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24/05/2007 | FRANCE | N°286

France | France, Cour d'appel de riom, Chambre civile 1, 24 mai 2007, 286


COUR D'APPEL
DE RIOM
PREMIERE CHAMBRE CIVILE

Du 24 mai 2007
Arrêt no-CB / SP-
Dossier n : 06 / 01282

S. A. D. DUCHESNE / Annie ...

Arrêt rendu le VINGT QUATRE MAI DEUX MILLE SEPT

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

M. Gérard BAUDRON, Président
M. Claude BILLY, Conseiller
Mme Marie-Claude GENDRE, Conseiller

En présence de :
Mme Sylviane PHILIPPE, Greffier lors de l'appel des causes et du prononcé

Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance de MOULINS, décision attaquée en date du 09 Mai

2006, enregistrée sous le n 05 / 00314

ENTRE :

S. A. D. DUCHESNE
...
1400-NIVELLES (Belgique)
représentée par Me M...

COUR D'APPEL
DE RIOM
PREMIERE CHAMBRE CIVILE

Du 24 mai 2007
Arrêt no-CB / SP-
Dossier n : 06 / 01282

S. A. D. DUCHESNE / Annie ...

Arrêt rendu le VINGT QUATRE MAI DEUX MILLE SEPT

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

M. Gérard BAUDRON, Président
M. Claude BILLY, Conseiller
Mme Marie-Claude GENDRE, Conseiller

En présence de :
Mme Sylviane PHILIPPE, Greffier lors de l'appel des causes et du prononcé

Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance de MOULINS, décision attaquée en date du 09 Mai 2006, enregistrée sous le n 05 / 00314

ENTRE :

S. A. D. DUCHESNE
...
1400-NIVELLES (Belgique)
représentée par Me Martine-Marie MOTTET, avoué à la Cour
assistée de Me MASSEIdu cabinet CHAS, avocat au barreau de NICE

APPELANTE

ET :

Mme Annie ...
Chemin de la chandelle
...
03000 AVERMES
représentée par Me Barbara GUTTON-PERRIN, avoué à la Cour
ayant pour avocat Me Danielle Z...du barreau de MOULINS
(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 2006002789 du 13 / 10 / 2006 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de RIOM)

INTIMEE

M. BILLY, rapporteur, après avoir entendu, en application des dispositions des articles 786 et 910 du Nouveau Code de Procédure Civile, à l'audience publique du 30 Avril 2007, sans opposition de leur part, les représentants des parties, avisés préalablement de la composition de la Cour, en a rendu compte à celle-ci dans son délibéré, pour la décision être rendue à l'audience publique de ce jour, par lui indiquée, où a été lu le dispositif de l'arrêt dont la teneur suit, en application de l'article 452 du nouveau code de procédure civile :

No06 / 1282-2-

Attendu que la S. A. D. DUCHESNE, exerçant à l'enseigne TV DIRECT DISTRIBUTION, a adressé à Madame A...plusieurs courriers lui annonçant qu'elle avait gagné un chèque de 10. 000 €, ou d'autres montants, ayant bénéficié de tirages au sort favorables dans différents jeux gratuits ;
Que, n'arrivant pas à obtenir le paiement des dits chèques, elle a fait assigner la société et a continué de recevoir d'autres courriers lui annonçant de nouveaux gains ;
Que le tribunal de grande instance de MOULINS, par jugement du 9 mai 2006, a condamné la S. A. D. DUCHESNE à lui payer 118. 712,80 €, et 500 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Que la S. A. D. DUCHESNE en a interjeté appel par déclaration du 29 mai suivant ;
Attendu que, soutenant que les jeux promotionnels sont autorisés sous conditions, que leur usage est extrêmement large, qu'elle est spécialisée dans la vente par correspondance de produits ménagers, que le jeu fonctionne selon un pré-tirage au sort du nom du gagnant, qu'en l'espèce le règlement est imprimé in extenso sur un feuillet à l'intérieur de l'enveloppe contenant les documents publicitaires, que le prix principal mis en jeu n'est qu'une éventualité pour l'ensemble des participants, à l'exception du gagnant potentiel dont le nom figure sur le procès-verbal dressé par l'huissier de justice, qu'il est rappelé à plusieurs reprises au client qu'il convient de se reporter au règlement du jeu, que dans la pochette le client trouve un matériel publicitaire accompagnant le catalogue, que le seul moyen de savoir si on a été préalablement désigné comme gagnant est bien évidemment de renvoyer sans frais et avant la date limite le bon de participation dont on est titulaire, que Madame A...ne justifie pas d'un préjudice moral, qu'on ne peut pas penser qu'elle a cru à chaque envoi qu'elle avait gagné la somme mise en jeu, que le consommateur doit être particulièrement diligent et se prêter à une lecture attentive de l'intégralité des documents publicitaires qu'il reçoit, sans se contenter des mentions les plus attractives, que tous les documents attirent l'attention du client sur l'aléa, que le bon de commande rappelle qu'être gagnant n'est qu'une éventualité, que le texte publicitaire faisait apparaître pour un consommateur moyen, doté de capacité de compréhension normale, les conditions pour gagner, que le consommateur doit croire de bonne foi à un engagement définitif après une lecture complète des documents, qu'elle exerce conformément aux lois et usages une activité légalement autorisée, la S. A. D. DUCHESNE demande d'infirmer le jugement, de débouter Madame A..., et de la condamner à lui payer 2. 000 € au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Attendu que, exposant que les documents lui indiquaient qu'elle était déclarée gagnante de sommes de 10. 000 €, ou moins, qu'aucun aléa n'était mis en évidence, qu'elle a envoyé sa commande dès réception, que le règlement du jeu n'est jamais sur la même page que l'annonce du gain et n'est souvent pas fourni avec les documents d'attribution définitive du gain, qu'elle a renvoyé les documents demandés le 16 mars 2003, à son numéro, qu'il a envoyé une nouvelle commande, qu'il n'a pas reçu de nouvelles, Madame A...demande de confirmer le jugement au principal, de condamner la S. A. D. DUCHESNE à lui payer 3. 000 € de dommages-intérêts ainsi que 1. 500 € au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Attendu que le fait qu'il s'agisse de documents publicitaires ne peut pas a priori permettre au consommateur moyen de conclure que l'affirmation qu'il a gagné, grâce à un pré-tirage, un chèque de 10. 000 € dont la délivrance est seulement liée à l'envoi d'une commande est simplement mensongère ;

No 06 / 1282-3-

Que la S. A. D. DUCHESNE affirme que " le nom de Madame A...n'a jamais été pré-tiré au sort ", alors que les documents envoyés affirmaient tout le contraire ;
Attendu que la cour ne peut que renvoyer aux exacts motifs du jugement, qu'elle adopte, la rappel des termes utilisés par les documents publicitaires litigieux et affirmant de façon péremptoire, allégations de constats d'huissier à l'appui, que Madame A...était la gagnante du premier lot mis en jeu, le plus souvent un chèque de 10. 000 € ;
Qu'on trouve même une carte de visite du " responsable des remises de prix " indiquant, par une écriture manuscrite : " toutes mes félicitations pour l'UNIQUE CHEQUE que vous avez GAGNE " ;
Attendu que, loin d'être mis en évidence, l'aléa affectant le gain lui-même était dissimulé au fin fond d'un règlement, rédigé en caractères destinés à l'évidence à décourager le candidat lecteur, puisqu'en petites majuscules, le plus souvent de couleur sur fond de même couleur mais plus clair, alors qu'il est indiqué dans les documents que " les résultats sont sans équivoque et nous pouvons vous garantir que votre chèque est d'ores et déjà établi " ;
Que le caractère aléatoire de l'attribution du gros lot ne saurait résulter de mentions telles que " toutes les affirmations contenues dans ce communiqué ainsi que la liste des prix soumis à aléa sont vérifiables et attestées ", de simili-cachets indiquant en petites lettres " prix soumis à aléa " rédigé en caractères destinés à l'évidence également à être le moins apparent possible, puisqu'en petites majuscules rouges sur fond rose, et de surcroît incompréhensible, alors que le pré-tirage comportait nécessairement un aléa, et que les documents annoncent à l'intéressée qu'il lui a été bénéfique ;
Que de façon ironique un faux cachet (Jeu S 415, No 344) affirme à la fois " prix soumis à aléa " et " gains garantis " ;
Que même la lecture du règlement, parfois plus lisible simplement parce qu'en lettres noires sur fond blanc, ne permet pas au destinataire d'envisager que l'affirmation de son gain est fausse, ce règlement disant seulement que le pré-tirage a été réalisé par huissier de justice avant l'envoi des documents et que le gagnant est la personne dont le numéro a été tiré au sort (article 4), que le prix principal n'est qu'une éventualité pour tous les participants (article 5) et les modalités de demande d'envoi du prix gagné, toutes choses qui ne font qu'ancrer le lecteur dans la confiance dans les affirmations de gain ;
Que tout au plus est-il indiqué que " le gagnant du prix principal, s'il participe dans les délais, sera averti par lettre recommandée avec accusé de réception ", (article 7, en plein milieu du règlement), ce qui ne saurait non plus être considéré comme la mise en évidence de l'aléa ;
Qu'également, on trouve en petites lettres en bas du bon de commande, encore faut-il préciser que certains jeux ne sont pas liés à l'envoi d'une commande, un paragraphe en continu, toujours en majuscules mais italiques, parfois commençant par le rappel de la loi informatique et liberté, le rappel que " vous avez déjà participé à un pré-tirage contrôlé par un huissier de justice ce qui signifie que le ou les gagnants potentiels des différents prix ont d'ores et déjà été définis et que vous avez réellement gagné un prix ", ce qui est conciliable avec les affirmations du gain du grand prix affirmées à longueur des documents envoyés ;

No 06 / 1282-4-

Attendu qu'il apparaît que chaque envoi annonçait à Madame A...qu'elle était l'unique gagnante du premier prix à l'issue d'un pré-tirage déjà réalisé devant un huissier de justice, que cette affirmation était répétée plusieurs fois dans les divers documents de chaque envoi, que l'existence d'un aléa n'était pas mise en évidence et même dissimulée sous des termes sibyllins et au milieu de textes rédigés de façon à décourager toute lecture, le plus souvent de nature à renforcer la conviction du gain résultant du reste des documents ;
Que c'est à juste titre que les premiers juges ont considéré que, pour chaque envoi, l'article 1371 du code civil devait conduire à considérer qu'il y avait un engagement de la société organisatrice des jeux par l'annonce de gains sans mise en évidence d'aléas ;
Attendu que la S. A. D. DUCHESNE soutient que Madame A..., si elle a pu croire au gain annoncé par le premier envoi, est de mauvaise foi en demandant la réalisation des autres gains ;
Que, toutefois, il est paradoxal de sa part d'invoquer la mauvaise foi du consommateur qui reçoit pendant plusieurs mois des assurances de gains rédigées dans des termes catégoriques et définitifs, ne laissant même pas la place à des questions, de la part de l'auteur de ces promesses qui refuse de les honorer ;
Qu'en outre le seul fait de recevoir de telles promesses plusieurs fois de suite ne peut pas constituer leur destinataire de mauvaise foi, alors que l'existence d'un jeu apparaît pouvoir résulter du seul tirage au sort qui a eu lieu avant l'envoi publicitaire, qu'aucune réponse n'a été adressée à Madame A...pour mettre en évidence le principe et les modalités du système de jeu choisi par la société D. DUCHESNE et ainsi la mettre en garde contre les envois futurs ;
Que le jugement doit donc être confirmé ;
Attendu que le fait que la S. A. D. DUCHESNE n'ait pas envoyé les gains promis lorsqu'ils lui ont été réclamés ne pouvait pas créer de préjudice moral à Madame A...alors que les gains lui étaient promis sans qu'elle eût rien demandé et qu'elle s'est bornée après les annonces à envoyer ses bons de commande ou de participation, et que la simple attente ne peut pas constituer un préjudice moral ;
Que le non respect spontané des engagements de la S. A. D. DUCHESNE ne constitue pas en soi la cause d'un préjudice moral ;
Que sur ce point aussi le jugement doit être confirmé ;

PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement et contradictoirement,
Confirme intégralement le jugement déféré,
Condamne la S. A. D. DUCHESNE à payer à Madame A...2. 000 € (DEUX MILLE EUROS) au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
No 06 / 1282-5-

La condamne aux dépens lesquels seront recouvrés conformément aux règles applicables en matière d'aide juridictionnelle.
Le présent arrêt a été signé par M. BAUDRON, Président et par Mme PHILIPPE, greffier lors du prononcé.
le greffier le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de riom
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 286
Date de la décision : 24/05/2007
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Moulins, 09 mai 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.riom;arret;2007-05-24;286 ?
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