02/09/2008
Arrêt no
VN/DB/NV
Dossier no07/02807
SA GROUPE PROFIL
/
Pierre X...
Arrêt rendu ce deux Septembre deux mille huit par la QUATRIEME CHAMBRE CIVILE (SOCIALE) de la Cour d'Appel de RIOM, composée lors des débats et du délibéré de :
Mme Chantal SONOKPON, Conseiller Président suppléant, nommée par ordonnance de Madame la Première Présidente de la Cour d'appel de RIOM en date du 4 décembre 2007 en remplacement de Monsieur RANCOULE, président titulaire empêché
M. Jean Y.... THOMAS, Conseiller
M. Vincent NICOLAS, Conseiller
En présence de Madame Dominique BRESLE greffier lors des débats et du prononcé
ENTRE :
Société GROUPE PROFIL, SAS
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis
Parc d'Activité de Fontvieille
13718 ALLAUCH CEDEX
Représentée et plaidant par Me Jean-Louis Z... avocat au barreau de MARSEILLE
APPELANT
ET :
M. Pierre X...
...
03000 MOULINS
Représenté et plaidant par Me A... avocat au barreau de MOULINS (SCP LARDANS A... MICALLEF)
INTIME
Après avoir entendu Monsieur NICOLAS Conseiller en son rapport, les représentants des parties à l'audience publique du 09 Juin 2008, la Cour a mis l'affaire en délibéré pour la décision être rendue à l'audience publique de ce jour, indiquée par M. le président, à laquelle ce dernier a lu le dispositif de l'arrêt dont la teneur suit, en application de l'article 452 du code de procédure civile :
Le 30 juin 1992 Pierre X... a été engagé par la société WELL en qualité de VRP. Il avait été prévu au titre des conditions essentielles du contrat qu'il exercerait ses fonctions à titre exclusif, sur un secteur d'activité incluant les départements de l'Allier et de la Nièvre, et à temps partiel, moyennant 100 heures par mois. Il était aussi prévu que la représentation aurait pour objet la fourniture générale de matériels et d'articles de bureau, et de cadeaux d'entreprises, et que Pierre X... serait réglé à la commission.
Considérant que Pierre X... ne travaillait plus sur son secteur, la société GROUPE PROFIL, qui vient aux droits de la société WELL, l'a mis en demeure, par lettre du 20 février 2007, de se remettre au travail ou de renoncer à son exclusivité.
Par lettre reçue le 30 août 2007, Pierre X... a fait savoir à la société GROUPE PROFIL qu'il prenait acte de la rupture du contrat de travail aux motifs qu'elle avait manqué à ses obligations contractuelles.
Le 29 août 2007, et en raison de cette rupture du contrat, Pierre X... a saisi le conseil de prud'hommes de Moulins pour obtenir le paiement de diverses sommes à titre de dommages-intérêts, d'indemnités de clientèle et de commissions.
Le 21 septembre 2007, il a saisi la formation de référé de ce conseil pour voir la société GROUPE PROFIL condamnée à lui payer une provision de 34.200,03 €, correspondant à hauteur de 31.090,94 € à un rappel de salaires afférents à une période débutant le 1er janvier 2003, et à hauteur de 3.109 € à l'indemnité de congés payés y afférente. Il sollicitait en outre l'allocation d'une somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ordonnance du 2 novembre 2007, la formation de référé a :
- "déclaré nul le bureau de conciliation qui s'est tenu le 23/10/2007 à l'audience de référé et a dit que les parties devront comparaître devant le bureau de conciliation de la section encadrement";
- condamné la société GROUPE PROFIL à payer à Pierre X... la somme de 29.636,28 € au titre du rappel de salaires ainsi que la somme de 2.963,62 € au titre de l'indemnité de congés payés, outre la somme de 500 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Le 7 novembre 2007, la société GROUPE PROFIL a interjeté appel de cette décision qui lui a été notifiée le 6 novembre 2007.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Aux termes de ses conclusions écrites du 4 juin 2008 reprises oralement à l'audience, la société GROUPE PROFIL demande principalement que l'ordonnance soit réformée et que par suite Pierre X... soit débouté de ses demandes. Subsidiairement, elle demande à la Cour de se déclarer incompétente pour statuer sur les prétentions de Pierre X....
Elle expose dans un premier temps :
- que depuis quelques années, Pierre X... ne prospectait plus du tout son secteur ;
- que les quelques commandes réalisées provenaient de clients institutionnels chez qui il passait de temps en temps ;
- qu'il n'avait jamais émis la moindre doléance sur le montant de sa rémunération avant de lui envoyer le 29 août 2007 un courrier faisant état de manière fallacieuse de manquements de son employeur à ses obligations contractuelles.
La société GROUPE PROFIL soutient ensuite :
- que Pierre X... étant VRP, il peut prétendre au salaire minimum institué par l'article 5 de l'accord national interprofessionnel du 3 octobre 1975 ;
- que toutefois, seul le travail mérite salaire ;
- que Pierre X... ne travaillant pas, il ne peut donc prétendre à une rémunération ;
- que cette absence de travail résulte du fait qu'il ne visitait plus son secteur et restait à son domicile pour des raisons personnelles ;
- qu'il ne prospectait plus de nouveaux clients, se contentant depuis des années de la même clientèle ;
- que cette absence de travail découle aussi du faible nombre de ses commandes, du peu de jours travaillés durant le mois, de l'impossibilité pour Pierre X... de justifier avec précision de ses frais de repas et de voiture, et du nombre de visites effectuées.
La société GROUPE PROFIL en conclut que Pierre X... ne rapporte pas la preuve qu'il était au travail, alors que cette preuve lui incombe.
Dans ces conditions, elle estime que l'existence de la créance du salarié est sérieusement contestable et que le conseil de prud'hommes pour cette raison aurait dû se déclarer "incompétent".
Aux termes de ses conclusions écrites en date du 6 juin 2008 reprises oralement à l'audience, Pierre X... sollicite la confirmation de l'ordonnance de référé, et en outre la condamnation de la société GROUPE PROFIL au paiement d'une somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Il soutient :
- qu'un salarié employé à titre exclusif et à temps partiel doit recevoir la rémunération minimale forfaitaire réservée aux salariés exerçant leurs fonctions à temps complet, prévue par l'accord national interprofessionnel du 3 octobre 1975 ;
- que depuis plusieurs années il a été rémunéré par des commissions qui ne le remplissaient pas de ses droits, alors qu'il consacrait toute son activité à la société GROUPE PROFIL ;
- que la réalité de son activité découle du fait que cette société lui a versé des commissions pendant des mois ;
- qu'en outre, toute retenue pratiquée par un employeur sur la ressource minimale forfaitaire au motif que le VRP n'a pas d'activité ou que celle-ci est insuffisante constitue une sanction pécuniaire illicite.
Par ailleurs Pierre X... dénie l'allégation de la société GROUPE PROFIL selon laquelle il n'effectuait plus de prospection.
Sur la recevabilité
Attendu que l'appel, interjeté dans le délai de 15 jours prévu par l'article R.1455-11 nouveau du Code du travail, est régulier en la forme ;
Au fond
Attendu qu'un VRP, s'il est engagé à titre exclusif, ne peut se voir imposer de travailler à temps partiel et a droit à la rémunération minimale forfaitaire prévue par l'accord national interprofessionnel des VRP du 3 octobre 1975 ; que cette rémunération minimale, au regard de l'article 5-1 de cet accord, est due pour chaque trimestre d'emploi, et réduite à due concurrence en cas de suspension temporaire d'activité du VRP ;
Attendu en l'espèce que Pierre X... a été embauché en qualité de représentant exclusif de la société WELL, à temps partiel ;
Qu'il avait donc droit à cette rémunération minimale, durant la période du 1er janvier 2003 au 30 août 2007,même si en raison du nombre d'heures de travail qu'il effectuait chaque trimestre, le montant de ses commissions était inférieure à cette rémunération, sauf si la société GROUPE PROFIL prouve que durant cette période il n'a pas travaillé ;
Attendu que cette absence de travail ne saurait résulter du fait, à le supposer établi, que Pierre X..., ne visitait plus son secteur et restait à son domicile pour des raisons personnelles ;
Attendu en effet que la société GROUPE PROFIL n'allègue pas que Pierre X... n'a pas fourni, durant la période du 1er janvier 2003 au 29 novembre 2006, la prestation de travail prévue par le contrat de travail ;
Attendu ensuite qu'elle soutient qu'au cours de l'année 2007, les commandes prises par Pierre X... ont été soit inexistantes (du 1er janvier au 19 février 2007) ou insuffisantes en nombre ;
Attendu cependant que seule une absence totale de fourniture de la prestation de travail durant cette période pourrait priver Pierre X... de son droit à la rémunération minimale garantie ; qu'il ressort des propres pièces de la société GROUPE PROFIL qu'en dehors du mois de janvier 2007, où Pierre X... n'a justifié d'aucune prise d'ordre, il a chaque mois, du 19 février au 28 août 2007, soit 2 jours avant la rupture du contrat de travail, obtenu pour le compte de la société GROUPE PROFIL des commandes ;
Attendu par ailleurs que l'examen de ses bulletins de paie afférents à la période du 1er janvier 2003 au 30 août 2007 fait ressortir que le montant des commissions qui lui ont été versées, étaient, pour chaque trimestre d'emploi, d'un montant inférieur à celui de la rémunération minimale garantie prévue par l'article 5-1 de l'accord précité ;
Attendu dans ces conditions que l'existence de la créance de rappel de salaires de Pierre X... n'est pas sérieusement contestable, sauf à tenir compte des périodes de suspension temporaire d'activité de ce dernier pour calculer le montant de la provision à valoir sur ce rappel de salaires ;
Attendu que Pierre X... produit un décompte duquel il ressort que selon lui, la différence entre les commissions qu'il a perçues du 1er janvier 2003 au 30 juin 2007 et la rémunération minimale garantie est égale à 30.608,57 € ; qu'il n'a pas tenu compte du mois de janvier 2007, mois durant lequel il n'a justifié d'aucune prise d'ordre, pour calculer son rappel de salaires ;
Attendu en revanche qu'il a pris en considération le mois de décembre 2006 pour fixer sa créance, alors que durant ce mois, la société GROUPE PROFIL allègue qu'il n'a pas eu d'activité et que le montant de ses commandes, au regard de son propre décompte, s'est élevé seulement à 2€ 21 ; qu'il n'établit donc pas suffisamment avoir fourni sa prestation de travail durant ce mois ; que par suite, seul son manque à gagner durant le dernier trimestre 2006 afférent aux mois d'octobre et novembre n'apparaît pas sérieusement contestable, ce qui représente une somme de 1.512 € environ ;
Attendu en conséquence qu' eu égard à ces éléments il y a lieu de fixer à 31.000 €, en tenant compte des indemnités de congés payés, le montant de la provision à valoir sur le rappel de salaire dû à Pierre X... et de condamner la société GROUPE PROFIL à lui payer cette somme ;
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Confirme l'ordonnance de référé en ce qu'elle a condamné la société GROUPE PROFIL à payer à Pierre X... une provision à valoir sur un rappel de salaires ainsi qu'une somme de 500,00 € (CINQ CENTS EUROS) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
L'infirme en ce qu'elle a fixé le montant de cette provision à 32.599,90 € (TRENTE-DEUX MILLE CINQ CENT QUATRE-VINGT-DIX-NEUF EUROS QUATRE-VINGT-DIX CENTIMES) ;
Et statuant à nouveau,
Condamne la société GROUPE PROFIL à payer à Pierre X... une provision de 31.000,00 € (TRENTE-UN MILLE EUROS) à valoir sur un rappel de salaires afférents à la période du 1er janvier 2003 au 30 juin 2007 ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société GROUPE PROFIL à payer à Pierre X... la somme de 1.000,00 € (MILLE EUROS) ; déboute la société GROUPE PROFIL de sa demande fondée sur cet article ;
Condamne la société GROUPE PROFIL aux dépens de première instance et d'appel ;
Ainsi fait et prononcé lesdits jour, mois et an.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,
D. BRESLE C. SONOKPON
Le présent arrêt est susceptible d'un pourvoi en cassation dans les conditions précisées dans l'acte de notification de cette décision aux parties.
Il est rappelé que le pourvoi en cassation est une voie de recours extraordinaire qui n'a pas pour but de faire rejuger l'affaire au fond, mais seulement de faire sanctionner la violation des règles de droit ou de procédure.