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13/09/2022 | FRANCE | N°20/00281

France | France, Cour d'appel de Riom, Chambre sociale, 13 septembre 2022, 20/00281


13 SEPTEMBRE 2022



Arrêt n°

CV/SB/NS



Dossier N° RG 20/00281 - N° Portalis DBVU-V-B7E-FLXA



S.A.S. SOFAMA



/



[S] [D] ÉPOUSE [R] [H]

Arrêt rendu ce TREIZE SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX par la QUATRIEME CHAMBRE CIVILE (SOCIALE) de la Cour d'Appel de RIOM, composée lors des débats et du délibéré de :



M. Christophe RUIN, Président



Mme Claude VICARD, Conseiller



Mme Karine VALLEE, Conseiller



En présence de Mme Séverine BOUDRY greffier lors

des débats et du prononcé



ENTRE :



S.A.S. SOFAMA prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Loca...

13 SEPTEMBRE 2022

Arrêt n°

CV/SB/NS

Dossier N° RG 20/00281 - N° Portalis DBVU-V-B7E-FLXA

S.A.S. SOFAMA

/

[S] [D] ÉPOUSE [R] [H]

Arrêt rendu ce TREIZE SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX par la QUATRIEME CHAMBRE CIVILE (SOCIALE) de la Cour d'Appel de RIOM, composée lors des débats et du délibéré de :

M. Christophe RUIN, Président

Mme Claude VICARD, Conseiller

Mme Karine VALLEE, Conseiller

En présence de Mme Séverine BOUDRY greffier lors des débats et du prononcé

ENTRE :

S.A.S. SOFAMA prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par Me Nadia LEBOEUF, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND suppléant Me Jean-michel DE ROCQUIGNY de la SCP COLLET DE ROCQUIGNY CHANTELOT BRODIEZ GOURDOU & ASSOCIES, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

APPELANTE

ET :

Mme [S] [D] ÉPOUSE [R] [H]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me François FUZET, avocat au barreau de CUSSET/VICHY suppléant Me Isabelle CATCEL, avocat au barreau de CUSSET/VICHY

INTIMEE

Après avoir entendu, Mme VICARD, Conseiller en son rapport, les représentants des parties à l'audience publique du 16 Mai 2022, la Cour a mis l'affaire en délibéré, Monsieur le Président ayant indiqué aux parties que l'arrêt serait prononcé, ce jour, par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 du code de procédure civile.

FAITS ET PROCÉDURE :

Mme [S] [D], épouse [R] [H], a été engagée à compter du 24 juin 2013 en qualité d'ouvrière en maroquinerie par la SAS SOFAMA, sous contrat de travail à durée indéterminée, régi par la convention collective nationale des industries de la maroquinerie.

La salariée, souffrant d'une rhinite chronique avec hyper réactivité nasale, a été placée en arrêt de travail à compter du 10 janvier 2015.

Aux termes de deux visites médicales de reprise organisées les 05 et 22 janvier 2016, elle a été déclarée inapte à tout poste exposé à des émanations et odeurs de colles ainsi qu'à la poussière de cuir et en définitive, inapte à tout poste dans l'entreprise.

Le 14 mars 2016, Mme [R] [H] a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Le 23 janvier 2017, la CPAM a reconnu le caractère professionnel de la maladie de Mme [R] [H].

Le 15 septembre 2017, Mme [R] [H] a saisi le conseil de prud'hommes de Vichy en contestation de son licenciement et indemnisation afférente, motifs pris d'un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité ayant privé le licenciement pour inaptitude de cause réelle et sérieuse.

Par jugement de départage du 30 janvier 2020, le conseil de prud'hommes de Vichy a :

- dit n'y avoir lieu à statuer, au vu du paiement intervenu, du chef de l'indemnité spéciale de licenciement et de l'indemnité compensatrice initialement réclamées par Mme [R] [H];

- dit que le licenciement de Mme [R] [H] est sans cause réelle et sérieuse ;

- condamné la SAS SOFAMA à payer à Mme [R] [H] la somme de 9.900 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec intérêts au taux légal à compter de la demande introductive d'instance;

- ordonné, le licenciement étant intervenu sans cause réelle et sérieuse dans une entreprise comptant plus de 10 salariés et à l'encontre d'une salariée ayant plus de deux ans d'ancienneté, le remboursement à Pôle Emploi Auvergne, en application des dispositions de l'article L.1235-4 du code du travail, des indemnités de chômage qui ont pu être versées à Madame [R] [H] pour une durée de six mois ;

- condamné la SAS SOFAMA à payer à Mme [R] [H] la somme de 800 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et ce, en sus des entiers dépens.

Le 13 février 2020, la SAS SOFAMA a interjeté appel de ce jugement qui lui a été notifié le 3 février 2020.

La procédure d'appel a été clôturée le 19 avril 2022 et l'affaire appelée à l'audience de la chambre sociale du 16 mai 2022.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Aux termes de ses écritures notifiées le 12 mai 2020, la SAS SOFAMA conclut à la réformation du jugement déféré en toutes ses dispositions et demande à la cour, statuant à nouveau, de:

- juger que l'employeur n'a pas manqué à son obligation de sécurité dès lors qu'il ne pouvait avoir conscience du risque auquel était exposée la salariée et qu'en tout état de cause, des mesures de prévention existaient déjà ;

- débouter Mme [R] [H] de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse;

- débouter Mme [R] [H] de l'intégralité de ses demandes ;

- condamner Mme [R] [H] au paiement d'une somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La SAS SOFAMA soutient qu'elle ne pouvait avoir conscience des dangers auxquels étaient exposés les salariés, dans la mesure où la fiche de données de sécurité relative aux produits utilisés mentionnait, en 2014 : 'ce produit n'est pas dangereux et ne nécessite pas d'étiquetage selon les directives 67/548/CEE et 99/45/CE'. Elle estime dès lors qu'elle était en droit d'en déduire l'absence de risque.

Elle ajoute, s'agissant du document unique d'évaluation des risques, que le fait que ce document n'ait pas été régulièrement mis à jour ne saurait suffire à caractériser la conscience de l'employeur de l'exposition des salariés à des risques, qui ont été évalués au fil des rapports et réunions du CHSCT; que selon les étiquetages des produits, il n'existait pas de risque avéré ou, à tout le moins, un risque faible compte tenu des petites quantités de produits utilisés sur le lieu de travail.

Elle argue qu'en outre les prélèvements effectués étaient rassurants sur les sites observés, et que les valeurs mesurées étaient inférieures à la valeur limite d'exposition professionnelle (VLEP); qu'elle justifie par ailleurs de la fourniture de gants et de masques ainsi que de la présence de systèmes de ventilation et d'aspiration.

Elle fait valoir que Mmes [S] [R] [H] et [I] [R] sont les premières salariées à avoir déclaré de manière concomitante des allergies aux produits; que les résultats d'analyse chimique n'ont été connus qu'en 2016; qu'elle ne pouvait donc avoir conscience du danger auquel pouvait être exposée la salariée.

Aux termes de ses écritures notifiées le 4 juin 2020, Mme [R] [H] conclut à la confirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions, au débouté de la SAS SOFAMA en toutes ses demandes ainsi qu'à sa condamnation à lui payer la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et ce, en sus des entiers dépens.

La salariée souligne qu'elle manipulait des produits chimiques dangereux pour la santé et que l'employeur n'a pris aucune mesure pour éviter l'apparition de la maladie professionnelle dont elle souffre, n'a donné aucune consigne de sécurité quant à l'utilisation de ces produits, ni n'a jamais remis d'équipements de protection; que l'employeur ne pouvait ignorer le danger lié à la manipulation des produits utilisés pour la teinte et l'encollage, celui-ci ayant été alerté par les membres du CHSCT et les services de santé au travail.

Elle soutient que la SAS SOFAMA a manqué à son obligation de sécurité de résultat en créant un environnement de travail dangereux et des conditions propices au développement de la maladie professionnelle dont elle souffre.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DECISION :

1°- Sur la rupture du contrat de travail:

Et dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement pour inaptitude lorsqu'il est démontré que l'inaptitude est consécutive à un manquement préalable de l'employeur à ses obligations, notamment à son obligation de sécurité vis-à-vis du salarié, qui l'a provoquée.

Aux termes de l'article L. 4121- 1 du même code, 'l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Ces mesures comprennent :

1° Des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail;

2° Des actions d'information et de formation ;

3° La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.

L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes'.

Pour la mise en oeuvre des mesures ci- dessus prévues, il doit s'appuyer sur les principes généraux de prévention suivants, visés à l'article L. 4121-2 du code du travail :

1°- Eviter les risques ;

2°- Evaluer les risques qui ne peuvent pas être évités ;

3°- Combattre les risques à la source ;

4°- Adapter le travail à l'homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail et de production, en vue notamment de limiter le travail monotone et le travail cadencé et de réduire les effets de ceux-ci sur la santé ;

5°- Tenir compte de l'état d'évolution de la technique ;

6°- Remplacer ce qui est dangereux par ce qui n'est pas dangereux ou par ce qui est moins dangereux ;

7°- Planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l'organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l'influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral, tel qu'il est défini à l'article L. 1152-1 ;

8°- Prendre des mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle;

9°- Donner les instructions appropriées aux travailleurs.'

Il résulte de la combinaison de ces dispositions légales que l'employeur est assujetti à une obligation générale de sécurité : il lui incombe de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, notamment en justifiant, d'une part, avoir pris toutes les mesures de prévention prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail et, d'autre part, dès qu'il est informé de l'existence de faits susceptibles de constituer un atteinte à la sécurité ou la santé, physique et mentale, d'un salarié, avoir pris les mesures immédiates propres à les faire cesser.

La responsabilité de l'employeur est ainsi engagée vis-à-vis des salariés (ou du salarié) dès lors qu'un risque pour la santé ou la sécurité des travailleurs (du travailleur) est avéré. Il n'est pas nécessaire que soit constaté une atteinte à la santé, le risque suffit.

L'obligation de sécurité de l'employeur, ou obligation pour celui-ci de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, couvre également les problèmes de stress ou mal-être au travail, plus généralement la question des risques psycho-sociaux liés aux conditions de travail, aux relations de travail ou à l'ambiance de travail. Dans ce cadre, il appartient à l'employeur de mettre en place des modes d'organisation du travail qui ne nuisent pas à la santé physique et mentale des salariés et de réagir de façon adaptée en cas de risque avéré.

La jurisprudence qualifie l'obligation de sécurité de l'employeur d'obligation de résultat. Selon la Cour de cassation, cette obligation de sécurité est désormais de résultat non au regard du risque effectivement encouru par le salarié, ou de l'atteinte à sa santé subi par le salarié, mais de son objet (prévention et cessation du risque). Le résultat attendu de l'employeur est de prévenir, par des moyens adaptés, tout risque lié non seulement à l'exécution de la prestation de travail mais également à l'environnement professionnel dans lequel elle est délivrée. Il s'agit pour l'employeur de prévenir, de former, d'informer et de mettre en place une organisation et des moyens adaptés. Le résultat dont il est question dans la notion d'obligation de résultat n'est pas l'absence d'atteinte à la santé physique et mentale, mais l'ensemble des mesures prises de façon effective par l'employeur dont la rationalité, la pertinence et l'adéquation sont analysées et appréciées par le juge.

L'employeur peut s'exonérer de sa responsabilité en démontrant avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L. 4121-1 et L.4121-2 du code du travail. Ainsi, en cas de risque avéré ou réalisé pour la santé ou la sécurité du travailleur, l'employeur engage sa responsabilité, sauf s'il démontre qu'il a pris les mesures générales de prévention nécessaires et suffisantes pour l'éviter, ce qu'il appartient aux juges du fond d'apprécier souverainement.

En l'espèce, il convient tout d'abord de relever que l'origine professionnelle de l'inaptitude de Mme [R] [H] ne fait l'objet d'aucune discussion.

Le 23 janvier 2017, l'origine professionnelle des rhinites et asthme dont souffre la salariée a été reconnue au titre du tableau n° 66 par la CPAM de l'Allier et n'a pas été contestée par l'employeur.

En outre, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, celui- ci a réglé l'indemnité spéciale de licenciement et l'indemnité compensatrice réclamées par la salariée dans sa requête introductive d'instance.

Mme [R] [H] soutient en revanche que les manquements de l'employeur à son obligation de sécurité, à l'origine de son inaptitude, privent le licenciement de cause réelle et sérieuse.

Ainsi que l'ont pertinemment relevé les premiers juges, les pièces produites aux débats, et notamment le rapport 'd'analyse risque chimique' établi le 30 mars 2016 par le service de santé au travail de l'Allier, établissent que la salariée a été exposée à des risques chimiques réels, compte tenu de:

- la nocivité et dangerosité des poussières de cuir, classées cancérogènes pour l'homme (page 13 du rapport précité) et de certains produits utilisés, notamment des solvants et des colles néoprènes (pages 13- 14 du rapport);

- l'absence d'évaluation du risque chimique, la société SOFAMA ne disconvenant pas ne pas avoir régulièrement mis à jour le document unique d'évaluation des risques;

- le défaut de ventilation des locaux SOFAMA 2 où travaillait la salariée: le service de santé au travail a constaté que si l'atelier du site SOFAMA 2 a été équipé en 2012 d'une installation de climatisation/ chauffage réversible, équipée de huit extracteurs combinés à des systèmes de soufflage, le renouvellement de l'air demeurait néanmoins très limité: 'en effet, les baies de l'atelier situées en hauteur ne sont jamais ouvertes, elles procurent seulement une arrivée de lumière naturelle. Quant aux issues de secours que les personnes en charge de l'entretien avaient pour habitude d'ouvrir en fin de journée pour aérer l'espace, elles sont pratiquement condamnées depuis qu'une maison modulaire a été installée à l'extérieur de l'atelier' (page 13 du rapport);

Par ailleurs, les photographies des appareils d'aspiration et de ventilation équipant les machines de découpe et d'encollage produites aux débats ne sont pas datées et ne permettent pas de vérifier l'époque de leur installation, étant au surplus constaté que le service de santé au travail n'en fait aucunement état dans son rapport.

- l'absence de mise à disposition d'équipements de protection individuelle: la société SOFAMA ne justifie de la fourniture de masques, dotés de filtres à particules poussières qu'à compter du mois de septembre 2015, soit postérieurement à l'arrêt maladie de Mme [R] [H];

- l'absence de formation des salariés quant aux précautions à prendre sur la manipulation et le bon usage de ces produits: l'employeur ne démontre ni même n'allègue l'existence d'une quelconque formation à ce sujet.

En conclusion de son rapport du 30 mars 2016, le service de santé au travail émet les préconisations suivantes:

- 'Etudier la possibilité de substituer certains produits pouvant présenter un risque de somnolence ou de vertiges (solvants néoprènes et Keck- Chimie);

- S'assurer du contrôle et de l'entretien réguliers de l'installation de ventilation et des divers dispositifs de captage à la source;

- Veiller au bon renouvellement en air neuf de l'atelier;

- Former le personnel à la lecture des étiquetages et à l'utilisation des produits. Il doit connaître les consignes de sécurité concernant la manipulation de chaque produit et les règles d'hygiène à respecter, par exemple au sujet du stockage des masques de protection respiratoire réutilisables (rangés dans un sac étanche...);

- Assurer une mise à jour des FDS (fiches de données de sécurité) inférieure à 5 ans;

- Envisager une évaluation de certaines Valeurs Limites d'Exposition Professionnelle (VLEP) réglementaires contraignantes (...) par prélèvements individuels au cours de postes où l'exposition à ces agents chimiques intervient.'

L'employeur soutient ne pas avoir eu conscience de la dangerosité des produits et des poussières de cuir avant les cas de maladie professionnelle déclarés par Mme [R] [H] et une autre salariée.

Si dans une attestation que la juridiction prud'homale a qualifiée de curieuse, les membres du CHSCT attestent en octobre 2017 'n'avoir jamais eu aucune remontée des salariés de SOFAMA 2 sur la période de 2013 à 2015 et que compte tenu des informations disponibles à l'époque, aucune mesure de protection supplémentaire n'était à prendre', la cour relève néanmoins, à l'examen des comptes rendus de réunion du CHSCT produits aux débats que des salariés se sont plaints, avant même le recrutement de Mme [R] [H] en juin 2013, de diverses gênes (respiratoires, odeurs...) occasionnées par les produits chimiques utilisés au sein de l'entreprise:

- lors de la réunion du 02 février 2011 (pièce appelante n° 21), les membres du CHSCT ont ainsi indiqué que 'beaucoup de gens se plaignent des odeurs sur les produits utilisés en particulier le solvant B 504932 et craignent à terme pour leur santé. Les opératrices nous ont demandé de bien vouloir afficher la fiche de données de sécurité associée au produit. Pour rassurer les personnes, devons nous mettre en place des protections individuelles type masques et gants pour celles qui le souhaitent''. Eu égard à la nocivité du produit, il a été décidé de ne plus en commander et de ne pas afficher la fiche de données de sécurité sur le panneau d'affichage du CHSCT.

- lors de la réunion du CHSCT du 23 mai 2013, les salariés ont fait état d'une gêne respiratoire importante en raison de problèmes d'aération du site SOFAMA 3. Il a été répondu 'qu'il était difficile d'envisager pour l'instant un système d'évacuation approprié au local de SOFAMA 3. Même si les vapeurs de colle sont très gênantes, nous préconisons le port d'un masque'.

- lors de la réunion du 16 décembre 2014, les membres du CHSCT ont alerté la direction de la multiplication des malaises des salariés affectés au poste de coloration dans les termes suivants: 'Depuis les nouvelles colorations que SOFAMA achète chez KJ QUEEN, nous sommes sollicités trop souvent pour des soucis d'indispositions sur les postes de coloration STIF (maux de tête, remontées gastriques, yeux rouges), les produits en cause sont les colorations apogées et les sous couches.'

Au cours de cette même réunion, était également abordé le sujet de l'aération de l'atelier: 'Serait-il possible d'aérer SOFOMA 2 régulièrement' Le personnel se rend compte sur les lignes et ailleurs qu'il y a un besoin de renouveler l'air ambiant, par contre le bâtiment ne dispose pas de fenêtres, quelle mesures pouvons-nous envisager' Pouvons nous projeter, après le départ des ALGECOS de SOF2, de demander à ONET lors de la prestation, de bien vouloir en plus aérer via les issues de secours''

De tout ce qui précède, il s'évince suffisamment que le risque chimique était identifié de longue date et que l'employeur n'a pas pris les mesures de prévention qui s'imposaient (évaluation des risques encourus pour la santé et la sécurité des travailleurs, aération satisfaisante des locaux, mise à jour annuelle du DUERP...), ni envisagé d'action de formation des salariés quant aux précautions à prendre sur la manipulation des produits utilisés.

C'est donc à bon escient que les premiers juges ont considéré que l'inaptitude professionnelle de Mme [R] [H] résultait de manquements de l'employeur à son obligation de sécurité, privant son licenciement de cause réelle et sérieuse.

Le jugement querellé sera en conséquence confirmé sur ce point.

2°- Sur la demande en paiement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :

La juridiction prud'homale a condamné la société SOFAMA à payer à Mme [S] [R] [H] la somme de 9.900 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Ce chef de jugement, qui n'a fait l'objet d'aucune critique des parties tant sur son principe que sur son quantum, sera dans ces conditions purement et simplement confirmé.

3°- Sur le remboursement à Pôle Emploi des indemnités chômage:

Ce chef de jugement, qui n'a fait l'objet d'aucune critique des parties, sera là encore purement et simplement confirmé.

4°- Sur les frais irrépétibles et dépens :

Les dispositions du jugement déféré relatives aux frais irrépétibles et dépens seront confirmées.

La SAS SOFAMA, partie qui succombe au sens de l'article 696 du code de procédure civile, sera déboutée de sa demande en indemnisation de ses frais irrépétibles et condamnée à payer à Mme [S] [D], épouse [R] [H], la somme de 1.200 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code précité et ce, en sus de la charge des entiers dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant publiquement, par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions;

Y ajoutant,

Déboute la SAS SOFAMA de sa demande en indemnisation de ses frais irrépétibles;

Condamne la SAS SOFAMA à payer à Mme [S] [D], épouse [R] [H], la somme de 1.200 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile;

Condamne la SAS SOFAMA aux entiers dépens d'appel;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Ainsi fait et prononcé lesdits jour, mois et an.

Le Greffier, Le Président,

S. BOUDRY C. RUIN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Riom
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20/00281
Date de la décision : 13/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-13;20.00281 ?
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