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24/05/2022 | FRANCE | N°20/00055

France | France, Cour d'appel de Riom, Chambre sociale, 24 mai 2022, 20/00055


24 MAI 2022



Arrêt n°

KV/NB/NS



Dossier N° RG 20/00055 - N° Portalis DBVU-V-B7E-FLCT



Société [7]

/

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE L'ALLIER, .M. LE CHEF DE L'ANTENNE [8], (salarié : M. [U] [G])

Arrêt rendu ce VINGT QUATRE MAI DEUX MILLE VINGT DEUX par la QUATRIEME CHAMBRE CIVILE (SOCIALE) de la Cour d'Appel de RIOM, composée lors du délibéré de :



M. Christophe RUIN, Président



Mme Karine VALLEE, Conseiller



Mme Claude VICARD, Conseiller



En prés

ence de Mme Nadia BELAROUI, Greffier lors des débats et du prononcé



ENTRE :



Société [7]

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité ...

24 MAI 2022

Arrêt n°

KV/NB/NS

Dossier N° RG 20/00055 - N° Portalis DBVU-V-B7E-FLCT

Société [7]

/

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE L'ALLIER, .M. LE CHEF DE L'ANTENNE [8], (salarié : M. [U] [G])

Arrêt rendu ce VINGT QUATRE MAI DEUX MILLE VINGT DEUX par la QUATRIEME CHAMBRE CIVILE (SOCIALE) de la Cour d'Appel de RIOM, composée lors du délibéré de :

M. Christophe RUIN, Président

Mme Karine VALLEE, Conseiller

Mme Claude VICARD, Conseiller

En présence de Mme Nadia BELAROUI, Greffier lors des débats et du prononcé

ENTRE :

Société [7]

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis

[Adresse 9]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Sylvie RUEDA-SAMAT de la SELARL RINGLE ROY & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE

APPELANTE

ET :

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE L'ALLIER

[Adresse 6]

[Localité 1]

Représentée par Me Valérie BARDIN-FOURNAIRON de la SAS HDV AVOCATS, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

.M. LE CHEF DE L'ANTENNE [8]

[Adresse 3]

[Localité 5]

non comparant ni représenté - convoqué par LRAR le 06/07/21- AR signé le 07/07/21

salarié : M. [U] [G]

INTIMES

Mme VALLEE, Conseiller en son rapport, après avoir entendu, à l'audience publique du 11 Avril 2022, tenue en application de l'article 945-1 du code de procédure civile, sans qu'ils ne s'y soient opposés, les représentants des parties en leurs explications, en a rendu compte à la Cour dans son délibéré

après avoir informé les parties que l'arrêt serait prononcé, ce jour, par mise à disposition au greffe conformément aux dispositions de l'article 450 du code de procédure civile.

FAITS ET PROCÉDURE

Le 18 décembre 2012, M. [Y] [E], salarié de la société [7], a déposé auprès de la caisse primaire d'assurance maladie ( CPAM) de l'ALLIER une déclaration de maladie professionnelle en joignant un certificat médical en date du 8 novembre 2012 faisant état de ' plaques pleurales partiellement calcifiées et nodulaires bilatérales sans atteinte pulmonaire chez un patient non tabagique et sans insuffisance respiratoire suite à une exposition à l'amiante.'

Après délai complémentaire d'instruction, la CPAM de l'ALLIER a notifié le 3 juin 2013 à la société [7] la prise en charge de la maladie déclarée au titre du tableau n°30 des maladies professionnelles.

La société [7] a saisi la commission de recours amiable de la caisse d'une contestation de cette décision de prise en charge par lettre en date du 10 juillet 2013.

Par lettre en date du 7 août 2013, la CARSAT a fait connaître à la société [7] que la maladie professionnelle de M. [Y] [E] était inscrite au compte spécial.

Par courrier du 28 août 2013, la commission de recours amiable a indiqué à l'employeur qu'en l'état de la décision de la CARSAT, son recours se trouvait sans objet et qu'elle procédait au classement du dossier.

Par lettre recommandée en date du 11 octobre 2013, la société [7] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de l'ALLIER d'un recours contre la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable de la CPAM de l'ALLIER relative à sa demande visant à lui voir déclarer inopposable la prise en charge de la maladie déclarée par M. [Y] [E].

Par jugement en date du 2 juin 2017, le tribunal des affaires de sécurité sociale de l'ALLIER a :

- constaté que la société ne justifie pas d'un intérêt à agir dans le cadre de la présente instance visant à obtenir l'inopposabilité de la prise en charge de la maladie professionnelle de M. [Y] [E] compte-tenu de l'affectation des conséquences de cette reconnaissance au compte spécial en application des dispositions de l'article 2 de l'arrêté du 16 octobre 1995 et fait droit à la fin de non-recevoir invoquée par la CPAM de l'ALLIER ;

- débouté la société [7] de l'intégralité de ses demandes.

Par déclaration reçue au greffe de la cour le 21 juin 2017, la société [7] a interjeté appel de ce jugement.

L'affaire a été radiée du rang des affaires en cours par ordonnance du 15 mai 2018.

Réinscrite au rôle le 7 janvier 2020 à l'initiative de la société appelante, elle a été fixée à l'audience du 11 avril 2022, à laquelle M. le chef de l'antenne [8], quoique régulièrement convoqué par lettre recommandée dont l'avis de réception a été signé le 7 juillet 2021, n'a pas comparu ni ne s'est fait représenter.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par ses conclusions n°2 oralement soutenues à l'audience, la société [7] demande à la cour de :

- réformer le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de l'ALLIER en ce qu'il a déclaré son recours irrecevable faute d'intérêt à agir ;

En conséquence,

Au principal :

- dire et juger que la législation française relative au régime général de la sécurité sociale est inapplicable en l'espèce, M. [Y] [E] ayant le statut d'expatrié et à ce titre, celui de cotisant à la caisse des Français de l'étranger seule compétente ;

- dire et juger en conséquence que la décision de prise en charge par la CPAM est irrégulière et que la maladie ne peut lui être imputée ;

Subsidiairement :

- dire et juger que la maladie professionnelle de M.[Y] [E] ne lui est pas imputable, la CPAM reconnaissant que le salarié n'a pas été exposé au risque ;

- en tout état de cause, constater que le principe du contradictoire n'a pas été respecté ;

- dire et juger que la décision de prise en charge de la maladie de M. [Y] [E] ne lui est pas opposable ;

- condamner la CPAM à lui verser la somme de 1.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ses dernières écritures notifiées le 30 mars 2022, oralement soutenues à l'audience, la CPAM de l'ALLIER demande à la cour de :

- confirmer le jugement de première instance ;

- débouter la société [7] de l'ensemble de ses demandes ;

- condamner la société [7] à payer la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions susvisées des parties, oralement soutenues à l'audience, pour l'exposé de leurs moyens.

MOTIFS

- Sur la recevabilité du recours de la société [7] :

L'article 31 du code de procédure civile rend irrecevable l'action engagée par celui qui n'aurait pas un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention.

Selon la CPAM de l'ALLIER, la décision prise par la CARSAT d'imputer la maladie déclarée par M. [Y] [E] au compte spécial prive la société [7] d'un intérêt à agir en contestation de la décision de prise en charge au titre de la législation sur les risques professionnels.

L'affectation par la CARSAT des conséquences de la reconnaissance de la maladie professionnelle de M. [Y] [E] au compte spécial en application des dispositions de l'article 2 de l'arrêté du 16 octobre 2015 permet certes à la société [7] de ne pas voir son compte employeur imputé et d'échapper aux conséquences financières subséquentes.

Toutefois, contrairement à ce qu'ont conclu les premiers juges, l'imputation au compte spécial de la maladie professionnelle déclarée par M. [Y] [E] ne supprime pas l'intérêt à agir de l'employeur, ce dernier ayant toujours intérêt à faire établir que la décision de prise en charge qui lui est notifiée n'est pas conforme aux dispositions légales et réglementaires, peu important que cette notification n'ait été faite qu'au titre de sa qualité de dernier employeur n'ayant pas exposé le salarié au risque professionnel.

Par infirmation du jugement entrepris, il y a lieu dès lors de rejeter la fin de non recevoir soulevée par la CPAM de l'ALLIER et de déclarer recevable le recours introduit par la société [7] à l'encontre de la décision de prise en charge de la maladie déclarée par M. [Y] [E].

Le jugement entrepris qui a mis fin à l'instance en déclarant irrecevable l'action formée par la société [7] étant infirmé, il sera fait application de la faculté d'évocation prévue par l'article 568 du code de procédure civile dès lors que les parties ont conclu au fond et qu'il est dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice de donner à l'affaire une solution définitive.

- Sur la compétence de la CPAM de l'ALLIER pour instruire la déclaration de maladie professionnelle :

Il résulte des articles L142-5 et R142-1 du code de la sécurité sociale, tels qu'en vigueur à la date du recours, que le recours gracieux devant la commission de recours amiable d'un organisme de sécurité sociale constitue un préalable obligatoire au recours contentieux devant les juridictions du contentieux général de la sécurité sociale.

Il est toutefois de principe que cette obligation d'introduction préalable d'un recours gracieux ne fait pas obstacle à ce que l'employeur qui conteste une décision de prise en charge d'une maladie professionnelle puisse invoquer devant la juridiction de sécurité sociale d'autres moyens que ceux soulevés devant la commission de recours amiable de l'organisme de sécurité sociale dont elle émane.

En l'espèce, par courrier expédié le 10 juillet 2013 et réceptionné le lendemain par la CPAM de l'ALLIER, la société [7] a saisi la commission de recours amiable de cet organisme de sécurité sociale d'une contestation afférente à la décision de prise en charge, au titre de la législation sur les risques professionnels, de la maladie déclarée par M. [Y] [E] le 18 décembre 2012. A l'appui de ce recours administratif destiné à obtenir une déclaration d'inopposabilité à son égard de cette décision de prise en charge, elle a fait valoir que ce salarié n'a pas effectué en son sein l'un des travaux listés par le tableau des maladies professionnelles appliqué et que la caisse a méconnu le principe du contradictoire.

En cause d'appel, la société [7] invoque, à l'appui de sa demande en inopposabilité, l'incompétence de la CPAM de l'ALLIER pour instruire le dossier de maladie professionnelle de M. [Y] [E] au motif que compte tenu de sa qualité de travailleur expatrié, ce dernier a cotisé uniquement auprès de la caisse des français de l'étranger, et non au régime général de la sécurité sociale française dont il ne relevait pas.

Peu important que ce moyen n'ait pas été préalablement soutenu devant la commission de recours amiable, dès lors qu'il est invoqué en support à une demande d'inopposabilité présentée devant cette instance de recours administratif, la société [7] est recevable à le développer devant la cour.

Sur le fond, l'employeur verse notamment aux débats le contrat de travail initial de son salarié ainsi que ses avenants successifs conclus à raison d'expatriations multiples, outre l'attestation de radiation établie par la caisse des Français de l'étranger le 1er décembre 2016, de laquelle il ressort que M. [Y] [E] relevait de cet organisme au titre de l'assurance volontaire des français de l'étranger pour les risques maladie-maternité-invalidité, indemnités journalières-décès, accidents du travail et vieillesse jusqu'au 31 décembre 2013. Ces pièces établissent l'affiliation de ce salarié à la caisse des Français de l'étranger lors du dépôt, le 18 décembre 2012, de la déclaration de la maladie professionnelle, circonstance que ne conteste d'ailleurs pas la CPAM de l'ALLIER, fût-ce à titre subsidiaire, laquelle ne soumet pas davantage aux débats d'arguments pour soutenir que cette affiliation à la caisse des Français de l'étranger ne la rendait pas pourtant incompétente pour instruire la déclaration de maladie professionnelle et se prononcer sur la prise en charge de la pathologie au titre de la législation sur les risques professionnels.

Il apparaît pourtant à la lecture des pièces communiquées que le salarié a adressé sa déclaration de maladie professionnelle à la CPAM de l'ALLIER qui a diligenté une enquête administrative avant de prendre une décision sur la prise en charge de la pathologie au titre de la législation sur les risques professionnels.

A tort, et sans que cela ne puisse être reproché à l'employeur, la CPAM de l'ALLIER a donc instruit la demande et admis la prise en charge de la maladie affectant M. [Y] [E], alors même que celui-ci, eu égard à sa qualité de salarié expatrié et son affiliation auprès de la caisse des Français à l'étranger, ne relevait pas du régime général de sécurité sociale appliqué par l'intimée.

Il résulte de ces considérations que la CPAM de l'ALLIER n'avait pas compétence pour connaître de la déclaration de maladie professionnelle déposée par M. [Y] [E], en sorte que la décision de prise en charge notifiée à l'employeur le 3 juin 2013 ne peut être valablement opposée à ce dernier, lequel se trouve dès lors bien fondé à voir juger cette décision inopposable à son égard sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens complémentaires qu'il a développés.

- Sur les dépens et les frais irrépétibles :

La CPAM de l'ALLIER qui succombe à la procédure au sens de l'article 696 du code de procédure civile sera condamnée aux entiers dépens d'appel, ce qui exclut qu'il soit fait droit à la demande qu'elle présente au titre des frais irrépétibles.

Pour des raisons d'équité, elle sera en revanche dispensée de verser à la société [7] une indemnité fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,

- Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a retenu la fin de non recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir de la société [7], et statuant à nouveau sur ce point, déclare le recours que cette société a formé devant la juridiction de sécurité sociale recevable ;

- Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société [7] de l'intégralité de ses demandes et statuant à nouveau sur ce point, déclare inopposable à la société [7] la décision de la CPAM de l'ALLIER, notifiée le 3 juin 2013, de prendre en charge au titre de la législation sur les risques professionnels la maladie déclarée par M. [Y] [E] ;

Y ajoutant,

- Rejette les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamne la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE de l'ALLIER aux dépens d'appel ;

- Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

Ainsi fait et prononcé lesdits jour, mois et an.

Le greffier, Le Président,

N. BELAROUI C. RUIN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Riom
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20/00055
Date de la décision : 24/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-24;20.00055 ?
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