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01/04/2008 | FRANCE | N°59

France | France, Cour d'appel de riom, Ct0268, 01 avril 2008, 59


01/04/2008

Arrêt no

CB/DB/IM

Dossier no07/01450

S.A. TRELLEBORG INDUSTRIE

/

UNION DE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SECURITE SOCIALE ET D'ALLOCATIONS FAMILIALES DU PUY DE DOME, D.R.A.S.S. D'AUVERGNE

Arrêt rendu ce Premier Avril deux mille huit par la QUATRIEME CHAMBRE CIVILE (SOCIALE) de la Cour d'Appel de RIOM, composée lors des débats et du délibéré de :

M. Claude BILLY, Conseiller faisant fonction de Président, désigné par ordonnance de Madame la Première Présidente de la Cour d'appel de RIOM, en date du 7 février 2008

en remplacement de Monsieur RANCOULE, président titulaire empêché, conformément aux dispositions de l'artic...

01/04/2008

Arrêt no

CB/DB/IM

Dossier no07/01450

S.A. TRELLEBORG INDUSTRIE

/

UNION DE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SECURITE SOCIALE ET D'ALLOCATIONS FAMILIALES DU PUY DE DOME, D.R.A.S.S. D'AUVERGNE

Arrêt rendu ce Premier Avril deux mille huit par la QUATRIEME CHAMBRE CIVILE (SOCIALE) de la Cour d'Appel de RIOM, composée lors des débats et du délibéré de :

M. Claude BILLY, Conseiller faisant fonction de Président, désigné par ordonnance de Madame la Première Présidente de la Cour d'appel de RIOM, en date du 7 février 2008 en remplacement de Monsieur RANCOULE, président titulaire empêché, conformément aux dispositions de l'article R 213-7 du code de l'organisation judiciaire.

M. J.L. THOMAS, Conseiller

M. Vincent NICOLAS, Conseiller

En présence de Madame Dominique BRESLE greffier lors des débats et du prononcé

ENTRE :

S.A. TRELLEBORG INDUSTRIE

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis

ZI La Combaude

Rue de Chantemerle

63000 CLERMONT-FERRAND

Représentée et plaidant par Me David X... avocat au barreau de PARIS ( Cabinet GIDE LOYRETTE NOUEL A.A.R.P.I.)

APPELANTE

ET :

UNION DE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SECURITE SOCIALE ET D'ALLOCATIONS FAMILIALES DU PUY DE DOME (U.R.S.S.A.F.)

La Pardieu

4 Rue Patrick Dépailler

63054 CLERMONT-FERRAND CEDEX 9

Représentée et plaidant par Me Marie-Michelle Y... avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

D.R.A.S.S. D'AUVERGNE

60 Avenue de l'Union Soviétique

63057 CLERMONT-FERRAND CEDEX 1

Non comparante ni représentée - Convoquée par lettre recommandée en date du 12 novembre 2007- Accusé de réception signé le 15 novembre 2007

INTIMES

Après avoir entendu le Président en son rapport, les représentants des parties à l'audience publique du11 Mars 2008, la Cour a mis l'affaire en délibéré pour la décision être rendue à l'audience publique de ce jour, indiquée par M. le président, audience à laquelle le dispositif de l'arrêt dont la teneur suit a été lu par Monsieur THOMAS Conseiller , en application de l'article 452 du nouveau code de procédure civile : Attendu que, pour l'application d'un accord collectif relatif à la réduction et à l'aménagement du temps de travail signé le 16 février 1998, la SAS TRELLEBORG INDUSTRIE verse à ses salariés un différentiel à titre de compensation de la rémunération consécutive à la réduction de la durée du temps de travail ;

Que, à la demande de l'URSSAF du Puy de Dôme, la société a inclus ce différentiel dans l'assiette de calcul de ses cotisations ;

Que, se fondant sur un arrêt rendu le 20 janvier 2004 par la Cour de Cassation, précisant que ses sommes ont un caractère indemnitaire et sont par conséquent exonérées de cotisations sociales, caractère indemnitaire souligné par l'ACOSS dans une circulaire du 28 décembre 2004, elle a sollicité le remboursement des cotisations versées ;

Que l'URSSAF, reconnaissant que ces cotisations avaient été acquittées à tort, a procédé au remboursement des cotisations de la période du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2004, mais a refusé, par lettre du 2 septembre 2005, de rembourser les cotisations indûment perçues pour la période du 1er mai 1998 au 31 décembre 2001, considérant que la revendication de leur restitution est prescrite par application de l'article L 243-6 du Code de la Sécurité Sociale ;

Que la Commission de recours amiable a rejeté le 6 décembre 2005 la demande de remboursement des cotisations perçues par l'URSSAF pour la période antérieur au 1er janvier 2002 ;

Que le tribunal des affaires de sécurité sociale de CLERMONT-FERRAND a, par jugement du 19 avril 2007, notifié le 14 mai, débouté de son recours la S.A.S. TRELLEBORG INDUSTRIE qui en a interjeté appel par lettre du 7 juin suivant ;

Attendu que, alléguant que, selon la législation dite "de Robien" et l'interprétation qui est faite par la jurisprudence de la nature des indemnités compensatrices des pertes de rémunération induites par l'application de la loi, ces sommes ne correspondent pas à une rémunération mais ont un caractère indemnitaire et sont donc exclues de l'assiette des cotisations de sécurité sociale, que c'est sur indication de l'URSSAF, qu'elle a inclus les sommes litigieuses dans l'assiette de calcul des cotisations à partir du 1er mai 1998, que l'URSSAF ne conteste pas que les cotisations litigieuses ont été versées à tort, que bien que le législateur affirme par une loi en date du 19 décembre 2005 que la compensation salariale dans ce domaine doit être considérée comme une rémunération, ce changement de statut du différentiel ne s'applique qu'à compter du 1er janvier 2006, que la jurisprudence considère de manière constante que, si la prescription en matière de répétition de l'indu commence à courir à compter de la date à laquelle le paiement est intervenu, ce principe doit être écarté dans le cas où le demandeur s'est trouvé dans l'impossibilité d'agir ou de surmonter son erreur pour avoir de manière légitime et raisonnable ignoré la naissance de son droit, que pour apprécier le caractère raisonnable et légitime de l'ignorance des droits auxquels elle pouvait prétendre, la Cour de Cassation se réfère aux relations entre la caisse et l'intéressé, que c'est à l'organisme de sécurité sociale d'informer les cotisants des droits auxquels ils peuvent prétendre en vertu de l'article R 112-2 du Code de la Sécurité Sociale, que les informations erronées fournies par l'URSSAF ont provoqué son ignorance légitime et raisonnable de ses droits, qu'elle ne pouvait pas ne pas suivre les indications fournies par l'administration et, dans le cas contraire, se serait exposée à une procédure de redressement et aux sanctions prévues à l'article R 243-18 du Code de la Sécurité Sociale, que la prescription ne pouvait commencer à courir qu'à partir du moment où elle était en mesure de connaître ses droits, soit, dans le cas d'espèce, à compter du 20 janvier 2004, que le délai de prescription ne peut donc lui être opposé, que l'URSSAF ne peut se prévaloir de la complexité de la législation sociale en constante évolution puisque c'est justement le fondement de son obligation d'information, obligation rappelée dans la Charte du cotisant, qu'en lui fournissant des informations erronées l'URSSAF est à l'origine de son préjudice, que la carence d'un organisme dans le cadre de sa mission d'information a été reconnue constitutive d'une faute, que l'URSSAF a reconnu le caractère indu des cotisations litigieuses, que la jurisprudence du 20 janvier 2004 n'a fait que confirmer la nature indemnitaire des compensations versées aux salariés et que l'URSSAF ne peut donc affirmer que l'information qu'elle a diffusée était exacte et loyale en évoquant un revirement de jurisprudence alors qu'il n'y a pas eu revirement mais confirmation, et invoquant la convention européenne des droits de l'homme, le droit à un procès équitable et le principe de sécurité juridique, la SAS TRELLEBORG INDUSTRIE demande de réformer le jugement, de constater que son action n'est pas prescrite, de condamner l'URSSAF du Puy de Dôme à lui rembourser 908.445,33€, subsidiairement de constater que son préjudice est la conséquences des fautes commises par l'URSSAF et en conséquence de la condamner à lui payer de 908.445,33€ de dommages et intérêts, ainsi qu'en tout état de cause 6.000€ au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Attendu que, soutenant qu'elle n'a pas commis d'erreur à l'occasion de l'information fournie à la société, qu'elle a suivi les directives de son organisme de tutelle, que la loi du 19 décembre 2006, article 14 II 1o prescrit que "la compensation salariale d'une perte de rémunération induite par une mesure de réduction du temps de travail est également considérée comme une rémunération, qu'elle prenne la forme, notamment, d'un complément différentiel de salaire ou...", que l'arrêt du 20 janvier 2004 a remis en cause la position administrative sur la nature de ces cotisations et constitue un revirement de jurisprudence par rapport à un précédent arrêt du 17 juin 2003, que suite à cet arrêt et compte tenu des instructions de l'ACOSS, elle a procédé au remboursement des cotisations indues non prescrites, que la société ne démontre pas en quoi elle s'est trouvée dans l'impossibilité d'agir dans le délai de prescription prévu par l'article L 243-6 du Code de la Sécurité Sociale, que la position de l'ACOSS et des URSSAF ne constituait pas un obstacle absolu à l'introduction d'une action devant les juridictions compétentes, que la prescription triennale trouve à jouer dans le cas d'espèce, que le délai commence à courir à la date de paiement des cotisations, qu' elle est de bonne foi et que, dans le cadre d'un système déclaratif de paiement des cotisations, la société avait la possibilité de contester les cotisations qu'elle estimait ne pas devoir, qu'elle n'a pas commis de faute dans le cadre de son obligation d'information et n'a fait que suivre les recommandations de son organisme de tutelle qui appliquait la position administrative liée à la nature de ces compensations, l'URSSAF du Puy de Dôme conclut à la confirmation du jugement et à la condamnation de la S.A.S. TRELLEBORG INDUSTRIE à lui payer 6.000 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;Attendu que la S.A.S. TRELLEBORG INDUSTRIE ne peut sérieusement soutenir qu'elle ne pouvait pas contester les cotisations litigieuses parce que leur non-paiement l'empêchait de soumissionner pour les marchés publics, alors que le paiement des cotisations ne lui interdisait pas de faire concomitamment une procédure de contestation ;

Attendu que le rappel de la primauté de la règle "contra non valentem agere non currit prescriptio" sur toute loi nationale est sans intérêt dès lors qu'elle est parfaitement admise, et depuis longtemps, par le droit français ;

Que l'ignorance du droit ne constitue une impossibilité d'agir que si elle est légitime ;

Que de même seule la mise en jeu de la prescription au mépris d'une ignorance légitime constitue une violation du droit à un procès équitable ;

Attendu que le problème consistait à déterminer la nature des sommes versées aux salariés acceptant une réduction de leur temps de travail en compensation des pertes de rémunération qui en résultaient et pour garantir ainsi le maintien de leur salaire ;

Qu'une circulaire ACOSS du 2 juillet 1997, faisant application de l'article L 242-1 du Code de la Sécurité Sociale et considérant que les compensations des pertes de rémunération induites par la réduction du temps de travail dans le cadre des dispositifs visant à la création d'emplois ou à la sauvegarde des emplois constituaient des sommes versées "en contrepartie ou à l'occasion du travail", a estimé que ces sommes devaient être incluses dans l'assiette des cotisations et que l'URSSAF du Puy de Dôme, en application de cette circulaire, a demandé le paiement des cotisations correspondantes, ce qui a été fait sans aucune contestation par la S.A.S. TRELLEBORG INDUSTRIE dès le 1er mai 1998 ;

Que, par l'arrêt du 20 janvier 1994, la Cour de cassation a considéré qu'il ne s'agissait pas de rémunérations mais d'indemnisations et que, comme telles, ces sommes étaient exclues de l'assiette des cotisations sociales ;

Attendu que la S.A.S TRELLEBORG INDUSTRIE affirme avoir été mise dans l'impossibilité absolue d'agir, n'étant pas en mesure de connaître ses droits du fait de l'information erronée délivrée par l'URSSAF ;

Attendu que le devoir d'information de l'URSSAF n'est pas contesté ;

Qu'en l'espèce, toutefois, l'URSSAF n'a pas délivré d'information mais seulement demandé le paiement de cotisations sur certaines sommes versées aux salariés, en arguant de la qualification de salaires de ces sommes, sans rencontrer apparemment de contestation pendant plusieurs années ;

Que rien n'empêchait un assujetti de contester une telle qualification et de revendiquer le caractère indemnitaire des compensations de salaire ;

Attendu que, pour soutenir que l'information donnée par l'URSSAF était erronée, la S.A.S. TRELLEBORG INDUSTRIE évoque un certain nombre d'arrêts antérieurs au 1er mai 1998 considérant diverses sommes comme des indemnisations non soumises aux cotisations sociales ;

Que, toutefois, il s'agissait chaque fois d'arrêts décidant au cas par cas que telle ou telle somme était une indemnité, et que, parmi les exemples cités, aucun ne concerne une somme compensant exactement et au fur et à mesure une perte de salaire due à l'acceptation d'une réduction du temps de travail ;

Attendu que l'argument de la comparaison avec le point de départ de la prescription de la répétition de l'indu pour les organismes sociaux n'est pas mieux fondé, alors que le départ de la prescription est reporté à la connaissance d'un événement qui leur était caché et dont la révélation a montré le caractère indu des sommes versées, alors qu'en l'espèce, l'arrêt du 20 janvier 2004 n'a rien révélé mais a seulement donné aux paiements litigieux une qualification juridique sur la base de textes connus dès l'origine par la S.A.S. TRELLEBORG INDUSTRIE ;

Que, au demeurant, l'URSSAF fait pertinemment remarquer à l'audience que l'importance de celle-ci laisse supposer qu'elle disposait de tous les moyens utiles pour connaître les textes en vigueur et les applications contestables, l'importance de la somme versée au titre des indemnités différentielles de salaires en quelques 44 mois faisant conclure à un grand nombre de salariés concernés ;

Attendu qu'il apparaît donc que rien n'empêchait la S.A.S. TRELLEBORG INDUSTRIE de contester l'application faite par l'URSSAF de l'article L 242-1 du Code de la Sécurité Sociale aux indemnités différentielles versées aux salariés subissant une baisse de rémunération en raison de la réduction de leur temps de travail résultant d'une application de la loi du 11 juin 1996 dite loi de ROBIEN, conformément à son article 39-1, et qu'elle disposait de tous les éléments qu'ont eus les autres employeurs dont les contestations ont conduit à la qualification donnée par la cour de cassation le 20 janvier 2004, peu important que cette contestation ait pris la forme d'un refus ou d'une abstention d'application de la circulaire ACOSS suivi de la contestation d'un redressement ;

Attendu que le litige provient seulement du choix d'une qualification, et que ce choix tranché par la cour de cassation en faveur de celle défendue par le débiteur de cotisations n'est pas constitutif, de la part de l'organisme de recouvrement ayant mis en oeuvre une autre qualification, d'une faute susceptible d'engager sa responsabilité à l'égard du cotisant ;

Que le choix de l'URSSAF était d'ailleurs d'autant moins fautif que la cour de cassation, dans un arrêt du 17 juin 2003, rendu il est vrai par une autre chambre, avait dit que la garantie de ressources versée par l'employeur en application de l'article 39-1 de la loi du 11 juin 1996 constituait une rémunération qui était assujettie aux cotisations de l'assurance-chômage, confirmant alors la qualification retenue par la circulaire ACOSS et que, de ce fait, l'arrêt du 20 janvier 2004 constitue un véritable revirement, favorable à la S.A.S. TRELLEBORG INDUSTRIE qui ne peut sérieusement se prévaloir de la sécurité juridique ;

Attendu que le jugement ne peut donc qu'être confirmé ; PAR CES MOTIFS

La Cour

Statuant publiquement et par arrêt réputé contradictoire,

Confirme le jugement déféré,

Condamne la S.A.S TRELLEBORG INDUSTRIE à payer à l'URSSAF du Puy de Dôme la somme de 3.000 € (TROIS MILLE EUROS) au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Dit n'y avoir lieu à paiement de droits prévus à l'article R.144-10 du Code de la Sécurité Sociale.

Ainsi fait et prononcé lesdits jour, mois et an.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

D. BRESLE C. BILLY

Dans les deux mois de la réception de la notification, chacune des parties intéressées peut se pourvoir en cassation contre cette décision.

Pour être recevable, le pourvoi doit être formé par le ministère d'un Avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation.

Il est rappelé que le pourvoi en cassation est une voie de recours extraordinaire qui n'a pas pour but de faire rejuger l'affaire au fond, mais seulement de faire sanctionner la violation des règles de droit ou de procédure.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de riom
Formation : Ct0268
Numéro d'arrêt : 59
Date de la décision : 01/04/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal des affaires de sécurité sociale de Clermont-Ferrand, 19 avril 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.riom;arret;2008-04-01;59 ?
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