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13/09/2022 | FRANCE | N°20/00204

France | France, Cour d'appel de Riom, Chambre sociale, 13 septembre 2022, 20/00204


13 SEPTEMBRE 2022



Arrêt n°

KV/NB/NS



Dossier N° RG 20/00204 - N° Portalis DBVU-V-B7E-FLP6



[U] [L]

/

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU PUY-DE-DOME (CPAM)

Arrêt rendu ce TREIZE SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX par la QUATRIEME CHAMBRE CIVILE (SOCIALE) de la Cour d'Appel de RIOM, composée lors du délibéré de :



M. Christophe RUIN, Président



Mme Karine VALLEE, Conseiller



Mme Frédérique DALLE, Conseiller



En présence de Mme Nadia BELAROUI, Greffier lor

s des débats et du prononcé



ENTRE :



M. [U] [L]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Comparant, assisté de Me Yannick FRANCIA de la SELAS AKILYS, avocat au barreau de LYON

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13 SEPTEMBRE 2022

Arrêt n°

KV/NB/NS

Dossier N° RG 20/00204 - N° Portalis DBVU-V-B7E-FLP6

[U] [L]

/

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU PUY-DE-DOME (CPAM)

Arrêt rendu ce TREIZE SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX par la QUATRIEME CHAMBRE CIVILE (SOCIALE) de la Cour d'Appel de RIOM, composée lors du délibéré de :

M. Christophe RUIN, Président

Mme Karine VALLEE, Conseiller

Mme Frédérique DALLE, Conseiller

En présence de Mme Nadia BELAROUI, Greffier lors des débats et du prononcé

ENTRE :

M. [U] [L]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Comparant, assisté de Me Yannick FRANCIA de la SELAS AKILYS, avocat au barreau de LYON

APPELANT

ET :

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU PUY-DE-DOME (CPAM)

[Localité 1]

Représentée par Me Marie-caroline JOUCLARD, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

INTIME

Mme VALLEE, Conseiller en son rapport après avoir entendu, à l'audience publique du 20 Juin 2022, tenue en application de l'article 945-1 du code de procédure civile, sans qu'ils ne s'y soient opposés, les représentants des parties en leurs explications, en a rendu compte à la Cour dans son délibéré après avoir informé les parties que l'arrêt serait prononcé, ce jour, par mise à disposition au greffe conformément aux dispositions de l'article 450 du code de procédure civile.

FAITS ET PROCÉDURE

A la suite d'un contrôle de facturations opéré sur la période du 1er janvier au 31 décembre 2016, la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du PUY DE DÔME a notifié le 17 novembre 2017 à M. [L], infirmier libéral depuis l'année 2010, un indu d'un montant de 87.840,95 euros se décomposant comme suit :

'- 63,25 euros au titre d'un acte non prescrit ;

- 3 euros au titre d'un domicile non prescrit ;

- 265 euros au titre d'une prescription médicale plus valable;

- 342, 35 euros au titre d'une erreur de cotation ;

- 4.246,41 euros au titre d'actes non remboursables ;

- 521,87 euros au titre du non respect de la prescription médicale;

- 12.030,90 euros au titre de prescription médicale de régularisation établie a posteriori ;

- 70.368,17 euros au titre de l'absence de prescription médicale.'

Par lettre recommandée avec avis de réception expédiée le 28 mars 2018, M. [L] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale du PUY DE DÔME d'un recours contre la décision de la commission de recours amiable de la CPAM du PUY DE DOME ayant rejeté sa contestation d'indu.

Par courrier du 4 avril 2018, le directeur de la CPAM du PUY DE DÔME a notifié à M. [L] une pénalité financière d'un montant de 30.000 euros.

Par lettre recommandée avec avis de réception expédiée le 1er juin 2018, M. [L] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale du PUY DE DÔME d'un recours contre cette décision.

La jonction de ces deux procédures a été ordonnée le 10 octobre 2019.

A compter du 1er janvier 2020, le pôle social du tribunal judiciaire de CLERMONT-FERRAND a succédé au pôle social du tribunal de grande instance de CLERMONT-FERRAND, auquel avaient été transférées sans formalités à compter du 1er janvier 2019 les affaires relevant jusqu'à cette date de la compétence du tribunal des affaires de sécurité sociale du PUY DE DÔME.

Par jugement en date du 9 janvier 2020, le pôle social du tribunal judiciaire de CLERMONT FERRAND a :

- débouté M. [L] de son recours et de l'intégralité de ses demandes ;

- condamné M. [L] à payer à la CPAM du PUY DE DÔME les sommes de :

87.840,95 euros au titre de l'indu relatif aux anomalies de facturations constatées sur la période du 1er janvier au 321 décembre 2016 ;

30.000 euros au titre de la pénalité financière ;

- condamné M. [L] aux dépens.

Par déclaration reçue au greffe de la cour le 31 janvier 2020, M. [L] a interjeté appel de ce jugement notifié à sa personne le 22 janvier 2020.

PRETENTIONS DES PARTIES

Par ses écritures visées le 20 juin 2022 et oralement soutenues à l'audience, M. [L] conclut à l'infirmation du jugement entrepris et demande à la cour, statuant à nouveau, d'annuler la décision de la commission de recours amiable de la CPAM du PUY DE DÔME et la notification de payer de la caisse, outre de condamner cette dernière à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de son recours, M. [L] invoque en premier lieu l'irrégularité de la procédure de contrôle, estimant que les agents assermentés de la caisse qui l'ont effectué ont méconnu les prescriptions de l'article L162-1-20 du code de la sécurité sociale. Il soutient que les agents de la CPAM n'ont pas respecté les droits de la défense puisque l'inobservation des dispositions de ce texte l'a privé de son droit de se faire assister par un conseil durant les opérations de contrôle. Or ce droit est consacré par une étude du Conseil d'Etat réalisée en avril 2001 et la charte du contrôle de l'activité des professionnels de santé.

L'appelant argue également du défaut de publication de l'acte par lequel le directeur de la CPAM du PUY DE DOME a délégué son pouvoir de signature de la notification d'indu pour soutenir que cette notification, qui constitue en tant qu'acte fondateur de la procédure de recouvrement une formalité substantielle, est entachée de nullité.

M. [L] conteste par ailleurs le bien fondé de l'indu relatif aux prescriptions médicales de régularisation établies a posteriori et à l'absence de prescriptions médicales au motif qu'il a privilégié l'intérêt des patients nécessitant des soins ne pouvant être différés. Il explique ainsi qu'il a effectivement continué de dispenser ses soins à ces malades au besoin médical avéré nonobstant l'absence de renouvellement de prescriptions médicales, ce en raison de l'absence de disponibilité des médecins prescripteurs qui malgré ses demandes, n'ont pas dégagé le temps nécessaire pour les établir. Rappelant qu'il est toujours intervenu sur la base d'une première prescription médicale, il ajoute que s'il avait interrompu ses soins quotidiens, les conséquences médicales pour les patients concernés auraient pu être dramatiques. Il fait valoir que sa responsabilité professionnelle aurait pu être engagée s'il s'était abstenu d'assurer la continuité de ces soins, dont la réalité et la qualité ne sont pas remises en cause, et que c'est à l'aune de cette responsabilité qu'il convient d'apprécier les conséquences de ses manquements à l'article 5 de la nomenclature générale des actes professionnels. Il relève que la caisse a choisi de ne pas faire usage de son pouvoir d'investigation en s'abstenant d'entendre les médecins prescripteurs ou ses patients, qui auraient confirmé l'utilité thérapeutique des soins prodigués et facturés. Enfin, il met en cause le respect par les agents de contrôle de la caisse du principe d'égalité de traitement entre les professionnels contrôlés.

Par ses écritures visées le 20 juin 2022 et oralement soutenues à l'audience, la CPAM du PUY DE DÔME conclut à la confirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions et demande en conséquence à la cour de débouter M. [L] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions et y ajoutant, de le condamner, outre aux entiers dépens, à lui payer la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'intimée conclut à la régularité du contrôle opéré. Elle expose que dans la mesure où M. [L] a fait l'objet d'un contrôle administratif, et non d'un contrôle effectué par son service médical, les dispositions de l'article L114-10 du code de la sécurité sociale sont seules applicables, à l'exclusion des dispositions prévoyant un formalisme particulier, qui n'ont aucun lien avec le contrôle des infirmiers libéraux. Elle fait en outre valoir que le moyen tenant au défaut de publication de la délégation consentie par le directeur de la caisse au sous directeur signataire de la notification d'indu est inopérant dès lors que les dispositions du code de la sécurité sociale ne subordonnent pas la validité de la notification d'indu à l'existence d'une délégation de pouvoir, ajoutant qu'en tout état de cause, M. [L] ne justifie pas d'un grief consécutif à l'irrégularité formelle dont il excipe.

Se fondant sur les dispositions des articles L162-1-7 et L133-4 du code de la sécurité sociale et 5 de la nomenclature générale des actes professionnels, la CPAM du PUY DE DOME expose sur le fond que les actes réalisés par un infirmier libéral ne peuvent faire l'objet d'une facturation auprès de la caisse en l'absence de prescription médicale. Or en l'espèce M. [L], invoquant à mauvais escient sa bonne foi et l'intérêt supérieur des patients, admet avoir réalisé des actes sans que les ordonnances de renouvellement afférentes aient été préalablement délivrées, ce sans pour autant justifier de la nécessité absolue dans laquelle les patients se trouvaient placés lorsqu'il leur a prodigué les soins dont la facturation est litigieuse.

MOTIFS

- Sur la régularité du contrôle :

Etant constant que le contrôle dont a fait l'objet M. [L] est de nature administrative, les articles L315-1 et R315-1 du code de la sécurité sociale relatifs au contrôle médical ne sont pas applicables.

Le contrôle qui a abouti à la notification d'indu a été réalisé par des agents assermentés de la caisse d'assurance maladie, qui ont agi sur le fondement de l'article L114-10 du même code dans sa version applicable à la cause, dont le premier alinéa prévoit que les directeurs des organismes chargés de la gestion d'un régime obligatoire de sécurité sociale confient à des agents chargés du contrôle, assermentés et agréés dans des conditions définies par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale ou par arrêté du ministre chargé de l'agriculture, le soin de procéder à toutes vérifications ou enquêtes administratives concernant l'attribution des prestations, le contrôle du respect des conditions de résidence et la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles. Des praticiens-conseils et auditeurs comptables peuvent, à ce titre, être assermentés et agréés dans des conditions définies par le même arrêté. Ces agents ont qualité pour dresser des procès-verbaux faisant foi jusqu'à preuve du contraire.

Comme l'admet l'appelant lui même, ces dispositions légales ne soumettent pas la procédure de contrôle administratif des caisses sur l'attribution des prestations à un formalisme particulier.

Pour autant, M. [L] prétend à l'application des dispositions des articles L162-1-20 et R114-18 III du code de la sécurité sociale en vertu desquelles les agents de contrôle doivent adresser un courrier au professionnel contrôlé 15 jours au moins avant le début des opérations annoncées.

L'article L162-1-20 du code de la sécurité sociale dispose que 'les agents assermentés et agréés des organismes locaux d'assurance maladie mentionnés à l'article L. 114-10 peuvent réaliser leurs vérifications et enquêtes administratives sur pièces et sur place aux fins d'obtenir communication des documents et informations mentionnés à l'article L. 114-19. A cet effet, ils doivent être reçus dans les établissements de santé ou par toute autre personne physique ou morale autorisée à délivrer les produits ou les prestations de services et d'adaptation associées inscrits sur les listes prévues aux articles L. 165-1 et L. 162-17 aux bénéficiaires mentionnés au 1° du I de l'article L. 114-17-1, sous réserve qu'ils aient avisé la personne concernée dans un délai et dans des formes définis par décret en Conseil d'Etat et, notamment, qu'ils l'aient informée de son droit de se faire assister pendant les vérifications ou l'enquête administrative du conseil de son choix.

Lorsque les vérifications ou l'enquête administrative ont pour objet des faits relevant du VII du même article L. 114-17-1, cette information préalable n'est pas requise.'

Aux termes de l'article R114-18 III du même code 'Lorsque les vérifications portent, en application de l'article L. 162-1-20, sur les médicaments, les dispositifs médicaux, les produits ou les prestations de service et d'adaptation associées inscrits sur les listes prévues aux articles L. 162-17 et L. 165-1, le directeur de l'organisme local d'assurance maladie adresse à l'établissement de santé ou à la personne physique ou morale un avis qui mentionne la date et l'heure du contrôle, l'objet des vérifications ou de l'enquête ainsi que la possibilité pour l'établissement ou la personne physique ou morale de se faire assister du conseil de son choix pendant les vérifications ou l'enquête administrative. Cet avis transmis par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception doit parvenir au moins quinze jours avant la date de la première visite.

L'envoi de cet avis ne s'applique pas aux vérifications ou à l'enquête qui ont pour objet des faits relevant du VII de l'article L. 114-17-1.'

Il ressort de l'analyse des textes ainsi invoqués par M. [L], et de ceux auxquels ils renvoient, que l'obligation de faire précéder le contrôle d'un avis mentionnant la date et l'heure du contrôle, l'objet des vérifications, ainsi que la possibilité de se faire assister durant les opérations du conseil de son choix, s'inscrit dans un cadre précis qui n'inclut pas le contrôle administratif de facturations pratiquées par un infirmier libéral.

Les textes sur lesquels M. [L] assoit sa position sont donc impuissants à entraîner l'irrégularité de la procédure de contrôle dont il a fait l'objet au titre de l'année 2016.

De même, la méconnaissance alléguée de la teneur de l'étude du conseil d'Etat et de la charte du contrôle de l'activité des professionnels de santé par l'assurance maladie, sur lesquelles il s'appuie également, ne peut constituer une cause d'irrégularité de la procédure de recouvrement de l'indu dans la mesure où ces documents sont en tout état de cause dépourvus de valeur normative et contraignante.

Ce premier moyen tenant à l'irrégularité de la procédure de contrôle suivie a donc été à juste titre rejeté par les premiers juges.

- Sur la régularité de la notification de payer :

La notification d'indu adressée en date du 17 novembre 2017 à M. [L] est signée par le sous directeur de la CPAM du PUY DE DOME.

Il résulte des articles L133-4, R133-9-1 et D253-6 du code de la sécurité sociale que l'action en recouvrement s'ouvre par l'envoi au professionnel d'une notification de payer le montant réclamé ou de produire le cas échéant leurs observations, cette notification devant émaner du directeur de l'organisme d'assurance maladie qui peut déléguer à titre permanent sa signature au directeur adjoint ou à un ou plusieurs autres agents de l'organisme.

Dès la procédure de première instance, la CPAM du PUY DE DOME a justifié de la délégation à titre permanent, ' dans le cadre des indus à réclamer aux professionnels de santé, auxiliaires médicaux, fournisseurs et établissements de soins, signer les divers courriers de notification justifiés par la procédure', de la signature de son directeur au sous-directeur, signataire de la notification de payer.

En se fondant sur des décisions de juridictions administratives, M. [L] soulève en cause d'appel le défaut de publication de l'acte portant délégation, dont il déduit l'irrégularité de la notification de payer.

Outre qu'il n'établit pas que les décisions dont il argue, qui portent sur des reversements d'honoraires infirmiers pour dépassement du seuil annuel d'efficience, soient transposables aux notifications d'indus quant à l'exigence de publication de l'acte de délégation, il importe de relever que la Cour de cassation pose le principe que les articles L133-4 et R133-9-1 n'exigent pas à peine de nullité que la lettre de notification soit signée par le directeur ou par un agent de l'organisme muni d'une délégation de pouvoir ou de signature de celui-ci. (Civ.2ème, 28 novembre 2019).

L'application de ce principe rend inopérant le moyen tiré du défaut de publication de l' acte de délégation, dont même l'inexistence ne pourrait entraîner la nullité de la notification de payer.

- Sur l'indu :

De même qu'en première instance, M. [L] ne conteste à hauteur d'appel l'indu notifié par la caisse qu'en ce qui concerne les anomalies relatives aux prescriptions médicales de régularisation établies a posteriori et à l'absence de prescriptions médicales, dont le montant correspondant cumulé représente 91% de la somme totale réclamée.

L'article L162-1-7 du code de la sécurité sociale énonce que la prise en charge ou le remboursement par l'assurance maladie de tout acte ou prestation réalisé par un professionnel de santé est, à l'exception des prestations mentionnées à l'article L165-1, subordonné à leur inscription sur une liste établie dans les conditions fixées au présent article.

L'article 5 de la nomenclature générale des actes professionnels applicable prévoit en l'occurrence que ' seuls peuvent être pris en charge ou remboursés par les caisses d'assurance maladie, sous réserve que les personnes qui les exécutent soient en règle vis à vis des dispositions législatives, réglementaires et disciplinaires concernant l'exercice de leur profession: les actes effectués personnellement par un auxiliaire médical, sous réserve qu'ils aient fait l'objet d'une prescription médicale écrite qualitative et quantitative et qu'ils soient de sa compétence.'

Le principe du remboursement des soins par les caisses d'assurance maladie est donc subordonné à la délivrance préalable d'une prescription médicale.

Selon l'article L133-4 du code de la sécurité sociale, en cas d'inobservation des règles de tarification ou de facturation des actes, prestation et produits, l'organisme de prise en charge recouvre l'indu correspondant auprès du professionnel à l'origine du non-respect de ces règles et ce, que le paiement ait été effectué à l'assuré, à un autre professionnel ou à un établissement.

Etant constaté que M. [L] ne conteste pas avoir prodigué des soins facturés à la CPAM sans prescription médicale de renouvellement, l'inobservation de la règle de facturation posée à l'article 5 de la nomenclature générale des actes professionnels est avérée.

Pour contester néanmoins l'indu fondé sur cette inobservation, M. [L] invoque l'absolue nécessité d'assurer la continuité des soins à des patients très fragilisés.

Son engagement professionnel et sa disponibilité sont confirmés par les éléments qu'il verse aux débats, desquels il ressort qu'il a pu effectivement intervenir pour soulager en urgence des patients non pris en charge par les médecins.

Reste que d'une part, il ne justifie pas, autrement que par la copie de trois messages écrits téléphoniques adressés à des médecins au cours de l'année 2019 qui n'est pas concernée par le contrôle ayant conduit à l'indu litigieux, des diligences qu'il aurait accomplies pour obtenir les prescriptions médicales nécessaires à la délivrance de ses soins infirmiers.

D'autre part, le caractère impérieux de la continuité des soins qu'il invoque pour justifier la méconnaissance de la règle de la prescription médicale préalable n'est pas démontré, si ce n'est à la marge, eu égard au volume des actes irrégulièrement facturés.

Les pratiques de facturation reprochées à M. [L] sont inscrites dans la durée et la réitération, de sorte que ce dernier ne peut valablement alléguer, pour l'ensemble des actes et des situations concernés, d'un caractère d'urgence médicale incontestable assimilable à un péril justifiant son intervention en application des dispositions des articles R4312-7 et R4323-12 du code de la santé publique qu'il invoque.

Nonobstant l'absence de contestation quant à la réalité de l'accomplissement des actes indûment facturés, et sans remettre en cause les difficultés de terrain qui compliquent voire menacent la prise en charge médicale dans certains secteurs géographiques, il ne peut qu'être constaté que c'est en violation des règles de facturation susvisées, auxquelles il restait tenu de se conformer en dépit des difficultés de prise en charge médicale et de son implication professionnelle qui ne fait pas débat, que M. [L] a effectué des actes indûment facturés à la caisse d'assurance maladie.

En outre, à l'instar de la CPAM du PUY DE DOME, la cour observe que s'il s'interroge sur les protocoles mis en oeuvre par les agents de contrôle de la CPAM et le non-respect du principe de l'égalité de traitement entre les professionnels contrôlés, M. [L] n'en tire aucune conséquence, de sorte que le reproche qu'il adresse à la CPAM du PUY DE DOME, en se prévalant au demeurant de la charte du contrôle de l'activité des professionnels de santé qui est dénuée de valeur normative, est sans incidence.

C'est dès lors à bon droit, faisant application des dispositions de l'article L133-4 du code de la sécurité sociale qui en tout état de cause ne réfèrent pas à la notion de bonne foi ni d'intérêt médical des patients, que la CPAM du PUY DE DOME a notifié à M. [L], sur le motif d'une absence de prescription médicale, un indu dont le montant de 70.368,17 euros n'est pas contesté.

En ce qui concerne en revanche l'indu de 12.030,90 euros correspondant aux prescriptions médicales de régularisation établies a posteriori, la cour considère que cette régularisation d'anomalies de facturation, en ce qu'elle révèle la nécessité des soins dispensés aux patients, justifie que la somme réclamée à ce titre soit déduite de l'indu opposé à M. [L].

Il s'ensuit qu'infirmant le jugement entrepris quant au montant de l'indu, la cour condamne ce dernier à payer à la CPAM du PUY DE DOME la somme de 78.810,05 euros (87.840,95 euros - 12.030,90 euros).

- Sur la pénalité financière :

Aux termes de l'article L114-17-1 du code de la sécurité sociale, les professionnels de santé peuvent faire l'objet d'une pénalité prononcée par le directeur de l'organisme local d'assurance maladie en cas d'inobservation des règles du présent code, du code de la santé publique, du code rural et de la pêche maritime ou du code de l'action sociale et des familles ayant abouti à une demande, une prise en charge ou un versement indu d'une prestation en nature ou en espèces par l'organisme local d'assurance maladie, sauf bonne foi de la personne concernée.

Nonobstant les difficultés évoquées par M. [L] pour obtenir le renouvellement des prescriptions auprès des médecins, celui-ci ne pouvait ignorer en tant que professionnel de santé expérimenté qu'il ne lui était pas permis de facturer des actes non prescrits par un médecin. Il lui appartenait d'être vigilant sur le respect des règles de facturation auxquelles l'exercice de son activité d'infirmier libéral était soumis. En ce sens, sa bonne foi ne peut être retenue.

Certes son intention frauduleuse n'est pas davantage établie, mais l'article L114-7-1 précité du code de la sécurité sociale ne conditionne pas le prononcé de la pénalité financière à la démonstration de l'intention frauduleuse dont le professionnel de santé à l'origine de l'inobservation des règles de facturation aurait été animé.

En conséquence, c'est par une exacte application du texte en vigueur que les premiers juges, par un jugement qui sera confirmé sur ce point, ont condamné M. [L] a réglé la somme de 30.000 euros réclamée par la caisse d'assurance maladie au titre de la pénalité financière, après avoir notamment relevé la répétition des manquements.

- Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile:

La solution du litige justifie la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a condamné M. [L] aux dépens et débouté celui-ci de sa demande au titre des frais irrépétibles.

M. [L], qui succombe pour l'essentiel en son recours au sens de l'article 696 du code de procédure civile, sera également condamné à supporter les dépens d'appel, ce qui exclut qu'il soit fait droit à la demande qu'il présente sur le fondement de l'article 700 du code de procédure, dont l'application au profit de la CPAM du PUY DE DOME sera également écartée pour des considérations d'équité.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,

- Infirme le jugement entrepris quant au montant de la condamnation en paiement prononcée au titre de l'indu notifié le 17 novembre 2017 par la caisse primaire d'assurance maladie du PUY de DOME à M. [U] [L] et, statuant à nouveau sur ce point, condamne M. [U] [L] à payer à la caisse primaire d'assurance d'assurance maladie du PUY DE DOME la somme de 78.810,05 au titre de l'indu notifié le 17 novembre 2017 pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2016 ;

- Confirme le jugement en ses autres dispositions soumises à la cour ;

Y ajoutant,

- Condamne M. [U] [L] aux dépens d'appel ;

- Rejette les demandes des parties fondées sur l'article 700 du code de procédure civile ;

- Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Ainsi fait et prononcé lesdits jour, mois et an.

Le greffier, Le Président,

N. BELAROUI C. RUIN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Riom
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20/00204
Date de la décision : 13/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-13;20.00204 ?
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