14 JUIN 2022
Arrêt n°
KV/NB/NS
Dossier N° RG 19/02050 - N° Portalis DBVU-V-B7D-FJZQ
[S] [E]
/
Organisme URSSAF SÉCURITÉ SOCIALE DES INDÉPENDANTS
Arrêt rendu ce QUATORZE JUIN DEUX MILLE VINGT DEUX par la QUATRIEME CHAMBRE CIVILE (SOCIALE) de la Cour d'Appel de RIOM, composée lors du délibéré de :
M. Christophe RUIN, Président
Mme Karine VALLEE, Conseiller
Mme Frédérique DALLE, Conseiller
En présence de Mme Nadia BELAROUI, Greffier lors des débats et du prononcé
ENTRE :
Mme [S] [E]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Me Coralie AMELA-PELLOQUIN, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND, avocat constitué, substitué par Me Pierre LADOUCEUR-BONNEFEMME de la SELARL LADOUCEUR BROWN et ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant
APPELANT
ET :
Organisme URSSAF SÉCURITÉ SOCIALE DES INDÉPENDANTS
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représenté par Me JOUVE, avocat suppléant Me Fabienne SERTILLANGE de la SCP TREINS-POULET-VIAN ET ASSOCIÉS, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
INTIME
Mme VALLEE, Conseiller en son rapport, après avoir entendu, à l'audience publique du 09 Mai 2022, tenue en application de l'article 945-1 du code de procédure civile, sans qu'ils ne s'y soient opposés, les représentants des parties en leurs explications, en a rendu compte à la Cour dans son délibéré après avoir informé les parties que l'arrêt serait prononcé, ce jour, par mise à disposition au greffe conformément aux dispositions de l'article 450 du code de procédure civile.
FAITS ET PROCÉDURE
Mme [E] a été affiliée le 15 septembre 2014 au régime social des indépendants ( RSI) en qualité d'associée unique de la société [5].
Par déclaration reçue au greffe le 7 novembre 2017, elle a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale du PUY DE DOME d'une opposition à l'exécution d'une contrainte d'un montant de 6.767 euros délivrée le 19 septembre 2017 et signifiée le 31 octobre 2017à la requête de la caisse RSI et de l'URSSAF en vue du recouvrement des cotisations et majorations de retard afférentes dues au titre des 3ème et 4ème trimestres 2016.
Par lettre recommandée avec avis de réception expédiée le 9 janvier 2018, Mme [E] a, devant le même tribunal, formé opposition à l'exécution d'une contrainte d'un montant de 3.687 euros délivrée le 11 décembre 2017 et signifiée le 26 décembre 2017 à la requête de la caisse RSI et de l'URSSAF en vue du recouvrement de la régularisation et des majorations de retard afférentes à l'année 2016 et du recouvrement des cotisations et des majorations de retard afférentes aux 1er et 2ème trimestres 2017.
Par jugement en date du 12 septembre 2019, le pôle social du tribunal de grande instance de CLERMONT FERRAND, auquel a été transféré sans formalités à compter du 1er janvier 2019 les affaires relevant jusqu'à cette date de la compétence d'attribution du tribunal des affaires de sécurité sociale du PUY DE DOME, a :
- ordonné la jonction du recours enregistré sous le numéro RG 18/0023 au recours enregistré sous le numéro RG 17/0695 ;
- débouté Mme [E] de ses oppositions ;
- validé la contrainte signifiée le 31 octobre 2017 à hauteur de la somme de 4.368 euros;
- validé la contrainte signifiée le 26 décembre 2017 à hauteur de la somme de 3.671 euros;
- condamné Mme [E] au paiement du coût des actes de signification, soit la somme totale de 144,64 euros ;
- débouté l'URSSAF - Agence pour la sécurité sociale des indépendants du surplus de ses demandes ;
- condamné Mme [E] aux dépens.
Par déclaration reçue au greffe de la cour le 21 octobre 2019 , Mme [E] a interjeté appel de ce jugement notifié à sa personne le 20 septembre 2019 .
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Par ses écritures n°2 notifiées le 7 mai 2020, oralement soutenues à l'audience, Mme [E] demande à la cour de:
- la déclarer bien fondée et recevable en ses demandes ;
- infirmer le jugement du tribunal de grande instance de CLERMONT FERRAND du 12 septembre 2019 en ce qu'il l' a déboutée de ses oppositions à contrainte, validé la contrainte du 31 octobre 2017 pour un montant 4.368 euros et celle du 26 décembre 2017 pour un montant de 3.671 euros ;
Par voie de conséquence,
- prononcer l'annulation de la contrainte signifiée le 31 octobre 2017 pour un montant de 4.368 euros hors majorations et frais de procédure ;
- prononcer l'annulation de la contrainte signifiée le 26 décembre 2017 pour un montant de 3.671 euros ;
En toute hypothèse,
- confirmer le jugement pour le surplus et notamment celles relatives à l'application de l'article R 133-6 du code de la sécurité ;
- condamner la CAISSE RSI ILE DE FRANCE aux entiers dépens ainsi qu'au paiement de la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ses dernières écritures notifiées le 26 avril 2022, oralement soutenues à l'audience, l'URSSAF AUVERGNE demande à la cour de :
- confirmer le jugement sur le principe de la validation des contraintes contestées ;
- constater que la contrainte du 19 septembre 2017, signifiée le 31 octobre 2017, est soldée ;
- valider la contrainte du 11 décembre 2017, signifiée le 26 décembre 2017 pour un montant actualisé de 980, 67 euros au titre des cotisations régularisation 2016.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions susvisées des parties, oralement soutenues à l'audience, pour l'exposé de leurs moyens.
MOTIFS
- Sur les oppositions à contraintes :
L'appelante fait valoir au soutien de son appel qu'elle a cessé son activité le 29 janvier 2016 en suite d'une décision de liquidation amiable, dûment enregistrée auprès du service des impôts des entreprises, de la société [5] qu'elle gérait. Elle en déduit que les demandes de cotisations portant sur des périodes postérieures à cette date sont nécessairement mal fondées, la liquidation amiable emportant selon elle radiation auprès de tous les organismes sociaux. Elle ajoute que les cotisations réclamées par l'URSSAF sont assises sur des montants sans aucun lien avec l'origine et le montant de ses revenus réels, qui à compter de la liquidation amiable de sa société, n'ont plus été tirés de son activité déclarée au RSI mais de son inscription à l'organisme Pôle Emploi puis d'un emploi salarié. Elle considère dès lors que les cotisations réclamées pour les 3ème et 4ème trimestres 2016 et 1er et 2ème trimestres 2017 ne sont pas dues.
Il ressort des explications de l'URSSAF que suite à la déclaration des revenus professionnels de l'année 2017, régularisée par Mme [E] en cours de procédure d'appel, un calcul actualisé des cotisations dues a été opéré.
Ce nouveau calcul a conduit l'organisme de recouvrement a constaté que les cotisations relatives à l'année 2017 se trouvent soldées et à actualiser le montant de la contrainte du 11 décembre 2017, signifiée le 26 décembre 2017, à la somme de 980,67 euros correspondant aux cotisations en régularisation de l'année 2016.
Pour soutenir qu'elle n'est plus redevable de cotisations depuis le 29 janvier 2016, Mme [E] se prévaut d'un certificat de cessation d'activité enregistrée à la direction générale des finances publiques le 29 janvier 2016. Elle verse à ce titre aux débats un procès-verbal d'assemblée générale extraordinaire des associés du 11 janvier 2016, enregistré au service des impôts des entreprises du Puy le 29 janvier 2016, duquel il ressort que ' l'associé unique décide de procéder à la liquidation amiable, de la dissolution et de la radiation anticipée de la société'.
L'URSSAF considère que cette décision, quoiqu'enregistrée au service des impôts des entreprises, ne vaut pas levée, pour la gérante de société qu'elle était, de l'obligation de s'acquitter des cotisations sociales, ladite obligation persistant jusqu'à la cessation effective de ses fonctions de gérante, indépendamment de l'exercice par la société gérée d'une activité réelle.
L'extrait Kbis à jour au 23 avril 2017, versé aux débats par Mme [E], ne rend pas compte d'une quelconque dissolution et radiation de la société [5] dès la date du 29 janvier 2016.
En outre, c'est à raison que l'URSSAF rappelle que selon la jurisprudence de la Cour de cassation, dans le cadre d'une société qui n'a pas cessé d'exister, l'activité de gérant, en ce qu'elle comporte une mission de contrôle et de surveillance de celle-ci, est assimilée à l'exercice d'une activité professionnelle, peu important que la société n'exerce aucune activité réelle et que les fonctions de gérant n'aient procuré aucun revenu à celui-ci. Dès lors, l'affiliation auprès de l'organisme social n'étant pas subordonnée à la perception d'une rémunération, le gérant majoritaire demeure, jusqu'à la disparition de la société, débiteur de cotisations, alors calculées sur des bases forfaitaires minimales.
Il résulte de ces éléments que comme le soutient à juste titre l'organisme social, ce n'est qu'à compter de la liquidation judiciaire de la société [5], seul événement marquant la disparition de son existence juridique, et non de l'enregistrement au service des impôts des entreprises d'un procès-verbal d'assemblée générale d'associés actant une décision de dissolution et radiation, qui ne produit aucun effet sur l'existence même de la société concernée, qu'a cessé l'obligation de paiement des cotisations sociales pesant sur sa gérante associée unique.
Le principe même de la créance de cotisations sociales dont le recouvrement est poursuivi par l'URSSAF doit dès lors être reconnu.
En ce qui concerne son quantum, étant rappelé qu'il incombe à l'opposant à la contrainte de rapporter la preuve du caractère indu de la créance dont le recouvrement est poursuivi par l'organisme social, il y a lieu d'observer que les explications et pièces produites par Mme [E] quant à l'origine et au montant des revenus perçus depuis le 29 janvier 2016 ne sont pas de nature à remettre utilement en cause les calculs de l'URSSAF, tels que détaillés au 1er paragraphe de ses dernières écritures.
L'URSSAF considérant désormais soldée la contrainte émise le 19 septembre 2017 et signifiée le 31 octobre 2017, il y a lieu d'infirmer le jugement entrepris qui l'a validée.
Le jugement déféré sera également infirmé quant au montant de la contrainte émise le 11 décembre 2017 et signifiée le 26 septembre 2017, qui après actualisation sera ramené à la somme de 980,67 euros.
- Sur les demandes accessoires :
Les dispositions du jugement déféré quant au paiement du coût des actes de signification des contraintes, à l'application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de première instance seront confirmées.
En cause d'appel, Mme [E] qui succombe en son recours au sens de l'article 696 du code de procédure civile sera condamnée à supporter les dépens de l'instance, ce qui exclut qu'il soit fait droit à la demande qu'elle forme au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,
- Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a validé la contrainte à l'encontre de Mme [S] [E] émise le 19 septembre 2017 et signifiée le 31 octobre 2017 et statuant à nouveau sur ce point, dit n'y avoir lieu à validation de cette contrainte dont les causes ont été réglées;
- Infirme le jugement entrepris quant au montant de la contrainte décernée le 11 décembre 2017 à l'encontre de Mme [S] [E], signifiée le 26 décembre 2017, et statuant à nouveau sur ce point, valide cette contrainte pour un montant actualisé de 980,67 euros ;
- Confirme le jugement entrepris en toutes ses autres dispositions ;
Y ajoutant,
- Déboute Mme [S] [E] de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamne Mme [S] [E] à supporter les dépens d'appel ;
- Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
Ainsi fait et prononcé lesdits jour, mois et an.
Le greffier, Le Président,
N. BELAROUI C. RUIN