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07/06/2022 | FRANCE | N°19/02357

France | France, Cour d'appel de Riom, Chambre sociale, 07 juin 2022, 19/02357


07 JUIN 2022



Arrêt n°

Chr/NB/NS



Dossier N° RG 19/02357 - N° Portalis DBVU-V-B7D-FKY6



S.E.L.A.R.L. MJ DE L'ALLIER en qualité de mandataire liquidateur de la SASU RC Couverture





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[M] [V], L'UNEDIC, Délégation AGS, CGEA d'[Localité 6], Association

Arrêt rendu ce SEPT JUIN DEUX MILLE VINGT DEUX par la QUATRIEME CHAMBRE CIVILE (SOCIALE) de la Cour d'Appel de RIOM, composée lors des débats et du délibéré de :



M. Christophe RUIN, Président



Mme Claude VICARD

, Conseiller



Mme Karine VALLEE, Conseiller



En présence de Mme Nadia BELAROUI greffier lors des débats et du prononcé



ENTRE :



S.E.L.A.R.L. MJ DE L'ALLIER...

07 JUIN 2022

Arrêt n°

Chr/NB/NS

Dossier N° RG 19/02357 - N° Portalis DBVU-V-B7D-FKY6

S.E.L.A.R.L. MJ DE L'ALLIER en qualité de mandataire liquidateur de la SASU RC Couverture

/

[M] [V], L'UNEDIC, Délégation AGS, CGEA d'[Localité 6], Association

Arrêt rendu ce SEPT JUIN DEUX MILLE VINGT DEUX par la QUATRIEME CHAMBRE CIVILE (SOCIALE) de la Cour d'Appel de RIOM, composée lors des débats et du délibéré de :

M. Christophe RUIN, Président

Mme Claude VICARD, Conseiller

Mme Karine VALLEE, Conseiller

En présence de Mme Nadia BELAROUI greffier lors des débats et du prononcé

ENTRE :

S.E.L.A.R.L. MJ DE L'ALLIER en qualité de mandataire liquidateur de la SASU RC Couverture

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Regis SENET, avocat au barreau de MOULINS

APPELANTE

ET :

M. [M] [V]

[Adresse 5]

[Localité 3]

Représenté par Mme [B] [F], défenseur syndical C.G.T muni d'un pouvoir de représentation du 8 janvier 2020

L'UNEDIC, Délégation AGS, CGEA d'[Localité 6], Association déclarée, représentée par sa Directrice Nationale, Madame [Z] [T], domicilié es qualité

[Adresse 4]

[Localité 6]

Représentée par Me Emilie PANEFIEU, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

INTIMES

Monsieur RUIN, Président et Mme VICARD, Conseiller après avoir entendu, Mme RUIN, Président en son rapport, à l'audience publique du 04 avril 2022, tenue par ces deux magistrats, sans qu'ils ne s'y soient opposés, les représentants des parties en leurs explications, en ont rendu compte à la Cour dans son délibéré après avoir informé les parties que l'arrêt serait prononcé, ce jour, par mise à disposition au greffe conformément aux dispositions de l'article 450 du code de procédure civile.

FAITS ET PROCÉDURE

La SASU RC COUVERTURE, dont le siège social est situé à [Localité 7] (03), est spécialisée dans les travaux de couverture.

Monsieur [M] [V] , né le 24 mars 1991, a été embauché par la SASU RC COUVERTURE, à compter du 23 février 2017. Au dernier état de la relation contractuelle, Monsieur [V] était employé comme chef d'équipe (ouvrier non cadre).

La convention collective nationale des ouvriers employés par les entreprises du bâtiment occupant jusqu'à 10 salariés s'applique à la relation contractuelle entre Monsieur [V] et la société RC COUVERTURE.

Par jugement du 19 juin 2018, le tribunal de commerce de CUSSET a constaté l'état de cessation des paiements de l'entreprise (date fixée au 4 septembre 2017), prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la société RC COUVERTURE, désigné la SELARL AJ UP, représentée par Maître [P] [S], en qualité d'administrateur judiciaire, nommé la SELARL MJ DE L'ALLIER, représentée par Maître [I] [E], en qualité de mandataire judiciaire, décidé l'ouverture d'une période d'observation jusqu'au 18 décembre 2018.

Le contrat de travail a été rompu par Monsieur [V] qui a démissionné en septembre 2018 (effet au 13 septembre 2018), soit pendant la période d'observation de la procédure collective.

Par jugement du18 juin 2019, le tribunal de commerce de CUSSET a mis fin à la période d'observation, prononcé la liquidation judiciaire de la société RC COUVERTURE, nommé la SELARL MJ DE L'ALLIER, représentée par Maître [I] [E], en qualité de liquidateur judiciaire, autorisé la poursuite d'activité jusqu'au 18 septembre 2019 pour les seuls besoins de la procédure.

Par courrier recommandé (accusé de réception du 7 juin 2019), Monsieur [V] a réclamé à la société RC COUVERTURE le règlement de ses congés payés, alors que le salarié n'avait pas obtenu le paiement de ses congés payés auprès de la caisse des congés payés du BTP du fait de l'absence de cotisations versées par l'employeur auprès de ladite caisse.

Par courrier recommandé daté du 4 juillet 2019, Monsieur [V] a informé (via le défenseur syndical) la SELARL MJ DE L'ALLIER, en qualité de liquidateur judiciaire de la société RC COUVERTURE, que des congés payés lui restaient dus (décompte joint à ce courrier), alors que l'employeur n'avait pas versé à la caisse des congés payés du BTP les cotisations pour les périodes 2017/2018 et 2018/2019.

Par courrier recommandé daté du 11 juillet 2019, le liquidateur judiciaire indiquait au défenseur syndical qu'il n'était pas en mesure de régler les congés payés restant dûs au salarié du fait que l'AGS ne voulait pas garantir les créances liées aux démissions. Le défenseur syndical du salarié répondait que l'AGS devait garantir une créance du salarié relative à l'exécution du contrat de travail et non à sa rupture. Le liquidateur judiciaire maintenait (courrier daté du 16 juillet 2019) que la créance du salarié, soit une indemnité compensatrice de congés payés, est afférente à la rupture du contrat de travail et non à son exécution.

Le 18 juillet 2019, Monsieur [V] a saisi le conseil de prud'hommes de VICHY aux fins notamment de voir ordonner à la SELARL MJ DE L'ALLIER, en qualité de liquidateur judiciaire de la société RC COUVERTURE, de lui délivrer un relevé de créances opposable auprès du CGEA d'[Localité 6] mentionnant les congés payés dus pour la période 2017/2018 et pour la période 2018/2019 ainsi que des dommages et intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail.

Les parties ont comparu directement devant le bureau de jugement le 20 septembre 2019 (convocations notifiées aux défendeurs les 22 et 24 juillet 2019).

Par jugement contradictoire en date du 29 novembre 2019 (audience du 20 septembre 2019), le conseil de prud'hommes de VICHY a:

- fixé les créances de Monsieur [V] dans le cadre de la liquidation judiciaire de la société RC COUVERTURE, aux sommes suivantes :

* 1.467,61 euros bruts au titre des congés payés pour la période de 2017/2018 ;

* 1.109,15 euros bruts au titre des congés payés pour la période de 2018/2019 ;

* 800 euros à titre de dommages et intérêts pour non exécution de bonne foi du contrat de travail ;

- condamné la SELARL MJ DE L'ALLIER, représentée par Maître [E] [I], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société RC COUVERTURE, à rectifier le relevé de créances de Monsieur [V] en incluant les congés payés de celui-ci, soit les sommes de 1.467,61 euros pour la période de 2017/2018 et de 1.109,15 euros pour la période de 2018/2019 ;

- condamné la SELARL MJ DE L'ALLIER, représentée par Maître [E] [I], à transmettre ledit relevé de créances rectifiés à l'AGS et au CGEA, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du 20ème jour suivant la notification de la présente décision ;

- s'est réservé le droit de liquider l'astreinte ;

- dit que des sommes ci-dessus énoncées en brut devront éventuellement être déduites les charges sociales salariales précomptées et reversées aux organismes sociaux par l'employeur ;

- déclaré le jugement opposable à l'AGS et au CGEA dans la limite de leurs garanties ;

- rappelé que le jugement d'ouverture arrête le cours des intérêts légaux, conformément à l'article L. 622-28 du Code du commerce;

- condamné la SELARL MJ DE L'ALLIER, représentée par Maître [I] [E], à payer à Monsieur [V] la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile;

- condamné la SELARL MJ DE L'ALLIER, représentée par Maître [I] [E], aux entiers dépens de la présente instance ;

- dit n'y avoir lieu à prononcer l'exécution provisoire de la présente décision étant rappelé qu'elle est de droit en ce qui concerne le salaire et ses accessoires.

Le 19 décembre 2019, la SELARL MJ DE L'ALLIER, en qualité de liquidateur judiciaire de la société RC COUVERTURE, a interjeté appel de ce jugement qui lui a été notifié à sa personne le 3 décembre 2019. L'affaire a été enrôlée sous le numéro RG 19/02357 et fixée à l'audience de la chambre sociale de la cour d'appel de Riom du 4 avril 2022.

Le 3 janvier 2020,l'association UNEDIC, délégation AGS, CGEA D'[Localité 6], a interjeté appel de ce jugement qui lui a été notifié à sa personne le 4 décembre 2019. L'affaire a été enrôlée sous le numéro RG 20/00037 et fixée à l'audience de la chambre sociale de la cour d'appel de Riom du 4 avril 2022.

Vu les conclusions notifiées à la cour les 17 mars 2020 et 13 mai 2020 par la SELARL MJ DE L'ALLIER, en qualité de liquidateur mandataire de la société RC COUVERTURE,

Vu les conclusions notifiées à la cour le 13 mai 2020 par l'association UNEDIC, délégation AGS, CGEA D'[Localité 6],

Vu les écritures notifiées à la cour le 25 mai 2020 (reçues le 27 mai 2020) par Monsieur [V],

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 7 mars 2022.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses dernières écritures, la SELARL MJ DE L'ALLIER, en qualité de liquidateur judiciaire de la société RC COUVERTURE, demande à la cour de :

A titre principal,

- juger son appel bien fondé ;

- juger que la SELARL MJ DE L'ALLIER, si elle peut être condamnée, elle ne le peut que « es qualité de mandataire liquidateur de ...»;

- en conséquence, si elle juge fondée la demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, la condamner ès qualités de mandataire liquidateur de la SASU RC COUVERTURE ;

À titre subsidiaire, si la cour retient l'argumentation de Monsieur [V], dire et déclarer l'arrêt opposable au C.G.E.A. d'[Localité 6] en qualité de gestionnaire de l'A.G.S.

Le liquidateur judiciaire ne fait appel que des dispositions du jugement concernant sa condamnation aux dépens ainsi que sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le liquidateur judiciaire relève que s'il n'a pas fait l'avance de l'indemnité compensatrice de congés payés due à Monsieur [V], c'est parce que l'AGS avait considéré, à tort, que cette indemnité résulte de la rupture du contrat de travail. Il indique avoir toujours considéré que les congés payés sont acquis par le salarié, chaque mois, au même titre que son salaire, que cet acquis doit être payé à la hauteur de ce que le salarié a cumulé, sans que cela puisse souffrir de la moindre exception, au moment de la rupture du contrat de travail. Or, si les AGS ne veulent pas faire l'avance des sommes dues au salarié, le liquidateur judiciaire ne peut pas payer en l'absence de fonds disponibles.

La SELARL MJ DE L'ALLIER, en qualité de liquidateur judiciaire de la société RC COUVERTURE, soutient que le conseil de prud'hommes de VICHY a commis une erreur de droit en la condamnant à titre personnel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et non ès qualités, au nom et pour le compte de la société en liquidation judiciaire, en l'espèce la société RC COUVERTURE. Elle fait valoir que la mandataire liquidateur ne peut être condamné qu'ès qualités.

Dans ses dernières écritures, l'association UNEDIC, délégation AGS, CGEA d'[Localité 6] demande à la cour de :

A titre principal :

- voir réformer le jugement du 29 novembre 2019 rendu par le conseil de prud'hommes de VICHY en ce qu'il a :

* fixé les créances à valoir, à Monsieur [V], dans le cadre de la liquidation judiciaire de l'entreprise RC COUVERTURE, aux sommes suivantes :

* 1.467,61 euros bruts au titre des congés payés pour la période de 2017/2018 ;

* 1.109,15 euros bruts au titre des congés payés pour la période de 2018/2019 ;

* 800,00 euros à titre de dommages et intérêts pour non-exécution de bonne foi du contrat de travail.

Se faisant et statuant à nouveau,

- rappeler que la garantie de l'UNEDIC, AGS/CGEA est exclue s'agissant de la demande au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés sollicitée ;

- voir débouter Monsieur [V] de sa demande au titre des congés payés pour les périodes 2017/2018 et 2018/2019 ;

- voir débouter Monsieur [V] de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;

- rappeler que la garantie de l'UNEDIC, AGS/CGEA est exclue s'agissant des demandes au titre d'astreinte ;

- rappeler que la garantie de l'UNEDIC, AGS/CGEA est exclue s'agissant de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

- voir débouter Monsieur [V] de l'intégralité de ses fins, demandes et conclusions ;

- en tant que de besoin, voir condamner Monsieur [V] à payer et porter à l'UNEDIC, AGS/CGEA les sommes nettes avancées ensuite de l'exécution provisoire de droit du jugement susvisé, simplement rappeler le cas échéant et en tant que de besoin que l'arrêt infirmatif à intervenir tiendra lieu de titre afin d'obtenir le remboursement des sommes versées en vertu de la décision de première instance assortie de l'exécution provisoire ;

A titre subsidiaire,

-voir déclarer l'arrêt à intervenir opposable à l'A.G.S et au C.G.E.A. d'[Localité 6] en qualité de gestionnaire de l'A.G.S, dans les limites prévues aux articles L.3253-1 et suivants (Article L.3253-8), D.3253-5 du Code du travail et du Décret n° 2003-684 du 24 juillet 2003 ;

- voir constater que la garantie de l'AGS est plafonnée, toutes créances avancées pour le compte du salarié, au plafond défini à l'article D.3253-5 du Code du Travail ;

- voir constater les limites de leur garantie ;

- voir dire et juger que l'arrêt à intervenir ne saurait prononcer une quelconque condamnation à leur encontre ;

- voir dire et juger que l'A.G.S ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L.3253-1 et suivants du Code du Travail (article L.3253-8 du Code du Travail) que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L.3253-1 et suivants du Code du Travail (article L.3253-8 du Code du Travail) ;

- voir dire et juger que l'obligation du C.G.E.A de faire l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafonds applicables, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire ;

- voir dire et juger que le jugement d'ouverture arrête le cours des intérêts légaux (article L.622-28 et suivants du Code de Commerce).

L'association UNEDIC, délégation AGS, CGEA D'[Localité 6], soutient, à titre principal, que lorsque le contrat de travail est rompu à l'initiative du salarié, la garantie de l'AGS n'est pas due pour les créances résultant de la rupture du contrat de travail qui ne peuvent donc pas lui être déclarées opposables. L'AGS-CGEA ne doit sa garantie pour les créances résultant de la rupture d'un contrat de travail que si deux conditions cumulatives sont remplies : - la rupture est à l'initiative du liquidateur judiciaire ; - la rupture intervient dans les délais de l'article L.3253-8 du Code du Travail.

Elle relève qu'en l'espèce le salarié, qui a démissionné en septembre 2018, sollicite la garantie de l'AGS pour des congés payés acquis et non pris pendant la relation contractuelle, ce qui correspond à une demande de créance au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés résultant de la rupture des contrats de travail. Elle fait valoir que c'est à tort que le conseil de prud'hommes a considéré qu'il s'agissait d'une période de congés payés pris et/ou d'une créance relevant de l'exécution du contrat de travail.

En effet, les congés payés dans le secteur du bâtiment s'acquière entre le 1er avril de l'année N-1 et le 31 mars de l'année N. La prise des congés payés se fait du 1er avril de l'année N et le 31 mars de l'année N+1. Ainsi, les congés acquis entre le 1er avril 2017 et le 31 mars 2018 doivent être pris sur la période du 1er avril 2018 au 31 mars 2019. De même, les congés acquis entre le 1er avril 2018 et le 31 mars 2019 doivent être pris sur la période du 1er avril 2019 au 31 mars 2020. Les indemnités compensatrices de congés payés sont dues lorsque le salarié n'a pas pu bénéficier de la totalité du congé auquel il avait droit, il s'agit donc bien d'une indemnité de rupture. S'agissant des entreprises du bâtiment, lorsque les cotisations n'ont pas été réglées à la Caisse des Congés Payés du Bâtiment, cette créance est fixée au passif de la société en liquidation judiciaire. L'AGS doit alors régler l'indemnité de congés payés afférentes si celle-ci répond aux conditions de garantie prévues par les articles L.3253-1 et suivants du Code du Travail et par la jurisprudence.

Or, en l'espèce, les créances sollicitées ne répondent pas aux conditions de garantie de l'AGS. Du fait de leur démission, les salariés n'ont pas été en mesure de prendre l'intégralité des congés payés acquis du 1er avril 2017 au 31 mars 2018 ainsi que les congés acquis entre le 1er avril 2018 et la date de leur démission. Ainsi, dans la mesure où la demande porte sur des congés payés non pris, il s'agit d'une demande d'indemnité compensatrice de congés payés. L'article L.3141-28 du Code du Travail prévoit que le salarié reçoit une indemnité compensatrice de congés payés lorsque le contrat est rompu avant que le salarié ait pu bénéficier de la totalité du congé auquel il avait droit. L'indemnité compensatrice de congés payés est donc bien une indemnité de rupture du contrat de travail et doit donc se voir appliquer la jurisprudence susvisée.

L'association UNEDIC, délégation AGS, CGEA D'[Localité 6], soutient en conséquence que l'indemnité compensatrice de préavis réclamée par le salarié n'est pas garantie par l'AGS.

L'Association UNEDIC, DÉLÉGATION AGS CGEA D'[Localité 6] soutient ensuite, relativement à la demande en dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail formulée par le salarié, que celui-ci ne verse aucun élément permettant de justifier l'existence d'un préjudice ou le montant des dommages et intérêts sollicités. Par conséquent, la demande du salarié devra être rejetée.

L'Association UNEDIC, DÉLÉGATION AGS CGEA D'[Localité 6] fait valoir que les demandes formulées au titre de l'article 700 du code de procédure civile ne peuvent pas être garanties par l'AGS.

L'Association UNEDIC, DÉLÉGATION AGS CGEA D'[Localité 6] soutient qu'elle devra obtenir la restitution des sommes nettes avancées par elle au salarié.

Dans ses dernières écritures, Monsieur [V] demande à la cour de :

- confirmer que ses demandes sont recevables et fondées ;

- débouter la SELARL MJ DE I'ALLIER et l'association UNEDIC de leurs demandes ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a ordonné au liquidateur judiciaire de mentionner ses créances salariales au titre du droit à congé comme suit :

* 1.467,61 euros au titre du droit à congé 2017/2018 ;

* 1.109,15 euros au titre du droit à congé 2018/2019 ;

* 800 euros au titre de dommage et intérêt pour exécution déloyale du contrat de travail ;

- confirmer l'établissement du relevé de créances sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

- réserver la liquidation de l'astreinte au Conseil de Prud'hommes de Vichy ;

- dire et juger ces sommes opposables à l'association UNEDIC délégation AGS CGEA D'[Localité 6] ;

- confirmer la condamnation de la SELARL MJ DE L'ALLIER en la personne de son représentant légal au paiement de 1 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile y ajoutant 100 euros pour les frais inhérent à I'instance d'appel ;

- condamner |'association UNEDIC délégation AGS CGEA D'[Localité 6] au paiement de 100 euros pour les frais inhérent à l'instance d'appel au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

- condamner la SELARL MJ DE L'ALLlER et l'Association UNEDIC délégation AGS CGEA D'[Localité 6] aux frais et entiers dépens de l'instance ainsi qu'aux éventuels frais d'exécution.

Monsieur [V] expose que son employeur, en ne payant pas les cotisations auprès de la caisse des congés payés du BTP, l'a privé de son droit à congés payés. Il relève que la société RC COUVERTURE a clairement violé le principe du droit au congé en ne lui garantissant pas le droit d'exercer son droit au congé et en imputant sur son salaire des absences pour congés payés alors qu'aucune cotisation n'était versée. Il s'estime bien fondé à réclamer que les sommes dues au titre de ses congés payés, ainsi qu'au titre des dommages-intérêts pour exécution fautive du contrat de travail par l'employeur lui ayant causé nécessairement un préjudice financier et moral qu'il convient de réparer, soient inscrites au passif de la liquidation judiciaire de la société RC COUVERTURE, et ce, sous astreinte. Il fait valoir que ces créances ne sont pas nées de la rupture du contrat de travail, mais bien de l'exécution dudit contrat, conformément à l'article L. 3141-30 du Code du travail, qu'en conséquence elles doivent être garanties par l'AGS.

Monsieur [V] expose que l'instance devant le conseil de prud'hommes fut contrainte par l'absence de diligence dont a fait preuve la SELARL MJ DE L'ALLIER, représentée par Maître [E], et que l'instance devant la Cour d'appel de RIOM est contrainte par l'entêtement de l'association UNEDIC, délégation AGS, CGEA d'[Localité 6]. Dès lors, il en conclut que la condamnation de la SELARL MJ DE L'ALLIER et de l'Association UNEDIC, DÉLÉGATION AGS, CGEA D'[Localité 6] au paiement des frais de l'instance est justifiée dans sa nature.

Pour plus ample relation des faits, de la procédure, des prétentions, moyens et arguments des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il y a lieu de se référer à la décision attaquée et aux dernières conclusions régulièrement notifiées et visées.

MOTIFS

- Sur la jonction des procédures -

Aux termes de l'article 367 du code de procédure civile, le juge peut, à la demande des parties ou d'office, ordonner la jonction de plusieurs instances pendantes devant lui s'il existe entre les litiges un lien tel qu'il soit de l'intérêt d'une bonne justice de les faire instruire ou juger ensemble. La décision de jonction d'instances est une mesure d'administration judiciaire dont les juges du fond apprécient souverainement l'opportunité et qui n'est pas susceptible de recours.

En l'espèce, il est de l'intérêt d'une bonne justice de juger ensemble les instances numéros RG 19/02357 et 20/00037, pendantes devant la chambre sociale de la cour d'appel de Riom, fixées à la même audience. Ces affaires, qui ont été conclues et plaidées de façon identique, qui concernent les mêmes parties et correspondent aux mêmes demandes et moyens, présentent un lien de connexité.

La cour joint en conséquence les procédures susvisées qui seront examinées et jugées ensemble dans le cadre du seul présent arrêt.

- Sur les créances du salarié à fixer au passif de la procédure collective -

Selon l'article L. 3253-8 1° du code du travail, l'AGS couvre les sommes dues aux salariés à la date du jugement d'ouverture de toute procédure de redressement ou de liquidation judiciaire, ainsi que les contributions dues par l'employeur dans le cadre du contrat de sécurisation professionnelle.

Selon l'article L. 3253-8 2° du code du travail, l'AGS couvre les créances résultant de la rupture des contrats de travail intervenant :

a) Pendant la période d'observation ;

b) Dans le mois suivant le jugement qui arrête le plan de sauvegarde, de redressement ou de cession ;

c) Dans les quinze jours, ou vingt et un jours lorsqu'un plan de sauvegarde de l'emploi est élaboré, suivant le jugement de liquidation ;

d) Pendant le maintien provisoire de l'activité autorisé par le jugement de liquidation judiciaire et dans les quinze jours, ou vingt et un jours lorsqu'un plan de sauvegarde de l'emploi est élaboré, suivant la fin de ce maintien de l'activité.

Selon l'article L. 3253-8 5° du code du travail, lorsque le tribunal prononce la liquidation judiciaire, dans la limite d'un montant maximal correspondant à un mois et demi de travail, l'AGS couvre les sommes dues :

a) Au cours de la période d'observation ;

b) Au cours des quinze jours, ou vingt et un jours lorsqu'un plan de sauvegarde de l'emploi est élaboré, suivant le jugement de liquidation ;

c) Au cours du mois suivant le jugement de liquidation pour les représentants des salariés ;

d) Pendant le maintien provisoire de l'activité autorisé par le jugement de liquidation et au cours des quinze jours, ou vingt et un jours lorsqu'un plan de sauvegarde de l'emploi est élaboré, suivant la fin de ce maintien de l'activité.

La mise en oeuvre de la garantie de l'AGS suppose d'abord l'ouverture d'une procédure collective (sauvegarde, redressement judiciaire ou liquidation judiciaire) à l'égard de l'employeur et l'absence de fonds disponibles chez cet employeur pour payer aux salariés les créances résultant de l'exécution ou de la rupture du contrat de travail.

Lors de l'ouverture d'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire, les créanciers du débiteur doivent déclarer leurs créances. Cependant, les salariés sont dispensés de cette formalité.

Le mandataire judiciaire nommé lors de l'ouverture de la procédure collective procède à la vérification des créances des salariés et porte les sommes dues sur des relevés de créances qui sont soumis pour validation au juge commissaire.

Le mandataire judiciaire (représentant des créanciers) établit un relevé des créances salariales, contrôlé par le représentant des salariés, visé par le juge-commissaire, déposé au greffe du tribunal de commerce et remis au CGEA compétent. Cette procédure a lieu dans les délais fixés par l'article L. 3253-19 du code du travail, les articles L. 625-1, R. 625-1 à R. 625-7 du code de commerce. Le mandataire judiciaire (représentant des créanciers) publie ensuite un avis dans un journal d'annonces légales pour indiquer que tous les relevés de créances ont été déposés au greffe du tribunal de commerce. Le mandataire judiciaire informe par tout moyen chaque salarié de la nature et du montant des créances admises ou rejetées, lui indique la date de dépôt au greffe du tribunal de commerce du relevé des créances le concernant et lui rappelle le délai de forclusion.

C'est en l'absence de fonds disponibles dans l'entreprise que le mandataire judiciaire sollicite l'intervention du régime de garantie des salaires (AGS) par la présentation des relevés qu'il a établis et transmis au Centre de Gestion et d'Etude AGS (CGEA). Le CGEA compétent verse des avances sur créances salariales au mandataire judiciaire. Il appartient ensuite au mandataire judiciaire de reverser immédiatement les sommes aux salariés.

Le CGEA doit avancer les sommes comprises dans les relevés de créances, même en cas de contestation par un tiers, ainsi que celles correspondant à des créances établies par décisions de justice exécutoire même si les délais de garantie sont expirés. Les décisions de justice sont de plein droit opposables à l'AGS.

La Cour de cassation juge que les créances résultant d'une rupture du contrat de travail ne sont garanties par l'AGS que lorsque la rupture intervient dans les périodes précisées par l'article L. 3258 2° du code du travail, mais l'AGS doit garantir le paiement des créances indemnitaires résultant de la rupture du contrat de travail intervenue effectivement pendant les périodes précitées, peu important le fait qu'aucune lettre de licenciement n'ait été notifiée (ce qui compte c'est la rupture du contrat de travail pas la forme).

La Cour de cassation juge que la garantie de l'AGS n'est due que dans le cas de ruptures de contrat de travail à l'initiative de l'administrateur judiciaire ou du mandataire liquidateur, ou de l'employeur le cas échéant, intervenues au cours des périodes visées à l'article L. 3253-8 2° du code du travail.

- Sur les congés payés -

Aux termes de l'article L. 3141-3 du code du travail : 'Le salarié a droit à un congé de deux jours et demi ouvrables par mois de travail effectif chez le même employeur. La durée totale du congé exigible ne peut excéder trente jours ouvrables.'.

Le congé annuel prévu à l'article L. 3141-3 du code du travail ouvre droit à une indemnité de congés payés qui n'est due qu'au salarié qui prend ses congés ou, s'il ne les prend pas, qui a été empêché de les prendre du fait de l'employeur. Seule l'impossibilité pour un salarié d'exercer le droit à congé annuel pendant la période de congés payés, du fait de l'employeur, ouvre droit au profit de ce salarié à la réparation du préjudice qui en est résulté.

En application des dispositions de l'article L. 3141-28 du code du travail, lorsque le contrat de travail est rompu avant que le salarié ait pu bénéficier de la totalité du congé auquel il avait droit, il reçoit, pour la fraction de congé dont il n'a pas bénéficié, une indemnité compensatrice de congé. L'indemnité compensatrice de congés payés est due que cette rupture résulte du fait du salarié ou du fait de l'employeur.

L'indemnité compensatrice de congés payés ne concerne en principe que les congés non pris par le salarié au titre de la période de référence en cours à la date de la rupture du contrat de travail, sauf report du solde de congés payés acquis au titre de la période antérieure à la période de référence en cours à la date de rupture du contrat de travail en raison de l'accord ou de la faute de l'employeur.

Selon l'article L. 3141-30 du code du travail, l'article L. 3141-28 du code du travail n'est pas applicable lorsque l'employeur est tenu d'adhérer à une caisse de congés en application de l'article L. 3141-32 du code du travail.

Aux termes de l'article L. 3141-32 du code du travail : 'Des décrets déterminent les professions, industries et commerces pour lesquels l'application des dispositions relatives aux congés payés comporte des modalités particulières, telles que la constitution de caisses de congés auxquelles les employeurs intéressés s'affilient obligatoirement. Ces décrets fixent la nature et l'étendue des obligations des employeurs, les règles d'organisation et de fonctionnement des caisses ainsi que la nature et les conditions d'exercice du contrôle de l'Etat à leur égard.'

Les droits à congés payés sont acquis par le salarié mois par mois de travail effectif. Tout salarié a ainsi droit à un congé payé annuel qu'il a l'obligation de prendre chaque année pendant la période de prise de congé. L'employeur a l'obligation de permettre aux salariés d'exercer leur droit à congé et de les informer qu'ils doivent prendre effectivement leurs congés restants avant l'expiration de la période de prise.

Dans les professions à travail discontinu, des caisses de congés payés se substituent à l'employeur pour le paiement des indemnité de congés payés. Relève notamment de ce régime le secteur du bâtiment où les entreprises sont affiliées à une caisse de congés payés (ou congés intempéries) du BTP.

Les employeurs affiliés à une caisse de congés payés doivent acquitter des cotisations. Les employeurs ne peuvent se substituer aux caisses de congés payés pour verser des indemnités de congés payés, en se dispensant de verser les cotisations, ni même considérer leurs dette de cotisations éteinte du fait que la caisse n'a pas versé les indemnité de congés payés aux salariés.

Dans le BTP, les droits à congés sont calculés en tenant compte de toutes les périodes d'emploi effectués dans la profession durant la période de référence, c'est-à-dire d'acquisition des droits à congés. Les salariés conservent leurs droits à congés acquis d'un employeur à l'autre.

Le point de départ de l'année de référence est fixé au 1er avril. Il ne peut pas être dérogé à cette règle ni par accord collectif ni unilatéralement par l'employeur. La durée du congé annuel ainsi que le montant de l'indemnité de congés payés sont fixés de façon que les salariés à travail discontinu aient les mêmes avantages que ceux du régime général des congés payés.

Les employeurs affiliés à une caisse de congés payés doivent délivrer aux salariés concernés, avant leur départ en vacances ou à leur départ de l'entreprise, en double exemplaire, un certificat justifiant de leurs droits à congés payés. À défaut, ils peuvent être condamnés à réparer le préjudice subi par les salariés.

Le paiement de l'indemnité de congés payés est effectué par la caisse sur présentation des attestations remises par les différents employeurs au moment où le salarié prend ses congés. Toutefois, la caisse ne peut pas être condamnée au paiement des indemnités de congés payés pour les périodes non couvertes par les cotisations mises à charge de l'employeur.

En l'espèce, à la lecture des bulletins de paie produits, pour une période d'emploi comprise entre février 2017 et septembre 2018, Monsieur [V] a pris des congés comme suit :

- en décembre 2017, et à ce titre l'employeur a déduit de son salaire mensuel une somme de 314,15 euros ;

- du 16 au 28 avril 2018, et à ce titre l'employeur a déduit de son salaire mensuel une somme de 799,66 euros ;

- du 6 au 25 août 2018, et à ce titre l'employeur a déduit de son salaire mensuel une somme de 1.054,64 euros.

Monsieur [V] n'a jamais pu bénéficier des indemnités de congés payés qui lui étaient dues parce que son employeur, la société RC COUVERTURE, n'a pas réglé les cotisations dont il était redevable auprès de la caisse de congés payés du BTP. Cette carence de l'employeur n'est pas contestée par les parties, elle est d'aileurs confirmée par un courrier adressé le 4 juillet 2019 à Monsieur [V] par la caisse (absence de versement des cotisations par l'employeur pour la période postérieure au 30 juin 2017).

Comme le relève à juste titre Monsieur [V], les dispositions légales et réglementaires obligent les entreprises du bâtiment à adhérer à une caisse de congés payés du BTP, le droit au congé du salarié étant alors versé sous forme d'une indemnité pécuniaire par cette caisse sous réserve que l'employeur soit à jour de ses cotisations auprès de la caisse, cette obligation de l'employeur est liée à l'exécution de la relation contractuelle.

Chaque mois de travail effectif, au cours de l'exécution de son contrat de travail, Monsieur [V] a acquis des droits à congés payés, mais il n'a jamais perçu d'indemnités de congés payés. Après des périodes de congés payés non indemnisées en raison de la carence de l'employeur, le salarié n'était plus en mesure de faire valoir, pendant la période de prise des congés payés, ses droits acquis en la matière. Cette situation a pour cause exclusive la faute de l'employeur qui a violé ses obligations contractuelles en ne s'acquittant pas des cotisations dues à la caisse de congés payés du BTP.

L'employeur qui n'a pas rempli ses obligations envers la caisse de compensation des congés payés est tenu de réparer personnellement le préjudice subi par le salarié qui, du fait de sa carence, s'est vu refuser par ladite caisse le paiement des indemnités de congés payés dues, et n'a pas été en mesure de faire valoir ses droits à congé dans la période de référence.

Monsieur [V] dispose donc bien d'une créance en matière de congés payés, que ce soit au titre des congés pris mais non indemnisés ou des droits à congé qu'il n'a pas pu prendre,

S'agissant du montant des droits restants dus en matière de congés payés à Monsieur [V] au jour de la rupture du contrat de travail, le jugement déféré n'est pas querellé en ce que le conseil de prud'hommes a retenu une somme de 1.467,61 euros bruts au titre des droits acquis pour la période de 2017/2018 et une somme de 1.109,15 euros bruts au titre des droits acquis pour la période de 2018/2019.

À compter de la rupture de son contrat de travail, Monsieur [V] pouvait donc prétendre au paiement de ces sommes au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés due par l'employeur.

Si cette créance au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés n'est exigible qu'à compter de la rupture du contrat de travail, elle trouve son fondement, ou sa source, non dans la rupture (en l'espèce une démission notifiée par le salarié), mais dans l'exécution du contrat de travail, alors que le salarié a acquis, mois par mois au cours de sa période de travail effectif, des droits à congés payés.

La créance en matière de congés payés de Monsieur [M] [V] susvisée est donc une créance liée à l'exécution du contrat de travail et non à sa rupture, qui, s'agissant de la garantie de l'AGS, relève de l'article L. 3253-8 1° du code du travail, et non de l'article L. 3253-8 2° du même code.

Il en résulte que la SELARL MJ DE L'ALLIER, représentée par Maître [I] [E], en qualité de mandataire liquidateur de la SASU RC COUVERTURE, avait l'obligation de porter cette créance sur le relevé des créances salariales de Monsieur [V] et que, faute de fonds disponibles, le CGEA d'[Localité 6], en tant que délégation AGS compétente, devait faire l'avance des sommes dues à ce titre sans pouvoir opposer l'existence d'une démission du salarié.

Après avoir quelque peu tergiversé, le mandataire judiciaire a reconnu le droit à créance en matière de congés payés de Monsieur [M] [V], en première instance comme en appel, ce qui n'a pas été le cas du CGEA d'[Localité 6] en tant que délégation AGS.

Le jugement entrepris sera confirmé en ce que le conseil de prud'hommes a fixé les créances de Monsieur [V] dans le cadre de la liquidation judiciaire de la société RC COUVERTURE, aux sommes de 1.467,61 euros bruts au titre des congés payés pour la période de 2017/2018 et de 1.109,15 euros bruts au titre des congés payés pour la période de 2018/2019, en ce que le premier juge a condamné la SELARL MJ DE L'ALLIER, représentée par Maître [E] [I], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société RC COUVERTURE, à rectifier le relevé de créances de Monsieur [V] en incluant les congés payés de celui-ci, soit les sommes de 1.467,61 euros pour la période de 2017/2018 et de 1.109,15 euros pour la période de 2018/2019, en ce qu'il a condamné la SELARL MJ DE L'ALLIER, représentée par Maître [E] [I], à transmettre ledit relevé de créances rectifiés à l'AGS et au CGEA, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du 20ème jour suivant la notification de la présente décision et en ce qu'il s'est réservé le droit de liquider l'astreinte.

- Sur les dommages-intérêts -

La cour constate que la demande de dommages-intérêts de Monsieur [V] porte uniquement sur la réparation du préjudice subi en raison d'une faute commise par la société RC COUVERTURE en tant qu'employeur, et non au titre d'une faute qui aurait été commise par le mandataire judiciaire ou par le CGEA compétent en tant que délégation AGS.

En ne réglant pas les cotisations dues à la caisse de congés payés du BTP pendant l'exécution du contrat de travail, l'employeur a manqué à ses obligations contractuelles vis-à-vis du salarié concerné. Monsieur [V] a subi un préjudice du fait de la faute de la société RC COUVERTURE puisqu'il n'a pas été indemnisé pour les périodes de congé prises et n'a plus été en mesure de faire valoir ses droits à congés payés avant la rupture du contrat de travail. La créance qui en résulte pour le salarié est bien liée à une exécution fautive du contrat de travail par l'employeur, et non à la rupture du contrat de travail.

Au regard des principes susvisés et des éléments d'appréciation dont la cour dispose, le premier juge a fait une exacte appréciation des circonstances de la cause ainsi que des droits et obligations des parties en fixant à la somme de 800 euros, au passif de la procédure collective de la société RC COUVERTURE, la créance de dommages et intérêts de Monsieur [V] pour exécution déloyale du contrat de travail par l'employeur.

- Sur la garantie de l'AGS -

L'AGS couvre, dans certaines limites, les sommes dues au salarié en exécution du contrat de travail et les créances du salarié résultant de la rupture de son contrat de travail.

Les sommes versées ou avancées par l'AGS sont nette de cotisations et de contributions salariales d'origines légales et conventionnelles et du prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu, l'AGS versant directement aux organismes concernés le montant du précompte.

L'AGS couvre les sommes dues au salarié en exécution du contrat de travail à la date du jugement d'ouverture de la procédure de redressement ou de liquidation judiciaire. L'AGS couvre ainsi notamment l'indemnité de congés payés ou l'indemnité compensatrice de congés payés pour la période antérieure à l'ouverture de la procédure collective.

Ne sont notamment pas couvertes par l'AGS certaines sommes liées à la demande en justice : dépens, frais irrépétibles sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, dommages-intérêts pour résistance abusive, liquidation d'astreinte, frais d'huissier.

En l'espèce, le présent arrêt est opposable à l'UNEDIC, CGEA d'[Localité 6], en qualité de gestionnaire de l'AGS.

La garantie de l'AGS s'exercera dans la limite des plafonds légaux, s'agissant de sommes dues au titre de l'exécution du contrat de travail.

Pour le surplus, l'UNEDIC, CGEA d'[Localité 6], en tant que délégation AGS, souhaite que la cour rappelle l'existence d'un certain nombre de principes s'agissant de l'opposabilité de la présente décision, des limites de la garantie de l'AGS, de l'absence de possibilité de condamnation à son encontre, de la procédure en matière d'avances sur créances etc.

Il échet de rappeler que l'office du juge consiste à trancher un litige, non à rappeler l'existence des textes applicables, voire à dresser la liste des articles de référence du code du travail, concernant des points ou questions qui ne font pas querelle au regard des prétentions énoncées au dispositif des dernières conclusions des parties.

- Sur les intérêts -

Comme l'a rappelé le premier juge, l'article L. 622-28 du code de commerce pose le principe de l'arrêt du cours des intérêts à la date du jugement d'ouverture de la procédure collective pour les créances ayant leur origine avant ledit jugement.

- Sur les dépens et frais irrépétibles -

Sa responsabilité personnelle n'étant ni mise en cause par les autres parties ni reconnue par décision de justice, la SELARL MJ DE L'ALLIER, représentée par Maître [I] [E], ne doit être condamnée aux entiers dépens de première instance ainsi qu'à payer à Monsieur [M] [V] la somme de1.000 euros au titre des frais irrépétibles qu'en sa qualité de mandataire liquidateur de la SASU RC COUVERTURE. Le jugement sera réformé en ce sens.

La SELARL MJ DE L'ALLIER, représentée par Maître [I] [E], en qualité de mandataire liquidateur de la société RC COUVERTURE, sera condamnée aux entiers dépens d'appel ainsi qu'à verser à Monsieur [M] [V] une somme de 100 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

- Joint les instances numéros RG 19/02357 et 20/00037 pendantes devant la chambre sociale de la cour d'appel de Riom qui font l'objet du présent arrêt ;

- Réformant le jugement déféré, condamne la SELARL MJ DE L'ALLIER, représentée par Maître [I] [E], en qualité de mandataire liquidateur de la société RC COUVERTURE, à payer à Monsieur [M] [V] la somme de1.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- Réformant le jugement déféré, condamne la SELARL MJ DE L'ALLIER, représentée par Maître [I] [E], en qualité de mandataire liquidateur de la société RC COUVERTURE, aux entiers dépens de la présente instance ;

- Confirme le jugement déféré en toutes ses autres dispositions non contraires ;

- Y ajoutant, condamne la SELARL MJ DE L'ALLIER, représentée par Maître [I] [E], en qualité de mandataire liquidateur de la société RC COUVERTURE, à verser à Monsieur [M] [V] une somme de 100 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

- Condamne la SELARL MJ DE L'ALLIER, représentée par Maître [I] [E], en qualité de mandataire liquidateur de la société RC COUVERTURE, aux dépens d'appel ;

- Déclare le présent arrêt commun et opposable au CGEA d'[Localité 6] en tant que délégation AGS ;

- Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Ainsi fait et prononcé lesdits jour, mois et an.

Le greffier, Le Président,

N. BELAROUI C. RUIN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Riom
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19/02357
Date de la décision : 07/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-07;19.02357 ?
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