14 JUIN 2022
Arrêt n°
CHR/SB/NS
Dossier N° RG 20/00333 - N° Portalis DBVU-V-B7E-FL3L
[Z] [C]
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S.A. METABOLIC EXPLORER
Arrêt rendu ce QUATORZE JUIN DEUX MILLE VINGT DEUX par la QUATRIEME CHAMBRE CIVILE (SOCIALE) de la Cour d'Appel de RIOM, composée lors du délibéré de :
M. Christophe RUIN, Président
Mme Claude VICARD, Conseiller
Mme Karine VALLEE, Conseiller
En présence de Mme Séverine BOUDRY greffier lors des débats et du prononcé
ENTRE :
M. [Z] [C]
[Adresse 4]
[Localité 1]
Représenté par Me Chloé BARGOIN, avocat au barreau de CUSSET/VICHY
APPELANT
ET :
S.A. METABOLIC EXPLORER prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représentée par Me Julien TOURNAIRE de la SELAFA BARTHELEMY, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND suppléant Me Philippe PATAUX de la SELAS BARTHELEMY AVOCATS, avocat au barreau de PARIS - et par Me Sophie LACQUIT, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
INTIMEE
Monsieur RUIN, Président et Mme VICARD, Conseiller, après avoir entendu Mr RUIN, Président en son rapport, à l'audience publique du 11 Avril 2022, tenue par ces deux magistrats, sans qu'ils ne s'y soient opposés, les représentants des parties en leurs explications, en ont rendu compte à la Cour dans son délibéré aprés avoir informé les parties que l'arrêt serait prononcé, ce jour, par mise à disposition au
greffe,conformément aux dispositions de l'article 450 du code de procédure civile.
FAITS ET PROCÉDURE
Monsieur [Z] [C], né le 1er décembre 1982, a été embauché par la société METABOLIC EXPLORER le 1er avril 2018, suivant contrat de travail à durée indéterminée, à temps complet, en qualité d'agent de maintenance (groupe IV, niveau B de la Convention Collective de 1'industrie Pharmaceutique, applicable à l'entreprise). Ce contrat à durée indéterminée, qui a fait suite à plusieurs contrats d'intérim successifs et qui prévoyait un horaire hebdomadaire de 39 heures, a été conclu sur la base d'un salaire mensuel brut de 2 340,17 euros.
Le 18 janvier 2019, Monsieur [C] a saisi le conseil de prud'hommes de RIOM aux fins notamment de voir juger qu'il a été victime d'une situation de harcèlement moral au travail, ou d'un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité, de voir requalifier la démission en prise d'acte de la rupture du contrat de travail ayant les effets d'un licenciement nul et, subsidiairement, dépourvu de cause réelle et sérieuse, outre obtenir diverses sommes à titre indemnitaire.
L'audience devant le bureau de conciliation et d'orientation s'est tenue en date du 12 février 2019 (convocation notifiée au défendeur le 21 janvier 2019 ) et, comme suite au constat de l'absence de conciliation, l'affaire a été renvoyée devant le bureau de jugement.
Par jugement contradictoire en date du 24 janvier 2020 (audience du 4 octobre 2019), le conseil de prud'hommes de RIOM a :
- débouté Monsieur [C] de toutes ses demandes ;
- dit que chaque partie supportera la charge de ses propres dépens ;
- débouté la société MÉTABOLIC EXPLORER de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Le 19 février 2020, Monsieur [C] a interjeté appel de ce jugement qui lui a été notifié à sa personne le 24 janvier 2020.
Vu les conclusions notifiées à la cour le 12 mai 2020 par Monsieur [C],
Vu les conclusions notifiées à la cour le 10 août 2020 par la société METABOLIC EXPLORER,
Vu l'ordonnance de clôture rendue le 14 mars 2022.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Dans ses dernières écritures, Monsieur [C] conclut à l'infirmation du jugement et demande à la cour de :
- déclarer recevable et bien fondé son appel ;
- dire et juger qu'il a été victime de faits constitutifs de harcèlement moral ou, à tout le moins, d'une exécution fautive et déloyale de son contrat de travail, l'employeur ayant manqué à son obligation de sécurité de résultat ;
- requalifier sa démission en une prise d'acte de la rupture du contrat de travail ayant les effets d'un licenciement nul et, subsidiairement, dépourvu de cause réelle et sérieuse,
- condamner la société METABOLIC EXPLORER à lui verser les sommes suivantes :
* dommages et intérêts pour harcèlement moral et, subsidiairement, pour exécution déloyale du contrat de travail avec manquement à l'obligation de sécurité de résultat: 15000 euros ;
* indemnité compensatrice de préavis : 7020,51 euros ;
* congés payés afférents : 702,05 euros ;
* dommages et intérêts pour licenciement nul et, subsidiairement, sans cause réelle et sérieuse : 15.000 euros, subsidiairement 2.340,17 euros ;
- ordonner à la société METABOLIC EXPLORER la remise de documents de fin de contrat rectifiés, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du prononcé de la décision ; la Cour se réservant la faculté de liquider l'astreinte ;
- condamner la société METABOLIC EXPLORER à lui verser la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile pour les frais engagés dans le cadre de la première instance;
- condamner la société METABOLIC EXPLORER à lui verser la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile pour les frais engagés en cause d'appel;
- débouter la société METABOLIC EXPLORER de ses demandes reconventionnelles ;
- condamner la société METABOLIC EXPLORER aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Monsieur [C] estime que la démission est imputable à l'employeur. En effet il affirme que ses conditions de travail étaient telles qu'il a développé des troubles anxio-dépressifs sévères en lien direct avec cette situation qu'il a pourtant dénoncé à son employeur.
Il affirme avoir été victime de faits constitutifs d'un harcèlement moral et, à tout le moins, d'une exécution fautive et déloyale de son contrat de travail, l'employeur ayant manqué à son obligation de sécurité de résultat. Il fait valoir qu'il a subi une surcharge de travail, qu'il a subi les agissements de deux salariées de l'entreprise et que l'ambiance de travail était fortement dégradée. Il affirme verser aux débats des attestations qui confirment le harcèlement moral qu'il subissait. Il indique n'avoir reçu aucun soutien ni aucune écoute de la part de son employeur
Il soutient ensuite n'être absolument pas à l'origine d'une pétition de soutien, signée par une grande partie des salariés de l'entreprise et affirme que les allégations de l'employeur sur ce point sont mensongères. Il ajoute que les salariés lui ont apporté leur soutien de manière volontaire et éclairée. De ce fait, cette pétition n'a pas à être retirée des débats.
Il conclut, au regard de tous ces éléments, qu'il a été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral et, subsidiairement d'une exécution fautive et déloyale de son contrat de travail, son employeur ayant manqué à son obligation de sécurité de résultat en ne le protégeant pas.
Monsieur [C] sollicite la requalification de sa démission en licenciement nul ou, subsidiairement sans cause réelle et sérieuse, du fait des manquements de l'employeur et du contexte de harcèlement dont il a été victime.
Monsieur [C] sollicite les conséquences indemnitaires de son licenciement nul. Il sollicite notamment des dommages et intérêts et estime être fondé à obtenir réparation de son préjudice subi du fait de la rupture injustifiée de son contrat de travail aux torts de l'employeur. Il rappelle s'être retrouvé injustement privé d'emploi et dans une situation financière extrêmement délicate.
Monsieur [C] demande la remise des documents de fin de contrat rectifiés et la condamnation de la société METABOLIC EXPLORER au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Dans ses dernières écritures, la société METABOLIC EXPLORER conclut à la confirmation du jugement en toutes ses dispositions et demande à la cour, y ajoutant, de :
- déclarer non fondées les demandes présentées par Monsieur [C] et confirmer ainsi la démission de l'appelant ;
- débouter l'appelant de ses demandes visant à faire reconnaître au titre d'un harcèlement moral la nullité du licenciement et à titre subsidiaire un licenciement dépourvu
de cause réelle sérieuse ;
- débouter l'Appelant de sa demande au titre d'une exécution déloyale du contrat de travail avec manquement à l'obligation de sécurité;
En conséquence,
- débouter Monsieur [C] de l'intégralité de ses demandes ;
- condamner Monsieur [C] au paiement de la somme de 2.500 euros en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile;
- condamner Monsieur [C] aux entiers dépens.
La société METABOLIC EXPLORER soutient que, s'agissant de la tentative de l'appelant de rendre imputable son départ à l'employeur, Monsieur [C] a démissionné par courrier du 24 octobre 2018, sans qu'aucune réserve ne soit formulée. Elle ajoute que les agissements de harcèlement allégués par le salarié ne sont jamais prouvés par celui-ci. Elle expose ainsi que Monsieur [C] ne fait état d'aucun argument ni d'aucun fait pouvant rendre imputable à l'employeur sa démission. Elle indique que les arrêts maladie du salarié sont tous postérieurs à sa démission. Elle fait valoir en outre que le salarié n'a jamais fait état d'un quelconque harcèlement durant leur relation de travail et que les accusations proférées contre deux salariées de l'entreprise sont mensongères.
La société METABOLIC EXPLORER conclut, au regard de tous ces éléments, que jamais Monsieur [C] ne rapporte la preuve du harcèlement allégué et que sa démission a été portée sans aucune réserve. Dès lors, le salarié verra sa demande en requalification être rejetée.
La société METABOLIC EXPLORER fait ensuite valoir que, contrairement à ce que soutient Monsieur [C], le barème fixé par l'article L. 1235-3 du Code du travail est conforme au droit positif et aux engagements internationaux de la France.
La société METABOLIC EXPLORER soutient ensuite que le salarié verra ses demandes indemnitaires être rejetées, étant donné que son acte de démission ne saurait être assimilé à une prise d'acte de rupture. En effet, les éléments permettant de caractériser un harcèlement moral ne pouvant être retenus, le licenciement ne saurait être reconnu comme nul et subsidiairement comme sans cause et sérieuse.
La société METABOLIC EXPLORER indique enfin que Monsieur [C], à hauteur de jugement de première instance était en situation de disponibilité de la fonction publique hospitalière et au jour de la conciliation n'avait pas souhaité sa réintégration au sein de l'hôpital.
Pour plus ample relation des faits, de la procédure, des prétentions, moyens et arguments des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il y a lieu de se référer à la décision attaquée et aux dernières conclusions régulièrement notifiées et visées.
MOTIFS
- Sur la demande au titre d'un harcèlement moral et du manquement de l'employeur à son obligation de sécurité -
Aux termes de l'article L 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
En application de l'article L.1154-1 du même code, en cas de litige relatif à l'application de l'article L.1152-1, il appartient au salarié concerné de présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement, la partie défenderesse devant alors prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
En l'espèce, M. [C] explique qu'embauché en qualité d'agent de maintenance, ses fonctions ont considérablement évolué à compter du mois de mars 2018 et que, devenu l'interlocuteur unique des fournisseurs et le référent pour les demandes internes, il devait gérer le suivi de l'ensemble des prestataires extérieurs (prises de rendez-vous, études, devis, planification, travaux, plan de prévention, permis de feu, etc.). Il ajoute qu'il a été également formé aux fonctions de moniteur d'entreprise à la conduite d'engins pour dispenser des formations théoriques et pratiques en interne, qu'il a été chargé d'assurer la mise en conformité de bon nombre de points en rapport avec la sécurité des bâtiments, comme la mise en sécurité de la toiture terrasse, et qu'en dernier lieu, il était, en plus, en charge de la sécurité et du suivi de chantier sur des travaux de climatisation.
Pour étayer ses dires, il verse aux débats le courriel rédigé par l'employeur, le 15 janvier 2018 (au moment de son embauche dans le cadre d'un contrat de travail temporaire), pour décrire les tâches qui lui étaient alors confiées (maintenance urgente, maintenance générale, maintenance préventive) ainsi que le courriel du 7 mars 2018 par lequel l'employeur explique que M. [C] 'va reprendre la maintenance des bâtiments et de certains équipements liés aux bâtiments (groupe élec, tansfo,...) et le suivi des rendez-vous'. Il est précisé que M. [C] 'sera l'interlocuteur technique des fournisseurs et le référent pour les demandes internes de SAV' Sont citées 12 entreprises partenaires 'et tous les intervenants occasionnels pour les travaux de plomberie, serrurerie, réparations diverses, etc.'. Ce courriel ajoute que, 'concernant l'APAVE', M. [C] 'va gérer les demandes de rendez-vous et vérifier avec les plate-formes concernées l'adéquation avec leurs charges de travail/disponibilité. Il recevra ces intervenants, les accompagnera sur le site et répondra à leurs questions. Il sera secondé par les responsables de plate-formes qui ont la connaissance de leur matériel'. Enfin, M. [C] était chargé de 's'occuper aussi des demandes de travaux spécifiques qui peuvent être faites par le CE, la Direction, une plate-forme, l'assureur, ...Il demandera des devis, les comparera et fera faire les travaux
après validation par le demandeur. Il s'occupera du suivi de chantier, informera le personnel des mesures de sécurité à prendre si besoin, et informera les personnes concernées de la fin des travaux'.
Expliquant avoir été contraint de travailler depuis son domicile le week-end, il produit un échange de courriels intervenu le 24 juillet 2018 avec son employeur pour déterminer le nombre d'heures de travail effectuées le week-end précédent. Il souligne, par ailleurs, qu'il lui avait été assuré que l'intitulé de son poste serait mis en conformité avec les tâches effectivement réalisées, à savoir technicien de maintenance en lieu et place d'agent de maintenance, et qu'il n'en a rien été, se prévalant d'un échange de courriels intervenu le 7 novembre 2018, lors de son départ, dans lequel son supérieur hiérarchique (M. [H]) assure que ce changement aurait dû intervenir.
M. [C] se plaint ainsi d'avoir occupé un poste de technicien de maintenance et non de simple agent et d'avoir été soumis à un 'emploi du temps particulièrement rude, contraint de cumuler l'ensemble des missions qui lui ont été confiées et ne pouvant de ce fait se consacrer correctement à aucune d'entre elles'. Il estime que, compte tenu de la surcharge de travail qui lui était imposée, il lui était devenu impossible d'assurer seul l'ensemble de ses missions dans de bonnes conditions de sécurité.
Le salarié fait valoir qu'il a sollicité, à diverses reprises, que des personnes du service Administration soient désignées pour l'assister et le suppléer dans l'accomplissement de ses missions, que l'assistance de Mme [L] et Mme [T] a, en effet, été définie en réunion mais que, dans les dernières semaines de sa collaboration, il a subi les agissements de ces deux salariées dans une 'ambiance de travail fortement dégradée'. Il explique avoir signalé à de nombreuses reprises à M. [H] qu'il ne pouvait plus assurer ses missions dans de bonnes conditions, mettant en jeu sa sécurité, celle des personnes et de la société. Il cite, à titre d'illustration, le jour où il devait, en même temps, gérer un suivi de chantier et réceptionner les colis des différentes plate-formes de la société en précisant que, dans ces cas, il était convenu que Mme [T] ou Mme [L] récupère son téléphone et assure la réception des colis. Or, il soutient que ces personnes ont refusé de se soumettre à ces directives et que, malgré les signalements effectués, les choses n'ont fait que se dégrader. Il ajoute que, dans les dernières semaines, il a été confronté à une 'attitude encore plus problématique' des deux salariées 'qui n'ont eu de cesse de le mettre à faux dans son travail'.
A l'appui de ses dires, il produit l'attestation de M. [N], technicien de maintenance au sein de l'entreprise, qui rapporte:
'Tout au long des dernières semaines de travail de [Z] précédant le jour de sa démission, j'ai constaté une dégradation de son état psychologique et physique. En effet, le côtoyant tous les jours, [Z] était stressé et angoissé à cause de la détérioration de ses conditions de travail.
Au sein de la société, [Z] était sollicité par l'ensemble
des plateformes, car il s'occupait en plus de ses missions quotidiennes d'un suivi de chantier concernant la climatisation.
[Z] me disait régulièrement qu'il rencontrait de nombreuses problématiques dans la réalisation de ses missions.
J'ai en effet constaté qu'il rencontrait des difficultés avec Mme [L] et Mme [T], car ces deux personnes ne faisaient rien pour l'aider alors censées prendre le relais, au moins des réceptions de colis et de son téléphone les matins quand [Z] devait gérer d'autres tâches (dépannage, chantier, prestataires extérieurs'). J'ai pu assister à de nombreuses reprises au fait que [Z] devait être souvent partout à la fois pour réussir à satisfaire tout le monde. Il courait même entre deux réceptions de colis.
J'ai constaté que ça pouvait être dangereux et risqué pour lui et pour l'entreprise car les tâches qu'il devait gérer demandaient une certaine concentration afin de ne pas commettre d'erreurs et de ce fait, ne pas être dérangé tout le temps. Exemple, pour le suivi de chantier ou quand des entreprises viennent faire des travaux ou des contrôles.
J'ai pu assister lors de nos réunions de maintenance que nous faisions tous les 15 jours avec notre supérieur hiérarchique, M. [P] [H], que [Z] remontait et expliquait très souvent les problèmes qu'il rencontrait à la fois à cause de sa charge de travail mais aussi à cause du comportement de Mme [L] et de Mme [T].
A chaque fois, M. [H] pouvait lui répondre qu'il en avait conscience et qu'il allait essayer d'améliorer ses conditions de travail, et qu'à diverses reprises il en avait discuté avec Mme [U] [B] (supérieur hiérarchique de Mme [L]), mais qu'il avait l'impression que ça ne bougeait pas pour autant et qu'il se confrontait à un mur.
Au fur et à mesure des semaines, j'ai même constaté que la situation empirait car le comportement qu'avait Mme [L] et Mme [T] à l'égard de [Z] était malsain du fait qu'elles essayaient de le mettre en porte à faux dans son travail.
[Z] était attristé par cette situation car il me disait que malgré tout l'investissement qu'il pouvait mettre dans son travail depuis qu'il était arrivé au mois de janvier 2018, et que j'ai constaté, il ne pouvait plus supporter de travailler dans des conditions de travail comme cela, et malgré toutes les discussions qu'il a pu avoir avec M. [H] et auxquelles j'ai pu assister à de nombreuses reprises, rien ne changeait'.
S'agissant de ses relations avec Mmes [T] et [L], le salarié verse aux débats un courriel du 23 octobre 2018 par lequel Mme [T] indique qu'une société devant intervenir au sein de l'entreprise n'avait pas reçu l'appel attendu de M. [C], ce que ce dernier explique être mensonger. Il produit également plusieurs courriels adressés à M. [H] au cours du mois d'octobre 2018 dans lesquels il se plaint de sa surcharge de travail et de l'attitude de Mmes [T] et [L]. Notamment, dans le courriel du 18 octobre 2018 par lequel il annonce sa démission, il explique :
'Par rapport à ce matin, je me suis démerdé seul pour la thermographie, la réception et le remplacement des bouteilles d'azote, la vérif du chantier et la réception des colis. Un moment donné on va arrêter les conneries, quand t'as [R] ([L]) qui fait en permanence la gueule
et qui te prend pour un con et [V] ([T]) qui est très gentille mais qui trouve toujours des solutions pour ne pas prendre le téléphone c'est plus possible.
On en a déjà discuté ensemble, avec [M] également et aussi pas mal de responsable de plate-formes, on est tous d'accord sur les mêmes points mais bon pour certaine personne c'est de la gaminerie ou des chamaillerie et rien ne change'.
Il est à noter que, dans le cadre de ces échanges de courriels, M. [H] qui assure M. [C] de sa compassion, ne remet aucunement en cause la réalité de la situation faite au salarié ni quant à la surcharge de travail, ni quant à l'absence d'assistance dont il se plaint. En particulier, le 2 novembre 2018, M. [H] fait état de 'l'attitude dédaigneuse' de Mme [L] à son égard et invoque, à titre d'exemple, le cas d'un bon de livraison qui a donné lieu à un précédent échange de courriels.
M. [C] se prévaut de la pétition signée 'par la quasi-totalité des employés de la société' et plus précisément 'par l'ensemble des techniciens, les responsables de plate-forme et autres personnels encadrants, le responsable de l'informatique, le comptable, le contrôleur de gestion et enfin le responsable de l'industrialisation qui fait partie de la direction de l'entreprise'. Cette pétition, qui comporte 46 signatures, vise 'à soutenir [Z] en regrettant son départ'. Même si 6 signataires de cette pétition, membres de la Délégation Unique du Personnel, ont déclaré s'en désolidariser, ainsi qu'en justifie l'employeur, en se plaignant de ne pas avoir été informé que Mme [T] et Mme [L] étaient visées par des accusations de harcèlement moral, il n'en reste pas moins qu'elle reste signée par une quarantaine de salariés et qu'elle constitue un élément de preuve soumis à la juridiction sans que le retrait de six signatures puisse justifier qu'elle soit écartée des débats, comme le demande l'employeur. Il appartient seulement à la juridiction, dans le cadre du débat au fond, d'apprécier la valeur probante d'une telle pièce.
M. [C] souligne que la situation qui lui a été faite a eu un impact sur son état de santé et qu'il a été victime d'un syndrome anxio dépressif réactionnel profond. Il produit le certificat médical de son médecin traitant en date du 22 novembre 2018 et l'avis d'arrêt de travail du 5 novembre 2018 qui font mention de ce diagnostic, ainsi que le certificat d'un médecin psychiatre daté du 17 décembre 2018 faisant état de troubles du sommeil et de troubles dépressifs en voie de constitution. Il justifie, par les ordonnances médicales, des traitements qui lui ont été prescrits.
Ces éléments d'appréciation, concordants entre eux et avec les plaintes de M. [C] ainsi qu'avec les documents médicaux produits, sont de nature à faire apparaître une dégradation des conditions de travail du salarié susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale et laissant ainsi supposer l'existence d'un harcèlement moral.
Il incombe, dès lors à l'employeur, conformément aux dispositions de l'article L 1154-1 du code du travail, de prouver que ces
agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que les décisions prises à l'égard de M. [C] sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Face aux éléments présentés par le salarié, l'employeur souligne que M. [C] a démissionné sans faire état d'un harcèlement moral, qu'il ne l'a fait que dans un second temps et que ses arrêts de travail pour syndrome dépressif sont postérieurs à la démission. Il soutient que le salarié a démissionné parce qu'il n'était pas satisfait par son poste et il fait valoir qu'à aucun moment, pendant la relation de travail, il n'a fait état d'un harcèlement moral ni à l'encontre de l'employeur, ni à l'encontre de Mmes [L] et [T].
Il dénonce le fait que M. [C] aurait sollicité, par l'intermédiaire de M. [N], une pétition de l'ensemble du personnel sans préciser qu'il envisageait de mettre en cause l'entreprise et deux salariées pour harcèlement moral. Il verse aux débats l'attestation signée par les 6 membres de la Délégation Unique du Personnel disant regretter 'd'avoir été abusés' dans le cadre de cette pétition, présentée en soutien du travail de M. [C] alors que sont gravement mises en cause Mmes [L] et [T] pour un harcèlement moral qu'ils n'ont pas constaté.
Mme [T] atteste pour affirmer avoir toujours été respectueuse de M. [C] et 'avoir toujours été dans une relation normale de travail' avec lui. Elle soutient qu'à aucun moment, il n'a 'été remonté des difficultés relationnelles qu'il pouvait rencontrer' à son égard, ni de sa part, ni de ses collègues de travail. Mme [L] reconnaît que son temps de travail était dédié, pour moitié, à la maintenance et qu'elle devait pallier 'exceptionnellement' les absences de M. [C]. Elle rapporte que M. [C] s'est plaint de ne pas avoir récupéré tous les dossiers maintenance, notamment le dossier climatisation géré par Mme [T] et qu'il en voulait à cette dernière. Selon elle, 'à cause de ça, il s'est montré à de nombreuses reprises, dénigrant et insultant par rapport à cette personne, la traitant de 'bête et incompétente'. Elle se dit 'abasourdie' d'être mise en cause, avançant avoir eu avec M. [C] des 'rapports courtois'.
Mme [B], qui se présente comme 'manager en 2018", explique que 'des questions organisationnelles relatives à la priorisation des tâches prises en charge par [R] [L] en cas d'absence de [Z] [C] (congés, maladie, formation) ont été soulevées par [Z] [C] et avaient donné lieu à des réunions avec son manager. Il avait été mentionné très clairement qu'[R] assurait le service en son absence sur la base d'une gestion des urgences en fonction de son emploi du temps'. Elle dit n'avoir 'jamais relevé la moindre difficulté s'apparentant à du harcèlement'.
M. [H] dit ne pas avoir 'assisté ni constaté de faits qui seraient qualifiables de harcèlement'. Il admet que 'leurs humeurs ont pu ne pas être toujours en phase mais un dédain passager de la part de Mme [L] ne (lui) a pas été rapporté comme une attitude de harcèlement par M. [C]'.
S'agissant des prétentions du salarié quant à une surcharge de travail, l'employeur fait valoir que celui-ci n'a à aucun moment évoqué un dépassement de la durée hebdomadaire de 39 heures.
Cependant, le rapprochement entre le courriel décrivant les tâches initialement confiées au salarié et le courriel portant adjonction de tâches nouvelles est de nature, à tout le moins, à confirmer les dires de M. [C] selon lequel, compte tenu de l'étendue de ses missions, il existait une difficulté pour assurer les tâches confiées notamment lorsqu'il était sollicité en même temps pour exécuter des travaux différents. La réalité de la situation dénoncée par M. [C] est confirmée par le fait que M. [H] n'a jamais contesté, dans le cadre des échanges de courriels versés aux débats, la situation décrite par le salarié et par le fait que l'employeur a estimé nécessaire l'assistance de deux salariées, la désignation de Mme [L] et de Mme [T] pour l'assister n'étant pas contestée.
Il est vrai qu'il existe une divergence certaine entre les parties au sujet de l'étendue de l'aide octroyée au salarié et que, selon Mme [B], cette aide (en tous cas en ce qui concerne Mme [L]) ne visait qu'à assurer les tâches de M. [C] en cas d'absence de celui-ci pour gérer les urgences mais rien ne permet de vérifier cette affirmation, ni le fait que M. [C] aurait été en mesure d'assurer ses tâches avec cette seule aide limitée alors que, selon M. [N], dont le témoignage n'est pas moins recevable, M. [C] 'était sollicité par l'ensemble des plate formes, car il s'occupait en plus de ses missions quotidiennes d'un suivi de chantier concernant la climatisation', précisant 'qu'il rencontrait des difficultés avec Mme [L] et Mme [T], car ces deux personnes ne faisaient rien pour l'aider alors (qu'elles étaient) censées prendre le relais, au moins des réceptions de colis et de son téléphone les matins quand [Z] devait gérer d'autres tâches'.
L'employeur ne saurait soutenir que M. [C] aurait quitté l'entreprise parce qu'il ne se sentait pas en adéquation avec le poste confié en se prévalant d'une déclaration faite par l'intéressé dans un courriel où il affirme qu'il ne souhaitait pas un poste dédié à 100% à la maintenance. La lecture complète de ce courriel révèle, en effet, que, s'il a évoqué ce souhait, il a surtout fait état de l'impossibilité de continuer à travailler ensemble compte tenu des difficultés rencontrées en précisant : 'Je souhaitais simplement faire mon travail avec des personnes partageant le même état d'esprit que le mien, c'est-à-dire confiance, entraide, esprit d'équipe'.
Alors qu'il n'est fourni aucune précision sur l'étendue de l'aide octroyée laquelle aurait été définie à l'occasion de réunions, l'ensemble des éléments versés aux débats fait, à tout le moins, ressortir que M. [C] se trouvait placé dans une situation ne lui permettant pas d'assurer correctement ses tâches, qu'il s'est vu confier un ensemble de missions rendant nécessaire qu'une aide lui soit apportée et que, si une aide lui a été effectivement accordée, les deux salariées désignées n'ont pas permis d'alléger sa charge de travail, ce qui a généré une relation conflictuelle avec les deux intéressées et a contribué à aggraver les conditions de travail de M. [C].
Néanmoins, s'il apparaît que la gestion de l'employeur est en cause, les éléments versés aux débats ne font pas ressortir l'existence de pressions exercées sur le salarié, de directives qui lui auraient été adressées ou de tout autre comportement excédant les limites des pouvoirs d'un employeur ou d'un supérieur hiérarchique (remarques inadaptées, ton déplacé, etc.) qui pourraient constituer un harcèlement moral. Au contraire, le supérieur hiérarchique de M. [C] semble avoir été plutôt à l'écoute de son subordonné même si les signalements du salarié n'ont donné lieu à aucune modification. De même, l'attitude des deux salariées mises en cause, telle qu'elle est décrite par M. [C], peut se caractériser par une certaine inertie ou une mauvaise volonté ou, ainsi que semble l'avoir jugé M. [C] dans certains courriels, par une certaine insuffisance pour accomplir les tâches requises, mais elle ne révèle pas, en l'absence de tout autre élément, la mise en oeuvre d'agissements pouvant être constitutifs d'un harcèlement moral.
En revanche, M. [C] se plaint à bon droit de ce que l'employeur n'a pas respecté son obligation de sécurité à son égard.
En effet, en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers celui-ci d'une obligation de sécurité, notamment en ce qui concerne les risques psycho-sociaux.
L'article L. 4121-1 du code du travail oblige l'employeur à prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs (actions de prévention, d'information et de formation, mise en place d'une organisation et de moyens adaptés).
En application de l'article L. 4121-2 du même code, l'employeur doit mettre en oeuvre les mesures prévues à l'article L. 4121-1 sur le fondement de principes généraux de prévention précisément énumérés (éviter les risques, évaluer les risques qui ne peuvent pas être évités, adapter le travail à l'homme, planifier la prévention, donner les instructions appropriées aux travailleurs, etc).
En application de l'article L. 4121-3, il doit évaluer les risques pour la santé et la sécurité des salariés, mettre en oeuvre des actions de prévention et des méthodes de travail pour prévenir ces risques.
Or, en l'espèce, s'il apparaît que l'employeur n'a pas nié les difficultés de M. [C] et qu'il a désigné deux salariées pour l'assister, il ne justifie pas avoir pris les mesures nécessaires pour que cette assistance soit effective et permette d'éviter la dégradation des conditions de travail de l'intéressé. Il résulte des pièces produites que, malgré les doléances successives de M. [C] et ses alertes, pourtant entendues par son supérieur hiérarchique, aucune mesure n'a été prise pour remédier aux dysfonctionnements signalés et mettre un terme à la dégradation de ses conditions de travail.
En l'état des éléments d'appréciation versés aux débats, l'employeur ne justifie pas avoir pris toutes les mesures prévues par les
dispositions légales et réglementaires susvisées pour satisfaire à ses obligations en matière de prévention des risques pour la santé et la sécurité des salariés.
M. [C] est, en conséquence, bien fondé à soutenir que l'employeur a manqué à ses obligations sur ce point et que ce manquement est à l'origine de la dégradation de ses conditions de travail ainsi que de sa santé comme en atteste les documents médicaux produits.
Le jugement sera, en conséquence, confirmé en ce qu'il n'a pas retenu l'existence d'un harcèlement moral mais infirmé en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande au titre du manquement de l'employeur à son obligation de sécurité.
Compte tenu des pièces justificatives versées aux débats et notamment des documents médicaux, il sera alloué à M. [C] la somme de 3.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi.
- Sur la rupture du contrat de travail -
En droit, la démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail.
Lorsque le salarié remet en cause sa démission en raison de faits ou manquements imputables à son employeur, cette démission, s'il résulte des circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle elle a été donnée celle-ci était équivoque, doit s'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, ou, dans le cas contraire, d'une démission.
Une démission doit donc être considérée comme une prise d'acte de rupture s'il résulte des circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle elle a été donnée celle-ci était équivoque.
En l'espèce, par lettre du 24 octobre 2018, mentionnant en objet qu'il s'agit d'une 'démission', M. [C] a informé l'employeur de sa 'décision de quitter le poste d'agent de maintenance' qu'il occupe dans l'entreprise. Il est vrai que cette lettre ne fait état d'aucune réserve et ne formule aucun grief à l'encontre de l'employeur mais le salarié a adressé à l'employeur une seconde lettre, le 6 novembre 2018, portant, en objet, la mention 'requalification de ma démission', dans lequel il explique : 'compte des circonstances de mon départ, j'estime que la rupture de mon contrat de travail vous est imputable'.
Or, ce courrier fait expressément référence aux circonstances du départ du salarié de l'entreprise alors que, ainsi qu'il ne ressort des éléments versés aux débats, il existait, à l'époque de la rupture du contrat de travail, un grave différend avec l'employeur. Dès lors, compte tenu que ce courrier a été adressé quelques jours seulement après la lettre portant
démission, la démission ainsi donnée est entachée d'équivoque et doit être considérée comme une prise d'acte de la rupture du contrat de travail.
Pour que la prise d'acte produise les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, les faits invoqués par le salarié doivent non seulement être établis mais constituer des manquements suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail et caractériser une rupture aux torts de l'employeur.
En l'espèce, le manquement de l'employeur à son obligation de sécurité, qui a été à l'origine de la dégradation des conditions de travail de M. [C] et de la dégradation de son état de santé présente un caractère de gravité tel qu'il justifie la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur, une telle rupture devant produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Le jugement sera infirmé en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande à ce titre.
Compte tenu du montant du salaire mensuel de M. [C] (2.340,17 euros brut) et en l'absence de contestation sur le montant sollicité, le salarié est bien fondé à solliciter une indemnité compensatrice de préavis de 7.020,51 euros brut (3 mois de salaire) avec l'indemnité compensatrice de congés payés correspondante.
S'agissant de la demande de dommages-intérêts, pour les licenciements sans cause réelle et sérieuse notifiés à compter du 24 septembre 2017, l'article L. 1235-3 du code du travail prévoit que si l'une ou l'autre des parties refuse la réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux fixés dans un tableau différent selon que l'entreprise emploie habituellement plus de dix ou moins de onze salariés (barème Macron).
Le nouvel article L. 1235-3 du code du travail définit des montants minimaux et maximaux d'indemnité de licenciement calculés en mois de salaire, en fonction de l'ancienneté et du nombre de salariés dans l'entreprise. Ainsi, dans les entreprises de 11 salariés ou plus, l'article L. 1235-3 prévoit que l'indemnité de licenciement varie de 1 à 20 mois de salaire brut suivant l'ancienneté dans l'entreprise, en fixant des montants minimaux et maximaux.
M. [C], né en 1982, a vu son contrat de travail rompu après 7 mois d'ancienneté au service d'une entreprise employant au moins 11 salariés, à l'âge de 35 ans. Il percevait un salaire de 2.340,17 euros brut.
En application de l'article L. 1235-3 du code du travail et au regard de son ancienneté, M. [C] peut prétendre à une indemnité d'un montant maximal égal à 1 mois de salaire mensuel brut, soit 2.340,17 euros.
M. [C] soutient que la réparation de l'intégralité de
son préjudice économique et moral justifierait une indemnisation à hauteur de 15.000 euros.
Cependant, alors que le barème prévu par l'article L. 1235-3 du code du travail a fait l'objet de recours devant le Conseil Constitutionnel, le Conseil d'État et la Cour de cassation et qu'il a été déclaré conforme aux textes européens et internationaux, rien ne permet de vérifier qu'en l'espèce, il ne permettrait pas une réparation adéquate et intégrale du préjudice de M. [C].
Celui-ci explique qu'il s'est retrouvé dans une situation financière délicate et qu'il n'a retrouvé un emploi stable qu'au mois de janvier 2020. Il ajoute qu'il a été très affecté par les conditions dans lesquelles la rupture est intervenue. Il justifie, outre de l'arrêt de travail dont il a fait l'objet, d'un contrat de travail à durée déterminée de 1 mois du 14 janvier 2019 au 14 février 2019 et d'un contrat à durée indéterminée obtenu le 2 janvier 2020.
Compte tenu des éléments versés aux débats, la cour ne dispose, s'agissant de la situation particulière de ce salarié, dont le contrat de travail a été rompu aux torts de l'employeur, que des critères d'appréciation habituels que constituent le montant de son salaire mensuel brut, son ancienneté et son âge au jour de la rupture.
Or, il ne ressort pas de ces éléments que l'application du barème prévu par l'article L. 1235-3 du code du travail porterait une atteinte disproportionnée aux droits de M. [C], notamment à son droit d'obtenir une réparation adéquate, appropriée ou intégrale du préjudice par lui subi du fait de la perte injustifiée de son emploi.
En conséquence, il sera alloué au salarié la somme de 2.340,17 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi.
- Sur la demande de documents -
L'employeur devra remettre au salarié un bulletin de salaire récapitulatif, un certificat de travail et une attestation destinée au POLE EMPLOI conformes au présent arrêt.
Cette remise devra intervenir dans le délai de quinze jours suivant le présent arrêt, sous peine d'une astreinte de 50 euros par jour de retard et pendant 60 jours et ce, sans qu'il y ait lieu que la cour se réserve la liquidation de cette astreinte.
- Sur les dépens et frais irrépétibles -
La SA METABOLIC EXPLORER devra supporter les entiers dépens de première instance et d'appel ce qui exclut qu'elle puisse prétendre bénéficier des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Il serait par contre inéquitable de laisser M. [C] supporter l'intégralité des frais qu'il a dû exposer pour faire assurer la défense de ses intérêts à la fois devant le premier juge et devant la cour. Ainsi, une indemnité de 2.000 euros lui sera accordée en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,
- Confirme le jugement en ce que Monsieur [Z] [C] a été débouté de ses demandes au titre du harcèlement moral;
- Infirme le jugement pour le surplus et, statuant à nouveau :
- Dit que Monsieur [Z] [C] a été victime d'une exécution fautive de son contrat de travail du fait de l'employeur par suite du manquement de la société METABOLIC EXPLORER à son obligation de sécurité,
- Condamne la société METABOLIC EXPLORER à payer à Monsieur [Z] [C] la somme de 3.000 euros à titre de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité,
- Dit que la démission donnée par Monsieur [Z] [C] le 24 octobre 2018 s'analyse en une prise d'acte de la rupture du contrat de travail et qu'elle produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- Condamne la société METABOLIC EXPLORER à payer à Monsieur [Z] [C] les sommes suivantes :
* 7.020,51 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 702,05 euros brut au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés correspondante,
* 2.340,17 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- Condamne la société METABOLIC EXPLORER aux entiers dépens de première instance ;
- Y ajoutant,
- Dit que la société METABOLIC EXPLORER doit remettre à Monsieur [Z] [C] un bulletin de salaire récapitulatif, un certificat de travail et une attestation destinée au POLE EMPLOI conformes au présent arrêt et ce, dans le délai de quinze jours suivant le présent arrêt, sous peine d'une astreinte de 50 euros par jour de retard et pendant 60 jours;
- Condamne la société METABOLIC EXPLORER à payer à Monsieur [Z] [C] la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;
- Condamne la société METABOLIC EXPLORER aux dépens d'appel ;
- Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
Ainsi fait et prononcé lesdits jour, mois et an.
Le Greffier, Le Président,
S. BOUDRY C. RUIN