité de l'employeur pour ne retenir que le fondement légal, tiré notamment des articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail, interprété à la lumière de la réglementation européenne concernant la mise en oeuvre de mesures visant à promouvoir l'amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs. Cette obligation de sécurité dont doit répondre l'employeur s'applique à toute situation de risque en matière de sécurité et de protection de la santé physique et mentale des travailleurs.

Tenu d'une obligation de sécurité, il appartient donc à l'employeur de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, notamment en justifiant, d'une part, avoir pris toutes les mesures de prévention prévues notamment par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail et, d'autre part, dès qu'il est informé de l'existence de faits susceptibles de constituer une atteinte à la sécurité ou la santé, physique et mentale d'un salarié, avoir pris les mesures immédiates propres à les faire cesser.

La responsabilité de l'employeur est engagée vis-à-vis des salariés (ou du salarié) dès lors qu'un risque pour la santé ou la sécurité des travailleurs (du travailleur) est avéré. Il n'est pas nécessaire que soit constaté une atteinte à la santé, le risque suffit.

L'obligation de sécurité de l'employeur, ou obligation pour celui-ci de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, couvre également les problèmes de stress ou mal-être au travail, plus généralement la question des risques pyscho-sociaux liées aux conditions de travail, aux relations de travail ou à l'ambiance de travail. Dans ce cadre, il appartient à l'employeur de mettre en place des modes d'organisation du travail qui ne nuisent pas à la santé physique et mentale des salariés et de réagir de façon adaptée en cas de risque avéré.

La jurisprudence qualifie l'obligation de sécurité de l'employeur d'obligation de résultat. Selon la Cour de cassation, cette obligation de sécurité est désormais de résultat non au regard du risque effectivement encouru par le salarié, ou de l'atteinte à sa santé subi par le salarié, mais de son objet (prévention et cessation du risque). Le résultat attendu de l'employeur est de prévenir, par des moyens adaptés, tout risque lié non seulement à l'exécution de la prestation de travail mais également à l'environnement professionnel dans lequel elle est délivrée. Il s'agit pour l'employeur de prévenir, de former, d'informer et de mettre en place une organisation et des moyens adaptés. Le résultat dont il est question dans la notion d'obligation de résultat n'est pas l'absence d'atteinte à la santé physique et mentale, mais l'ensemble des mesures prises de façon effective par l'employeur dont la rationalité, la pertinence et l'adéquation sont analysées et appréciées par le juge. L'employeur peut s'exonérer de sa responsabilité en démontrant avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L. 4121-1 et L.4121-2 du code du travail. Ainsi, en cas de risque avéré ou réalisé pour la santé ou la sécurité du travailleur, l'employeur engage sa responsabilité, sauf s'il démontre qu'il a pris les mesures générales de prévention nécessaires et suffisantes pour l'éviter, ce qu'il appartient aux juges du fond d'apprécier souverainement.

Au titre de son obligation de sécurité, il appartient à l'employeur de repérer les situations de tension et, le cas échéant, d'ouvrir rapidement une enquête. L'inertie de l'employeur en présence d'une situation susceptible d'être qualifiée de souffrance au travail, dont il a connaissance, alors qu'il est tenu légalement d'assurer la protection de la santé et de la sécurité des salariés et d'exécuter de bonne foi le contrat de travail, engage nécessairement sa responsabilité, quand bien même il ne serait pas l'auteur des faits dénoncés.

Le salarié peut solliciter des dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait d'un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité.

Sur la demande de résiliation judiciaire, la société SOFIDIS explique que, en près de 20 ans de relations contractuelles, Monsieur [O] n'a jamais formulé le moindre reproche aux dirigeants successifs de l'entreprise. Elle indique que Monsieur [O] a formulé sa demande de résiliation judiciaire alors qu'il était absent de 1'entreprise en raison d'un arrêt de travail pour maladie depuis plusieurs mois et qu'il a invoqué des manquements remontant donc à plusieurs mois, voire même années. Elle affirme en outre qu'aucun des reproches formulés par Monsieur [O], ne constitue un manquement grave suffisant pour justifier la résiliation judiciaire du contrat.

A titre subsidiaire, sur le licenciement pour inaptitude d'origine non professionnelle et l'impossibilité de procéder au reclassement, la société SOFIDIS indique que contrairement à ce qu'affirme Monsieur [O], elle a consulté les délégués du personnel lors d'une réunion qui s'est tenue le 16 mars 2018 et que ceux-ci ont rendu un avis favorable à son licenciement pour inaptitude d'origine non professionnelle et impossibilité de procéder à son reclassement.

Monsieur [O] soutient, au regard de l'ensemble des éléments précités, que les manquements de l'employeur étaient suffisamment graves pour justifier la rupture de la relation de travail et conclut à la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a prononcé la résiliation judiciaire aux torts exclusifs de la société SOFIDIS. Il sollicite les conséquences indemnitaires et financières de la résiliation judiciaire aux torts de l'employeur.

A titre subsidiaire, sur le licenciement, Monsieur [O] fait valoir qu'il a été déclaré inapte par le médecin du travail, et que la société SOFIDIS aurait dû consulter les délégués du personnel préalablement à son licenciement, même en cas d'impossibilité à être reclassé, ce qui n'a pas été le cas, dès lors ledit licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

- Sur la résiliation judiciaire -

En l'espèce, Monsieur [E] [O] a tout d'abord été embauché, le 14 décembre 1998, suivant contrat de qualification, par la SARL DISTRILEADER ALLIER qui exploite des supermarchés à l'enseigne LEADER PRICE.

A l'issue de son contrat de qualification, le 14 décembre 1999, il a été promu responsable de rayon, coefficient 170, en poste au magasin de [Localité 8].

Le 1er juillet 2000, il a été promu adjoint de magasin, coefficient 200, au sein du même magasin.

Le 1er avril 2002, il a été promu adjoint directeur de magasin, niveau 5, statut agent de maîtrise, par la SARL DISTRILEADER RHONE, au magasin de [Localité 7].

Le 1er juillet 2003, il a été promu directeur de magasin, niveau 7, statut cadre, par la société DISTRILEADER NORD CENTRE II, en poste au magasin d'[Localité 6].

Le 1er mars 2009, toujours directeur de magasin, niveau 7, statut cadre, employé par la SNC LEADER BRASSAC, il était en poste au magasin de [Localité 5].

Le 10 mars 2014, Monsieur [O] a été promu aux fonctions d'inspecteur, niveau 7, statut cadre, au sein de la SAS SOFIDIS.

Depuis le 1er juillet 2003 et sa promotion comme directeur de magasin, Monsieur [O] exerçait ses fonctions dans le cadre d'un forfait jour.

Le 2 septembre 2016, Monsieur [S], salarié de la société SOFIDIS en qualité de directeur régional et, à ce titre, supérieur hiérarchique de Monsieur [O], a visité un des magasins relevant du secteur géographique de ce dernier.

Selon Monsieur [O], cette visite s'est déroulée dans des conditions vexatoires à son endroit.

Le 6 septembre 2016, Monsieur [O] a été placé en arrêt de travail, arrêt prolongé jusqu'à une visite médicale de pré-reprise le 30 mai 2017.

Le 23 janvier 2017, par requête expédiée en recommandé, Monsieur [O] a saisi le conseil de prud'hommes du PUY-EN-VELAY aux fins notamment de voir prononcer l'annulation de la convention forfait jours en vigueur entre les parties et constater que la durée du travail est établie sur la durée légale soit 35 heures hebdomadaires augmentées des temps de pause conventionnels, prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail, outre obtenir diverses sommes à titre indemnitaire.

Au soutien de sa demande, Monsieur [O] fait état des manquements suivants de l'employeur:

- non-respect des dispositions en matière de forfait jours ;

- non-respect de la santé et la sécurité ;

- astreintes ;

- exécution déloyale du contrat de travail.

La cour a déjà retenu que la convention de forfait jours signée par Monsieur [E] [O] lui est inopposable en raison de l'absence de tout suivi de l'organisation et de la charge du travail du salarié, a condamné sur ce fondement la société SOFIDIS à payer à Monsieur [E] [O] la somme de 113.639,48 euros à titre de rappel de salaire, outre la somme de 11.363,94 euros au titre des congés payés afférents et a enfin confirmé le jugement déféré en ce qu'il a condamné la société SOFIDIS à payer à Monsieur [O] la somme de 25.000 euros de dommages et intérêts pour non-respect des dispositions légales sur les astreintes.

S'agissant des autres manquements évoqués par le salarié, celui-ci verse aux débats les attestations suivantes portant sur une visite de contrôle effectuée le 2 septembre 2016 par son supérieur hiérarchique, Monsieur [S], dans des conditions particulièrement vexatoires.

Monsieur [R], directeur du magasin LEADER PRICE d'ISSSOIRE, indique qu'après lui avoir fait des reproches sur les abords du magasin, en l'espèce 'trop de mauvaises herbes et les espaces verts (pelouse) pas entretenus', Monsieur [S] est entré dans le magasin et a demandé 'à Monsieur [O] de se mettre à genoux' en présence du directeur, du personnel du magasin et de la clientèle afin d'y constater des traces de saleté sous certaines gondoles. Monsieur [S] ajoutait qu'il fallait y remédier, quitte à 'frotter avec une brosse à dents jusqu'à ce que tout soit irréprochable.'

Monsieur [R] ajoute: 'j'ai trouvé cette situation très dégradante et humiliante pour Monsieur [O], vu le nombre de clients présents au magasin à ce moment-là (16h00) (...) Par la suite, Monsieur [S] a demandé à Monsieur [O] d'aller chercher sa tablette afin de consulter ces dernières fiches visites effectuées au magasin. Pour chacun des commentaires et diagnostics notés sur ces fiches, Monsieur [S] revendiquait (tout en s'exhibant devant la clientèle) que ces écrits n'étaient que des mensonges et ne reflétaient pas la situation du magasin, il remettait clairement en cause ses compétences de manager.'

Madame [V], adjointe de direction du même magasin, témoigne: 'en septembre 2016, Monsieur [O] s'est présenté au magasin LEADER PRICE d'[Localité 6] avec Monsieur [S]. Ce dernier paraissait très énervé avec Monsieur [O] et mon directeur actuel, Monsieur [R].

Je les ai même vu se coucher sous les meubles fruits et légumes afin de constater la propreté du sol. J'ai vu également Monsieur [S] se donner en spectacle les bras en l'air à réprimander Monsieur [O] devant la clientèle et le personnel du magasin.

Monsieur [O] a toujours été un directeur et manager exemplaire de part son professionnalisme et son management.'

Il s'ensuit de ce qui précède que les manquements de l'employeur, consistant en un non-respect des dispositions en matière de forfait jours, une absence de rémunération des astreintes dues ainsi qu'en un non-respect de la santé et de la sécurité du salarié rendaient impossible la poursuite du contrat de travail.

Le salarié apparaît bien fondé dans sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur, sans qu'il n'y ait lieu d'évoquer les autres moyens surabondamment soumis. Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de Monsieur [E] [O], qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse à la date du 24 avril 2018.

Au moment de la rupture du contrat de travail, Monsieur [E] [O] était âge de 43 ans, bénéficiait d'une ancienneté de 20 ans et percevait un salaire moyen de 4.843,29 euros bruts mensuels.

Au vu des éléments d'appréciation dont la cour dispose, les premiers juges ont justement évalué les circonstances de la cause ainsi que les droits et obligations des parties en condamnant la SAS SOFIDIS - LEADER PRICE à payer à Monsieur [E] [O] les sommes de 11.378,73 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 1.137,87 euros bruts à titre des congés payés afférents au préavis, ainsi que de 55.000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le jugement déféré sera confirmé sur ces dispositions.

- Sur la demande de dommages et intérêts au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail -

Sur la prétendue exécution déloyale du contrat, la société SOFIDIS affirme que Monsieur [O] ne démontre jamais qu'elle n'aurait pas exécuté le contrat de bonne foi. En effet, l'ensemble des éléments avancés par Monsieur [O] ne démontre pas une exécution déloyale du contrat, tandis que la résiliation judiciaire ne saurait être fondée sur des faits isolés, anciens de plusieurs mois, voire années avant la rupture et surtout au titre desquels Monsieur [O] n'a rien contesté lors de leur survenance. Dès lors, Monsieur [O] sera donc débouté de sa demande de dommages et intérêts car elle est aussi exorbitante que forfaitaire.

Monsieur [O] soutient ensuite que l'employeur s'est rendu coupable d'une exécution déloyale du contrat de travail, notamment en raison d'un management par la peur, d'un non-respect de l'obligation de protection de la santé et de la sécurité des salariés dans l'entreprise, par le détournement de la vidéo-surveillance sans en avoir averti les salariés, mais aussi en raison du fait qu'il a dû prendre en charge 24 magasins au lieu de 12 et a assuré les missions de formateur sans aucun dédommagement ni une quelconque modification contractuelle.

En l'espèce, le salarié a démontré les manquements de l'employeur, s'agissant d'un non-respect des dispositions en matière de forfait jours, d'une absence de rémunération des astreintes dues ainsi que du non-respect de la santé et de la sécurité du salarié rendaient impossible la poursuite du contrat de travail.

Il verse en outre l'avis médical du médecin du travail en date du 20 février 2017 suivant:

'Monsieur,

N'ayant pas réussi à vous joindre par téléphone, je vous fais ce courrier pour vous alerter sur la situation de M. [O] [E], en arrêt de travail depuis septembre 2016 que l'on a rencontré dans notre service de santé, à quatre reprises.

M. [O] me fait part d'une souffrance au travail en lien avec une surcharge de travail qu'il aurait évoquée à plusieurs reprises dans ses entretiens annuels, et à des difficultés relationnelles récentes avec son supérieur hiérarchique M. [S].

Je souhaiterai, en regard de ces doléances, avoir votre avis sur la situation particulière de M. [O].

Des mesures peuvent-elles être mises en places' Lesquelles'

De façon plus générale, je souhaiterai savoir quelles démarches sont en place, dans votre structure pour prévenir les Risques psycho sociaux 'plains de prévention en cours, espace d'écoute, formation, mode de communication... etc)' (...)'

Il ressort du certificat médical établi par le Docteur [N] le 6 février 2017 les éléments suivants:

'J'ai revu ce jour, en consultation Monsieur [O] [E] que vous avez vu en visite de reprise d'arrêt de travail après quatre mois d'arrêt de travail.

Ce patient me semble présenter un état de souffrance au travail avec une syrmptomatologie anxieuse et dépressive nécessitant un traitement psychotrope (...). En septembre 2016 il a présenté un malaise sur son lieu de travail et n'arrivait plus à manager son équipe avec ce qu'il décrit comme des 'blancs' dans ses exposés .Il se sent dévalorisé et décrédibilisé dans sa position de manager et ne voit pas comment il peut reprendre le dessus.'

Il résulte des éléments susvisés que le salarié a subi un préjudice spécifique, lié aux manquements de l'employeur.

Au vu des éléments d''appréciation dont la cour dispose, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a condamné la société SAS SOFIDIS - LEADER PRICE à payer à Monsieur [E] [O] la somme de 30.000 euros.

- Sur la demande de dommages et intérêts pour absence l'absence de mention de mise à jour de la fiche d'entreprise -

Aux termes de l'article R.4121-1 du code du travail, 'l'employeur transcrit et met à jour dans un document unique les résultats de l'évaluation des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs à laquelle il procède en application de l'article L.4121-3. Cette évaluation comporte un inventaire des risques identifiés dans chaque unité de travail de l'entreprise ou de l'établissement, y compris liés aux ambiances thermiques.'

En l'espèce, Monsieur [O] ne verse aucun élément permettant de caractériser un préjudice spécifique de ce chef qui n'aurait pas déjà été indemnisé par ailleurs, alors que la Cour de cassation a abandonné la notion de préjudice nécessaire en 2016.

Il échet dès lors de débouter Monsieur [E] [O] de sa demande de dommages et intérêts pour absence de mention de mise à jour de la fiche d'entreprise.

- Sur la demande de dommages et intérêts au titre de l'enrichissement injustifié -

La société SOFIDIS sollicite la condamnation de Monsieur [O] à lui payer la somme de 19.336 euros pour enrichissement sans cause car il aurait joui du véhicule de fonction plus de trois ans après la rupture du contrat de travail.

En l'espèce, il résulte des éléments produits aux débats que par courrier en date du 26 février 2019, le conseil de Monsieur [O] indiquait que le véhicule était à disposition pour restitution sans qu'aucune suite ne soit donnée par la société.

Ainsi, la société SOFIDIS sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts au titre de l'enrichissement injustifié du salarié.

- Sur les frais irrépétibles et les dépens -

Le jugement déféré sera confirmé en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens de première instance.

En équité, la société SOFIDIS sera condamnée à payer la somme de 1.000 euros à Monsieur [E] [O] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La société SOFIDIS sera également condamnée au paiement des dépens en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi,

- Infirme le jugement déféré en ce qu'il a dit et jugé nulle et de nul effet la convention de forfait jours signée par Monsieur [E] [O] et, statuant à nouveau, dit que la convention de forfait jours signée par Monsieur [E] [O] lui est inopposable en raison de l'absence de tout suivi de l'organisation et de la charge du travail du salarié ;

- Infirme le jugement déféré en ce qu'il a condamné la société SOFIDIS à payer à Monsieur [E] [O] la somme de 119.555 euros à titre de rappel de salaire, outre la somme de 11.955,50 euros au titre des congés payés afférents et, statuant à nouveau, la cour condamne la société SOFIDIS à payer à Monsieur [E] [O] la somme de 113.639,48 euros à titre de rappel de salaire, outre la somme de 11.363,94 euros au titre des congés payés afférents ;

- Infirme le jugement déféré en ce qu'il a condamné la société SOFIDIS à payer à Monsieur [O] la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour défaut d'information du repos compensateur et, statuant à nouveau, déboute Monsieur [E] [O] de sa demande à titre de dommages et intérêts pour défaut d'information du repos compensateur ;

- Confirme le jugement déféré en toutes ses autres dispositions soumises à la cour ;

Y ajoutant,

- Ecarte le moyen tenant à l'irrecevabilité de la demande formulée au titre de l'enrichissement injustifié par la société SOFIDIS ;

- Déboute Monsieur [E] [O] de sa demande de dommages et intérêts pour absence de mention de mise à jour de la fiche d'entreprise ;

- Déboute la société SOFIDIS de sa demande de dommages et intérêts au titre de l'enrichissement injustifié ;

- Condamne la société SOFIDIS à payer la somme de 1.000 euros à Monsieur [E] [O] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamne la société SOFIDIS au paiement des dépens en cause d'appel ;

- Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Ainsi fait et prononcé lesdits jour, mois et an.

Le Greffier, Le Président,

N. BELAROUI C. RUIN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Riom
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19/01437
Date de la décision : 27/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-27;19.01437 ?
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