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12/06/2007 | FRANCE | N°04/710

France | France, Cour d'appel de riom, Chambre sociale, 12 juin 2007, 04/710


710/04

Prud'hommes

JLT

EMBAUCHE DU REMPLACEMENT DU SALARIE MALADE CINQ MOIS APRES LE LICENCIEMENT = PAS DE NECESSITE DU REMPLACEMENT DEFINITIF

Appelant : Mme Paulette X...

Intimé : La SA SIEL

FAITS ET PROCÉDURE

Mme Paulette X... a été embauchée par la SA SIEL en qualité de monteur-cableur par un contrat de travail à durée indéterminée du 2 avril 1990.

Elle a été licenciée en raison d'absences pour maladie "ayant créé une perturbation grave au sein de l'entreprise" par lettre recommandée du 29 mai 2002.

Saisi par

la salariée, le Conseil de Prud'hommes du PUY EN VELAY, par jugement du 28 janvier 2004, a débouté Mme X... de ses d...

710/04

Prud'hommes

JLT

EMBAUCHE DU REMPLACEMENT DU SALARIE MALADE CINQ MOIS APRES LE LICENCIEMENT = PAS DE NECESSITE DU REMPLACEMENT DEFINITIF

Appelant : Mme Paulette X...

Intimé : La SA SIEL

FAITS ET PROCÉDURE

Mme Paulette X... a été embauchée par la SA SIEL en qualité de monteur-cableur par un contrat de travail à durée indéterminée du 2 avril 1990.

Elle a été licenciée en raison d'absences pour maladie "ayant créé une perturbation grave au sein de l'entreprise" par lettre recommandée du 29 mai 2002.

Saisi par la salariée, le Conseil de Prud'hommes du PUY EN VELAY, par jugement du 28 janvier 2004, a débouté Mme X... de ses demandes.

Mme X... a relevé appel de ce jugement le 13 février 2004.

L'affaire a fait l'objet d'une décision de radiation le 17 janvier 2005 et d'une réinscription au rôle le 11 janvier 2007.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

La SA SIEL sollicite de dire que l'appel interjeté par Mme X... est frappé par la péremption d'instance, la salariée n'ayant déposé ses écritures que le 11 janvier 2007 alors que la Cour lui avait enjoint, par décision du 21 octobre 2004 de conclure avant le 22 novembre 2004. Elle demande de condamner Mme X... à lui payer la somme de 1000,00 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Mme X... soutient que l'instance n'est pas périmée, faisant valoir que moins de deux ans se sont écoulés entre la décision de radiation et la demande de réinscription au rôle.

Elle ajoute qu'aucune diligence n'a été mise à sa charge par la cour ou le magistrat chargé d'instruire l'affaire.

Sur le fond, Mme X..., concluant à la réformation, sollicite de dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse et de condamner la SA SIEL à lui payer les sommes de:

- 14219,00 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 1578,57 € à titre de remboursement de la retenue sur salaire du mois de mai 2002,

- 750,00 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Elle conteste que son absence, justifiée pour raison de maladie, ait été de nature à perturber le fonctionnement de l'entreprise.

Elle soutient que ses absences ont pu être palliées par glissement de postes d'autant que celle-ci était, selon elle, en sous activité.

Elle estime que l'effectif de l'entreprise permettait de procéder à son remplacement, soit dans le cadre d'un contrat de mise à disposition, soit dans le cadre d'un contrat de travail à durée déterminée.

Elle fait observer que l'employeur ne vise ses absences qu'à compter du mois de février 2002 et qu'elle bénéficie d'une garantie d'emploi de 9 mois en vertu de la convention collective de la métallurgie du Puy-De-Dôme.

Elle ajoute que l'employeur ne justifie pas de la nécessité de son remplacement définitif et souligne que son remplaçant n'a été embauché que 5 mois après son licenciement.

En ce qui concerne la demande de rappel de salaire, elle estime que la retenue opérée sur son salaire de mai 2002 était sans fondement

La SA SIEL demande, à titre subsidiaire, de rejeter les demandes de Mme X..., de confirmer le jugement et de condamner la salariée à lui payer la somme de 1000,00 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Elle explique que la retenue opérée pour 1184,83 € constitue une régularisation, cette somme ayant été versée à la salariée à la suite d'une erreur au titre d'une garantie de salaire à laquelle Mme X... ne pouvait prétendre.

De même, selon elle, la somme de 394,83 € également retenue correspond à une régularisation d'écriture à la suite d'avances faites par rapport aux indemnités journalières versées par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie et par la prévoyance).

Elle fait valoir que le licenciement de Mme X... a été motivé par les nombreuses absence de la salarié et que ces absences étaient préjudiciables à l'entreprise.

Elle souligne qu'elle a dû pourvoir au remplacement définitif de Mme X... et que le salarié chargé de remplacer Mme X... a été embauché dans un délai raisonnable

Elle soutient que la salariée ne peut bénéficier de la garantie d'emploi de neuf mois prévue par la convention collective, cette garantie n'étant ouverte qu'aux salariés classés au moins au 2ème échelon.

Elle insiste pour dire que la charge de travail était satisfaisante lorsque la décision de licenciement a été prise et pour que soit pris en compte la complexité des opérations ainsi que le fait qu'aucune formation spécifique ne prépare les salariés à ce métier pour lequel seul compte l'expérience acquise dans l'entreprise.

Elle explique qu'elle a dû recourir à du personnel intérimaire et aux heures supplémentaires, qu'elle a cherché à préserver l'emploi de Mme X... mais que les absence de plus en plus fréquentes et de plus en plus longues de cette dernière induisaient une désorganisation de moins en moins supportable.

Pour plus ample relation des faits, de la procédure et des prétentions et moyens antérieurs des parties, il y a lieu de se référer à la décision attaquée et aux conclusions déposées, oralement reprises.

DISCUSSION

Sur la recevabilité

La décision contestée ayant été notifiée le 7 février 2004, l'appel, régularisé le 13 février suivant, est recevable au regard du délai d'un mois prescrit par les articles 538 du nouveau code de procédure civile et R 517-7 du code du travail.

Sur l'exception de péremption d'instance

Aux termes de l'article R 516- 3 du code du travail , en matière prud'homale, l'instance n'est périmée que lorsque les parties s'abstiennent d'accomplir , pendant le délai de deux ans mentionné à l'article 386 du nouveau code de procédure civile , les diligences qui ont été expressément mises a leur charge par la juridiction;

Il résulte de ces dispositions que le dépôt de conclusions écrites, en matière de procédure orale, constitue une diligence au sens de l'article R 516-3 du code du travail dés lors qu'il a été ordonné par la juridiction pour mettre l'affaire en état d'être jugée et d'autre part que le délai de péremption court à la date impartie pour la réalisation des diligences mises expressément à la charge des parties ;

Au cas d'espèce, la convocation adressée par le greffe à Mme X... l'invitant a conclure avant le 22 novembre 2004 n'a pas été signée par le magistrat chargé d'instruire l'affaire

En conséquence , la dite convocation n'a pu produire les effets sus-rappelés ce qui ne peut que conduire la Cour a rejeter l'exception ainsi soulevée, le délai de deux ans n'ayant pas couru.

Sur le licenciement

En droit, l'absence répétée du salarié pour maladie peut constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement si l'employeur justifie que cette absence entraîne pour l'entreprise une perturbation telle qu'elle l'oblige à procéder au remplacement définitif du salarié malade. Toutefois, l'absence prolongée du salarié ne peut constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement que si celui-ci fait l'objet d'un remplacement effectif et définitif dans un délai raisonnable après le licenciement.

En l'espèce, dans la lettre de licenciement, l'employeur récapitule les périodes d'absences de Mme X... depuis 2001 pour souligner que ces absences créent une perturbation grave au sein de l'entreprise qui nécessite son remplacement. Il explique que depuis février 2002, le personnel du secteur où la salariée était affectée a dû effectuer de nombreuses heures supplémentaires et que, malgré ces heures et compte tenu des délais de livraison relativement courts, l'entreprise a connu des retards. Il estime que les remplacements temporaires par du personnel extérieur n'est pas suffisant "au niveau compétence et expérience professionnelle" pour combler les absences.

Il est de fait que Mme X... a été absente 92 jours en 2000, 200 jours en 2001 et pendant la totalité de la période du 1er janvier au 31 mai 2002.

Le responsable de l'atelier et le délégué du personnel attestent de la désorganisation de l'atelier causé par les absences de Mme X..., obligeant l'entreprise à recourir à des heures supplémentaires et au travail temporaire mais il ne ressort pas des pièces produites que l'entreprise n'ait pas pu pallier ces absences et que le remplacement de Mme X... était en conséquence nécessaire.

Le recours à des contrats de travail temporaire dont justifie l'employeur ne démontre pas, en lui-même, la nécessité du remplacement de Mme X... mais tend, au contraire, à révéler que la société a pu répondre, par ce moyen, aux difficultés résultant de l'absence de la salariée

L'employeur soutient que le recours à du personnel intérimaire a été commandé par l'impossibilité de trouver du personnel qualifié. Cependant, si l'emploi occupé par Mme X... impliquait l'exécution de plusieurs types de tâches, les fiches produites par l'employeur ne permettent pas de mettre en évidence que ces tâches présenteraient une complexité telle qu'elles justifieraient une compétence particulière ou une expérience longue à acquérir alors que l'intéressé était classée en catégorie ouvrier au niveau I échelon 2 coefficient 170 de la convention collective.

Il apparaît que l'entreprise a employé, sous contrats de travail temporaire, une quinzaine de salariés différents entre le mois d'avril et le mois de novembre 2002 sans qu'il soit justifié d'une quelconque difficulté résultant de ces recours répétés à des emplois intérimaires. Il n'est, plus particulièrement, pas justifié des retards de livraison allégués.

Il convient, en outre, de relever que l'employeur a attendu jusqu'au 1er novembre 2002 pour embaucher M. Y... en remplacement de Mme X..., laissant ainsi passer un délai de cinq mois après le licenciement sans qu'il soit justifié ni d'une quelconque difficulté de recrutement résultant notamment d'une pénurie de personnel ayant la qualification requise ni de quelconques démarches de l'employeur en vue d'un recrutement antérieurement au mois de novembre 2002 (annonces, appels de candidatures, etc.).

Il s'ensuit qu'il n'est pas démontré qu'il était nécessaire, en mai 2002, de procéder au remplacement définitif de Mme X....

Le licenciement est, en conséquence, dépourvu de cause réelle et sérieuse et le jugement doit être infirmé en ce qu'il a débouté la salariée de ses demandes.

Compte tenu de la durée de la présence de la salariée dans l'entreprise, de son salaire et des pièces justificatives produites, le préjudice résultant du licenciement sera réparé par l'allocation de la somme de 12000,00 € à titre de dommages-intérêts.

Sur les retenues

Le bulletin de salaire du mois de mai 2002 fait apparaître une retenue de 1183,74 € sous la mention "complément salaire employeur, régul. Maladie 27/10 au 30/04, quotas jours atteints en 08/01".

Selon la convention collective de la Métallurgie, tout salarié dont l'ancienneté est comprise entre 10 et 15 ans a droit, en cas d'arrêt de travail par suite de maladie, à un maintien du salaire à hauteur de 100% pendant 75 jours puis à un maintien de 75% pendant 50 jours.

L'employeur fait valoir qu'en 2001, Mme X... a totalisé 125 jours d'absence entre le 10 janvier et le 31 juillet 2001 et qu'elle a, néanmoins, continué à percevoir un complément de salaire au titre des mois de novembre et décembre 2001 ainsi que de janvier à avril 2002.

Compte tenu des indications fournies par les bulletins de salaire de l'intéressée et en l'absence de preuve contraire, il apparaît que la retenue était justifiée.

Sur le même bulletin de mai 2002, il a été pratiqué une autre retenue, d'un montant de 394,83 € sous la mention "régul complément salaire employeur, régul maladies 2001".

Il résulte, cependant, des mentions de ce bulletin qu'ont été porté au crédit de Mme X... la somme de 320,10 € (régul. Indemnité IPGM, régul. Maladies 2001") ainsi que la somme, portée en net, de 58,65 € sous le libellé "régul. Indemnité Sécurité Sociale, régul. Maladies 2001".

L'employeur explique qu'il ne s'agit que d'une régularisation d'écritures entre les avances faites par la société par anticipation et les indemnités perçues par la société de la caisse de Sécurité Sociale et de la caisse de Prévoyance. Il fait observer que la retenue est annulée à l'euro près par le crédit des sommes de 320,10 € et de 58,65 €, cette dernière correspondant à la somme de 74,72 € brut.

Faute pour Mme X... d'apporter la preuve contraire, il apparaît qu'elle a été remplie de ses droits et que les retenues sont justifiées.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur l'ASSEDIC

Compte tenu que le licenciement sans cause réelle et sérieuse est intervenu dans une entreprise comptant plus de 10 salariés et qu'il a été prononcé à l'encontre d'une salariée ayant plus de deux ans d'ancienneté, l'employeur devra rembourser à l'ASSEDIC, par application des dispositions de l'article L 122-14-4 alinéa 2 du code du travail et compte tenu des pièces justificatives produites, les indemnités chômage versées à Mme X... pendant six mois.

Sur l'article 700 du nouveau code de procédure civile

Il n'est pas inéquitable de laisser aux parties la charge de leurs frais non compris dans les dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement et contradictoirement :

En la forme,

- Déclare l'appel recevable,

Au fond,

Infirme le jugement en ce qu'il a débouté Mme Paulette X... de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Statuant à nouveau sur ce point,

- Dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- Dit que la SA SIEL doit payer à Mme Paulette X... la somme de 12000,00 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Confirme le jugement pour le surplus,

Y ajoutant,

- Dit que la SA SIEL doit rembourser à l'ASSEDIC de la région AUVERGNE les indemnités chômage versées à Mme Paulette X... pendant six mois,

- Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- Dit que la SA SIEL doit supporter les dépens de première instance et d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de riom
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 04/710
Date de la décision : 12/06/2007
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Cause - Cause réelle et sérieuse - Défaut - Applications diverses - / JDF

Ne constitue pas une cause réelle et sérieuse de licenciement l'absence prolongée de la salariée dès lors que l'employeur, qui ne justifie pas d'une difficulté de recrutement, a laissé s'écouler un délai de cinq mois après le licenciement pour procéder au remplacement définitif de la salariée.


Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes du Puy-en-Velay, 28 janvier 2004


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.riom;arret;2007-06-12;04.710 ?
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