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17/05/2022 | FRANCE | N°19/02157

France | France, Cour d'appel de Riom, Chambre sociale, 17 mai 2022, 19/02157


17 MAI 2022



Arrêt n°

FD/NB/NS



Dossier N° RG 19/02157 - N° Portalis DBVU-V-B7D-FKE2



Société JACQUET PANIFICATION A



/



[P] [X]

Arrêt rendu ce DIX SEPT MAI DEUX MILLE VINGT DEUX par la QUATRIEME CHAMBRE CIVILE (SOCIALE) de la Cour d'Appel de RIOM, composée lors des débats et du délibéré de :



M. Christophe RUIN, Président



Mme Claude VICARD, Conseiller



Mme Frédérique DALLE, Conseiller



En présence de Mme Nadia BELAROUI greffier lors de

s débats et du prononcé



ENTRE :



Société JACQUET PANIFICATION, prise en la personne de son représentant légal en exercice y domicilié ès qualité.

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Repré...

17 MAI 2022

Arrêt n°

FD/NB/NS

Dossier N° RG 19/02157 - N° Portalis DBVU-V-B7D-FKE2

Société JACQUET PANIFICATION A

/

[P] [X]

Arrêt rendu ce DIX SEPT MAI DEUX MILLE VINGT DEUX par la QUATRIEME CHAMBRE CIVILE (SOCIALE) de la Cour d'Appel de RIOM, composée lors des débats et du délibéré de :

M. Christophe RUIN, Président

Mme Claude VICARD, Conseiller

Mme Frédérique DALLE, Conseiller

En présence de Mme Nadia BELAROUI greffier lors des débats et du prononcé

ENTRE :

Société JACQUET PANIFICATION, prise en la personne de son représentant légal en exercice y domicilié ès qualité.

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Séverine FOURVEL, avocat de la SELAS BARTHELEMY AVOCATS, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

APPELANTE

ET :

M. [P] [X]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Pauline DISSARD, avocat de la SELARL BADJI-DISSARD, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

INTIME

Après avoir entendu Mme DALLE, Conseiller en son rapport, les représentants des parties à l'audience publique du 14 Mars 2022, la Cour a mis l'affaire en délibéré, Monsieur le Président ayant indiqué aux parties que l'arrêt serait prononcé, ce jour, par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 du code de procédure civile.

FAITS ET PROCÉDURE

Monsieur [P] [X] a été embauché suivant contrat a durée indéterminée a compter du 5 juin 2001 en qualité d'opérateur de fabrication.

Monsieur [X] a été placé en arrêt de travail et a bénéficié d' un mi-temps thérapeutique. Le 11 mai 2017, il a été déclaré apte à une reprise a temps plein.

Le 19 juillet 2017, par requête expédiée en recommandé, Monsieur [X] a saisi le conseil de prud'hommes de RIOM aux fins notamment de voir prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail outre obtenir diverses sommes à titre indemnitaire et de rappel de salaires.

Il a été sanctionné par un avertissement le 20 juillet 2017 et d'une mise a pied disciplinaire le 20 septembre 2017

Il a été déclaré inapte à son poste de travail suivant avis du 14 novembre 2017.

Par courrier en date du 21 novembre 2017, Monsieur [X] a été convoqué à un entretien préalable à licenciement.

Monsieur [X] a été licencié pour inaptitude et le contrat de travail a pris fin le 8 décembre 2017.

Le courrier de notification est ainsi libellé :

' Monsieur [X],

Vous avez été déclaré inapte aux fonctions d'opérateur de fabrication que vous exerciez précédemment par le Docteur [B] [W], Médecin du travail, à l'issue d'un examen médical du 14 novembre 2017.

Nous vous avons reçu le 4 décembre 2017 pour l'entretien préalable au licenciement que nous envisagions de prononcer à votre encontre.

Le Médecin du travail a indiqué dans l'avis d'inaptitude physique 'dispense de l'obligation de reclassement : tout maintien dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé.'

Nous sommes donc contraints de procéder à votre licenciement en raison de votre inaptitude physique médicalement constatée.

Votre contrat de travail sera rompu à la date d'envoi de la présente notification, soit le 8 décembre 2017.

Nous vous adresserons par pli séparé un certificat de travail, un reçu pour solde de tout compte et une attestation Pôle Emploi, ainsi que les salaires et indemnités qui vous sont dus.

Nous vous prions d'agréer, Monsieur, l'assurance de notre sincère considération.'

L'audience devant le bureau de conciliation et d'orientation s'est tenue en date du 21septembre 2017 et, comme suite au constat de l'absence de conciliation (convocation notifiée au défendeur le 27 juillet 2017), l'affaire a été renvoyée devant le bureau de jugement.

Par jugement contradictoire en date du 2 octobre (audience du 12 juin 2019), le conseil de prud'hommes de RIOM a :

- Dit et jugé que la demande de résiliation judiciaire est dépourvue d'élément justifiant un manquement grave de la société JACQUET PANIFICATION ;

- Débouté Monsieur [X] de sa demande de résiliation judicaire et des conséquences indemnitaires invoquées ;

- Dit et jugé que les griefs invoqués pour fonder l'avertissement du 20 juillet 2017 et la mise à pied disciplinaire du 20 septembre 2017 ne sont pas de nature à justifier des sanctions ;

- Dit et jugé que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse en l'absence de consultation des délégués du personnel ;

En conséquence,

- Dit et jugé que Monsieur [X] peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 1226-15 du Code du travail en vigueur à l'époque des faits ;

- Condamné la société JACQUET PANIFICATION a payer et porter à Monsieur [X] la somme de 21 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- Débouté Monsieur [X] du surplus de ses demandes ;

- Débouté la société JACQUET PANIFICATION de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamné la société JACQUET PANIFICATION à payer et porter à Monsieur [X] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- Rappelé que l'exécution provisoire est de droit dans les termes et limites de l'article R.l454-28 du Code du travail ;

- Condamné la société JACQUET PANIFICATION aux entiers dépens de l'instance.

Le 14 novembre 2019, la société JACQUET PANIFICATION a interjeté appel de ce jugement qui lui a été notifié à sa personne le 31 octobre 2019.

Vu les conclusions notifiées à la cour le 5 août 2020 par la société JACQUET PANIFICATION,

Vu les conclusions notifiées à la cour le 13 mai 2020 par Monsieur [X],

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 14 février 2022.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses dernières écritures, la société JACQUET PANIFICATION demande à la cour de :

A titre principal

Sur la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail de Monsieur [X] :

- Constater que la modification des horaires de travail, qui constitue un simple changement des conditions de travail et relève du pouvoir de direction de l'employeur, n'est pas soumise à l'approbation du salarié ;

- Constater que Monsieur [X] a bénéficié de ses tickets restaurants ;

- Juger que la société JACQUET PANIFICATION n'a commis aucun manquement grave de nature a empêcher la poursuite du contrat de travail ;

En conséquence,

- Confirmer le jugement du Conseil de Prud'hommes de Riom rendu en date du 2 octobre 2019 en ce qu'il a débouté Monsieur [X] de sa demande de résiliation judiciaire et des conséquences indemnitaires invoquées ;

- Débouter Monsieur [X] de ses demandes relatives à la résiliation judiciaire de son contrat de travail ;

Sur le bien-fondé de la rupture du contrat de travail de Monsieur [X] :

- Constater que le médecin du travail a mentionné que 'tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé' ;

- Juger que l'impossibilité de reclassement du salarié en application de l'article L.1226-2-1 du code du travail emporte l'absence d'obligation d'informer et consulter les délégués du personnel ;

En conséquence,

- Infirmer le jugement du Conseil de Prud'hommes de RIOM en ce qu'il a jugé que le licenciement de Monsieur [X] était dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamné la société JACQUET PANIFICATION au versement de la somme de 21 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- Débouter Monsieur [X] de ses demandes relatives à la rupture de son contrat de travail pour inaptitude et impossibilité de reclassement ;

Sur les sanctions disciplinaires adressées à Monsieur [X] :

- Constater que les faits reprochés à Monsieur [X] sont susceptibles

de sanctions disciplinaires ;

En conséquence,

- Infirmer le jugement du Conseil de Prud'hommes de RIOM en ce qu'il a annulé l'avertissement, en date du 20 juillet 2017, et la mise à pied disciplinaire, en date du 20 septembre 2017 ;

- Débouter Monsieur [X] de sa demande d'annulation des sanctions disciplinaires ;

Sur les dispositions article 700 du Code de procédure civile :

- Condamner Monsieur [X] à verser à la société JACQUET PANIFICATION la somme de 3.500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- Condamner Monsieur [X] aux éventuels dépens ;

A titre subsidiaire,

Dans l'hypothèse où la Cour entrait en voie de condamnation concernant la demande de résiliation judiciaire de Monsieur [X] :

- Débouter Monsieur [X] de sa demande relative à l'indemnité de licenciement ;

- Débouter Monsieur [X] de sa demande relative à l'indemnité de préavis ;

- Limiter la demande de Monsieur [X] au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à l'équivalent de 13.5 mois de salaire, à charge pour ce dernier de rapporter la preuve d'un préjudice à cette hauteur ;

Dans l'hypothèse où la Cour déclarerait le licenciement de Monsieur [X] comme étant dépourvu de cause réelle et sérieuse :

- Infirmer le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de RIOM ;

- Rapporter à une plus juste valeur la demande de Monsieur [X] au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse dans la limite de 13.5 mois de salaire, à charge pour ce dernier de rapporter la preuve d'un préjudice à cette hauteur.

La société JACQUET PANIFICATION soutient tout d'abord que Monsieur [X] verra sa demande en résiliation judiciaire du contrat de travail rejetée.

Elle affirme, au soutien de son propos, que la modification des horaires de travail ne constitue pas une modification du contrat de travail mais un simple changement des conditions de travail relevant du pouvoir de direction de l'employeur. De plus, elle fait valoir que le changement d'horaires de travail a été mineur et constitue donc un simple changement des conditions de travail qui ne justifie aucunement une résiliation judiciaire du contrat de travail.

Elle avance ensuite que le salarié a bien bénéficié de tickets restaurants, contrairement à ce qu'il avance. En effet elle souligne que les pièces produites, et notamment une liste d'émargement de mai à juin 2017, démontrent qu'il a bien perçu lesdits tickets.

Elle conclut qu'aucun manquement suffisamment grave de nature à interrompre l'exécution du contrat de travail du salarié n'est démontré.

La société JACQUET PANIFICATION soulève ensuite le bien-fondé du licenciement de Monsieur [X].

Elle soutient notamment qu'elle n'avait n'avait aucune obligation de consultation des représentants du personnel dans la mesure où elle avait été dispensée de recherche de reclassement par le médecin du travail, en application des dispositions de l'article L.1226-2-1 du code du travail.

L'employeur conclut que le salarié verra sa demande au titre du licenciement rejetée.

La société JACQUET PANIFICATION soutient ensuite que les sanctions disciplinaires, adressées le 20 juillet 2017 et le 20 septembre 2017 à Monsieur [X] sont fondées.

Elle soutient en effet établir l'existence de manquements relatifs à l'insubordination du salarié qui justifient les sanctions. Elle précise que le salarié a été mis en demeure le 18 juillet 2017 de respecter ses horaires de travail conformément à son contrat de travail et ajoute que ce même jour, celui-ci a fait preuve d'un comportement irrespectueux à l'encontre de son supérieur hiérarchique, refusant de le laisser lui parler et adoptant un ton menaçant. Elle indique que ce comportement a entraîné la notification d'un avertissement au salarié dans un courrier en date du 20 juillet 2017. Elle souligne que ce courrier n'a donné lieu à aucune contestation. Elle ajoute que Monsieur [X] a maintenu l'irrespect de ses horaires de travail pendant les mois de juillet, août et septembre 2017. Dès lors, une mise à pied disciplinaire a été notifiée au salarié par courrier en date du 20 septembre 2017. Elle précise que là encore ce courrier n'a pas été contesté.

Elle conclut que les manquements sont avérés et sollicite le rejet de la demande de Monsieur [X].

La société JACQUET PANIFICATION soutient, à titre subsidiaire, que si la cour entrait en voie de condamnation, Monsieur [X] devrait être débouté de sa demande tendant à obtenir le versement d'une indemnité de licenciement. Elle affirme que le salarié a déjà perçu une indemnité suite à son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement. Dès lors, il ne saurait revendiquer, à nouveau, le versement d'une indemnité de licenciement qu'il a déjà perçu.

L'employeur fait valoir en outre que le salarié verra sa demande tendant à obtenir le versement d'une indemnité de préavis rejetée, étant donné qu'il se trouvait, en raison de son inaptitude, dans l'impossibilité d'exécuter son préavis et en raison du fait que la notification de son licenciement rompait définitivement son contrat de travail.

L'employeur considère enfin que la demande du salarié en dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse est disproportionnée. Dès lors, elle affirme que s'il est fait droit à ladite demande, son montant sera rapporté à une plus faible valeur.

Dans ses dernières écritures, Monsieur [X] demande à la cour de :

- Déclarer recevable et bien-fondé Monsieur [X] en sa demande ;

A titre principal,

- Confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a indiqué que les griefs invoqués pour fonder l'avertissement du 20 juillet 2017 et la mise à pied disciplinaire du 20 septembre 2017 ne sont pas de nature à justifier des sanctions ;

- Réformer le jugement de première instance en ce qu'il a débouté Monsieur [X] de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail ;

- En conséquence, prononcer la résiliation judicaire du contrat de travail aux torts de la société JACQUET PANIFICATION ;

- Condamner en conséquence, la société à verser à Monsieur [X]:

* La somme de 3 741.50 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre la somme de 374.15 euros bruts de congés payés y afférents ;

* La somme de 40 000.00 euros nette de CSG et CRDS et cotisations sociales, à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

A titre subsidiaire,

Si par impossible, la Cour de céans ne réformait pas le jugement de première instance sur la résiliation judiciaire de la relation de travail et ses conséquences, elle ne pourrait que confirmer le jugement du Conseil de Prud'hommes de RIOM en ce qu'il a considéré, à juste titre, le licenciement pour inaptitude de Monsieur [X] comme dépourvu de cause réelle et sérieuse.

- Confirmer que le licenciement pour inaptitude est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

- Réformer le quantum des dommages et intérêts alloués à Monsieur [X] ;

- Condamner en conséquence, la société à verser à Monsieur [X] :

* La somme de 40 000.00 euros nette de CSG et CRDS et cotisations sociales, à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

En tout état de cause,

- Confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a condamné la société JACQUET PANIFICATION à la somme de 1 500,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en première instance ;

- Y ajoutant condamner le défendeur au paiement de la somme de 3 000.00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

- Condamner en tout état de cause le défendeur aux entiers dépens de l'instance.

Monsieur [X] sollicite l'annulation des sanctions disciplinaires du 20 juillet 2017 et du 20 septembre 2017. Il avance avoir été sanctionné pour des motifs fallacieux puisqu'il a respecté les plannings transmis et ce malgré la modification du contrat de travail imposée. Il souligne verser aux débats des pièces qui corroborent ce point.

Monsieur [X] soutient ensuite que sa demande en résiliation judiciaire du contrat de travail est fondée. Il affirme démontrer la gravité du manquement commis par l'employeur. Il précise, au soutien de son propos, que ses horaires de travail ont été modifiés sans conclure d'avenant. Or, il souligne que son accord était nécessaire puisqu'il s'agit d'une modification qui porte sur un élément essentiel du contrat. Il conclut que cette modification est grave en ce qu'elle a porté atteinte à ses droits. Dès lors, la résiliation judiciaire du contrat aux torts de l'employeur est justifiée.

Monsieur [X] sollicite ensuite diverses sommes à titre indemnitaire, sommes qui découlent de la résiliation judiciaire de son contrat de travail. Il rappelle, concernant l'indemnité de licenciement, qu'il a perçu ladite indemnité seulement dans le cadre de la rupture pour inaptitude. Il sollicite en outre une somme à titre d'indemnité de préavis. Il demande de plus une somme à titre de dommages et intérêts et affirme que son préjudice est incontestable, étant donné qu'il est entré au service de l'employeur le 5 juin 2001 et s'est toujours investi dans son travail.

Monsieur [X] soutient que si par impossible il n'était pas fait droit à sa demande de résiliation judiciaire, le jugement du conseil de prud'hommes de RIOM sera confirmé en ce qu'il a considéré que son licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse. En effet, il avance que, relativement à son licenciement pour inaptitude, les délégués du personnel n'ont pas été consultés préalablement, tel qu'il ressort de la notification de licenciement. Or, il souligne le fait que la Cour de cassation a indique que la consultation des délégués du personnel était obligatoire, même dans le cas où le reclassement est impossible.

Dès lors, le salarié conclut que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse et réclame une somme à titre de dommages et intérêts de ce chef, le préjudice qu'il a subi étant incontestable.

Pour plus ample relation des faits, de la procédure, des prétentions, moyens et arguments des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il y a lieu de se référer à la décision attaquée et aux dernières conclusions régulièrement notifiées et visées.

MOTIFS

- Sur les sanctions disciplinaires -

Le droit pour l'employeur de surveiller et contrôler ses salariés sur le lieu et pendant le temps du travail est une prérogative découlant directement du contrat de travail et plus particulièrement du lien de subordination. Mais celle-ci ne doit pas porter atteinte aux droits et libertés des salariés ni enfreindre l'exigence de loyauté dans les relations contractuelles.

Les dispositions du contrat de travail relatives au droit disciplinaire dans l'entreprise, définissant la notion de sanction, les mesures interdites, la procédure à respecter par l'employeur pour garantir au salarié ses droits fondamentaux, ainsi que les pouvoirs du juge judiciaire qui s'appliquent à tout salarié, quels que soient l'activité ou la taille de l'entreprise, son ancienneté ou son statut, même s'il est en période d'essai.

Le comportement fautif du salarié doit, en principe, se manifester par un acte positif ou une abstention de nature volontaire. Ainsi, l'insuffisance professionnelle ne constitue pas un motif de sanction disciplinaire.

La faute ne peut résulter que d'un fait avéré, imputable au salarié et constituant une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail.

La mise à pied est une suspension du contrat de travail imposée par l'employeur. Elle est qualifiée de sanction si elle vise à punir un comportement fautif du salarié.

Le juge exerce un contrôle de proportionnalité en matière de sanction disciplinaire et vérifie en conséquence que la sanction prononcée par l'employeur à l'encontre du salarié n'est pas trop sévère compte tenu des faits reprochés.

Le juge doit annuler la sanction disciplinaire s'il en constate le caractère disproportionné ou injustifié.

La société JACQUET PANIFICATION fait valoir que les sanctions disciplinaires adressées le 20 juillet 2017 et le 20 septembre 2017 à Monsieur [X] sont fondées.

Elle soutient en effet établir l'existence de manquements relatifs à l'insubordination du salarié qui justifient les sanctions. Elle précise que le salarié a été mis en demeure le 18 juillet 2017 de respecter ses horaires de travail conformément à son contrat de travail et ajoute que ce même jour, celui-ci a fait preuve d'un comportement irrespectueux à l'encontre de son supérieur hiérarchique, refusant de le laisser lui parler et adoptant un ton menaçant. Elle indique que ce comportement a entraîné la notification d'un avertissement au salarié dans un courrier en date du 20 juillet 2017. Elle souligne que ce courrier n'a donné lieu à aucune contestation.

Elle ajoute que Monsieur [X] a maintenu l'irrespect de ses horaires de travail pendant les mois de juillet, août et septembre 2017. Dès lors, une mise à pied disciplinaire a été notifiée au salarié par courrier en date du 20 septembre 2017. Elle précise que là encore ce courrier n'a pas été contesté.

Monsieur [X] sollicite l'annulation des sanctions disciplinaires du 20 juillet 2017 et du 20 septembre 2017. Il avance avoir été sanctionné pour des motifs fallacieux puisqu'il a respecté les plannings transmis et ce malgré la modification du contrat de travail imposée. Il souligne verser aux débats des pièces qui corroborent ce point.

En l'espèce, Monsieur [P] [X] a été embauché suivant contrat a durée indéterminée a compter du 5 juin 2001 en qualité d'opérateur de fabrication.

Il a été sanctionné par un avertissement le 20 juillet 2017 et une mise a pied disciplinaire le 20 septembre 2017

- Sur l'avertissement du 20 juillet 2017 -

Par courrier en date du 18 juillet 2017, la société JACQUET PANIFICATION notifiait la mise en demeure suivante à Monsieur [X]:

'Monsieur,

Nous vous mettons en demeure de respecter les horaires indiquant dans l'avenant du 13 janvier 2014.

Consciente qu'il y a eu des petites erreurs de planning pendant 10 semaines allant du 9 Mai 2017 au 16 Juillet 2017 (à savoir vous avez terminé une demi-heure plus tôt que l'horaire indiqué dans votre avenant, à savoir 20h30 au lieu de 21h, sans que cela n'ait eu le moindre impact sur votre autres droits ou avantages, y compris votre rémunération), cela ne constitue en aucun cas un changement définitif des horaires telles que défini dans votre avenant.

Cette erreur ayant été repérée et vous ayant été notifiée oralement, nous vous demandons désormais de reprendre les horaires exactement définis dans l'avenant susmentionné.

Le 17 juillet vous avez refusé de terminer à 21h00 comme indiqué sur votre avenant ainsi que sur le planning affiché, et vous êtes parti à 20h30.

A défaut nous serions contraints d'envisager une sanction disciplinaire, pour rappel, comme indiqué dans le Règlement Intérieur 'Les salariés doivent se conformer aux horaires de travail applicables dans l'entreprise (site de JAI) et fixés par la direction.' (...)'

Le 18 juillet 2017, [V] [Z], responsable hiérarchique du salarié, établissait un rapport ressources humaines d'où il ressortait que le jour-même, ainsi que la veille, Monsieur [X] avait quitté son poste 'de son plein gré' à 20h30.

Par courrier en date du 20 juillet 2017, la société JACQUET PANIFICATION notifiait l'avertissement suivant au salarié:

'Monsieur,

Le 18 juillet 2017, je vous avais proposé de nous rencontrer afin d'échanger sur le fait que vous refusiez d'exécuter vos horaires de travail, conformément à votre contrat de travail.

Vous vous êtes donc présenté à mon bureau, le jour même, accompagné d'un représentant du personnel, Monsieur [D] [H].

Lors de ce rendez-vous, vous n'avez rien voulu entendre de ma part, prétextant que désormais nous devions nous adresser à votre avocat pour échanger avec vous. Je n'ai même pas pu vous adresser une seule phrase, vous nous avez informé de ce que vous prétendez être 'notre nouvel interlocuteur' et avez quitté mon bureau immédiatement sans que je puisse vous dire quoi que ce soit.

Ce comportement irrespectueux est totalement inadmissible et constitue une faute.

En effet, si nous avons effectivement eu connaissance par notre avocat que vous souhaitiez éventuellement engager une action en justice à l'égard de notre société, vous ne devez, en aucun cas, ne plus respecter votre employeur. Car pour rappel, à date, vous êtes toujours salarié de notre entreprise, et donc devez respecter le droit disciplinaire et les directives qui vous sont donnés par vos supérieurs hiérarchiques.

De manière générale, nous souhaitons attirer votre attention sur votre comportement qui n'est pas en conformité avec vos obligations professionnelles. Ces faits sont inacceptables.

C'est pourquoi, aujourd'hui nous avons décidé de vous notifier un avertissement et tenons à vous préciser que si de tels faits venaient à se reproduire nous pourrions être contraints d'envisager une sanction plus sévère.

Nous souhaitons donc vivement que vous fassiez le nécessaire pour un redressement rapide et durable.'

Il résulte ainsi de la lettre d'avertissement produite que l'employeur reproche les deux griefs suivants au salarié: un comportement irrespectueux à l'encontre de son supérieur hiérarchique et un non-respect par le salarié de ses horaires de travail.

En ce qui concerne le grief lié au comportement irrespectueux au salarié, ce grief n'est pas établi dans la mesure où il est reproché au salarié de n'avoir pas voulu engager une discussion avec l'un de ses supérieurs hiérarchiques en lui demandant de s'adresser dorénavant à son avocat, ce qui ne constitue aucunement un comportement agressif ou méprisant de la part du salarié mais le simple exercice de sa liberté personnelle. En outre, l'employeur ne verse aucune attestation et aucun autre élément de preuve démontrant que les propos tenus auraient outrepassé ce cadre alors qu'un tiers, représentant du personnel, était également présent lors de l'entretien en question.

S'agissant du grief tenant au non-respect des horaires de travail, Monsieur [X] verse aux débats ses plannings de la semaine du 17 au 22 juillet 2017 qui établissent que le salarié avait comme horaire de travail prévu celui de 17h00 à 20h30.

Monsieur [X] s'étant confirmé aux directives écrites données par son employeur quant à ses horaires de travail sur la période considérée, il ne peut non plus lui être reproché ce grief.

Ainsi l'avertissement du 20 juillet 2017 constitue une sanction injustifiée, les griefs reprochés n'étant pas matériellement établis.

- Sur la mise à pied du 20 septembre 2017 -

Par courrier en date du 20 septembre 2017, la société JACQUET PANIFICATION notifiait la mise à pied disciplinaire suivante au salarié:

'Monsieur,

Nous vous avons convoqué à un entretien, le 24 août 2017, auquel vous n'avez pas souhaité vous présenter.

Le manager, [V] [Z] vous a informé le vendredi 21 juillet 2017 que je souhaitais vous rencontrer, vous avez refusé de venir dans les bureaux, de plus depuis votre mise en demeure de respecter vos horaires, vous n'avez pas modifié votre comportement et partez à 20h30 au lieu de 21h00.

Votre insubordination et indiscipline sont inacceptables. Ce type d'agissement ne peut être toléré dans notre entreprise. Il porte préjudice à l'image de notre entreprise et perturbe son bon fonctionnement. Vous étiez absent à l'entretien fixé au 24 août 2017, nous n'avons donc pu recueillir des éléments permettant de modifier notre appréciation des faits.

En conséquence, nous sommes contraints de vous notifier par la présente votre mise à pied disciplinaire de 3 jours qui prendra effet du 14 au 16 novembre 2017.

Ces jours de mise à pied seront retenus sur votre bulletin de salaire.

Nous comptons sur votre sens des responsabilités pour que de tels faits ne se renouvellent pas à l'avenir.'

La mise à pied disciplinaire du salarié est motivée par le non-respect de ses horaires de travail sur une période comprise entre le 21 juillet et le 20 septembre 2017.

Il résulte de ce qui précède que Monsieur [X] s'est confirmé aux directives écrites données par son employeur quant à ses horaires de travail pendant la semaine du 17 au 22 juillet 2017.

L'employeur ne verse aucun élément de preuve établissant que par la suite le salarié ne s'est pas conformé aux horaires de travail communiqués par écrit.

Alors que le doute doit profiter au salarié, l'employeur ne démontre aucunement le grief reproché à Monsieur [X].

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a dit que les griefs invoqués pour fonder l'avertissement du 20 juillet 2017 et la mise à pied disciplinaire du 20 septembre 2017 ne sont pas de nature à justifier des sanctions.

- Sur la rupture du contrat de travail -

Il ressort de la chronologie du contentieux opposant la société JACQUET PANIFICATION et Monsieur [X] que le conseil de prud'hommes a d'abord été saisi d'une demande de résiliation du contrat de travail avant que ne soit notifiée la mesure de licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement prononcée par l'employeur.

Dans cette hypothèse, les juges doivent d'abord se prononcer sur les mérites de la demande de résiliation avant de statuer, le cas échéant, sur le licenciement notifié par l'employeur.

- Sur la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail -

Le salarié peut demander au juge prud'homal la résiliation judiciaire de son contrat de travail s'il estime que l'employeur manque à ses obligations.

L'action en résiliation judiciaire du contrat de travail, qui ne constitue pas une prise d'acte de la rupture, ne met pas fin au contrat de travail et implique la poursuite des relations contractuelles dans l'attente de la décision du juge du fond.

Si les manquements de l'employeur invoqués par le salarié sont suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail, le juge prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail, et donc la rupture de celui-ci aux torts de l'employeur, au jour de sa décision, sauf si le contrat de travail a déjà été interrompu et que le salarié n'est plus au service de son employeur.

En matière de résiliation judiciaire du contrat de travail, la prise d'effet ne peut être fixée qu'à la date de la décision judiciaire le prononçant, dès lors qu'à cette date le contrat de travail n'a pas été rompu et que le salarié est toujours au service de son employeur.

Cette rupture du contrat de travail produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, ou nul en cas de harcèlement ou de discrimination ou si le salarié est protégé ou si le salarié était victime d'un accident du travail ou en cas de caractérisation d'un autre cas de nullité de la rupture.

La réalité et la gravité des manquements de l'employeur invoqués par le salarié sont souverainement appréciés par les juges du fond.

C'est au salarié de rapporter la preuve des manquements de l'employeur qu'il invoque. Les juges du fond doivent examiner l'ensemble des manquement de l'employeur invoqués par la salarié, en tenant compte de toutes les circonstances intervenues jusqu'au jour du jugement. En cas de doute sur la réalité des faits allégués, il profite à l'employeur.

La société JACQUET PANIFICATION affirme que la modification des horaires de travail du salarié ne constitue pas une modification du contrat de travail mais un simple changement des conditions de travail relevant du pouvoir de direction de l'employeur. De plus, elle fait valoir que le changement d'horaires de travail a été mineur et constitue donc un simple changement des conditions de travail qui ne justifie aucunement une résiliation judiciaire du contrat de travail.

Elle conclut qu'aucun manquement suffisamment grave de nature à interrompre l'exécution du contrat de travail du salarié n'est démontré.

Monsieur [X] réplique que sa demande en résiliation judiciaire du contrat de travail est fondée dans la mesure où ses horaires de travail ont été modifiés sans conclure d'avenant. Or, il souligne que son accord était nécessaire puisqu'il s'agit d'une modification qui porte sur un élément essentiel du contrat. Il conclut que cette modification est grave en ce qu'elle a porté atteinte à ses droits. En cause d'appel, il ne soulève plus le manquement de l'employeur quant à l'absence de remise de tickets restaurants.

En l'espèce, Monsieur [X] affirme que sa demande aux fins de résiliation judiciaire repose sur la modification unilatérale du contrat de travail en ce qui concerne ses horaires de travail, ce manquement était d'une gravité telle qu'il a rendu impossible la poursuite de la relation contractuelle.

La mesure qui affecte un ou plusieurs éléments ayant déterminé le consentement à l'engagement contractuel d'un salarié correspond à une modification du contrat nécessitant l'accord de l'intéressé, lequel doit être formalisé selon une procédure particulière, qui diffère selon que le motif de la modification soit ou non de nature économique.

Dans le cas où la modification repose sur un motif économique tel que défini à l'article L.1233-3 du code du travail, l'employeur doit proposer à chaque salarié concerné la modification envisagée par lettre recommandée avec avis de réception, en l'informant de ses nouvelles conditions d'emploi et des éventuelles mesures d'accompagnement, et en lui précisant qu'il dispose d'un délai d'un mois, voire de 15 jours en cas de redressement ou liquidation judiciaire, à compter de sa réception pour faire connaître son refus. S'il ne respecte pas la procédure de proposition préalable, l'employeur ne peut se prévaloir ni d'une acception ni d'un refus du salarié et le licenciement prononcé en raison de ce dernier est sans cause réelle et sérieuse.

Dans les autres cas de modification, et sauf disposition conventionnelle contraire, l'information est obligatoire mais n'est soumise à aucune condition de forme. L'employeur demeure toutefois tenu de laisser à l'intéressé un délai suffisant pour faire connaître sa position, étant observé que lorsque la modification envisagée repose sur un motif disciplinaire, il doit mettre en oeuvre la procédure spécifique prévue à ce titre par le code du travail.

En cas de refus par le salarié de la modification de son contrat, l'employeur dispose d'une option: poursuivre le contrat aux conditions initiales ou prendre l'initiative d'un licenciement. L'employeur qui décide d'imposer une modification unilatérale du contrat de travail s'expose à la résiliation judiciaire ou à une prise d'acte de la rupture à ses torts lorsqu'elle est de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail, ce qu'il appartient aux juges du fond de déterminer.

La modification unilatérale du contrat de travail ne peut être retenue qu'en cas de modification d'un ou plusieurs éléments déterminants, tels la rémunération, la qualification ou l'emploi, la durée du travail, la distinction entre modification du contrat de travail et modification des conditions de travail, laquelle procède de l'exercice du pouvoir de direction conféré à l'employeur, relève de l'appréciation des juges du fond. A la différence de la modification du contrat, la modification des conditions de travail s'impose au salarié qui, s'il refuse de s'y soumettre, commet une faute susceptible d'entraîner le prononcé d'une sanction disciplinaire.

En l'espèce, Monsieur [P] [X] a été embauché suivant contrat a durée indéterminée a compter du 5 juin 2001 en qualité d'opérateur de fabrication.

Au moyen d'un avenant à son contrat de travail, signé le 21 janvier 2014, les horaires de travail de Monsieur [X] ont été modifiés comme suit:

- 8 heures 30 à 12 heures ;

- 17 heures à 21 heures.

Suite à un arrêt de travail, Monsieur [X] a bénéficié d' un mi-temps thérapeutique à partir du 30 septembre 2016 avec des horaires de travail de 17 heures à 20 heures 30.

A compter du 3 décembre 2016, Monsieur [X] a repris son poste à temps complet selon les horaires suivants:

- 8 heures 30 à 12 heures ;

- 17 heures à 21 heures.

A compter du mois de mai 2016, le planning de Monsieur [X] indiquait les horaires suivants:

- 8 heures 30 à 12 heures ;

- 17 heures à 20 heures 30.

Monsieur [X] estime que la modification de ses horaires de travail constitue une modification unilatérale de son contrat de travail qui lui porte préjudice.

Il est constant qu'aucun avenant n'a été signé par les parties suite à l'avenant du 21 janvier 2014.

Il convient cependant de relever, comme l'ont fait les juges de première instance, que la modification des horaires de travail de Monsieur [X] a été faite dans le champ des horaires contractualisés et n'a eu pour seul effet que d'amputer la journée de travail du salarié d'une demi-heure, ce qui permettait au salarié de finir sa journée de travail plus tôt alors que sa rémunération restait identique.

Ainsi Monsieur [X] n'apporte pas la preuve d'un manquement suffisamment grave pour empêcher la poursuite de son contrat de travail. Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté Monsieur [P] [X] de sa demande de résiliation judiciaires et de ses demandes indemnitaires subséquentes.

- Sur le licenciement pour inaptitude -

Aux termes de l'article L.1226-2 du code du travail, dans sa version applicable au moment du litige,

'Lorsque le salarié victime d'une maladie ou d'un accident non professionnel est déclaré inapte par le médecin du travail, en application de l'article L.4624-4, à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, au sein de l'entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient le cas échéant, situées sur le territoire national et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.

Pour l'application du présent article, le groupe est défini conformément au I de l'article L.2331-1.

Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel lorsqu'ils existent, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur les capacités du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise. Le médecin du travail formule également des indications sur la capacité du salarié à bénéficier d'une formation le préparant à occuper un poste adapté.

L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail.'

Aux termes de l'article L.1226-2-1 du code du travail:

'Lorsqu'il est impossible à l'employeur de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s'opposent à son reclassement.

L'employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article L.1226-2, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions, soit de la mention expresse dans l'avis du médecin du travail que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi.

L'obligation de reclassement est réputée satisfaite lorsque l'employeur a proposé un emploi, dans les conditions prévues à l'article L.1226-2, en prenant en compte l'avis et les indications du médecin du travail.

S'il prononce le licenciement, l'employeur respecte la procédure applicable au licenciement pour motif personnel prévue au chapitre II du titre III du présent livre.'

Lorsqu'un salarié en contrat de travail à durée indéterminée est déclaré inapte, l'employeur peut prononcer un licenciement pour cause d'inaptitude du salarié avec impossibilité de reclassement en respectant la procédure de licenciement fixée par le code du travail (articles L. 1226-2 à L. 1226-4-3 pour l'inaptitude consécutive à une maladie ou à un accident d'origine non professionnelle / articles L. 1226-7 à L. 1226-17 pour l'inaptitude consécutive à un accident du travail ou une maladie professionnelle).

La lettre de licenciement doit mentionner l'inaptitude physique et l'impossibilité de reclassement. Si l'employeur est dispensé de son obligation de reclassement par le médecin du travail, la lettre de licenciement doit le mentionner.

Le contrat de travail est rompu à la date de notification du licenciement pour inaptitude et non à celle d'achèvement du préavis que le salarié, par définition inapte, ne peut pas exécuter, y compris lorsque l'employeur lui verse ou doit lui verser une indemnité compensatrice de préavis ou une indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis.

Le licenciement pour cause d'inaptitude du salarié est abusif si l'employeur a manqué à son obligation de reclassement (défaut de consultation des représentants du personnel ou consultation irrégulière ; absence de preuve de l'impossibilité de reclassement ou d'un refus du salarié des postes de reclassement...), ou si la rupture du contrat de travail a été notifiée en réalité par l'employeur pour un autre motif que l'inaptitude physique et l'impossibilité de reclassement mentionnées dans la lettre de licenciement.

L'obligation de reclassement s'impose même si le médecin du travail conclut à une inaptitude à tout emploi dans l'entreprise, ou à l'impossibilité de reclasser le salarié, ou ne fait aucune proposition en matière de reclassement, car seule la mention expresse dans l'avis du médecin du travail que 'tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi' (article L. 1226-2-1 du code du travail) peut dispenser l'employeur de son obligation de reclassement.

La société JACQUET PANIFICATION soulève le bien-fondé du licenciement de Monsieur [X] et soutient qu'elle n'avait n'avait aucune obligation de consultation des représentants du personnel dans la mesure où elle avait été dispensée de recherche de reclassement par le médecin du travail, en application des dispositions de l'article L.1226-2-1 du code du travail.

Monsieur [X] soutient que si, par impossible, il n'était pas fait droit à sa demande de résiliation judiciaire, le jugement du conseil de prud'hommes de RIOM sera confirmé en ce qu'il a considéré que son licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse. En effet, il avance que, relativement à son licenciement pour inaptitude, les délégués du personnel n'ont pas été consultés préalablement, tel qu'il ressort de la notification de licenciement. Or, il souligne le fait que la Cour de cassation a indique que la consultation des délégués du personnel était obligatoire, même dans le cas où le reclassement est impossible.

En l'espèce, Monsieur [X] a été déclaré inapte à son poste de travail suivant avis du 14 novembre 2017, le médecin du travail indiquant 'dispense de l'obligation de reclassement: tout maintien dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé'.

Par courrier en date du 21 novembre 2017, Monsieur [X] a été convoqué à un entretien préalable à licenciement.

Monsieur [X] a été licencié pour inaptitude et le contrat de travail a pris fin le 8 décembre 2017.

Le courrier de notification est ainsi libellé :

' Monsieur [X],

Vous avez été déclaré inapte aux fonctions d'opérateur de fabrication que vous exerciez précédemment par le Docteur [B] [W], Médecin du travail, à l'issue d'un examen médical du 14 novembre 2017.

Nous vous avons reçu le 4 décembre 2017 pour l'entretien préalable au licenciement que nous envisagions de prononcer à votre encontre.

Le Médecin du travail a indiqué dans l'avis d'inaptitude physique 'dispense de l'obligation de reclassement : tout maintien dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé.'

Nous sommes donc contraints de procéder à votre licenciement en raison de votre inaptitude physique médicalement constatée.

Votre contrat de travail sera rompu à la date d'envoi de la présente notification, soit le 8 décembre 2017.

Nous vous adresserons par pli séparé un certificat de travail, un reçu pour solde de tout compte et une attestation Pôle Emploi, ainsi que les salaires et indemnités qui vous sont dus.

Nous vous prions d'agréer, Monsieur, l'assurance de notre sincère considération.'

Il est constant que le licenciement de Monsieur [X] repose sur une inaptitude d'origine non professionnelle et que l'avis d'inaptitude du médecin du travail mentionne expressément que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi, conformément aux dispositions de l'article L.1226-2-1 du code du travail.

Or, il ressort de la combinaison des articles L.1226-2 et L.1226-2-1 du code du travail que l'obligation de reclassement de l'employeur et la consultation des délégués du personnel qui en découle ne s'imposent à lui que dans les cas où le médecin du travail n'exonère pas expressément l'employeur de mettre en oeuvre une recherche de reclassement.

Au vu de ces éléments et des principes de droit sus-visés, il convient de considérer que la mention expresse du médecin du travail exonérant l'employeur de son obligation de reclassement du salarié l'exonère également de son obligation de consultation des délégués du personnel, laquelle est devenue sans objet.

Le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a considéré que la procédure de licenciement de Monsieur [X] était dépourvu de cause réelle et sérieuse en l'absence de consultation des délégués du personnel et, statuant à nouveau, la cour dit que la procédure de licenciement de Monsieur [X] reposait sur une cause réelle et sérieuse.

Le jugement déféré sera également infirmé en ce qu'il a condamné la société JACQUET PANIFICATION à payer et porter à Monsieur [P] [X] la somme de 21.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du licenciement sans cause réelle et sérieuse et, statuant à nouveau, la cour déboute le salarié de ses demandes indemnitaires subséquentes au licenciement.

- Sur les frais irrépétibles et les dépens -

Les dispositions du jugement déféré relatives aux dépens et aux frais irrépétibles de première instance seront confirmées.

Il y a lieu de condamner Monsieur [P] [X] au paiement des dépens en cause d'appel.

En équité, il n'y a pas lieu de statuer sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi,

- Infirme le jugement déféré en ce qu'il a considéré que la procédure de licenciement de Monsieur [X] était dépourvu de cause réelle et sérieuse en l'absence de consultation des délégués du personnel et, statuant à nouveau, dit que la procédure de licenciement de Monsieur [X] reposait sur une cause réelle et sérieuse ;

- Infirme le jugement déféré en ce qu'il a condamné la société JACQUET PANIFICATION à payer et porter à Monsieur [P] [X] la somme de 21.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du licenciement sans cause réelle et sérieuse et, statuant à nouveau, déboute le salarié de ses demandes indemnitaires subséquentes au licenciement ;

- Confirme le jugement déféré en toutes ses autres dispositions;

Y ajoutant,

- Condamne Monsieur [P] [X] au paiement des dépens en cause d'appel ;

- Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Ainsi fait et prononcé lesdits jour, mois et an.

Le greffier, Le Président,

N. BELAROUI C. RUIN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Riom
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19/02157
Date de la décision : 17/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-17;19.02157 ?
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