14 JUIN 2022
Arrêt n°
CHR/SB/NS
Dossier N° RG 19/00474 - N° Portalis DBVU-V-B7D-FFL3
[F] [S]
/
SASU OMNITRANS (FRIGETRANS)
Arrêt rendu ce QUATORZE JUIN DEUX MILLE VINGT DEUX par la QUATRIEME CHAMBRE CIVILE (SOCIALE) de la Cour d'Appel de RIOM, composée lors du délibéré de :
M. Christophe RUIN, Président
Mme Claude VICARD, Conseiller
Mme KarineVALLEE, Conseiller
En présence de Mme Séverine BOUDRY greffier lors des débats et du prononcé
ENTRE :
M. [F] [S]
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représenté par Me Léna BORIE-BELCOUR de la SCP ARSAC, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND suppléant Me Clémence MARCELOT, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
APPELANT
ET :
SASU OMNITRANS (FRIGETRANS) prise en la personne de son Président en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 5]
[Localité 3]
Représentée par Me Nelly COUPAT-WAWRZYNIAK de la SELARL CABINET NELLY COUPAT, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE et par Me Sophie LACQUIT, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
INTIMEE
Monsieur RUIN, Président et Mme VICARD, Conseiller, après avoir entendu Mr RUIN, Président en son rapport, à l'audience publique du 11 Avril 2022, tenue par ces deux magistrats, sans qu'ils ne s'y soient opposés, les représentants des parties en leurs explications, en ont rendu compte à la Cour dans son délibéré aprés avoir informé les parties que l'arrêt serait prononcé, ce jour, par mise à disposition au
greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 du code de procédure civile.
FAITS ET PROCÉDURE
La société OMNITRANS, dont le siège social est situé à [Localité 4] (69), exerce une activité de transports routiers de fret interurbains. A ce titre, les salariés relèvent de la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport du 21 décembre 1950. Les relations contractuelles sont en outre notamment régies par le décret 83-40 du 26 janvier 1983, actuellement codifié au sein du code des transports.
Monsieur [F] [S], né le 23 septembre 1967, a été embauché par la SASU OMNITRANS le 1er septembre 2011, selon contrat de travail à durée déterminée , en qualité de conducteur routier courte distance (groupe 7, coefficient 150). Après un renouvellement de ce contrat à durée déterminée, la relation contractuelle s'est poursuivie dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er mars 2012.
Monsieur [S] a été en arrêt maladie du 2 mai 2017 au 20 septembre 2017.
Monsieur [S] et la société OMNITRANS ont signé une rupture conventionnelle le 20 octobre 2017, précisant la fin de la relation contractuelle au 28 novembre 2017.
Le 19 octobre 2017, Monsieur [S] a saisi le conseil de prud'hommes du PUY-EN-VELAY aux fins notamment de voir juger qu'il a effectué des heures supplémentaires non rémunérées par son employeur, outre obtenir diverses sommes à titre indemnitaire et de rappel de salaires.
L'audience devant le bureau de conciliation et d'orientation s'est tenue en date du 21 décembre 2017 (convocation notifiée au défendeur le 30 octobre 2017) et, comme suite au constat de l'absence de conciliation, l'affaire a été renvoyée devant le bureau de jugement.
Par jugement contradictoire en date du 7 février 2019 (audience du 27 septembre 2018), le conseil de prud'hommes du PUY-EN-VELAY a :
- dit que les heures supplémentaires effectuées sur la période 2014-2016 par Monsieur [S] lui ont été réglées ;
- dit que la société OMNITRANS n'a pas respecté la contrepartie obligatoire en repos ;
- dit que la société OMNITRANS a bien maintenu le salaire de Monsieur [S] pendant la période d'arrêt maladie, conformément aux dispositions de la convention collective applicable ;
- dit que la société OMNITRANS a bien respecté son obligation de sécurité envers Monsieur [S] ;
En conséquence,
- condamné la société OMNITRANS à payer et porter à Monsieur [S] les sommes suivantes :
* 180,59 euros à titre de rappel de salaire sur contrepartie obligatoire en repos pour l'année 2015 ;
* 549,33 euros à titre de rappel de salaire sur contrepartie obligatoire en repos pour l'année 2016 ;
* 250 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi ;
- dit que les créances salariales sont productrices d'intérêts au taux légal à compter de la réception par le défendeur de la convocation à comparaître à l'audience de conciliation et d'orientation et à défaut de demande initiale, à compter de la date à laquelle ces sommes ont été réclamées et la créance indemnitaire à compter du prononcé du présent jugement ;
- rappelé que l'exécution provisoire est de droit sur les sommes dues au titre des rémunérations et indemnités mentionnées au 2° de l'article R. 1454-14 du code du travail, dans la limite de neuf mois de salaire;
- dit que la moyenne des trois derniers mois de salaire est de 1.308,25 euros ;
- condamné la société OMNITRANS à payer et porter à Monsieur [S] la somme de 600 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- débouté Monsieur [S] de ses autres demandes ;
- débouté la société OMNITRANS de sa demande reconventionnelle ;
- condamné la société OMNITRANS aux dépens de l'instance.
Le 6 mars 2019, Monsieur [S] a interjeté appel de ce jugement qui lui a été notifié à sa personne le 9 février 2019.
Vu les conclusions notifiées à la cour le 23 juillet 2021 par la société OMNITRANS,
Vu les conclusions notifiées à la cour le 15 juillet 2019 par Monsieur [S],
Vu l'ordonnance de clôture rendue le 14 mars 2022.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Dans ses dernières écritures, Monsieur [S] demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris, sauf en ces dispositions relatives à la contrepartie obligatoire en repos, et, statuant de nouveau, de :
- dire et juger ses demandes recevables et bien fondées, les accueillir ;
- dire et juger qu'il a effectué des heures supplémentaires non rémunérées par son employeur ;
- condamner la société OMNITRANS à lui payer et porter la somme 6429,92 euros à titre de rappels de salaire sur heures supplémentaires et heures d'équivalence, congés payés compris, sur la période 2014-2016 ;
- condamner la société OMNITRANS à payer et porter à Monsieur [S] la somme de 5000 euros en réparation du préjudice subi;
- constater que la société OMNITRANS n'a pas procédé au versement de la totalité du maintien de salaire de Monsieur [S] lors de son arrêt de travail ;
En conséquence,
- à titre principal, condamner la société OMNITRANS de lui payer et porter la somme 3.917,29 euros à titre de rappels de salaire sur maintien de salaire sur la période comprise entre mai et septembre 2017, et à communiquer les bulletins de salaires rectifiés, le tout sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du 8 ème jour suivant la notification du Jugement à intervenir ;
- à titre subsidiaire, condamner la société OMNITRANS de lui payer et porter la somme 2731,04 euros à titre de rappels de salaire sur maintien de salaire sur la période comprise entre mai et septembre 2017, et à communiquer les bulletins de salaires rectifiés, le tout sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du 8ème jour suivant la notification du Jugement à intervenir ;
En tout état de cause,
- constater que la société OMNITRANS a manqué à son obligation de sécurité ;
- condamner la société OMNITRANS à lui payer et porter la somme de 5000 euros à titre de justes dommages et intérêts ;
- condamner la société OMNITRANS à lui payer et porter la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile;
- statuer ce que de droit sur les dépens.
Monsieur [S], à l'appui de ses demandes, fait valoir que, sur la période 2014-2016, la totalité des heures supplémentaires qu'il a effectuées ne lui ont pas été payées par la société OMNITRANS. Il indique que les relevés enregistrés par sa carte de décompte du temps de travail, ainsi que ses bulletins de salaire, prouvent qu'il n'a pas perçu l'intégralité du paiement de ses heures supplémentaires. Il précise que les calculs présentés par l'employeur sont erronés.
Il fait ensuite valoir que les heures supplémentaires qu'il a effectuées au-delà du contingent annuel de 195 heures en 2015 et 2016, ne lui ont en outre apporté aucune contrepartie obligatoire en repos. Ainsi, il s'estime fondé à réclamer une somme à ce titre.
Il soutient que les manquements de la société OMNITRANS lui ont fait subir un préjudice financier important. En effet, aucune contrepartie ni financière, ni en repos ne lui a été accordé au titre des heures supplémentaires dues. Par conséquent, il sollicite le versement de dommages et intérêts à ce titre.
Lors de son arrêt maladie du 2 mai 2017 au 20 septembre 2017, il affirme que son employeur n'a pas respecté ses obligations conventionnelles de maintien de salaire.
Il fait en outre valoir que la société OMNITRANS n'a pas respecté l'obligation de sécurité à laquelle elle était tenue en ne respectant pas les recommandations du médecin du travail. Il indique en avoir subi un préjudice. Il ajoute que ces manquements lui ont causé une grande fatigue tant physique que morale. Dès lors, Monsieur [S] s'estime bien fondé à solliciter la condamnation de son employeur au titre du manquement à l'obligation de sécurité.
Dans ses dernières écritures, la société OMNITRANS demande à la cour de :
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
- dit et jugé que toutes les heures supplémentaires ont été rémunérées par l'employeur ;
- débouté en conséquence Monsieur [S] de sa demande de rappel de salaire sur ce fondement ;
- débouté Monsieur [S] de sa demande de dommages-intérêts pour préjudice prétendument subi ;
- constaté que la société OMNITRANS a parfaitement maintenu le salaire durant l'arrêt maladie du salarié ;
- débouté, en conséquence, Monsieur [S] des demandes de rappel de salaire formulées sur ce chef de demande ;
- constaté que la société OMNITRANS a parfaitement respecté son obligation de sécurité ;
- débouté, en conséquence, Monsieur [S] de sa demande exorbitante de dommages-intérêts ;
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a confondu les repos compensateursobligatoiresprévusdans le transport routier avec la contrepartie obligatoire en repos prévue par le code du travail ; sachant que la Cour de Cassation rejette le cumul des repos liés aux heures supplémentaires dans le transport routier ;
Statuant à nouveau,
- donner acte à la société OMNITRANS de ce qu'elle reste redevable de la somme de 143 euros au titre du COR ;
- débouter Monsieur [S] de sa demande de dommages-intérêts pour préjudice prétendument subi ;
- débouter Monsieur [S] de sa demande d'article 700 du Code de Procédure Civile ;
- le condamner, toutefois, à titre reconventionnel à verser à la société OMNITRANS la somme de 1500 euros sur ce fondement ;
- statuer ce que de droit sur les dépens.
La société OMNITRANS soutient que toutes les heures supplémentaires effectuées par Monsieur [S] ont bien été rémunérées ainsi qu'il en est démontré par les données issues d'un chronotachygraphe, qui décompte les heures effectuées très précisément, et par les rapports mensuels, les fiches individuelles et les bulletins de paie de novembre 2014 au 31 décembre 2016.
Elle indique ensuite rester seulement redevable de 143 euros au titre de la contrepartie obligatoire en repos.
Elle affirme avoir rempli ses obligations en matière de complément de salaire pour la période de maladie du 2 mai 2017 au 20 septembre 2017 concernant Monsieur [S].
Elle soutient enfin que ses obligations en matière de sécurité, suite aux recommandations du médecin du travail, ont bien été respectées. Elle affirme que les allégations de Monsieur [S] sur ce point sont affabulatrices étant donné qu'à aucun moment la médecine du travail ne lui a imposé quoi que ce soit, ni mis en garde contre un quelconque danger pour la santé et la sécurité du salarié.
Pour plus ample relation des faits, de la procédure, des prétentions, moyens et arguments des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il y a lieu de se référer à la décision attaquée et aux dernières conclusions régulièrement notifiées et visées.
MOTIFS
- Sur les heures supplémentaires -
La durée légale du travail effectif des salariés est fixée à trente-cinq heures par semaine civile. Constituent des heures supplémentaires toutes les heures de travail effectuées au-delà de la durée légale hebdomadaire ou de la durée considérée comme équivalente. Toute heure accomplie au-delà de la durée légale hebdomadaire ou de la durée considérée comme équivalente est une heure supplémentaire qui ouvre droit à une majoration salariale ou, le cas échéant, à un repos compensateur équivalent. Les heures supplémentaires se décomptent par semaine. Une convention collective ou un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, de branche peut fixer une période de sept jours consécutifs constituant la semaine. À défaut d'accord, la semaine débute le lundi à 0 heure et se termine le dimanche à 24 heures.
Une convention collective ou un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, de branche peut fixer le ou les taux de majoration des heures supplémentaires, qui ne peut pas être inférieur à 10%. À défaut d'accord, les heures supplémentaires accomplies au-delà de la durée légale hebdomadaire ou la durée considérée comme équivalente donnent lieu à une majoration de salaire de 25 % pour chacune des huit premières heures supplémentaires (de la 36ème heure à la 43ème heure incluse). Les heures suivantes donnent lieu à une majoration de 50 % (à partir de la 44ème heure). La majoration des heures supplémentaires s'applique au taux horaire des heures normales de travail, ce taux ne pouvant pas être inférieur au quotient résultant de la division du salaire mensuel brut par l'horaire mensuel. Il doit être tenu compte des primes et indemnités versées en contrepartie directe du travail ou inhérentes à la nature du travail fourni et du montant des avantages en nature.
Aux termes de l'article L. 3171-4 du code du travail : 'En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.'.
Il résulte de ce texte que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties. Le salarié doit étayer sa demande de paiement d'heures supplémentaires par la production d'éléments suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments quant aux horaires effectivement réalisés par le requérant.
Monsieur [S] fait valoir que, sur la période de 2014 à 2016, la totalité des heures supplémentaires qu'il a effectuées ne lui ont pas été payées par la société OMNITRANS. Il indique que les relevés enregistrés par sa carte de décompte du temps de travail, ainsi que ses bulletins de salaire, prouvent qu'il n'a pas perçu l'intégralité du paiement de ses heures supplémentaires. Il précise que les calculs présentés par l'employeur sont erronés.
La société OMNITRANS réplique que toutes les heures supplémentaires effectuées par Monsieur [S] ont bien été rémunérées.
A l'appui de ses dires, Monsieur [S] ne verse aucun tableau récapitulatif et ne détaille pas davantage ses demandes, se contentant de réclamer une somme totale de 6.429,92 euros sur la période considérée au vu de ses fiches de paie.
En réponse, l'employeur produit aux débats l'intégralité des données issues du chronotachygraphe, appareil électronique permettant d'enregistrer la vitesse, le temps de conduite et les activités du salarié. L'employeur démontre en outre qu'il existe un décalage de paie de deux mois au sein de la société en versant l'intégralité des rapports mensuels, des fiches individuelles et des bulletins de paie de novembre 2014 au 31 décembre 2016.
Au vu de ces éléments et des principes de droit sus-visés, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a dit que le paiement des heures complémentaires ou supplémentaires a bien été effectué et a débouté Monsieur [F] [S] de ses demandes à ce titre.
- Sur la contrepartie obligatoire en repos-
Aux termes de l'article L.3121-30 du code du travail, 'des heures supplémentaires peuvent être accomplies dans la limite d'un contingent annuel. Les heures effectuées au-delà de ce contingent annuel ouvrent droit à une contrepartie obligatoire sous forme de repos. Les heures prises en compte pour le calcul du contingent annuel d'heures supplémentaires sont celles accomplies au-delà de la durée légale. Les heures supplémentaires ouvrant droit au repos compensateur équivalent mentionné à l'article L.3121-28 et celles accomplies dans les cas de travaux urgents énumérés à l'article L.3132-4 ne s'imputent pas sur le contingent annuel d'heures supplémentaires.'
Les repos compensateurs trimestriels obligatoires prévus au 5° de l'article 5 du décret n° 83-40 du 26 janvier 1983, relatif aux modalités d'application des dispositions du code du travail concernant la durée du travail dans les entreprises de transport routier de marchandises, dans sa rédaction issue du décret n° 2007-13 du 4 janvier 2007 et antérieure au décret n° 2016-1549 du 17 novembre 2016, ont seulement vocation à s'appliquer aux personnels roulants, sans possibilité de cumul avec la contrepartie obligatoire en repos prévue par les dispositions du code du travail.
Monsieur [S] soutient que les heures supplémentaires qu'il a effectuées au-delà du contingent annuel de 195 heures en 2015 et 2016, ne lui ont apporté aucune contrepartie obligatoire en repos. Ainsi, il s'estime fondé à réclamer une somme à ce titre.
La société OMNITRANS répond rester seulement redevable de 143 euros au titre de la contrepartie obligatoire en repos.
Il résulte de l'analyse des données issues du chronotachygraphe, de l'intégralité des rapports mensuels, des fiches individuelles et des bulletins de paie de novembre 2014 au 31 décembre 2016 du salarié que Monsieur [S] a acquis seulement deux jours de repos compensateur sur la période de l'année 2016 alors que la jurisprudence de la Cour de cassation précise que les repos compensateurs trimestriels obligatoires prévus dans le transport routier ne peuvent se cumuler avec la contrepartie obligatoire en repos prévue par le code du travail pour les heures supplémentaires.
Au vu de ces éléments, le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a condamné la société OMNITRANS à payer à Monsieur [S] les sommes de 180,59 euros à titre de rappel de salaire sur contrepartie obligatoire en repos pour l'année 2015 et de 549,33 euros à titre de rappel de salaire sur contrepartie obligatoire en repos pour l'année 2016 et, statuant à nouveau, la cour condamne la société OMNITRANS à payer à Monsieur [F] [S] la somme de 143 euros à titre de rappel de salaire sur contrepartie obligatoire en repos pour l'année 2016.
- Sur la demande de rappel de salaire au titre de l'arrêt maladie-
Aux termes de l'article 10 ter de l'annexe relative aux ouvriers de la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaire du transport, un salarié peut prétendre au versement d'un complément de rémunération assurant les garanties de ressources suivantes:
- 100 % de la rémunération du 6ème au 70ème jour d'arrêt ;
- 75% de la rémunération du 71ème au 130ème jour d'arrêt.
Cependant cette disposition conventionnelle ne peut conduire au versement d'une rémunération nette supérieure à celle qu'aurait effectivement perçu l'ouvrier s'il avait continué à travailler et vient en complément des indemnités journalières versées par la sécurité sociale.
Monsieur [S] affirme que son employeur n'a pas respecté ses obligations conventionnelles de maintien de salaire lors de son arrêt maladie du 2 mai 2017 au 20 septembre 2017.
La société OMNITRANS affirme avoir rempli ses obligations en matière de complément de salaire pour la période de maladie du 2 mai 2017 au 20 septembre 2017 concernant Monsieur [S].
En l'espèce, Monsieur [F] [S], né le 23 septembre 1967, a été embauché par la SASU OMNITRANS le 1er septembre 2011, selon contrat de travail à durée déterminée , en qualité de conducteur routier courte distance (groupe 7, coefficient 150). Après un renouvellement de ce contrat à durée déterminée, la relation contractuelle s'est poursuivie dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er mars 2012.
Monsieur [S] a été en arrêt maladie du 2 mai 2017 au 20 septembre 2017.
Il résulte de la comparaison des bulletins de paie du salarié, de la fiche complément versée par l'employeur et de l'attestation de paiement des indemnités journalières que Monsieur [S] a bien été rempli de ses droits par l'employeur.
Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté Monsieur [S] de ses demandes de versement d'un complément de salaire pendant la période de son arrêt maladie.
- Sur la demande de dommages et intérêts au titre de la durée du travail -
Monsieur [S] soutient que les manquements de la société OMNITRANS lui ont fait subir un préjudice financier important. En effet, aucune contrepartie ni financière, ni en repos ne lui a été accordé au titre des heures supplémentaires dues. Par conséquent, il sollicite le versement de dommages et intérêts à ce titre.
Cependant la cour a déjà retenu que Monsieur [S] avait été indemnisé à juste titre par son employeur en matière d'heures supplémentaires et pendant son arrêt maladie.
En outre, alors que la notion de préjudice nécessaire a été abandonnée par la Cour de cassation en 2016, il doit être observé que la réalité d'un préjudice distinct à celui déjà indemnisé par la cour n'est pas rapportée.
Le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a condamné la SAS OMNISTRANS à payer à Monsieur [F] [S] la somme de 250 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice financier subi et, statuant à nouveau, la cour déboute Monsieur [F] [S] de sa demande de dommages et intérêts au titre du préjudice financier subi.
- Sur l'obligation de sécurité -
Aux termes des dispositions alors applicables de l'article L. 4121-1 du code du travail : 'L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent : 1° Des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail ; 2° Des actions d'information et de formation ; 3° La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés. L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes.'.
Aux termes des dispositions alors applicables de l'article L. 4121-2 du code du travail : 'L'employeur met en oeuvre les mesures prévues à l'article L. 4121-1 sur le fondement des principes généraux de prévention suivants : 1° Eviter les risques ; 2° Evaluer les risques qui ne peuvent pas être évités ; 3° Combattre les risques à la source ; 4° Adapter le travail à l'homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail et de production, en vue notamment de limiter le travail monotone et le travail cadencé et de réduire les effets de ceux-ci sur la santé ; 5° Tenir compte de l'état d'évolution de la technique ; 6° Remplacer ce qui est dangereux par ce qui n'est pas dangereux ou par ce qui est moins dangereux ; 7° Planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l'organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l'influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral et au harcèlement sexuel, tels qu'ils sont définis aux articles L. 1152-2 et L. 1152-3 ; Prendre des mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle ; 9° Donner les instructions appropriées aux travailleurs.'.
L'employeur est tenu vis-à-vis de ses salariés d'une obligation de sécurité dans le cadre ou à l'occasion du travail. Cette obligation spécifique a été consacrée par la jurisprudence de la Cour de cassation qui a désormais abandonné le fondement contractuel de l'obligation de sécurité de l'employeur pour ne retenir que le fondement légal, tiré notamment des articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail, interprété à la lumière de la réglementation européenne concernant la mise en oeuvre de mesures visant à promouvoir l'amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs. Cette obligation de sécurité dont doit répondre l'employeur s'applique à toute situation de risque en matière de sécurité et de protection de la santé physique et mentale des travailleurs.
Tenu d'une obligation de sécurité, il appartient donc à l'employeur de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, notamment en justifiant, d'une part, avoir pris toutes les mesures de prévention prévues notamment par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail et, d'autre part, dès qu'il est informé de l'existence de faits susceptibles de constituer une atteinte à la sécurité ou la santé, physique et mentale d'un salarié, avoir pris les mesures immédiates propres à les faire cesser.
La responsabilité de l'employeur est engagée vis-à-vis des salariés (ou du salarié) dès lors qu'un risque pour la santé ou la sécurité des travailleurs (du travailleur) est avéré. Il n'est pas nécessaire que soit constaté une atteinte à la santé, le risque suffit.
L'obligation de sécurité de l'employeur, ou obligation pour celui-ci de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, couvre également les problèmes de stress ou mal-être au travail, plus généralement la question des risques pyscho-sociaux liées aux conditions de travail, aux relations de travail ou à l'ambiance de travail. Dans ce cadre, il appartient à l'employeur de mettre en place des modes d'organisation du travail qui ne nuisent pas à la santé physique et mentale des salariés et de réagir de façon adaptée en cas de risque avéré.
La jurisprudence qualifie l'obligation de sécurité de l'employeur d'obligation de résultat. Selon la Cour de cassation, cette obligation de sécurité est désormais de résultat non au regard du risque effectivement encouru par le salarié, ou de l'atteinte à sa santé subi par le salarié, mais de son objet (prévention et cessation du risque). Le résultat attendu de l'employeur est de prévenir, par des moyens adaptés, tout risque lié non seulement à l'exécution de la prestation de travail mais également à l'environnement professionnel dans lequel elle est délivrée. Il s'agit pour l'employeur de prévenir, de former, d'informer et de mettre en place une organisation et des moyens adaptés. Le résultat dont il est question dans la notion d'obligation de résultat n'est pas l'absence d'atteinte à la santé physique et mentale, mais l'ensemble des mesures prises de façon effective par l'employeur dont la rationalité, la pertinence et l'adéquation sont analysées et appréciées par le juge. L'employeur peut s'exonérer de sa responsabilité en démontrant avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L. 4121-1 et L.4121-2 du code du travail. Ainsi, en cas de risque avéré ou réalisé pour la santé ou la sécurité du travailleur, l'employeur engage sa responsabilité, sauf s'il démontre qu'il a pris les mesures générales de prévention nécessaires et suffisantes pour l'éviter, ce qu'il appartient aux juges du fond d'apprécier souverainement.
Au titre de son obligation de sécurité, il appartient à l'employeur de repérer les situations de tension et, le cas échéant, d'ouvrir rapidement une enquête. L'inertie de l'employeur en présence d'une situation susceptible d'être qualifiée de souffrance au travail, dont il a connaissance, alors qu'il est tenu légalement d'assurer la protection de la santé et de la sécurité des salariés et d'exécuter de bonne foi le contrat de travail, engage nécessairement sa responsabilité, quand bien même il ne serait pas l'auteur des faits dénoncés.
Le salarié peut solliciter des dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait d'un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité.
Monsieur [S] fait valoir que la société OMNITRANS n'a pas respecté les recommandations du médecin du travail. Il indique en avoir subi un préjudice en conséquence. Il ajoute que ces manquements lui ont causé une grande fatigue tant physique que morale. Dès lors, Monsieur [S] s'estime bien fondé à solliciter la condamnation de son employeur au titre du manquement à l'obligation de sécurité.
La société OMNITRANS soutient que ses obligations en matière de sécurité, suite aux recommandations du médecin du travail, ont bien été respectées. Elle affirme que les allégations de Monsieur [S] sur ce point sont affabulatrices étant donné qu'à aucun moment la médecine du travail ne lui a imposé quoi que ce soit, ni mis en garde contre un quelconque danger pour la santé et la sécurité du salarié.
La cour a déjà retenu que Monsieur [S] avait été indemnisé à juste titre par son employeur en matière d'heures supplémentaires et pendant son arrêt maladie et que seule la somme de 143 euros lui restait due à titre de rappel de salaire sur contrepartie obligatoire en repos pour l'année 2016.
Il résulte par ailleurs de l'avis du médecin du travail en date du 29 octobre 2016 que ce dernier n'émettait aucune réserve sur l'aptitude de Monsieur [S] mais indiquait seulement que le salarié était 'apte mais lors de la reprise un travail avec des horaires plus réguliers est conseillé en évitant trop d'horaires de nuit'. Il n'est pas justifié que l'employeur aurait manqué à son obligation de sécurité dans ce cadre.
Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté Monsieur [F] [S] de sa demande à titre de dommages et intérêts pour manquement de l'employeur a son obligation de sécurité.
- Sur les frais irrépétibles et les dépens -
Les dispositions du jugement déféré relatives aux dépens et aux frais irrépétibles de première instance seront confirmées.
Monsieur [F] [S], qui succombe au principal en son recours, sera condamné aux entiers dépens d'appel.
En équité, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,
- Infirme le jugement déféré en ce qu'il a condamné la SAS OMNITRANS à payer à Monsieur [S] les sommes de 180,59 euros à titre de rappel de salaire sur contrepartie obligatoire en repos pour l'année 2015 et de 549,33 euros à titre de rappel de salaire sur contrepartie obligatoire en repos pour l'année 2016 et, statuant à nouveau, condamne la SAS OMNITRANS à payer à Monsieur [F] [S] la somme de 143 euros à titre de rappel de salaire sur contrepartie obligatoire en repos pour l'année 2016 ;
- Infirme le jugement déféré en ce qu'il a condamné la SAS OMNISTRANS à payer à Monsieur [F] [S] la somme de 250 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice financier subi et, statuant à nouveau, déboute Monsieur [F] [S] de sa demande de dommages et intérêts au titre du préjudice financier subi ;
- Confirme le jugement déféré en toutes ses autres dispositions non contraires ;
- Condamne Monsieur [F] [S] aux dépens d'appel;
- Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
Ainsi fait et prononcé lesdits jour, mois et an.
Le Greffier, Le Président,
S. BOUDRY C. RUIN